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10/05/2022 | FRANCE | N°20/01178

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 1, 10 mai 2022, 20/01178


Arrêt n° 22/00278



10 Mai 2022

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N° RG 20/01178 - N° Portalis DBVS-V-B7E-FJUB

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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FORBACH

06 Juillet 2020

19/00280

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE METZ



Chambre Sociale-Section 1







ARRÊT DU



dix mai deux mille vingt deux







APPELANTE :



Association AMAPA



[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Xavier IOCHUM, avocat au barreau de METZ







INTIMÉE :



Mme [B] [E]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Stéphane FARAVARI, avocat au barreau de METZ




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Arrêt n° 22/00278

10 Mai 2022

---------------------

N° RG 20/01178 - N° Portalis DBVS-V-B7E-FJUB

-------------------------

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FORBACH

06 Juillet 2020

19/00280

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

dix mai deux mille vingt deux

APPELANTE :

Association AMAPA

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Xavier IOCHUM, avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

Mme [B] [E]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Stéphane FARAVARI, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

Madame Laëtitia WELTER, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Hélène BAJEUX

ARRÊT :

Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Anne FABERT, Conseillère, substituant la Président de Chambre régulièrement empêchée, et par Mme Hélène BAJEUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS

Mme [B] [E] a été embauchée par l'Association Mosellane d'Aide aux personnes Agées (Amapa) en qualité d'aide à domicile par :

- un contrat à durée déterminée du 8 août 2017 à échéance du 3 septembre 2017 pour le remplacement de Mme [J], assistante de vie, absente pour maladie ;

- un contrat à durée déterminée daté du 4 septembre 2017, mais signé par la salariée le 8 septembre 2017, pour la période courant du 4 septembre au 8 septembre 2017 pour le remplacement de Mme [G], absente pour maladie. Ce contrat prévoit une embauche à temps partiel de 86,67 heures mensuelles pour une rémunération brute de 845,90 euros.

Ce contrat est celui dont se prévaut la salariée, mais l'Amapa produit un troisième contrat daté du 8 septembre 2017, prévoyant également le remplacement de Mme [G] pour une durée minimale d'une semaine, mais pouvant se poursuivre jusqu'au retour de la salariée remplacée, dont l'employeur indique qu'il n'a pas été retourné signé par Mme [E].

La relation de travail a pris fin le 16 janvier 2018 à la fin du congé maladie de Mme [G], ce dont s'est plaint Mme [E] par courrier du 19 janvier 2018, ayant été avisée la veille, le 15 janvier, par téléphone de la rupture de la relation contractuelle alors qu'elle était elle-même en arrêt maladie.

Dans cette lettre, la salariée fait référence au deuxième contrat à la suite duquel elle a continué à travailler et dénonce le fait que le 17 octobre 2017 une référente lui a présenté un contrat concernant Mme [G] antidaté au 9 septembre 2017 qu'elle a refusé de signer, la salariée demandant l'application à son profit de l'article L. 1243-11 du code du travail.

Mme [E] a saisi par acte réceptionné au greffe le 9 septembre 2019 le conseil de prud'hommes de Forbach pour demander la requalification du contrat à durée déterminée du 8 septembre 2017 en contrat à durée indéterminée et la condamnation de l'Amapa, outre aux dépens de l'instance, à lui payer les sommes de :

- 2000 euros nets à titre d'indemnité de requalification,

- 6300 euros nets à titre d'indemnité pour rupture abusive du CDD,

- 260,18 euros bruts au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 1 043,24 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 104,32 euros bruts pour les congés payés afférents,

- 2086,48 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, subsidiairement 1 425,01 euros à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,

- 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 6 juillet 2020, le conseil de prud'hommes a déclaré la demande recevable et bien fondée, après avoir écarté l'exception de prescription soulevée par l'employeur, et a condamné l'Amapa, outre aux dépens de l'instance, à payer à Mme [E] les sommes de :

- 1425,10 et net à titre d'indemnité de requalification,

- 260,81 euros brut à titre d'indemnité de licenciement ,

- 1 043,24 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 104,32 euros bruts pour les congés payés afférents,

- 1 043, 24 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

le tout avec les intérêts au taux légal à compter du jugement ;

- 50 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'Association Amapa a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 17 juillet 2020 et, par conclusions récapitulatives entrées au RPVA le 6 janvier 2021, elle demande l'infirmation de ce jugement en ce qu'il a condamné l'Amapa à payer à Mme [E] les sommes de :

- 260,81 euros brut à titre d'indemnité de licenciement ,

- 1 043,24 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 104,32 euros bruts pour les congés payés afférents,

- 1 043, 24 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

qu'il soit dit que les demandes de Mme [E] à ce titre sont prescrites et l'en débouter et condamner Mme [E] à lui payer la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Par conclusions datées du 22 mars 2021, Mme [B] [E] demande la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, que l'Association Amapa soit déboutée de ses fins et prétentions et condamnée, outre aux dépens de l'instance et de l'appel, à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 juin 2021.

Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions respectives des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la fin de non recevoir tenant à la prescription

L'Association Amapa fait valoir que, si la demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et en paiement de l'indemnité de requalification n'est pas prescrite à un jour près, par contre les demandes portant sur la rupture du contrat de travail le sont en application des dispositions de l'article L. 1471-1 du code du travail, puisque Mme [E] s'est vue notifier la fin de la relation contractuelle au plus tard le 19 janvier 2018, date de son courrier dans lequel elle se plaignait des circonstances de cette rupture, outre qu'elle s'est vue adresser des documents de fin de contrat mentionnant la date du15 janvier 2018 pour fin de contrat.

Mme [E] soutient que la relation de travail s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée et que donc l'Amapa aurait du procéder à son licenciement, un licenciement verbal, de même qu'un simple coup de fil ou l'envoi des documents de fin de contrat étant insuffisant.

Elle se prévaut aussi d'une jurisprudence récente de la Cour de cassation en matière de requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, dont la rupture est dans ce cas soumis à la prescription biennale.

La Cour constate en l'espèce que l'appelante ne conteste pas l'absence de prescription de l'action en requalification du contrat à durée déterminée qui la liait à Mme [E] en contrat à durée indéterminée, ni cette requalification en elle-même dès lors qu'elle ne conclut que sur la prescription partielle des demandes et non au fond.

En l'occurrence, en présence d'un appel limité par les seules conclusions récapitulatives du 6 janvier 202, qui lient la Cour, en dernier lieu à la prescription des demandes portant sur la rupture du contrat de travail, force est de constater que le jugement entrepris est définitif sur ces points, sauf à relever que le conseil de prud'hommes n'a pas expressément statué sur la requalification, mais seulement sur ses conséquences, n'évoquant que dans le cadre de la motivation sur l'octroi de l'indemnité de requalification le fait que cette indemnité vise à sanctionner les irrégularités du contrat à durée déterminée, notamment l'absence d'écrit, puis dans celle sur le rejet de la demande d'indemnité pour rupture abusive du contrat à durée déterminée le fait que la relation de travail qui s'est poursuivie au delà du terme « a été requalifiée en CDI ».

Il convient, si besoin était, de rappeler que si la relation contractuelle se poursuit après l'échéance du terme d'un contrat à durée déterminée sans signature d'un avenant ou d'un nouveau contrat à durée déterminée, celui-ci devient, comme le prévoit l'article L. 1243-11 du code du travail évoqué par la salariée dans son courrier du 19 janvier 2018, un contrat à durée indéterminée.

En l'espèce, le second contrat à durée déterminée pour le remplacement de Mme [G] en date du 8 septembre 2017 (et non du 9 comme indiqué par erreur par la salariée dans son courrier) n'ayant jamais été signé par Mme [E], qui a d'ailleurs contesté les circonstances dans lesquelles un représentant de l'employeur a entendu lui soumettre ce contrat, la requalification était de droit en application de cet article.

S'agissant de la prescription, aux termes de l'article L. 1471-1, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 22 septembre 2017, toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits qui lui permettent de l'exercer et toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture.

L'action en requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée est, selon une jurisprudence affirmée, soumis à la prescription biennale, comme relevant de l'exécution du code du travail, et à pour point de départ le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats, le terme du dernier contrat (Soc 29 janvier 2020).

En l'occurrence, le contrat à durée déterminée dont se prévaut Mme [E], celui signé par elle le 8 septembre 2017, a expiré le même jour, son terme ayant été fixé précisément au 8 septembre 2017, et le délai de prescription de l'action en requalification, selon les règles de computation des délais prévus par le code de procédure civile, a donc commencé à courir le lendemain 9 septembre 2017 à 0 heure pour s'achever le 9 septembre 2019 à 24 h, de sorte que la demande de la salariée enregistrée au greffe du conseil de prud'hommes ce même jour n'était pas prescrite.

Il en va de même de toutes les demandes afférentes tant à l'exécution de ce contrat de travail, qui s'est trouvé transformé en contrat à durée indéterminée après son terme et s'est donc poursuivi, que de sa rupture, qui n'est pas intervenue lors de ce terme.

Au surplus, la prescription annuelle dont se prévaut l'appelante court à compter de la « notification » de la rupture, or un contrat à durée indéterminée ne peut légalement être rompu par l'employeur que par une procédure de licenciement en bonne et due forme, de sorte que l'Association Amapa ne peut se prévaloir d'un licenciement verbal ou de l'envoi de documents de fin de contrat, ici un certificat de travail faisant état d'une embauche « en CDD » du 04/09/2017 au 15/01/2018, qui ne peuvent en aucun cas tenir lieu d'une telle notification, a fortiori la mention par la salariée elle-même dans un courrier d'un coup de fil qui lui annonçait le retour de la salariée remplacée, qui ne saurait lui porter grief et n'a donc même pas valeur de preuve de ce licenciement verbal.

Dès lors, l'appelante sera déboutée de sa fin de non recevoir et le jugement entrepris, sera confirmé, pour les motifs retenus par la Cour, pour avoir écarté la prescription et déclaré l'action de Mme [E] recevable.

Au fond

Comme déjà relevé, l'Association Amapa n'a formulé aucune conclusion sur le principe et le calcul des diverses indemnités allouées à la salariée en considération de la rupture de son contrat de travail, qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, n'ayant conclu au rejet des demandes de la salarié qu'à raison de leur prescription et non pour un motif de fond.

Mme [E] n'ayant elle-même formé aucun appel incident sur les sommes qui lui ont été accordées, le jugement entrepris sera donc confirmé, sauf à rappeler que, si l'indemnité légale de licenciement se calcule à partir du salaire brut, le montant de l'indemnité est lui du en net, cette indemnité n'étant pas soumise à cotisations sociales.

Sur le surplus

L'Association Amapa, qui succombe, supportera les dépens d'appel.

Il est équitable par ailleurs d'allouer à Mme [E] une somme de 1500 euros pour les frais autres que les dépens exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions frappées d'appel, par substitution de motifs s'agissant de la prescription ;

Condamne l'Association Amapa aux dépens d'appel et à payer à Mme [B] [E] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le GreffierP/La Présidente régulièrement empêchée,

La Conseillère


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 1
Numéro d'arrêt : 20/01178
Date de la décision : 10/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;20.01178 ?
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