La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/05/2022 | FRANCE | N°19/02781

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 1, 10 mai 2022, 19/02781


Arrêt n° 22/00234



10 mai 2022

---------------------

N° RG 19/02781 -

N° Portalis DBVS-V-B7D-FE4D

-------------------------

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de METZ

09 octobre 2019

18/00581

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE METZ



Chambre Sociale-Section 1







ARRÊT DU



Dix mai deux mille vingt deux







APPELANTE :



Mme [N] [D]

épouse [U]

21 rue Jean Jaurès

57300 HAGONDANGE

Représentée par Me Marion Descamps, avocat au barreau de METZ







INTIMÉ :



M. [P] [X]

4 rue Jean Jaurès

57300 HAGONDANGE

Représenté par Me Jonas Olszakowski, avocat...

Arrêt n° 22/00234

10 mai 2022

---------------------

N° RG 19/02781 -

N° Portalis DBVS-V-B7D-FE4D

-------------------------

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de METZ

09 octobre 2019

18/00581

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

Dix mai deux mille vingt deux

APPELANTE :

Mme [N] [D] épouse [U]

21 rue Jean Jaurès

57300 HAGONDANGE

Représentée par Me Marion Descamps, avocat au barreau de METZ

INTIMÉ :

M. [P] [X]

4 rue Jean Jaurès

57300 HAGONDANGE

Représenté par Me Jonas Olszakowski, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Anne-Marie Wolf, Présidente de Chambre, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Anne-Marie Wolf, Présidente de Chambre

Mme Anne Fabert, Conseillère

Mme Laëtitia Welter, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Hélène Bajeux

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Anne-Marie Wolf, Présidente de Chambre, et par Mme Hélène Bajeux, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS

Mme [N] [U] a été embauchée par M. [P] [X], selon contrat à durée indéterminée, à compter du 23 août 2016, en qualité d'employée de maison.

La répartition du temps de travail prévue au contrat portait sur 2 heures par jour du lundi au vendredi, soit 12 heures par semaine, pour un salaire horaire net de 12 euros. La convention collective applicable est celle des salariés du particulier employeur.

L'activité de Mme [U] consistait principalement à s'occuper de la mère de M. [X] dans le cadre de sa vie quotidienne. Après l'entrée en maison de retraite de cette dernière, en mai 2017, Mme [U] a continué à effectuer des tâches de la vie quotidienne pour M. [X] et ce, jusqu'au 04 septembre 2017. Après ce jour, Mme [U] n'a plus travaillé.

Le 4 octobre 2017, M. [X] a remis en main propre à Mme [U] un chèque de 816 euros, un reçu pour solde de tout compte et un certificat de travail mentionnant une fin de contrat.

Par acte introductif enregistré au greffe le 20 juillet 2018, Mme [U] a saisi le Conseil de prud'hommes de Metz, lui demandant de :

- Constater l'absence de remise des attestations de paiement des salaires pour les mois de juin et juillet 2017

- Ordonner à l'employeur de transmettre les attestations de paiement de juin et juillet 2017

- Constater l'établissement par M. [X] et la remise en main propre à Mme [U] en date du 04/10/2017 d'un reçu pour solde de tout compte et d'un certificat de travail mentionnant une fin de contrat

- Juger que la rupture du contrat de travail est intervenue à l'initiative de M. [X], employeur, en date du 04/10/2017 et constitue donc un licenciement

- Constater l'absence de lettre de licenciement et de procédure de licenciement

- Juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse

- Constater l'inexactitude des mentions figurant aux documents de fin de contrat

- Constater que Mme [U] démontre avoir subi un préjudice moral et financier en raison des circonstances de la rupture, préjudices autonomes de la rupture en elle-même

- Constater que M. [X] a manqué à son obligation de fournir du travail à Mme [U] à hauteur du volume convenu au contrat de travail de 12 heures par semaine

- Constater que Mme [U] a été rémunérée régulièrement à un niveau inférieur à celui correspondant au volume horaire convenu au contrat de travail

- Constater l'accomplissement d'heures supplémentaires impayées pour la journée du 22/05/2017

- Constater l'inexactitude des mentions à la fiche de salaire de mai 2017

- Condamner M. [X] à payer à Mme [U] les sommes suivantes :

* Au titre de l'indemnité de licenciement : 247,82 euros net,

* Au titre de l'indemnité de préavis : 624,24 euros net,

* Au titre des congés payés sur préavis : 62,40 euros net,

* Au titre de l'indemnité compensant le préjudice subi du fait de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement : 1.666,00 euros net,

* Au titre de l'indemnité compensant le préjudice subi du fait de l'irrégularité du licenciement : 833,00 euros net,

* Au titre de l'indemnité de congés payés non pris : 497,70 euros net,

* Au titre de la réparation du préjudice moral subi suite à la rupture: 5.000,00 € net,

* Au titre de l'indemnité pour résistance abusive : 2.000,00 € net,

* Au titre des rappels de salaire d'août 2016 à octobre 2017 : 1.730,00 € net,

* Au titre de l'indemnité de congés payés de 10 % sur cette somme : 173,00 € net,

* Au titre du préjudice financier découlant du retard et des inexactitudes des mentions figurant sur les documents de fin de contrat, ayant empêché Mme [U] de bénéficier d'une indemnité Pôle Emploi durant 4 mois : 1.268,64 € net

- Condamner M. [X] à la délivrance, sous astreinte de 150,00 € par jour de retard à compter d'un délai de 5 jours courant à partir de la notification de la décision à intervenir, des documents suivants, établis conformément au jugement à intervenir: - solde de tout compte, attestation pôle emploi, certificat de travail, mentionnant une rupture au 04/11/2017 du fait d'un licenciement, - fiche de paye correspondant aux sommes versées, en indiquant spécifiquement la période concernée- rectification de l'attestation de paiement de mai 2017

- Se réserver le pouvoir de liquider l'astreinte prononcée

- Condamner M. [X] à payer à Mme [U] 2.000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Dire et juger que l'ensemble des sommes produiront intérêts au taux légal depuis la première présentation du courrier de mise en demeure, soit le 17/10/2017, subsidiairement, depuis la date d'introduction de la présente demande

- Ordonner l'exécution provisoire sur le tout conformément à l'article 515 du code de procédure civile

- Condamner M. [X] aux frais et dépens d'instance et d'exécution y compris les droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement

- Rejeter l'ensemble des demandes éventuellement formulées par M. [X].

Par jugement du 09 octobre 2019, le conseil de prud'hommes de Metz, section activités diverses, a :

- Dit et jugé la demande de Mme [U] recevable et bien-fondée,

- Dit et jugé que la remise des documents de fin de contrat à Mme [U] constitue une rupture de son contrat à l'initiative de M. [X] avec effet au 4 octobre 2017,

En conséquence,

- Dit et jugé que la rupture du contrat de travail de Mme [U] constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamné M. [X] à payer à Mme [U] les sommes suivantes :

* au titre de l'indemnité de licenciement : 247,82 € nets

* au titre de l'indemnité compensatrice de préavis : 624,24 € nets

* au titre des congés payés sur préavis : 62,42 € nets

* au titre du préjudice subi pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 312,12 € nets

* au titre de l'indemnité pour congés payés non pris: 497,70 € nets

* au titre des rappels de salaires : 1.730 € nets

* au titre des congés payés sur rappels de salaires : 173 € nets

- Débouté Mme [U] du surplus de ses demandes,

- Condamné M. [X] à payer à Mme [U] la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné M. [X] aux entiers frais et dépens,

- Ordonné à M. [X] de fournir à Mme [U] ses documents de fin de contrat dûment rectifiés ainsi que les attestations de paiement des mois de juin et juillet 2017, sous astreinte de 15 € par jour de retard à compter du 31 ème jour après notification du jugement,

- Réservé le droit de liquider l'astreinte,

- Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du jugement en application des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile.

Par déclaration formée par voie électronique le 06 novembre 2019, Mme [U] a régulièrement interjeté appel du jugement.

Par ses dernières conclusions datées du 07 décembre 2020, Mme [U] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de Metz du 09/10/2019, sauf en ce qu'il a fixé la date de la rupture au 04/10/2017, fixé le quantum de l'indemnité réparant le préjudice subi du fait du licenciement sans cause réelle et sérieuse à 312,12 € nets et débouté Mme [U] de ses demandes d'indemnisation pour résistance abusive, pour préjudice moral et préjudice financier et de sa demande de délivrance des attestations de paiement des salaires d'août à novembre 2017

- Infirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de Metz du 09/10/2019 en ce qu'il a fixé la date de la rupture au 04/10/2017, fixé le quantum de l'indemnité réparant le préjudice subi du fait du licenciement sans cause réelle et sérieuse à 312,12 € nets et débouté Mme [U] de ses demandes d'indemnisation pour résistance abusive, pour préjudice moral et préjudice financier et de sa demande de délivrance des attestations de paiement des salaires d'août à novembre 2017

Statuant à nouveau,

- Dire que la rupture du contrat de travail a produit ses effets en date du 04/11/2017, à l'expiration du préavis d'un mois courant à compter de la notification de la rupture en date du 04/10/2017

- Ordonner à l'employeur de transmettre les attestations de paiement d'août à novembre 2017

- Condamner M. [X] à la délivrance de ces documents, sous astreinte de 150,00 € par jour de retard à compter d'un délai de 5 jours courant à partir de la notification de la décision à intervenir

- Se réserver le pouvoir de liquider l'astreinte prononcée

- Dire que Mme [U] démontre avoir subi un préjudice moral et financier en raison des circonstances de la rupture, préjudices autonomes de la rupture en elle-même

- Dire que M. [X] a fait preuve de résistance abusive

- Fixer le quantum de l'indemnité réparant l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement que M. [X] doit à payer à Mme [U] la somme de 1.666,00 euros net, correspondant à 2 mois de salaire brut

- Condamner M. [X] à payer cette somme à Mme [U]

- Condamner M. [X] à payer à Mme [U] 5.000,00 € net au titre de la réparation du préjudice moral subi et 1.268,64 € net au titre du préjudice financier découlant du retard et des inexactitudes des mentions figurant sur les documents de fin de contrat, ayant empêché Mme [U] de bénéficier d'une indemnité Pôle Emploi avant septembre 2018

- Condamner M. [X] à payer à Mme [U] 2.000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles d'appel

- Dire et juger que l'ensemble des sommes produiront intérêts au taux légal depuis la première présentation du courrier de mise en demeure, soit le 17/10/2017, subsidiairement, depuis la date d'introduction de la demande devant le Conseil de Prud'hommes

- Condamner M. [X] aux frais et dépens d'instance et d'exécution à hauteur d'appel, y compris les droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement

- Rejeter l'ensemble des demandes éventuellement formulées par M. [X] à l'encontre de Mme [U].

Par ses dernières conclusions datées du 07 juin 2021, M. [X] demande à la cour de:

- Débouter Mme [U] de sa demande quant à la date de rupture du contrat de travail ;

- Débouter Mme [U] de sa demande de fixation du quantum de l'indemnisation de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement à 1.666,00 euros ;

- Débouter Mme [U] de sa demande de dommage et intérêt à hauteur de 5.000 euros pour préjudice moral ;

- Débouter Mme [U] de sa demande de dommage et intérêt à hauteur de 2.000 euros pour résistance abusive ;

- Débouter Mme [U] de sa demande de dommage et intérêt à hauteur de 1.268,64 euros au titre du préjudice économique subi du fait de la délivrance tardive et de l'inexactitude des mentions figurant sur les documents de fin de contrat, l'empêchant de bénéficier d'une indemnisation pôle emploi durant 4 mois ;

- Débouter Mme [U] de sa demande de délivrance des fiches de salaires d'aout 2017 jusqu'à la rupture.

- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Metz en date du 09.10.2019

- Condamner Mme [U] à payer à M. [X] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Condamner Mme [U] aux frais et dépens y compris les droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 09 novembre 2021.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS

Il n'est pas contesté entre les parties que la rupture du contrat de travail de Mme [U], initiée par M. [X], constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse tel que qualifié par les premiers juges.

En revanche, Mme [U] fait grief au jugement d'avoir fixé la date de la rupture au 04/10/2017, fixé le quantum de l'indemnité réparant le préjudice subi du fait du licenciement sans cause réelle et sérieuse à 312,12 € nets et de l'avoir déboutée de ses demandes d'indemnisation pour résistance abusive, pour préjudice moral et préjudice financier et de sa demande de délivrance des attestations de paiement des salaires d'août à novembre 2017.

Il convient donc d'examiner ces demandes successivement.

Sur la date du licenciement

Le jugement dont appel a fixé la date d'effet de la rupture du contrat de travail au 04 octobre 2017, date à laquelle M. [X] a remis en main propre à la salariée les documents de fin de contrat, à savoir le solde de tout compte et le certificat de travail. Les premiers juges ont considéré que Mme [U] n'ayant pas eu de travail depuis le 04 septembre 2017, il pouvait être retenu que la période du 04 septembre au 04 octobre 2017 était assimilable au délai de préavis auquel la salariée avait droit.

Cependant, il ne ressort d'aucun élément que M. [X], qui reconnait ne pas avoir mis en 'uvre une procédure de licenciement, avait fait connaître à la salariée sa volonté de rompre le contrat de travail dès le 04 septembre 2017.

Seule la remise des documents de fin de contrat, à savoir le solde de tout compte et le certificat de travail, mentionnant la rupture du contrat de travail permet d'établir la volonté de l'employeur de mettre fin au contrat de travail, de sorte qu'il y a lieu d'assimiler cette remise, pour ce qui est de la date du licenciement, à la notification du licenciement.

S'agissant d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la salariée avait droit à un préavis d'un mois, ce qui n'est pas contesté entre les parties.

Dès lors, ce préavis d'un mois courait à compter du 04 octobre 2017 et le terme du contrat de travail est survenu à l'expiration de ce préavis, soit le 04 novembre 2017.

Le jugement dont appel sera par conséquent infirmé en ce qu'il a dit que la rupture du contrat de travail à l'initiative de M. [X] avait pris effet au 4 octobre 2017, le terme du contrat étant le 04 novembre 2017.

Par ailleurs, si M. [X] expose avoir fourni les fiches de paye visées par la décision des premiers juges, il ressort de la décision dont appel que la condamnation sous astreinte ne visait que les documents de fin de contrat et les attestations de paiement des mois de juin et juillet 2017.

Dans ce cadre, il doit être fait droit à la demande de Mme [U] tendant à ordonner à M. [X] de lui délivrer les attestations de paiement manquantes. Il sera toutefois relevé que la fiche de paye du mois d'août 2017, qui comprend une rémunération complète conforme au contrat de travail, est versée aux débats par Mme [U] elle-même, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'en ordonner la délivrance sous astreinte.

Ajoutant au jugement, il sera donc ordonné à M. [X] de délivrer à Mme [U] les attestations de paiement des sommes dues pour la période allant du 01 septembre 2017 au 04 novembre 2017, terme du contrat, et ce dans les 30 jours du prononcé de la présente décision et sans qu'il ne soit nécessaire de prononcer une astreinte au vu des circonstances de la cause.

Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

En application de l'article L.1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et qu'il n'y a pas de réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau prévu par cet article.

En cas de licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, pour un salarié ayant 1 année complète d'ancienneté, le barème fixé se situe entre 0,5 et 2 mois de salaire brut.

Mme [U] fait grief aux premiers juges d'avoir limité l'indemnité allouée à ce titre à la somme de 312,12 € nets correspondant à un demi mois de salaire net, et non brut. Elle fait en outre valoir que si son licenciement avait eu une cause réelle et sérieuse tout en étant irrégulier, elle aurait perçu une indemnité égale à au moins 1 mois de salaire, et qu'il est donc inéquitable qu'elle perçoive une indemnité moindre.

En l'espèce, compte tenu du salaire mensuel brut perçu par Mme [U] (833 euros), de son ancienneté (1 an et 2 mois) mais également de son âge à la date du licenciement (67 ans) et des circonstances particulières de la rupture intervenue par la seule remise de documents mentionnant la fin de contrat après un silence de l'employeur ayant duré un mois, il y a lieu de fixer l'indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 833 euros net, correspondant à l'équivalent d'un mois de salaire brut.

Le jugement sera amendé en ce sens. S'agissant d'une créance de nature indemnitaire, elle produira intérêts à compter du présent arrêt infirmatif.

Sur la demande d'indemnisation pour préjudice moral et préjudice financier

Il est constant que, malgré de multiples courriers (16 octobre 2017, 17 novembre 2017 et 24 novembre 2017) de la CGT lui expliquant la situation et la législation applicable au licenciement, ainsi qu'un courrier de l'avocate de Mme [U] daté du 22 mars 2018, M. [X] n'a pas réagi aux demandes de sa salariée.

M. [X] n'a d'ailleurs pas même récupéré les multiples courriers recommandés dont il avait pourtant été avisé et a attendu d'être assigné en justice pour répondre aux demandes de Mme [U]. Il ne produit aucune pièce et n'explique pas son comportement autrement que par de la négligence.

L'employeur, fût-il un particulier peu informé sur le mode de rupture des contrats de travail, ne pouvait se contenter de ne plus donner signe de vie à la salariée qui s'est légitimement trouvée démunie face à ce silence et à l'impossibilité de faire valoir ses droits auprès de Pôle Emploi du fait de la carence de son employeur.

Une telle négligence, tant dans les circonstances de la rupture du contrat de travail que dans l'absence de toute réponse donnée, ensuite, aux demandes de la salariée, est fautive.

Mme [U] justifie par la production de plusieurs certificats médicaux et arrêts de travail s'être trouvée dans un état psychologique difficile (anxiété réactionnelle majeure) lié à cette situation et s'est vu prescrire des anxiolytiques pour y faire face.

Ces documents médicaux, qui émanent de son médecin traitant et d'une psychologue, sont parfaitement recevables contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, et font état d'un lien très clair avec sa situation professionnelle.

La causalité entre la négligence fautive de M. [X] et le préjudice moral subi par la salariée ne saurait donc être écartée en invoquant un état préalablement existant de la salariée.

Dès lors, ce préjudice moral sera indemnisé justement à hauteur de 300 euros.

Mme [U] justifie également d'un refus d'indemnisation par Pôle Emploi en octobre 2017 du fait de l'absence des documents de fin de contrat nécessaires pour ouvrir ses droits auprès de cet organisme.

Elle a cependant, par la suite, perçu les allocations retour à l'emploi pour une période allant du 08 septembre 2017 au 14 septembre 2018. Le courrier de Pôle Emploi du 26 février 2019 permet d'établir que ces droits ont été intégralement versés au 14 septembre 2018, soit un peu moins d'un an après la rupture du contrat.

Le retard de plusieurs mois dans la perception des indemnités du fait de l'absence de délivrance des documents nécessaires par M. [X] a ainsi causé un préjudice financier à Mme [U] qui s'est trouvée sans ressources pendant plusieurs mois, préjudice qu'il convient de réparer par l'allocation de la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts.

S'agissant de créances indemnitaires, ces sommes produiront intérêts à compter du présent arrêt.

Sur la demande d'indemnisation pour résistance abusive

Mme [U] fait grief aux premiers juges d'avoir rejeté sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive de la part de l'employeur.

Toutefois, si la négligence fautive de M. [X] dans le cadre de la rupture du contrat de travail est avérée, sa faute dans l'exercice du droit de se défendre et sa mauvaise foi ne sont pas établies.

Rien ne démontre que ce droit ait dégénéré en abus de la part de l'intimé et Mme [U] ne prouve pas avoir subi un préjudice distinct de celui déjà réparé par l'allocation de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral et financier.

La demande de dommages et intérêts formée par Mme [U] sur ce fondement doit donc être rejetée, le jugement étant confirmé de ce chef.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les dispositions du jugement dont appel statuant sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile seront confirmées.

M. [X] qui succombe en majeure partie devant la Cour sera condamné aux dépens d'appel et à payer à Mme [U] la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement dont appel en ce qu'il a fixé le terme du contrat de travail au 04 octobre 2017 et en ses dispositions relatives aux demandes indemnitaires de Mme [N] [U] portant sur le préjudice subi pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que sur son préjudice moral et financier ;

Confirme le jugement pour le surplus des dispositions frappées d'appel ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne M. [P] [X] à payer à Mme [N] [U] la somme de 833 euros nets à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne M. [P] [X] à payer à Mme [N] [U] la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

Condamne M. [P] [X] à payer à Mme [N] [U] la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier ;

Dit que ces sommes produiront intérêts à compter de la présente décision ;

Ordonne à M. [P] [X] de délivrer à Mme [N] [U] les attestations de paiement des sommes dues pour la période allant du 01 septembre 2017 au 04 novembre 2017, terme du contrat, et ce, et ce dans les 30 jours du prononcé de la présente décision ;

Condamne M. [P] [X] aux dépens d'appel ;

Condamne M. [P] [X] à payer à Mme [N] [U] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de toute autre demande.

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 1
Numéro d'arrêt : 19/02781
Date de la décision : 10/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;19.02781 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award