RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 21/00412 - N° Portalis DBVS-V-B7F-FN3H
Minute n° 22/00154
[I]
C/
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, S.E.L.A.S. ALLIANCE
Jugement Au fond, origine Juge des contentieux de la protection de Metz, décision attaquée en date du 30 Décembre 2020, enregistrée sous le n° 19-000629
COUR D'APPEL DE METZ
3ème CHAMBRE - TI
ARRÊT DU 28 AVRIL 2022
APPELANTE :
Mme [E] [I] épouse [G]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Emilie CHARTON, avocat au barreau de METZ
INTIMÉES :
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Nathalie ROCHE-DUDEK, avocat au barreau de METZ
S.E.L.A.S. ALLIANCE prise en la personne de Maître [U] [K] ès qualités de mandataire liquidateur
[Adresse 3]
[Localité 6]
Non représentée
DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du 24 février 2022 tenue par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Magistrat rapporteur qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 28 avril 2022.
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Sophie GUIMARAES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre
ASSESSEURS : Mme BASTIDE, Conseiller
M. MICHEL, Conseiller
FAITS ET PROCEDURE
Mme [E] [I] épouse [G] et M. [Y] [G] ont été démarchés à domicile par la SAS IC Group et le 15 décembre 2015, ils ont signé un bon de commande portant sur une installation photovoltaïque pour un montant de 23.000 euros. Le même jour, ils ont contracté un crédit affecté auprès de la SA BNP Paribas Personal Finance du même montant.
[Y] [G] est décédé le 20 juillet 2017.
La SAS IC Group a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 13 décembre 2018 et la SELAS Alliance a été désignée ès qualités de mandataire liquidateur de la société.
Suivant actes d'huissier du 5 avril 2019, Mme [I] a fait assigner la SA BNP Paribas Personal Finance et la SELAS Alliance ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS IC Group devant le tribunal d'instance de Metz. Au dernier état de la procédure, elle a demandé au juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Metz de :
- se déclarer compétent
- prononcer l'annulation du contrat de vente et subsidiairement sa résolution
- ordonner la restitution du matériel et fixer sa créance de 23.000 euros au passif de la liquidation judiciaire de la SAS IC Group
- dire que la SAS IC Group représentée par son liquidateur devra procéder au démontage des panneaux photovoltaïques et à la remise en état de l'immeuble dans le délai d'un mois sous astreinte et qu'à défaut elle pourra faire déposer l'installation
- constater l'annulation de plein droit du contrat de prêt
- condamner la SA BNP Paribas Personal Finance à lui rembourser la somme de 7.760,28 euros et la débouter de ses demandes
- la condamner à lui verser 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
La SELAS Alliance ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS IC Group a conclu à l'incompétence du tribunal au profit du tribunal de commerce, à l'irrecevabilité des demandes de Mme [I] et leur rejet, outre la condamnation de celle-ci à lui verser une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La SA BNP Paribas Personal Finance s'est opposée aux demandes, a sollicité la condamnation de Mme [I] à reprendre le paiement du prêt, à titre subsidiaire sa condamnation à lui rembourser le montant du capital prêté sous déduction des sommes déjà réglées et à défaut une fraction du capital qui ne peut être inférieure aux deux tiers de la somme, outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Après avoir par jugement avant dire droit du 23 août 2019 suspendu le paiement du contrat de crédit et par jugement du 30 décembre 2020, le juge des contentieux de la protection s'est déclaré compétent et a :
- déclaré recevables les demandes formées par Mme [I]
- prononcé la résolution du contrat de vente et du contrat de prêt passés le 15 décembre 2015
- condamné la SAS IC Group représentée par son liquidateur la SELAS Alliance à restituer le prix de vente de 23.000 euros à Mme [I] et fixé la créance de celle-ci à ce montant
- condamné Mme [I] à restituer le matériel à la SAS IC Group représentée par son liquidateur qui devra le faire enlever aux frais de la société dans un délai de 3 mois à compter du jugement, à défaut autorisé Mme [I] à le faire enlever aux frais de la SAS IC Group représentée par son liquidateur ou à le conserver
- condamné Mme [I] à restituer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 15.239,72 euros
- condamné la SAS IC Group représentée par son liquidateur aux dépens.
Par déclaration d'appel déposée au greffe de la cour le 16 février 2021, Mme [I] a interjeté appel du jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité du contrat de vente et l'a condamnée à verser à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 15.239,72 euros.
Aux termes de ses dernières conclusions, l'appelante demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité du contrat de vente et l'a condamnée à verser à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 15.239,72 euros et de :
- à titre principal annuler le bon de commande signé le 15 décembre 2015
- à titre subsidiaire prononcer la résolution du bon de commande signé le 15 décembre 2015
- fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SAS IC Group à la somme de 23.000 euros
- enjoindre à la SAS IC Group représentée son liquidateur de venir récupérer les matériels et remettre les lieux dans leur état antérieur à ses frais dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt et à défaut dire qu'elle pourra en disposer librement
- prononcer l'annulation et subsidiairement la résolution du contrat de crédit affecté
- la dispenser de rembourser le crédit
- condamner la SA BNP Paribas Personal Finance à lui rembourser la somme de 8.700,92 euros au titre des mensualités prélevées au 15 janvier 2021
- la débouter de ses demandes
- condamner solidairement la SAS IC Group représentée par la SELAS Alliance ès qualités de mandataire liquidateur et la SA BNP Paribas Personal Finance à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens
- confirmer les autres dispositions du jugement.
Sur la nullité du contrat principal, Mme [I] soutient que les dispositions de l'article L.121-18-2 du code de la consommation ont été violées puisque la SAS IC Group a livré l'installation le 22 décembre 2015 soit 7 jours après la signature du bon de commande. Elle fait également valoir que les dispositions de l'article L.121-18-1 n'ont pas été respectées puisque le bon de commande ne comprend pas les caractéristiques essentielles des biens (absence de mention des marque et modèle des modules et de l'onduleur, puissance électrique unitaire des modules, dimension et composition des panneaux, prix unitaire des biens et prestations, délai de réalisation des démarches administratives), ni la date et l'adresse de livraison et conteste avoir confirmé la nullité du contrat. Elle ajoute que les conditions, délai et modalités d'exercice du droit de rétractation ne figurent pas de manière lisible sur le bon de commande, que les informations sont erronées pour reproduire aux conditions générales du contrat l'article L.121-25 du code de la consommation qui n'était plus en vigueur au moment de la signature du contrat et indiquer que le délai du droit de rétractation court à compter de la livraison et que les caractères sont minuscules. Elle soutient encore que le numéro d'identification pour la TVA ne figure pas sur le bon de commande, ni les coordonnées de l'assurance du vendeur, ni la possibilité de recourir à un médiateur.
Sur la confirmation de la nullité, l'appelante conteste avoir eu connaissance des vices affectant le bon de commande et soutient, que la reproduction des articles du code de la consommation est insuffisante de même que la réception de l'installation et la signature d'une attestation de livraison et que les conditions de l'article 1338 du code civil ne sont pas réunies.
A titre subsidiaire, elle invoque la nullité pour vice du consentement et détaille les manoeuvres dolosives du vendeur qui s'est présenté comme partenaire EDF et leur a présenté l'opération comme auto-financée, ce qui est repris sur le bon de commande par 'écofinancement' et précise que l'installation n'a jamais assuré l'auto-financement de l'achat et que la SAS IC Group a été condamnée pour pratiques commerciales trompeuses par le tribunal correctionnel de Nanterre.
Plus subsidiairement, Mme [I] conclut à la confirmation du jugement ayant prononcé la résolution du contrat pour inexécution par le vendeur de ses obligations, au motif que l'installation ne fonctionne plus suite à la panne des micro-onduleurs dont le coût de remplacement est égal à la moitié de l'investissement, que le vendeur en liquidation ne peut intervenir, qu'il a manqué à son obligation de conseil en ne lui remettant pas d'étude de faisabilité et rentabilité, ce qui constitue des manquement suffisamment graves pour valoir résolution du contrat de vente.
Sur les conséquence de la nullité du contrat principal, elle soutient que celle du contrat de crédit affecté est de droit en application de l'article L.311-31 du code de la consommation. Sur la responsabilité de la banque, elle expose qu'elle a commis une faute en remettant les fonds au vendeur sans s'être assurée de la complète exécution de la prestation, qu'elle ne peut se prévaloir de l'attestation de livraison au regard de l'ambiguïté de ce document pré-rédigé et sans mention 'lu et approuvé', que les fonds ont été débloqués 13 jours après la pose de l'installation alors que le raccordement ne pouvait être réalisé ni les diverses démarches administratives prévues au bon de commande. Elle ajoute que la banque a également commis une faute en délivrant les fonds sans vérifier que le bon de commande respectait les dispositions d'ordre public du code de la consommation.
Sur le préjudice subi, l'appelante expose que la faute de la banque la prive de sa créance de restitution, sans que les notions de perte de chance ou de préjudice soient en jeu. Elle ajoute que la liquidation judiciaire de la SAS IC Group la prive de la possibilité de récupérer le prix de vente alors qu'elle doit restituer le matériel, que ses ressources modestes ne lui permettent pas de supporter le coût des réparations de l'installation défectueuse ni le remboursement du prêt et que son préjudice est en lien avec la faute de la banque puisque, si celle-ci n'avait pas débloqué les fonds au profit du vendeur, elle ne serait pas dans cette situation. Subsidiairement, elle évalue son préjudice à 10.000 euros soit le coût des réparations, à déduire de la créance de restitution. Enfin elle sollicite le remboursement des échéances réglées.
Selon ses dernières conclusions, dont le dispositif doit être expurgé de toutes mentions qui ne constituent pas des demandes mais reprennent les moyens soutenus dans les motifs, la SA BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions et débouter Mme [I] de ses demandes
- subsidiairement condamner Mme [I] à lui verser une fraction du capital prêté qui ne peut être inférieure aux deux tiers
- en tout état de cause, la condamner à lui verser 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile.
Sur la nullité du contrat principal, elle expose que l'appelante ne rapporte pas la preuve que l'une des conditions de l'article 1108 n'est pas constituée, que le contrat a été exécuté puisque l'installation a été livrée et raccordée et a généré des revenus énergétiques, de sorte que la nullité n'est pas encourue. Elle soutient que le bon de commande comprend les caractéristiques essentielles des biens, que le prix unitaire n'est pas prévu par les textes, que les conditions de paiement sont clairement indiquées, que la violation des dispositions du code de la consommation est sanctionnée par une nullité relative qui peut être couverte par l'exécution volontaire du contrat, que Mme [I] avait connaissance du vice affectant le bon de commande dès sa signature puisque la reproduction des articles du code de la consommation lui permettait d'avoir connaissance des irrégularités du bon de commande. Elle considère que l'emprunteuse avait l'intention de réparer le vice puisqu'elle n'a pas usé de son droit de rétractation, a accepté la livraison et la pose des installations, signé sans réserve l'attestation de fin de travaux, réglé les échéances du prêt, perçu les revenus de la revente d'énergie et attendu plus de trois ans pour saisir la justice, concluant à la confirmation du jugement.
Sur le dol, la SA BNP Paribas Personal Finance fait valoir que l'appelante ne démontre pas avoir été victime de manoeuvres dolosives, concluant au rejet de la demande de ce chef. Sur la résolution du contrat, elle expose que l'emprunteur qui a signé sans réserve une attestation de livraison n'est plus recevable à invoquer une inexécution du contrat, que Mme [I] ne rapporte pas la preuve de manquements suffisamment graves pour justifier la résolution du contrat, qu'elle reconnaît que les panneaux photovoltaïques ont été livrés, posés et ont produit de l'énergie revendue, que le dysfonctionnement allégué n'est pas démontré et que l'appelante doit être déboutée de sa demande.
L'intimée soutient en tout état de cause, si la cour prononce l'annulation ou la résolution du contrat de crédit en conséquence de celle du contrat de vente, que Mme [I] doit être condamnée à lui restituer le capital puisque les parties sont remises dans leur état antérieur. Elle rappelle qu'elle a remis les fonds au vu d'une attestation de livraison signée sans réserve par les emprunteurs, qu'elle n'a pas à faire d'investigations complémentaires quant à la réalisation des travaux et qu'il ne lui appartenait pas de s'assurer de la conformité du bon de commande au code de la consommation, de sorte qu'elle n'a commis aucune faute de nature à la priver de sa créance de restitution. Elle ajoute que le raccordement et les autorisations administratives supposent l'intervention d'un tiers au contrat, ERDF qui dispose d'un monopole légal, que l'installation peut servir à une auto-consommation, qu'elle ne s'est pas engagée contractuellement à s'assurer de la mise en service de l'installation et n'a ainsi commis aucune faute en débloquant les fonds. Elle en déduit que Mme [I] doit lui restituer le capital prêté sous déduction des échéances versées, subsidiairement que l'appelante ne peut prétendre qu'à une perte de chance qui ne peut donner lieu à la réparation intégrale du préjudice, qu'elle ne justifie d'aucun préjudice puisqu'elle dispose d'une installation raccordée qui ne sera jamais réclamée par le mandataire liquidateur du vendeur et qu'elle peut faire réparer les micro-onduleurs. Elle conclut en conséquence à la restitution du capital ou à tout le moins à une fraction de ce capital.
Par acte du 10 mai 2021 remis à personne habilitée Mme [I] a fait signifier sa déclaration d'appel et ses conclusions à la SELAS Alliance, ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS IC Group, qui n'a pas constitué avocat.
MOTIFS DE LA DECISION :
Vu les écritures déposées le 12 janvier 2022 par Mme [I] et le 12 novembre 2021 par la SA BNP Paribas Personal Finance, auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 17 février 2022 ;
Sur l'annulation du contrat de vente
Selon L. 121-18-1 recodifié L.221-9 du code de la consommation, à peine de nullité du contrat en application de l'article L. 242-1 du même code, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties et ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5 du code de la consommation.
Selon l'article L.221-5 préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2, celles relatives aux conditions, délai et modalités d'exercice du droit de rétractation ainsi que le formulaire type de rétractation. L'article L. 111-1 précise notamment qu'avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations relatives aux caractéristiques essentielles du bien ou du service, le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1, en l'absence d'exécution immédiate du contrat la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service, et les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte.
En l'espèce, il n'est pas contesté que le contrat de vente signé le 15 décembre 2015 est un contrat conclu hors établissement soumis aux articles recodifiés précités.
Si Mme [I] affirme que les dispositions de l'article L.121-18-2 (L.221-10) du code de la consommation ont été violées, il est relevé que contrairement à ce qu'elle soutient l'installation a été livrée le 2 janvier 2016 ainsi qu'il ressort de l'attestation de livraison signé par son époux qui a à cette date ordonné au prêteur de libérer les fonds au profit du vendeur, de sorte que le délai légal de 7 jours a été respecté, aucune pièce n'étant produite pour établir que les fonds auraient été délivrés le 22 décembre 2015 comme allégué. Ce moyen est inopérant.
Sur les dispositions de l'article L.221-9, le premier juge a exactement dit que le bon de commande comprenait bien les caractéristiques essentielles des biens et que le modèle des modules et de l'onduleur, la puissance électrique unitaire des modules, les dimension et composition des panneaux, le prix unitaire des biens et prestations ne sont pas des mentions nécessaires puisqu'elles ne constituent pas des caractéristiques essentielles. Il a tout aussi justement relevé que le contrat ne comporte aucune date de livraison et encourt la nullité pour non respect des dispositions légales. Il est en outre observé que le bon de commande comporte un bordereau de rétractation non régulier puisqu'il indique que le délai court à compter de la commande alors que selon l'article R.221-3 ce délai court à compter de la livraison des biens commandés. Pour le reste, les moyens invoqués sur l'absence du numéro d'identification pour la TVA, des coordonnées de l'assurance du vendeur et de la possibilité de recourir à un médiateur sont inopérants.
La nullité de l'article L.221-9 étant une nullité relative, sa confirmation est subordonnée à la conclusion d'un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l'obligation et qu'il a eu l'intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l'époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée. L'intention de réparer exige que le vice soit spécialement validé et que la volonté soit suffisamment caractérisée, l'intention ne pouvant se déduire de la simple connaissance du vice sans réaction immédiate par la partie lésée. Il appartient à celui qui se prévaut d'une confirmation de rapporter la double preuve imposée par l'article 1338 du code civil.
En l'espèce, il est relevé que les articles reproduits au verso du bon de commande sont les articles L.121-23 à L.121-27 du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, qui ne sont donc pas applicables au contrat signé le 15 décembre 2015. Il en découle que Mme [I] n'a pu avoir connaissance du vice affectant le bon de commande relativement à l'absence de mention de la date de livraison et de la nullité encourue de ce fait, de sorte qu'il ne peut être considéré que le fait de laisser le contrat s'exécuter en acceptant la livraison, en signant l'attestation de réception des travaux et en réglant des échéances du prêt, s'analyse en une confirmation tacite de l'obligation entachée de nullité en toute connaissance de cause.
En conséquence le jugement ayant rejeté la demande de nullité du contrat principal en retenant que la nullité avait été confirmée par Mme [I] est infirmé et il convient de prononcer la nullité du contrat de vente. Les autres dispositions du jugement relatives à la résolution du contrat sont également infirmées puisqu'il est fait droit à la demande principale en nullité de l'appelante.
Sur l'annulation du contrat de prêt
En application de l'article L.312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé. Il s'ensuit qu'en raison de la nullité du contrat principal de vente et de l'interdépendance des deux contrats, le contrat de prêt conclu avec la SA BNP Paribas Personal Finance doit également être annulé. Le jugement déféré est infirmé.
Sur le remboursement du capital prêté
L'annulation ou la résolution du contrat de crédit affecté en conséquence de celle du contrat de vente ou prestation de service qu'il finance, emporte pour l'emprunteur l'obligation de restituer au prêteur le capital prêté. Cependant, le prêteur qui a délivré les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé de tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
En l'espèce, il ressort de ce qui précède sur la nullité du contrat principal de vente que le bon de commande a été établi en méconnaissance des dispositions de l'article L.221-9 du code de la consommation, ce dont il résulte qu'en versant les fonds au vendeur, sans procéder préalablement aux vérifications nécessaires qui lui aurait permis de constater que le contrat de vente était affecté d'une nullité, la SA BNP Paribas Personal Finance a commis une faute.
Contrairement à ce que soutient l'appelante, il lui appartient de rapporter la preuve du préjudice subi et du lien de causalité avec la faute de la banque. Sur le préjudice subi, il ressort des pièces versées aux débats que les biens commandés ont été livrés et installés le 2 janvier 2015, que les panneaux photovoltaïques ont été raccordés au réseau ERDF, que les acquéreurs ont signé un contrat de rachat d'électricité avec ERDF et perçu des revenus énergétiques à compter du mois d'août 2016 jusqu'en 2019. Si Mme [I] soutient que l'installation serait en panne avec un coût de réparation de 10.000 euros, il est constaté qu'elle ne produit aucune pièce pour démontrer la panne effective de l'installation, le seul fait que la facture de revente d'énergie pour l'année 2020 soit d'un montant limité par rapport aux années antérieures étant insuffisamment probant pour justifier d'une panne. Il n'est pas plus produit de pièce démontrant que l'absence de production à compter de 2020 serait due à une usure prématurée des micro-onduleurs, ni aucun devis de réparation.
Au regard de l'ensemble de ces éléments il est considéré que l'appelante ne démontre pas avoir subi un préjudice lié à la faute de la banque relative à l'absence de vérification formelle du contrat principal, alors que la panne dont elle se prévaut survenue selon ses dires en 2020 est sans lien avec la faute commise par le prêteur au moment de la délivrance des fonds en janvier 2016. En conséquence, elle doit être condamnée à restituer au prêteur le capital prêté sous déduction des échéances déjà versées. Il ressort des relevés de compte bancaire produits par l'appelante que jusqu'au 16 septembre 2019 elle a réglé 33 mensualités de 235,16 euros, que suite au jugement du 23 août 2019 le prêt a été suspendu et qu'elle a effectué trois nouveaux règlements de 235,16 euros en octobre, novembre et décembre 2021, soit la somme totale de 8.465,76 euros.
En conséquence il convient de la condamner à verser à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 14.534,24 euros (23.000 - 8.465,76) et d'infirmer le jugement. Il n'y a en conséquence pas lieu de statuer sur la demande de remboursement des échéances déjà déduites.
Sur les autres demandes
Selon l'article 901 du code de procédure civile, la déclaration d'appel comporte les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité.
En l'espèce, il est observé qu'aux termes de sa déclaration d'appel, Mme [I] a limité son appel aux dispositions du jugement ayant rejeté sa demande de nullité du contrat de vente et l'ayant condamnée à verser à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 15.239,72 euros. Comme elle n'a pas fait appel des dispositions du jugement relatives à la fixation de sa créance au passif de la SAS IC Group, à la restitution de l'installation photovoltaïque et la remise en état de l'immeuble et que la SA BNP Paribas Personal Finance n'a pas formé appel incident de ces chefs, la cour n'a pas à statuer sur ces points.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
Il convient de condamner Mme [I], partie perdante aux dépens d'appel. Il n'y a pas lieu en équité de faire application des dispositions au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'article 699 du code de procédure civile n'étant pas applicable dans les départements d'Alsace et de Moselle, il n'y a pas lieu à distraction des dépens au profit de Me Roche.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant par arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté [E] [I] épouse [G] de sa demande de nullité des contrats de vente et de prêt et l'a condamnée à verser à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 15.239,72 euros et statuant à nouveau,
PRONONCE la nullité du contrat de vente conclu le 15 décembre 2015 entre [E] [I] épouse [G] et la SAS IC Group ;
CONSTATE la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté conclu le 15 décembre 2015 entre [E] [I] épouse [G] et la SA BNP Paribas Personal Finance ;
DIT en conséquence n'y avoir lieu à résolution des deux contrats de vente et de crédit affecté;
CONDAMNE [E] [I] épouse [G] à verser à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 14.534,24 euros au titre de la restitution du capital prêté, sous déduction des échéances déjà versées et avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
Y ajoutant,
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE [E] [I] épouse [G] aux dépens d'appel et dit n'y avoir lieu à application de l'article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, présidente de chambre à la cour d'appel de Metz et par Madame GUIMARAES, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRESIDENT