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16/04/2022 | FRANCE | N°22/00218

France | France, Cour d'appel de Metz, Rétention administrative, 16 avril 2022, 22/00218


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE METZ

ORDONNANCE DU 14 AVRIL 2022



Nous, Denise MARTINO, Présidente de chambre, agissant sur délégation de Monsieur le premier président de la cour d'appel de Metz, assistée de Sonia DE SOUSA, greffier ;



Dans l'affaire N° RG 22/00218 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FWZW ETRANGER :



M. [V] [R]

né le 18 Février 1991 à [Localité 1] EN TUNISIE

de nationalité Tunisienne

Sans domicile connu en France

Actuellement en rétention admin

istrative.



Vu la décision de M. LE PREFET DU DOUBS prononçant l'obligation de quitter le territoire français de M. [V] [R], et son maintien en l...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

ORDONNANCE DU 14 AVRIL 2022

Nous, Denise MARTINO, Présidente de chambre, agissant sur délégation de Monsieur le premier président de la cour d'appel de Metz, assistée de Sonia DE SOUSA, greffier ;

Dans l'affaire N° RG 22/00218 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FWZW ETRANGER :

M. [V] [R]

né le 18 Février 1991 à [Localité 1] EN TUNISIE

de nationalité Tunisienne

Sans domicile connu en France

Actuellement en rétention administrative.

Vu la décision de M. LE PREFET DU DOUBS prononçant l'obligation de quitter le territoire français de M. [V] [R], et son maintien en local non pénitentiaire pour une durée n'excédant pas 48 heures ;

Vu l'ordonnance rendue le 16 mars 2022 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire ordonnant le maintien de l'intéressé dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire jusqu'au 13 avril 2022 inclus;

Vu la requête en prolongation de M. LE PREFET DU DOUBS;

Vu l'ordonnance rendue le 13 avril 2022 à 11h14 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire ordonnant la prolongation de la rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire et ce pour une durée maximale de 30 jours jusqu'au 13 mai 2022 inclus ;

Vu l'acte d'appel de Me Sophie WEINBERG pour le compte de M. [V] [R] interjeté par courriel du 14 avril 2022 à 00h45 contre l'ordonnance ayant statué sur la prolongation de la mesure de rétention administrative ;

Vu l'avis adressé à Monsieur le procureur général de la date et l'heure de l'audience;

A l'audience publique de ce jour, à 15 H 00, en visioconference se sont présentés :

-M. [V] [R], appelant, assisté de Me Ruben GARCIA, avocat de permanence commis d'office, absent lors du prononcé de la décision et de Monsieur [H] [M] interprète assermenté en langue arabe présent lors du prononcé de la décision ;

-M. LE PREFET DU DOUBS, intimé, représenté par Me Dominique MEYER , avocat au barreau de Metz substituant le cabinet Claisse, du barreau de Paris, absente lors du prononcé de la décision

Me Ruben GARCIA et M. [V] [R], par l'intermédiaire de l'interprète ont présenté leurs observations ;

Me Dominique MEYER a sollicité la confirmation de l'ordonnance entreprise ;

M. [V] [R], par l'intermédiaire de l'interprète, a eu la parole en dernier.

Sur ce,

- Sur la recevabilité de l'acte d'appel :

L'appel est recevable comme ayant été formé dans les formes et délai prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

-Sur l'irrecevabilité des pièces et écritures parvenues après expiration du délai d'appel

Le délai d'appel étant de 24 heures, toutes les pièces et écritures parvenues après expiration de ce délai soit après le 14 avril à 11h14 sont déclarées irrecevables.

Cette irrecevabilité ne s'étend pas à la jurisprudence produite qui est librement accessible.

Sur la validité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention au regard du défaut de motivation

L'appelant soutient qu'il n'a pas été répondu au moyen tiré de ce qu'il a été privé de communiquer avec toute personne de son choix durant sontransfert du CRA de [Localité 2] à l'aéroport d'[Localité 3] ni pendant le délai de son transfert de retour à [Localité 2] durant lequel il a été privé de l'exercice de ses droits.

Il relève qu'il n'a pas été davantage répondu au moyen tiré du défaut d'interprète à l'occasion de la notification de l'ordonnance rendue par la cour d'appel le 17 mars 2022, pour lire l'ordonnance à M [R] qui n'était pas en capacité de le faire.

Toutefois, le premier juge a suffisemment répondu au 1er moyen en retenant qu'aucun élément ne permettait de dire que M. [V] [R] n'avait pu continuer à exercer les droits sont il bénéficie en rétention durant son transfert à [Localité 3] jusqu'à son retout à 18 h 20 à [Localité 2].

Il a également répondu au moyen tiré de l'absence d'interprète lors de la remise de l'arrêt de la cour d'appel de Metz en date du 17 mars 2022 en se déclarant incompétent pour en connaître et en ajoutant surabondament qu'une interprète en langue arabe était présente lors du prononcé de la décision à 16 h 20 et que cette décision avait été notifiée par écrit à l'interessé à 18 h25.

M. [R] qui prétend encore que le premier juge n'aurait pas répondu au moyen tiré de l'irrégularité résultant du transfert anormalement long du trajet retour de l'aéroport d'[Localité 3] au CRA [Localité 2], n'a pas versé aux débats les conclusions de première instance permettant de vérifier quels moyens ont été soulevés devant le juge des libertés et de la détention en sorte que sa demande ne peut être prise en considération à ce titre.

L'ordonnance querellée qui répond au prescrit de l'article 455 du code de procédure civile est régulière.

Le moyen est en conséquence écarté.

Sur la régularité de la procédure

En application de l'article L 743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ' en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalité substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la main levée de la mesure de placement ou du maintien en rétention que lorsque elle ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.

- Sur l 'ineffectivité du droit de communiquer avec toute personne de son choix

Si aucune mention de la procédure ne permet de s'assurer que l'intéressé était bien en possession d'un téléphone, qu'il s'agisse du sien ou de celui d'un membre de l'escorte durant la journée du 15 mars 2022 où il a été conduit à l'aéroport d'[Localité 3] puis ramené au CRA de [Localité 2] suite à son refus d'embarquement,

il n'est pas davantage établi qu'il aurait été effectivement privé du droit de communiquer avec les tiers s'il en avait manifesté l'intention en sorte qu'aucun grief n'est établi.

Il n'y a pas davantage lieu de considérer que l'intéressé se serait vu priver de l'exercice de l'ensemble de ses droits pouvant être exercés au centre de rétention administrative pendant son transfert [Localité 2]-[Localité 3], aller et retour alors qu'il se trouvait nécessairement dans un fourgon d'escorte dans le cadre de la procédure d'éloignement et non au centre de rétention et que même si les raisons des longueurs apportées à l'exécution du trajet retour ne sont pas connues , M. [R] n 'est pas étranger à la

prétendue atteinte à ses droits ayant refusé l'embarquement et contraint l'escorte à le ramener au centre de rétention administrative de [Localité 2].

Le moyen est écarté.

-Sur le défaut d'alimentation de l'intéressé à midi

Il ressort du procès-verbal de transport que l'intéressé a pu s'alimenter entre 8h et 8h20 sans qu'aucune mention de l'heure d'alimentation durant la pause méridienne n'ait été mentionnée, avant d'être ramené au CRA le même jour à 18h20.

Il convient de rappeler qu'il n'existe aucune obligation pour l'escorte de mentionner l'heure des repas pris par l'étranger lors de son transfert à l'aéroport et plus spécialement lors du trajet de retour en centre de rétention si celui ci refuse l'embarquement sur un vol à destination de son pays d'origine.

En tout état de cause, si la première chambre civile de la cour de cassation a pu considérer que l'absence de proposition de repas pendant une garde à vue de 14h45 jusqu'à la levée de la mesure de coercition le lendemain à 9h30 entraînait une atteinte à la personne justifiant le refus de prolongation de la rétention , comme l'a relevé à juste titre le premier juge , le saut du repas de midi ne constitue pas en l'espèce une atteinte à la personne justifiant la levée d'une mesure de rétention administrative .

Le moyen est écarté et l'ordonnance confirmée de ce chef.

-Sur la tardiveté de l'avis au Procureur de la république de la levée de la mise à l'écart de l'intéressé et de son transfert intervenus le 15 mars 2022 .

Il est prétendu que l'effectivité de la levée de mise à l'écart de l'interessé et de son transfert le 15 mars 2022 n'a été portée à la connaissance du parquet que le 17 mars 2022 et non le jour même .

De première part, l'appelant ne vise pas le texte faisant ,selon elle, obligation au centre de rétention d'aviser le parquet d'une levée de mise à l'écart d'un étranger placé en rétention administrative.

En tout état de cause, le PV de levée de la mise à l'isolement pour raisons sanitaires de l'intéressé en vue de son éloignement, établi le 15 mars 2022 à 08 heures par M. [K] [Z], brigadier de police en fonction au CRA de [Localité 2] porte l'indication suivante précédant la signature de son rédacteur ' de même suite, mentionnons avoir avisé M. le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Metz.'

Il en résulte que le parquet a été avisé dès le 15 mars 2022 de la levée de la mise à l'isolement et de l'éloignement et que la transmission au procureur de la République de l'intégralité du procès-verbal effectuée postérieurement par mail du 17 mars n'est venu qu' en complément alors au demeurant qu'aucune disposition ne précise de quelle façon doit être délivrée l'information.

En tout état cause et de façon surabondante il est observé qu'il n'est pas démontré par l'intéressé une atteinte effective à ses droits et qu'en outre aucune atteinte au pouvoir de l'autorité judiciaire de se transporter sur les lieux de rétention , de vérifier les conditions de celle ci , de se faire communiquer le registre mentionnant l'état-civil des personnes maintenues ainsi que les conditions du maintien ne peut être utilement invoquée à l'occasion du départ sous escorte d'un retenu vers un aéroport en vue de son éloignement, la jurisprudence évoquée étant relative au transfert d'un retenu d'un centre de rétention vers un autre centre de rétention.

Le moyen est rejeté.

- Sur l'ineffectivité du droit de bénéficier de l'assistance d'un avocat depuis le début de la rétention et plus particulièrement depuis le 17 mars 2022

L'article L 744-4 invoqué au soutien du moyen dispose que l'étranger placé en rétention est informé dans les meilleurs délais qu'il bénéficie dans les lieux de rétention du droit de demander l'assistance d'un conseil.

M. [R] n'explique pas en son acte d'appel qui saisit la cour pour qu'elles raisons il considère ne pas avoir été en mesure de bénéficier de l'assistance d'un avocat.

En tout état de cause , le moyen est irrecevable en application de l'article L 743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'irrégularité prétendue étant antérieure à la précédente audience au cours de laquelle le juge de la liberté et de la détention a prolongé la mesure de rétention administrative de M. [R].

-Sur le défaut d'interprète et le défaut de lecture de l'ordonnance rendue par la cour d'appel de Metz le 17 mars 2022

L'appelant expose avoir été présenté à la cour d'appel le 17 mars 2022 par visio conférence assisté d'un interprète et soutient qu'aucune mention n'a été portée à l'arrêt de nature à faire connaître si lecture lui a été donnée des motifs et du sens de la décision en question.

C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge retenant que les irrégularités ayant le cas échéant affecté la procédure précedemment tenue devant la cour d'appelde Metz ne pouvaient être dénoncées que par la voie d'un recours contre cette décision soit par la voie d' un recours en cassation, s'est déclaré incompétent .

La décision est confirmée de ce chef.

 -Sur le changement de langue en cours de procédure

Il résulte du procès-verbal d'audition de M. [R] établi en date du 4 février 2022 au cours de la procédure de retenue aux fins de vérification du droit au séjour que celui ci s'est exprimé en français sans être assisté d'un interprètre lors de ses réponses aux questions posées et a déclaré comprendre le français, et le lire .

La notification de ses droits lui a été faite au centre de rétention administrative le 14 mars 2022 en langue française qu'il a déclaré comprendre.

Le 4 avril 2022 l'intéressé à refusé le test PCR nécessaire à son éloignement indiquant en langue française que sa femme était enceinte et qu'il disposait d'une situation professionnelle sur le territoire français.

Si M. [R] a bénéficié à sa demande des services d'un interprète lors de sa comparution devant les diférentes juridictions, il n'en résulte pas pour autant que l'autorité administrative ait manqué à ses obligations alors que l'interéssé s'est présenté devant elle comme comprenant et parlant la langue française et s'est abstenu de solliciter l'assistance d'un interprète.

Le moyen est rejeté .

- Sur la prolongation de la rétention :

À l'appui de son appel M. [V] [R] invoque l'insuffisance des diligences de l'administration en violation des dispositions de l'article L 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Aux termes de l'article L. 742-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu'à l'article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :

1° En cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public ;

2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;

3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement ;

b) de l'absence de moyens de transport.

L'étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l'article L. 742-2.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours.

Selon l'article L. 741-3 du même code, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet.

 

La cour considère que c'est par une analyse particulièrement circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents qu'il convient d'adopter que le premier juge, retenant que M. [R] avait fait obstacle à plusieurs reprises aux tentatives d'éloignement mises en oeuvre et se trouvait ainsi particulièrement mal fondé à invoquer un défaut de diligences de l'administration a statué sur le moyen de fond soulevé devant lui et repris à hauteur d'appel en le rejetant .

L'appel est en consiération de l'ensemble de ce qui pécède rejeté.

L'ordonnance entreprise st confirmée .

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,

DÉCLARONS recevable l'appel de M. [V] [R]

DECLARONS irrecevables les pièces et écritures déposées après le délai d'appel à l'exception de la jurisprudence fournie.

REJETONS la demande tendant à ce qu'il soit constaté l'irrégularité pour absence de motivation de l'ordonnance rendue par le juge de la liberté et de la détention de Metz le 13 avril 2022

CONFIRMONS l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de Metz le 13 avril 2022 à 11h14 ;

ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance

DISONS n'y avoir lieu à dépens ;

Prononcée publiquement à Metz, le 14 Avril 2022 à 16h00

Le greffier, Le président de chambre,

N° RG 22/00218 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FWZW

M. [V] [R] contre M. LE PREFET DU DOUBS

Ordonnance notifiée le 14 Avril 2022 par email, par le greffe des rétentions administratives de la cour d'appel à :

- M. [V] [R] et son conseil

- M. LE PREFET DU DOUBS et son représentant

- Au centre de rétention administrative de [Localité 2]

- Au juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Metz

- Au procureur général de la cour d'appel de Metz


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Rétention administrative
Numéro d'arrêt : 22/00218
Date de la décision : 16/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-16;22.00218 ?
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