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10/05/2022 | FRANCE | N°19/00530

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 1, 10 mai 2022, 19/00530


Arrêt n° 22/00282



10 Mai 2022

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N° RG 19/00530 - N° Portalis DBVS-V-B7D-E67L

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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de METZ

13 Février 2019

F 18/00150

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE METZ



Chambre Sociale-Section 1







ARRÊT DU



dix Mai deux mille vingt deux





APPELANTE :



S.A.R.L. LES TUILERIES>
[Adresse 3]

Représentée par Me Antoine LEUPOLD, avocat au barreau de METZ







INTIMÉ :



M. [J] [S]

[Adresse 1]

Représenté par Me Laurent ZACHAYUS, avocat postulant au barreau de METZ et Me Claire ALTERMATT...

Arrêt n° 22/00282

10 Mai 2022

---------------------

N° RG 19/00530 - N° Portalis DBVS-V-B7D-E67L

-------------------------

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de METZ

13 Février 2019

F 18/00150

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

dix Mai deux mille vingt deux

APPELANTE :

S.A.R.L. LES TUILERIES

[Adresse 3]

Représentée par Me Antoine LEUPOLD, avocat au barreau de METZ

INTIMÉ :

M. [J] [S]

[Adresse 1]

Représenté par Me Laurent ZACHAYUS, avocat postulant au barreau de METZ et Me Claire ALTERMATT, avocat plaidant au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Novembre 2021, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Anne FABERT, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

Madame Laëtitia WELTER, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Catherine MALHERBE

ARRÊT :

Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Anne FABERT, Conseillère, pour le président régulièrement empêché, et par Mme Hélène BAJEUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS

M. [J] [S] a été embauché par la SARL Les Tuileries, selon contrat à durée indéterminée signé le 6 juin 2017, prenant effet à compter du 2 mai 2017, en qualité de cuisinier-pâtissier.

M. [S] percevait une rémunération mensuelle brute de 2 100,00 €.

Le 19 octobre 2017, M. [S] s'est vu notifier un avertissement par son employeur.

Par courrier recommandé établi le 1er décembre 2017, M. [S] a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur.

Par acte introductif enregistré au greffe le 19 février 2018, M. [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Metz aux fins de :

- Dire et juger que la prise d'acte de M. [S] est constitutive d'un licenciement nul et subsidiairement d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Condamner la SARL Les Tuileries à verser à M. [S] les sommes suivantes :

- 12 600,00 € à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la demande;

- 2 100,00 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 210,00 € brut au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande;

- 5 000,00 € à titre de dommage et intérêts en réparation du préjudice moral subi par M. [S] avec intérêts au taux légal à compter de la demande;

- 2 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la SARL Les Tuileries aux entiers frais et dépens de la présente instance ;

- Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir en application de l'article 515 du code de procédure civile.

La SARL Les Tuileries s'opposait aux demandes formées contre elle et sollicitait la condamnation de M. [J] [S] à lui verser 980,67 € d'indemnité de préavis, outre 3 000,00 € de dommages et intérêts en application de l'article 32-1 du code de procédure civile, et 2 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 13 février 2019, le conseil de prud'hommes de Metz, section activités diverses, a statué ainsi qu'il suit :

- Dit et juge que M. [S] n'a pas démissionné de son travail ;

- Dit et juge que la prise d'acte de rupture de son contrat de travail par M. [J] [S] aux torts de la SARL Les Tuileries produit les effets d'un licenciement nul;

- Condamner la SARL Les Tuileries, prise en la personne de son représentant légal, à payer à M.[S] les sommes de :

- 2 100,00 € net à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul avec intérêts au taux légal à compter de la demande ;

- 2 100,00 € brut au titre de l'indemnité de préavis;

- 210,00 € brut au titre des congés payés afférents;

- 4 000,00 € net de dommages et intérêts pour préjudice moral avec intérêts au taux légal à compter de la demande ;

- 1250,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonne l'exécution provisoire du jugement à intervenir en application des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile ;

- Déboute la SARL Les Tuileries, prise en la personne de son représentant légal, de ses demandes reconventionnelles ;

- Condamne la SARL Les Tuileries, prise en la personne de son représentant légal, aux entiers frais et dépens de l'instance y compris ceux liés à l'exécution du présent jugement.

Par déclaration formée par voie électronique le 26 février 2019 et enregistrée au greffe le jour même, la SARL Les Tuileries a régulièrement interjeté appel du jugement.

Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 janvier 2021, la SARL Les Tuileries demande à la Cour de :

- Réformer le jugement rendu en toutes ses dispositions ;

- Dire et juger que la prise d'acte de la rupture doit produire les effets d'une démission ;

- Dire et juger n'y avoir eu lieu à harcèlement moral de M. [S] ;

A titre subsidiaire :

- Réduire le montant des dommages et intérêts pouvant être alloués à M.[S] à la somme de 200,00 € ;

- Condamner M.[S] à payer à la SARL Les Tuileries la somme de 1 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner M. [S] en tous les frais et dépens.

Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 7 septembre 2020, M. [J] [S] demande à la Cour de :

A titre principal :

- Confirmer le jugement rendu le 13 février 2019 par le conseil de prud'hommes de Metz ;

Subsidiairement :

- Dire et juger que la prise d'acte de M. [S] est constitutive d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamner la SARL Les Tuileries à verser à M. [S] les sommes suivantes :

. 2 100,00 € bruts à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 2 100,00 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre une somme de 210,00 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés, avec intérêts au taux légal à compter de la demande,

. 4 000,00 € nets à titre dommage et intérêts en réparation du préjudice moral subi par M. [S] ;

En tout état de cause :

- Débouter la SARL Les Tuileries de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- Condamner la SARL Les Tuileries à payer à M. [S] une somme de 2 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de ses frais irrépétibles d'appel,

- Condamner la SARL Les Tuileries aux entiers frais et dépens, y compris ceux de l'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 avril 2021.

Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions respectives des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS,

Sur la rupture du contrat de travail

- sur le harcèlement moral et la discrimination

Selon l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

De plus, en application de l'article L 1132-1 du même code, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison notamment de son état de santé ou de son handicap.

S'agissant de la preuve du harcèlement, l'article L 1154-1 du même code, dans sa version applicable aux faits, prévoit que « lorsque survient un litige relatif notamment à l'application de l'article L 1152-1, (...) le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ».

Enfin aux termes de l'article L 1152-3 du code du travail, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L 1152-1 et L 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul.

M. [S] invoque l'altercation survenue le 19 octobre 2017 avec son employeur, en la personne d'un de ses deux gérants M. [B] [F], au cours de laquelle il explique avoir fait l'objet d'insultes, de violences et d'insultes homophobes.

Le salarié justifie avoir déposé plainte le jour même auprès des services de police du commissariat de [Localité 2], et avoir précisé à cette occasion avoir été insulté par M. [F] dans un premier temps (de « mécréant, con ») puis, après lui avoir tenu tête, s'être fait jeté une lavette à la tête par celui-ci qui aurait alors proféré des injures homophobes. Il ajoute que dix minutes plus tard son patron est revenu à la charge en l'insultant une nouvelle fois et en lui montrant des photos de nourriture mal emballée dont il lui faisait le reproche. M. [F] l'aurait alors agrippé par les bras et poussé en arrière contre la table de la cuisine, occasionnant la chute d'un bol de chocolat, avant de finalement lui demander de partir.

M. [J] [S] justifie également de deux certificats médicaux établis le 19 octobre 2017 puis le 23 octobre 2017, constatant que le salarié présente un hématome de 3cm sur 4cm au niveau lombaire, compatible avec le fait que le salarié se plaint de s'être cogné contre l'angle de son plan de travail, faisant état du fait que M. [S] se plaint de douleurs aux deux poignets, présente une anxiété suite à l'altercation avec son patron qu'il relate, et concluent respectivement à un arrêt de travail de 4 jours et à une incapacité totale de travail (ITT) d'un jour.

La SARL Les Tuileries conteste les faits dont se plaint M. [S] et justifie d'une plainte déposée par M. [B] [F] le 18 décembre 2017 pour dénonciation calomnieuse.

Elle produit des attestations établies par plusieurs de ses salariés confirmant l'existence d'une altercation ayant précédé le départ de M. [S] de son poste de travail le 19 octobre 2017, mais ne donnant aucune précision sur le fait que ces témoins (chef de cuisine, responsable de la réception, maître d'hôtel, plongeuse) se trouvaient ou non sur les lieux.

Par ailleurs, certaines de ces attestations (Mme [R], M. [P], M. [X]) mentionnent une altercation sans donner de précision sur la nature de celle-ci (emportement, insultes ou violences).

Seuls M. [P], dans une seconde attestation, et Mme [U] précisent qu'il n'y a eu aucune insulte et aucune bousculade de la part de M. [F] qui aurait simplement formé des reproches à M.[S] quant à la qualité de son travail.

Ces dernières attestations sont toutefois contredites par l'audition de M. [B] [F] lui-même le 18 décembre 2017 par les services de police au cours de laquelle il reconnaît que le ton est monté, qu'il a proféré des insultes à l'encontre de M.[S], quand bien même elles auraient été réciproques, qu'il a jeté une lavette sur M.[S] et que lorsqu'il a haussé le ton le salarié a reculé et a provoqué la chute du récipient dans lequel se trouvait le chocolat en train de fondre.

Ainsi, la SARL Les Tuileries ne peut légitimement contester les insultes et le jet de la lavette reconnus par son gérant, et les certificats médicaux corroborent le fait que M. [S] ait été bousculé par le gérant et se soit cogné à son plan de travail, occasionnant notamment un hématome.

Les violences physiques (bousculade et jet de lavette) et les insultes invoquées par M.[S] sont donc suffisamment établies par les éléments du dossier, seules les insultes à caractère homophobe et les actes de dénigrement répété de son travail n'étant pas suffisant démontrés, puisque ne résultant que des seuls propos du salarié mentionnés dans sa lettre de rupture, sa plainte ou auprès des médecins l'ayant examiné.

En conséquence, si la discrimination n'est pas établie, les insultes et violences sont bien réelles et ne sont pas objectivement justifiées par l'employeur qui ne peut légitimement invoquer les manquements professionnels de son salarié pour y avoir recours.

Toutefois, compte tenu du fait que ces agissements ont été commis dans un même laps de temps, il convient de constater qu'il s'agit d'un acte unique.

Seule l'altercation du 19 octobre 2017 étant établie, il convient de constater qu'en l'absence de tout autre fait de nature à laisser supposer l'existence de harcèlement moral, celui-ci n'est pas caractérisé.

M. [S] sera débouté de sa demande principale aux fins de voir constatée que sa prise d'acte produit les effets d'un licenciement nul et le jugement entrepris infirmé en ce sens.

- sur les manquements à l'origine de la prise d'acte

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués par lui constituent des manquements d'une importance telle qu'ils empêchaient la poursuite des relations contractuelles, soit d'une démission dans le cas contraire.

Il appartient donc au juge de vérifier si les faits invoqués par le salarié sont établis et, dans l'affirmative, s'ils caractérisent des manquements d'une importance telle qu'ils empêchaient la poursuite des relations contractuelles, la rupture étant alors imputable à l'employeur et produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

C'est au salarié qui prend l'initiative de la rupture qu'il appartient d'établir la réalité de ces manquements, à charge pour le juge à en apprécier la gravité, et si un doute subsiste la rupture produit les effets d'une démission.

Le juge se doit enfin d'examiner l'ensemble des griefs invoqués par le salarié, sans se limiter aux griefs mentionnés dans la lettre de rupture.

M.[S] invoque au titre des manquements reprochés à son employeur les injures, violences, injures homophobes et dénigrement répété de son travail dont il a fait l'objet de la part de son employeur.

Il résulte des développements qui précèdent que ces griefs sont établis, à l'exception des injures homophobes et du dénigrement répété.

Ces faits d'injures et de violence commis par le gérant de la SARL Les Tuileries le 10 octobre 2017 sont suffisamment graves, car portant atteinte à la santé et à la sécurité du salarié, pour empêcher la poursuite du contrat de travail de M.[S] qui ne pouvait plus exercer ses fonctions.

Dès lors, la demande de prise d'acte de la rupture du contrat de travail, formée par M.[S] par lettre recommandée du 1er décembre 2017 est justifiée, et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce sens.

- sur les conséquences financières de la rupture du contrat de travail

. sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents

Le salarié victime d'un licenciement nul dont la réintégration est impossible ou qui ne la demande pas a droit, quelles que soient son ancienneté et la taille de l'entreprise, aux indemnités de rupture dont fait partie l'indemnité compensatrice de préavis.

L'article 30 de la convention collective nationale des Hôtels Cafés Restaurants applicable à la relation de travail prévoit que, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave ou une faute lourde, les salariés (niveau maîtrise) justifiant chez le même employeur d'une ancienneté comprise entre 6 mois et 2 ans ont droit à un préavis de 1 mois.

En outre selon l'article L 1234-5 du même code, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.

M.[S] sollicite la somme de 2 100,00 € au titre de l'indemnité de préavis, correspondant au montant mensuel de son salaire brut.

Étant salarié de la SARL Les Tuileries depuis le 2 mai 2017, au vu de son contrat de travail, il justifie au moment de sa prise d'acte datée du 1er décembre 2017 d'une ancienneté de 6 mois et 30 jours, soit comprise entre 6 mois et 2 ans, ce qui lui donne droit à une indemnité compensatrice d'un mois de préavis.

Il y a lieu en conséquence de condamner la SARL Les Tuileries à verser à M. [S] la somme de 2100,00 € brut d'indemnité de préavis, outre 210,00 € au titre des congés payés y afférents, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 19 février 2018, date de l'enregistrement de la demande.

. sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

En application de l'alinéa 1 de l'article L 1235-3 du code du travail, les salariés ayant fait l'objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse par une entreprise employant habituellement au moins 11 salariés se voient octroyés par le juge une indemnité à la charge de l'employeur dont le montant est fixé, pour une ancienneté de moins d'une année complète, à un mois de salaire brut au maximum.

Il est constant en l'espèce que M. [S] avait une ancienneté de moins d'un an (6 mois et 30 jours) au moment de son licenciement, et il résulte de l'attestation établie par l'employeur destinée à Pôle emploi que la SARL Les Tuileries a 28 salariés, soit plus de 11 salariés, de sorte que M. [S] peut bénéficier une indemnité dans les conditions rappelées ci-dessus.

M. [S] sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SARL Les Tuileries à ce titre à lui verser 2 100,00 € net de dommages et intérêts, soit le montant d'un mois de salaire brut, avec intérêts au taux légal à compter de la demande.

Compte tenu de l'ancienneté de M.[S] dans l'entreprise au moment de la rupture du contrat (6 mois et 30 jours), de l'âge du salarié à cette date (24 ans) et du fait qu'il ait retrouvé du travail par la suite, il convient de fixer le montant de cette indemnité à la somme de 2 100,00 €.

Le jugement entrepris sera modifié en ce sens et l'employeur condamné à payer cette somme à M.[S] à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter de la décision de première instance, soit en l'espèce à la date du jugement prononcé le 13 février 2019 par le conseil de prud'hommes de Metz.

. sur les dommages et intérêts pour préjudice moral

M.[S] fait valoir que les circonstances de la rupture de son contrat de travail (harcèlement moral, violences) lui ont causé un préjudice moral.

Il est constant que le salarié peut prétendre à des dommages et intérêts en raison des circonstances brusques ou vexatoires de la rupture.

Si le harcèlement moral n'est pas caractérisé, tout comme les insultes homophobes ou le dénigrement répété de son travail, les injures et actes de violence sont établis à la date du 19 octobre 2017.

Compte tenu du fait qu'ils ont été commis sur le lieu de travail, en présence d'autres salariés et ont conduit M.[S] à quitter celui-ci, la nature de ces actes (insultes, violences) et les constatations médicales effectuées le jour des faits puis 4 jours après justifient l'existence d'un préjudice moral subi par M.[S] qui peut être justement évalué à 2 000,00 €.

La décision des premiers juges sera donc infirmée en ce sens et la SARL Les Tuileries condamnée à verser 2 000,00 € à titre de dommages avec intérêts au taux légal sur cette somme à compter du jugement du 13 février 2019.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement entrepris sera confirmé sur ses dispositions sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SARL Les Tuileries, partie perdante à la procédure, sera condamnée aux dépens d'appel.

Elle sera en outre condamnée à payer à M.[S] la somme de 2 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant contradictoirement, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement entrepris sauf en ses dispositions sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile de première instance ;

Statuant à nouveau,

Déboute M. [J] [S] de sa demande de qualification de sa prise d'acte en licenciement nul ;

Qualifie sa demande de prise d'acte en rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur avec effet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la SARL Les Tuileries à payer à M. [J] [S] les sommes de 2 100,00 € brut à titre d'indemnité de préavis outre celle de 210,00 € brut à titre de congés payés afférents à cette indemnité, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 19 février 2018, date de l'enregistrement de la demande ;

Condamne la SARL Les Tuileries à payer à M. [J] [S] la somme de 2 100,00 € net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du jugement du 13 février 2019 ;

Condamne la SARL Les Tuileries à payer à M. [J] [S] la somme de 2 000,00 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter du jugement du 13 février 2019 ;

Confirme le jugement entrepris pour le surplus ;

Y ajoutant,

Condamne la SARL Les Tuileries à payer à M. [J] [S] la somme de 2 000,00 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne la SARL Les Tuileries aux dépens d'appel.

Le GreffierP/La Présidente régulièrement empêchée,

La Conseillère


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 1
Numéro d'arrêt : 19/00530
Date de la décision : 10/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;19.00530 ?
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