RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 21/00244 - N° Portalis DBVS-V-B7F-FNN2
Minute n° 22/00152
[T], [D]
C/
[K]
Jugement Au fond, origine Juge des contentieux de la protection de THIONVILLE, décision attaquée en date du 01 Décembre 2020, enregistrée sous le n° 11-20-0507
COUR D'APPEL DE METZ
3ème CHAMBRE - TI
ARRÊT DU 28 AVRIL 2022
APPELANTS :
Mme [W] [Y] [T]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représentée par Me Armelle BETTENFELD, avocat au barreau de METZ
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/001266 du 09/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)
M. [P] [D]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représenté par Me Armelle BETTENFELD, avocat au barreau de METZ
INTIMÉE :
Mme [V] [K] épouse [L]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Gaspard GARREL, avocat au barreau de METZ
DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du24 février 2022 tenue par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Magistrat rapporteur qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 28 avril 2022.
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Madame Sophie GUIMARAES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre
ASSESSEURS : Mme BASTIDE, Conseiller
M. MICHEL, Conseiller
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte sous seing privé du 6 juillet 2017, M. [J] [L] et Mme [V] [K] épouse [L] ont consenti un bail à usage d'habitation à M. [P] [D] sur un appartement situé [Adresse 1]) moyennant un loyer mensuel de 450 euros par mois outre une provision sur charges de 30 euros. Le 3 juillet 2017, Mme [W] [Y] [T] s'est portée caution solidaire des engagements souscrits par le locataire envers les bailleurs.
[J] [L] est décédé le 24 novembre 2017.
Le 13 février 2020, Mme [L] a fait délivrer au locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire figurant dans le contrat de location et ce commandement a été dénoncé à la caution le 24 février 2020.
Par actes d'huissier des 29 et 30 juin 2020, la bailleresse a fait citer le locataire et la caution devant le tribunal judiciaire de Thionville aux fins de voir constater la résiliation du bail, ordonner l'expulsion de M. [D], condamner solidairement M. [D] et Mme [T] à lui payer 9.104,86 euros au titre des loyers et charges impayés arrêtés au 18 juin 2020, une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer jusqu'au départ effectif des lieux, 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.
A l'audience, Mme [L] a indiqué que le locataire avait quitté les lieux et n'a maintenu que sa demande en paiement.
M. [D] et Mme [T] n'ont pas comparu et n'ont pas été représentés.
Par jugement réputé contradictoire du 1er décembre 2020, le tribunal a :
- constaté que Mme [L] s'est désistée de ses demandes tendant à la résiliation du bail, à l'expulsion et à l'indemnité d'occupation
- écarté des débats le courrier et les pièces adressés par Mme [T] le 28 septembre 2020
- condamné solidairement M. [D] et Mme [T] à payer à Mme [L] la somme de 9.104,86 euros au titre des loyers et provisions sur charges impayés avec intérêts au taux légal à compter du jugement
- condamné M. [D] et Mme [T] in solidum à payer à Mme [L] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens comprenant notamment le coût du commandement de payer, de l'assignation et de sa notification au sous-préfet et les frais d'exécution .
Par déclaration déposée au greffe de la cour le 27 janvier 2021, M. [D] et Mme [T] ont formé appel de ce jugement en ce qu'il les a condamnés solidairement à payer à Mme [L] la somme de 9.104,86 euros au titre des loyers et provisions sur charges impayés avec intérêt au taux légal à compter de la décision, la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions dont le dispositif doit être expurgé des mentions qui ne constituent pas des demandes mais reprennent les moyens soutenus dans les motifs, ils demandent à la cour d'infirmer le jugement, débouter Mme [L] de ses demandes en paiement, fixer sa créance au passif de leur procédure de surendettement respective, rejeter l'appel incident et dire que chaque partie supportera la charge de ses frais et dépens d'instance et d'appel.
Les appelants exposent que les impayés locatifs résultent de difficultés personnelles et financières et qu'ils ont sollicité le bénéfice d'une mesure de traitement de leur situation de surendettement actuellement en cours d'instance, ce qui interdit l'engagement d'une mesure d'exécution.
Sur l'appel incident, ils font valoir que la cour n'est saisie que par les prétentions figurant dans le dispositif des premières conclusions notifiées par chacune des parties et qu'elle ne peut que confirmer le jugement si l'appelant ou l'appelant incident ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l'infirmation du jugement sur les chefs du dispositif critiqué, ni son annulation, et ce même pour l'augmentation du quantum d'une condamnation. Ils en déduisent que la cour n'est pas saisie de l'appel incident et ne peut faire droit à la demande d'augmentation. Subsidiairement, ils soutiennent que Mme [L] ne justifie d'aucune pièce de nature à permettre la fixation de sa créance aux sommes réclamées.
Mme [L] demande à la cour de débouter M. [D] et Mme [T] de l'ensemble de leurs demandes, confirmer le jugement rendu le 1er février 2020 en toutes ses dispositions à l'exception du quantum de la somme mise à la charge des appelants au titre des loyers et provisions sur charges impayés et condamner solidairement Mme [L] et Mme [T] à lui régler la somme de 10.268,19 euros au titre des loyers et provisions sur charges impayés avec intérêts à compter du 1er juillet 2020 et la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens.
Elle indique que l'arriéré locatif arrêté au 17 septembre 2020 s'élève à 10.268,19 euros, que cette créance est certaine, liquide et exigible et que son montant est particulièrement conséquent eu égard à ses revenus modestes. Elle précise que dans le dispositif de ses conclusions, elle demande à la cour de ne pas confirmer le quantum de la somme mise à la charge des appelants, de statuer à nouveau sur ce seul point et de condamner ces derniers à lui verser la somme de 10.268,19 euros, ce qui vaut demande d'infirmation. L'intimée fait également valoir qu'à défaut pour la cour de considérer qu'elle n'est pas juridiquement saisie d'un appel incident, la simple élévation du montant de la demande ne constitue pas une prétention nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile et que la cour doit statuer sur sa demande.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Vu les écritures déposées le 7 janvier 2022 par Mme [L] et le 26 janvier 2022 par M. [D] et Mme [T], auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 17 février 2022 ;
Sur la demande en paiement
Aux termes des dispositions de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est tenu de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus. L'article 1353 du code civil dispose que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Il est constant que ni la demande tendant à bénéficier des mesures de traitement du surendettement, ni la décision déclarant recevable une telle demande, n'empêchent le créancier d'agir en justice pour voir reconnaître son droit de créance contre le débiteur.
En l'espèce, même si M. [D] et Mme [T] ont sollicité le bénéfice d'une mesure de traitement de leur situation de surendettement, Mme [L] peut valablement demander leur condamnation au paiement de l'arriéré locatif aux fins d'obtenir un titre exécutoire pouvant être mis à exécution en cas d'échec des mesures préconisées par la commission de surendettement, étant en outre observé que les appelants ne justifient pas de l'existence d'une mesure de surendettement en cours pour chacun d'eux. Ils sont donc déboutés de leur demande tendant à voir fixer la créance de Mme [L] au passif de leur procédure de surendettement.
L'article 542 du code de procédure civile dispose que l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.
Selon l'article 954 du même code, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Les conclusions contiennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Il résulte de ces dispositions que l'appelant, à titre principal ou incident, doit dans le dispositif de ses conclusions mentionner qu'il demande l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement, ou l'annulation du jugement. En cas de non-respect de cette règle, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement.
La demande d'infirmation doit être expresse, elle ne peut procéder d'une déduction ou d'une interprétation.
En l'espèce, dans le dispositif de ses conclusions d'intimée, Mme [L] demande à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions 'à l'exception du quantum de la somme mise à la charge des appelants au titre des loyers et provisions sur charges impayés' et, statuant à nouveau sur ce seul point, de condamner solidairement M. [D] et Mme [T] au paiement de la somme de 10.268,19 euros au titre de l'arriéré locatif. Aucune infirmation n'est expressément sollicitée et la possibilité de déduire de la formulation employée qu'il s'agit d'une demande infirmation n'est pas en soi de nature à en faire une prétention dont est valablement saisie la cour.
C'est en vain que Mme [L] fait valoir que la simple élévation du montant de la demande ne constitue pas une prétention nouvelle et que la cour doit se prononcer sur le montant majoré, indépendamment d'une demande d'infirmation. En effet, l'absence de demande nouvelle ne dispense en rien l'intimée formant appel incident du respect des dispositions précitées des articles 542 et 954 du code de procédure civile et il appartient à la partie qui entend obtenir la modification d'une disposition de la décision déférée de solliciter expressément son infirmation. En conséquence, la cour ne peut que confirmer le jugement sur le quantum de l'arriéré locatif sans pouvoir statuer sur l'appel incident.
Sur le montant dû, le premier juge a condamné à juste titre M. [D] et Mme [T] en sa qualité de caution solidaire, au paiement de la somme de 9.104, 86 euros, au vu du décompte de loyers et charges impayés au 18 juin 2020, les appelants ne justifiant d'aucun règlement qui n'aurait pas été pris en compte. Le jugement est confirmé
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Les dispositions du jugement sur les dépens et les frais irrépétibles sont confirmées.
M. [D] et Mme [T], parties perdantes, sont condamnés solidairement aux dépens d'appel et à payer à Mme [L] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en sus de la somme allouée en première instance.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a condamné M. [P] [D] et Mme [W] [Y] [T] solidairement à payer à Mme [V] [K] épouse [L] la somme de 9.104,86 euros au titre des loyers et provisions sur charges impayés, avec intérêts au taux légal à compter du jugement et in solidum la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance comprenant notamment le coût du commandement de payer, de l'assignation et de sa notification au sous-préfet et les frais d'exécution ;
Y ajoutant,
DÉBOUTE M. [P] [D] et Mme [W] [Y] [T] de leur demande tendant à voir fixer la créance de Mme [V] [K] épouse [L] au passif de leur procédure de surendettement ;
CONDAMNE solidairemet M. [P] [D] et Mme [W] [Y] [T] à payer à Mme [V] [K] épouse [L] la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [P] [D] et Mme [W] [Y] [T] aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, présidente de chambre à la cour d'appel de Metz et par Madame GUIMARAES, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRESIDENT