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10/05/2022 | FRANCE | N°20/01222

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 1, 10 mai 2022, 20/01222


Arrêt n° 22/00279



10 Mai 2022

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N° RG 20/01222 - N° Portalis DBVS-V-B7E-FJXJ

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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de METZ

25 Juin 2020

F 18/00633

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE METZ



Chambre Sociale-Section 1







ARRÊT DU



dix Mai deux mille vingt deux







APPELANT :



M. [N] [D]

[Adr

esse 1]

Représenté par Me Jonas OLSZAKOWSKI, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/005093 du 10/09/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)





INTIMÉ :

...

Arrêt n° 22/00279

10 Mai 2022

---------------------

N° RG 20/01222 - N° Portalis DBVS-V-B7E-FJXJ

-------------------------

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de METZ

25 Juin 2020

F 18/00633

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

dix Mai deux mille vingt deux

APPELANT :

M. [N] [D]

[Adresse 1]

Représenté par Me Jonas OLSZAKOWSKI, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/005093 du 10/09/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)

INTIMÉ :

M. [P] [O]

AMS BATIMENT

[Adresse 2]

Représenté par Me Daniel POUGEOISE, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

Madame Laëtitia WELTER, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Hélène BAJEUX

ARRÊT :

Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Anne, Conseillère, substituant la Présidente de Chambre régulièrement empêchée, et par Mme Hélène BAJEUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS

M. [N] [D] a été embauché en qualité de maçon par M. [P] [O], artisan exerçant à l'enseigne AMS Batiment par un contrat à durée déterminée à temps partiel de 25 heures par semaine, portant sur la période du 14 mars au 13 juin 2018, mais selon lui il a commencé à travailler pour ce dernier dès le 20 février 2018. Ce contrat prévoyait une rémunération de 1083,33 euros au taux horaire de 40 euros.

Estimant ne pas avoir été payé de toutes ses heures, il a saisi le 8 août 2018 le conseil de prud'hommes de Metz pour demander en dernier lieu la condamnation de M. [O], outre aux dépens de l'instance, à lui payer les sommes de :

- 2 333,33 euros brut à titre de rappel de salaires,

- 6 499,98 euros au titre de l'indemnité pour travail dissimulé,

- 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

Il demandait aussi la délivrance sous astreinte des bulletins de salaire des mois de février, mai et juin 2018, d'un certificat de travail, d'un solde de tout compte et d'une attestation Pôle Emploi.

Par jugement en date du 25 juin 2020, rendu en l'absence de comparution du défendeur, le conseil de prud'hommes a fait droit à cette dernière demande, mais en la limitant pour les bulletins de salaire à ceux de mai et juin 2018, à rectifier selon les sommes versées en liquide au salarié, 2700 euros selon les motifs de ce jugement, sans prévoir d'astreinte, et a débouté M. [D] de ses autres prétentions, faute de preuve suffisante.

M. [D] a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 22 juillet 2020.

L'intimé n'ayant pas constitué avocat, le greffe a demandé à l'appelant de procéder par voie d'assignation à son encontre et Me Pougeoise s'est constitué pour l'intimé le 20 octobre 2020.

Par conclusions justificatives d'appel entrées au RPVA le 21 octobre 2021, M. [D] demande l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et il reprend l'ensemble de ses prétentions de première instance, sauf à porter à 2000 euros le montant réclamé au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance d'incident de mise en état en date du 15 juin 2021, le conseiller chargé de la mise en état a constaté que la déclaration d'appel de M. [D] avait bien été signifiée à M. [O] dans le délai d'un mois imparti à l'article 902 du code de procédure civile et a déclaré irrecevables toutes les conclusions de l'intimé qui auraient été déposées après le 21 janvier 2021, date d'expiration du délai de trois mois prévu à l'article 909 du même code.

Aucunes conclusions, ni pièces, n'ont en l'occurrence été transmises par le conseil de M. [O].

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 septembre 2021.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le rappel de salaire

M. [D] explique qu'il a travaillé pour M. [O] durant la période du 20 février au 14 juin 2018 comme en attestent les autres salariés qui travaillaient avec lui, mais que l'employeur ne lui a remis des fiches de paye que pour mars et avril 2018 et qu'il lui doit le paiement des salaires du 20 février au 13 mars et du 1er mai au 14 juin, soit une somme totale de 250 + 500 + 1083 + 500 = 2333,33 euros bruts.

Il produit en l'occurrence quatre documents rédigés à la main de manière identique en ces termes : « Je soussigné (suit un nom rajouté) déclare avoir travailler avec M. [D] [N] dans l'entreprise AMS Bâtiment de M. [O] [P] pour la période du 20 février 2018 (après rature ou rectification d'un date initiale du 02 février 2020) au 13 juin 2018 ».

Ces attestations portent, en mention rajoutée par une autre main, le nom et la signature des nommés [R] [H] [Y], [K] [A], [G] [X] et [K] [C] [U] et sont chacune assortie du titre de séjour de la personne concernée.

Bien que ne respectant pas entièrement les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile et malgré la rectification de la date, ces attestations sont suffisantes, la preuve étant libre en droit social, pour établir que M. [D] a bien travaillé pour le compte de M. [O] durant toute la période invoquée, donc avant la prise d'effet de son contrat à durée déterminée le 14 mars 2018.

Par ailleurs, selon les pièces produites par lui, il ne lui a été remis que deux bulletins de salaire, l'un pour la période du 14 mars au 31 mars 2018, mentionnant un salaire brut de 383,30 euros, après déduction de 25 heures d' « absence bâtiment » et de 45 heures entrée-sortie, et un salaire net de 294,45 euros, l'autre pour le mois d'avril, retenant un salaire brut de 733,30 euros, après déduction de 35 heures d' « absence bâtiment », et un salaire net de 563,32 euros.

Si on tient compte du salaire mensuel de 1083,30 euros brut convenu par le contrat de travail, M. [D] pouvait prétendre au paiement de :

- 250 euros (une semaine) pour la période du 20 au 28 février 2018,

- 1083,30 euros x 3 pour les mois de mars, avril et mai 2018, dont à déduire les heures d'absences non contestées par le salarié pour le montant de 600 euros (250+350)

- 500 euros (deux semaines) pour la période du 1er au 14 juin 2018

soit un total de 3 399,90 euros.

Il lui reste donc du une somme de : 3399,90 ' (383,3 +733,30) = 2283,30 euros brut, qui sera accordée au salarié.

Bien qu'il n'en fasse plus état dans ses conclusions que dans le cadre du travail dissimulé, mais comme le rappelle le jugement entrepris et l'indiquent les pièces versées aux débats (des extraits bancaires faisant état de deux virements de AMS Bâtiment pour les montants de 1250 et 1200 euros), M. [D] a déjà reçu de l'employeur une somme de 2450 euros sur ses comptes bancaires, mais il a aussi reconnu devant les premiers juges avoir perçu un total de 2700 euros, dont des versements supplémentaires en espèces pour les sommes de deux fois 100 et 50 euros.

Si l'on ôte de ce paiement les montants nets correspondant aux bulletins de salaire de mars et avril (294,45 et 563,32), il reste une somme de 1 869,23 euros nette, qui devra venir en compensation des créances dues au salarié.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce sens.

Sur le travail dissimulé

Aux termes de l'article L8221-5 du Code du travail, « Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales. »

Aux termes de l'article L.8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions de l'article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L.8221-5 du même code relatifs au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

En l'espèce, il est établi que M. [O] a fait travailler M. [D] avant même de lui établir un contrat de travail, qu'il l'a payé en partie en espèces ou sans établir de bulletin de salaire, ce qui permet de faire échapper le salaire versé aux cotisations sociales, soit autant d'éléments caractérisant une volonté de dissimuler en partie l'emploi du salarié.

Il sera donc fait droit à la demande de l'appelant en paiement de l'indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, soit la somme de 6 499,98 euros (6x1083,33) avec cette précision que si cette indemnité se calcule en référence au salaire brut, elle est due en montant net, n'étant pas soumise à cotisations sociales.

Sur la remise des documents

Il sera fait en entier droit à cette demande de l'appelant et, compte tenu de la non exécution du jugement entrepris, l'obligation de l'employeur sera assortie d'une astreinte pour garantir cette exécution, selon les modalités précisées ci-avant au dispositif de cet arrêt.

La Cour ne se réserve pas la liquidation éventuelle de cette astreinte, qui devra le cas échéant être demandée au juge de l'exécution compétent.

Sur le surplus

M. [O], qui succombe, supportera les dépens de première instance et d'appel.

Il est équitable par ailleurs d'allouer à l'appelant une somme de 1500 euros pour les frais autres que les dépens exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne M. [P] [O], exerçant à l'enseigne AMS Bâtiment, à payer à M. [N] [D] les sommes de :

- 2283,30 euros bruts à titre de rappel de salaires,

- 6 499,98 euros nets au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

- 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile;

Ordonne la compensation de ces créances avec la somme de 1 869,23 euros déjà versée par M. [P] [O] ;

Ordonne à M. [P] [O] de remettre à M. [N] [D] :

- les bulletins de salaire des mois de février, mai et juin 2018,

- le certificat de travail, le solde de tout compte et une attestation Pôle Emploi

et ce dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 10 euros par jour de retard au delà de ce délai ;

Condamne M. [P] [O] aux dépens de première instance et d'appel.

Le GreffierP/La Présidente régulièrement empêchée,

La Conseillère


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 1
Numéro d'arrêt : 20/01222
Date de la décision : 10/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;20.01222 ?
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