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14/06/2017 | FRANCE | N°16/01403

France | France, Cour d'appel de metz, Chambre sociale-section 1, 14 juin 2017, 16/01403


Arrêt no 17/ 00296

14 Juin 2017
-----------------------
RG No 16/ 01403
---------------------------
Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ
07 Avril 2016
F 13/ 00731
--------------------------- RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ
Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU
quatorze Juin deux mille dix sept
APPELANTE :
SAS SOLOTRAMO, prise en la personne de son représentant légal
Rue Henri de Bonnegarde
57280 MAIZIERES LES METZ

Représentée par Me Patricia AUBRY, avocat au barreau de

METZ

INTIMÉ :

Monsieur Roland X...
...
...

Représenté par Me Bernard PETIT, avocat au barreau de METZ substitué par Me...

Arrêt no 17/ 00296

14 Juin 2017
-----------------------
RG No 16/ 01403
---------------------------
Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ
07 Avril 2016
F 13/ 00731
--------------------------- RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ
Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU
quatorze Juin deux mille dix sept
APPELANTE :
SAS SOLOTRAMO, prise en la personne de son représentant légal
Rue Henri de Bonnegarde
57280 MAIZIERES LES METZ

Représentée par Me Patricia AUBRY, avocat au barreau de METZ

INTIMÉ :

Monsieur Roland X...
...
...

Représenté par Me Bernard PETIT, avocat au barreau de METZ substitué par Me BOUAZIZ, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Avril 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Renée-Michèle OTT, Présidente de Chambre, chargé d'instruire l'affaire, en présence de Monsieur Jacques LAFOSSE, Conseiller
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Renée-Michèle OTT, Président de Chambre,
Monsieur Olivier BEAUDIER, Conseiller
Monsieur Jacques LAFOSSE, Conseiller

Greffier, lors des débats : Monsieur Ralph TSENG

ARRÊT :

Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après prorogation, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Madame Renée-Michèle OTT, Présidente de Chambre, et par Monsieur Ralph TSENG, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du conseil des prud'hommes de Metz en date du 7 avril 2016 ;

Vu la déclaration d'appel de la société Solotramo en date du 4 mai 2016 ;
Vu les conclusions de la société Solotramo en date du 23 décembre 2016 et déposées le 28 décembre 2016 ;
Vu les conclusions de M. Roland X... en date du 13 mars 2017 et déposées le 14 mars 2017 ;

EXPOSE DU LITIGE

M. Roland X... a été engagé par la société Solotramo le 20 juin 1983. Il a occupé un poste d'affréteur chauffeur poids lourds, statut ouvrier, classification GPE 6- 138M au coefficient 100, selon la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport en date du 21 décembre 1950.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 31 janvier 2013, la société Solotramo a convoqué M. Roland X... à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement pour motif économique.
Le 12 février 2013, M. Roland X... a accepté un contrat de sécurisation professionnelle, fixant la rupture du contrat de travail à l'expiration d'un délai de réflexion de 21 jours, soit le 4 mars 2013.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 27 février 2013, la société Solotramo a confirmé la rupture du contrat de travail du salarié, consécutive à la suppression de son poste d'affréteur chauffeur poids lourds.
Le 9 juillet 2013, M. Roland X... a saisi le conseil des prud'hommes de Metz de plusieurs demandes de rappels de salaire formés au titre des heures supplémentaires (effectuées au bureau et « conduite hors bureau »), ainsi que des repos compensateurs. Il demande également de dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et de condamner l'employeur à lui payer la somme de 31 598, 10 €, à titre de dommages-intérêts. A titre subsidiaire, il demande de dire que la société Solotramo n'a pas respecté les critères de licenciement et de la condamner à lui verser la même somme en réparation de son préjudice.
Suivant jugement en date du 7 avril 2016, le conseil des prud'hommes de Metz a
-dit le licenciement de M. Roland X... sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Solotramo à payer à M. Roland X... la somme de 25 000 €, à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, majorée des intérêts au taux légal, à compter du présent jugement,

- condamné la société Solotramo à payer à M. Roland X... la somme de 2 042, 39 € brut, au titre des heures supplémentaires effectuées au bureau et « en conduite hors bureau », outre celle de 204, 24 € brut, au titre des congés payés y afférents, majorées des intérêts au taux légal à compter du 14 juin 2013,

- Rejeté la demande de M. Roland X... au titre du rappel de salaire relatif aux repos compensateurs et aux congés payés y afférents,
- condamné la société Solotramo à payer à M. Roland X... la somme de 1 500 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- Débouté la société Solotramo de sa demande formée au titre de l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Solotramo aux dépens,
Par conclusions sus-visées et reprises à l'audience, la société Solotramo demande d'infirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté la demande formée par le salarié au titre des repos compensateurs. Elle demande de dire que le licenciement de M. Roland X... repose sur une cause réelle et sérieuse et de débouter ce dernier de toutes ses demandes. Elle demande qu'il soit néanmoins donné acte qu'elle reconnaît devoir au salarié une somme de 968, 73 € brut, au titre des heures de conduite, ainsi que celle de 96, 87 € brut, au titre des congés payés y afférents. Elle sollicite enfin la condamnation de M. Roland X... à lui payer la somme de 2 500 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Par conclusions sus-visées et reprises à l'audience, M. Roland X... demande de confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a déclaré son licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner la société Solotramo à lui régler la somme de 2042, 39 € brut, celle de 204, 24 € brut au titre des congés payés y afférents, celle de 1 500 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile. Il demande de l'infirmer pour le surplus et de condamner la société Solotramo à lui payer les sommes suivantes :
-4 084, 04 € brut, au titre des heures supplémentaires effectuées au bureau,
-408, 40 € brut, au titre des congés payés y afférents,
-15 169, 23 € brut, à titre de rappel de salaire relatif aux repos compensateurs,
-1 516, 92 € brut, au titre des congés payés y afférents,
-1 500 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Monsieur Roland X... demande de condamner la société Solotramo à lui payer la somme de 31 598, 10 €, à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et subsidiairement de condamner l'employeur au paiement de la même somme, à titre de dommages-intérêts en raison du non-respect des critères de l'ordre des licenciements.
Pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions des parties, la cour renvoie expressément à leurs conclusions ci-dessus visées.

MOTIFS :

Sur les heures supplémentaires

Attendu qu'en application de l'article 3245-1 du code du travail, issu de la loi du 17 juin 2008, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour ou celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat ;

Qu'en l'espèce, M. Roland X... soutient que la prescription relative au rappel de salaire, sollicité au titre des heures supplémentaires, doit être décomptée à partir du 14 juin 2013, date à laquelle il a mis en demeure par écrit son employeur de lui régler celles-ci, et non à compter de la date à laquelle il a saisi le conseil des prud'hommes de Metz (9 juillet 2013) ;
Attendu que suivant lettre recommandée avec accusé de réception en date du 14 juin 2013, M. Roland X... a effectivement mis en demeure la société Solotramo de lui régler la somme de 25 000 €, à titre d'« indemnité compensatrice » des heures supplémentaires, qu'il prétend avoir effectuées du 20 juin 1983 au 4 mars 2013, date de la rupture de son contrat de travail ;
Que conformément aux articles 2240 et suivants du code civil, contrairement à ce qui a été retenu par les premiers juges, l'action en paiement des salaires n'est toutefois pas interrompue par l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception par le salarié valant mise en demeure ;
Qu'ainsi, la demande en justice de M. Roland X... en date du 9 juillet 2013 ne pouvant porter que sur les sommes dues au titre des trois dernières années précédant la rupture de son contrat de travail (4 mars 2013), sa demande de rappel de salaire, concernant la période antérieure au 4 mars 2010, est prescrite ;
Attendu qu'aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ;
Que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;
Que si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ;
Attendu que M. Roland X... soutient qu'en sa qualité d'affréteur depuis le mois de mai 2005, il était présent au bureau de l'entreprise, du lundi au vendredi de 8 heures à 12 heures, puis de 14 heures à 18 heures, de sorte qu'il a exécuté de manière continue depuis cette date 40 heures de travail par semaine, alors qu'il n'a été rémunéré que 39 heures par semaine, ce qui résulte de la lecture de ses bulletins de paie ;
Qu'au titre de son activité de chauffeur-poids lourds (conduite de camions et porte-engins), le salarié prétend également avoir accompli, sur une période allant du 4 janvier 2008 au 14 novembre 2012, 98, 51 heures de travail supplémentaires, dont il sollicite le paiement sur la base d'un taux horaire de 20, 66 € de l'heure, soit 2 042, 39 € ;
Attendu que s'agissant des heures supplémentaires effectuées au bureau, M. Roland X... ne verse aucun élément qui soit susceptible d'étayer ses affirmations suivant lesquelles il effectuait systématiquement une heure supplémentaire par semaine, étant observé que les trois témoignages de ses collègues et la copie de quelques disques chronotachygraphes ne concernent que les heures supplémentaires qu'il prétend avoir exécutées dans le cadre de son activité de chauffeur poids-lourds, et non d'affréteur ;
Qu'également, les éléments fournis par M. Roland X... sont insusceptibles d'étayer sa demande, dès lors qu'il prétend avoir effectué, d'abord en tant qu'affréteur, 40 heures de travail par semaine au bureau, auxquelles il ajoute ensuite sur la même période des heures supplémentaires accomplies au titre de son activité de chauffeur-poids lourds, correspondant à des dépassements de temps de conduite ;
Qu'au surplus, le salarié ne conteste pas les affirmations de la société Solotramo, confirmées en l'espèce par la copie d'un affichage dans les locaux de l'entreprise des heures d'ouverture et de fermeture, que les bureaux de la société fermaient tous les vendredis à 17 heures (et non à 18 heures), ne fournissant sur ce point aucune explication ;
Que M. Roland X... sera par conséquent débouté de sa demande formée au titre des heures supplémentaires qu'il prétend avoir accomplies dans le cadre de son activité d'affréteur pour la période non-prescrite allant du 4 mars 2010 au 4 mars 2013, date de la rupture de son contrat de travail ;
Attendu qu'il convient par ailleurs de rappeler que la demande formée par M. Roland X... au titre des heures supplémentaires accomplies depuis le 4 janvier 2008 jusqu'au 4 mars 2010 est prescrite en application de l'article 3245-1 du code du travail ;
Que s'agissant des heures supplémentaires alléguées au titre de son activité de chauffeur poids-lourds, postérieurement au 4 mars 2010, M. Roland X... verse aux débats les attestations de trois de ses collègues de travail, ainsi que quelques disques chronotachygraphes, et affirme qu'il effectuait régulièrement des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été payées ;
Qu'ainsi, M. Brahim Y..., routier, certifie dans son attestation que le salarié « venait le charger dès 5 heures 30 du matin sur le site de Haganis (SIVOM) de Metz à l'aide d'un chargeur sur pneus ou à l'aide d'une pelle hydraulique », afin de récupérer de la boue primaire destinée à alimenter différents sites de revalorisation ;
Que M. François Z..., technicien d'exploitation, affirme quant à lui que M. Roland X... « intervenait régulièrement sur le site d'Haganis pour charger et transporter les boues de la station d'épuration vers les différentes filières de revalorisation, et ceci de 7 heures du matin à 17 heures » ;

Que M. Daniel A..., conducteur poids-lourds, déclare enfin que le salarié « a bien pris en charge le chargement, le transport, ainsi que le stockage des boues sur le site d'Haganis dans le cadre de ses activités professionnelles pour le compte de la société Solotramo agencée à Maizières-Les-Metz, et ce quotidiennement à partir de 7 heures du matin durant plusieurs années » ;

Que ces trois attestations ne concernent qu'un seul chantier sur lequel M. Roland X... a été un temps affecté et ne comportent de surcroît aucune précision sur les horaires effectivement réalisés par ces derniers, étant ainsi insusceptibles d'étayer sa demande d'heures supplémentaires au titre de son activité de chauffeur poids-lourds ;
Attendu que les quelques disques chronotachygraphes sont insusceptibles également d'étayer la demande formée par M. Roland X..., au titre des heures supplémentaires, dans la mesure où ces derniers sont inexploitables ;
Qu'ils ne permettent pas en effet à la Cour d'établir l'existence des dépassements allégués par le salarié, en particulier s'agissant des journées des 17 juillet 2008, 22 juillet 2010, 3 avril 2012, 5 avril 2012, 13 novembre 2012 et 14 novembre 2012 qui sont citées en exemples ;
Qu'au surplus, force est de constater que selon le décompte joint à la demande, le salarié sollicite le paiement d'heures supplémentaires pour une période allant du 4 janvier 2008 au 15 juillet 2008, alors que les disques chronotachygraphes communiqués concernent une période postérieure, étant en effet datés pour le premier à compter du 17 juillet 2008 ;
Qu'à l'appui de ces documents, il convient de considérer que M. Roland X... étaye néanmoins sa demande pour les seuls dépassements postérieurs au 4 mars 2010 qui sont reconnus expressément par son employeur, soit en l'espèce 40, 31 heures, pour lesquelles il ne s'oppose pas au paiement ;
Attendu qu'à l'examen de trois rapports d'activités, couvrant une période complète allant du 1er janvier 2010 au 4 mars 2014, la société Solotramo reconnaît de plus d'autres dépassements qui sont générateurs d'heures supplémentaires, soit respectivement 5 heures 18 en 2010 et 1 heure 39 en 2011, pour un total de 6, 57 heures ;
Qu'au vu de ces éléments, la société Solotramo sera condamnée à payer à M. Roland X... la somme de 968, 73 € brut, au titre des 46, 88 heures supplémentaires réalisées à compter du 4 mars 2010 jusqu'à la date de la rupture du contrat de travail, outre celle de 96, 87 € brut, correspondant aux congés payés y afférents ;

Sur les repos compensateurs

Attendu que conformément à l'article L. 3121-11 alinéa 1er du code du travail, des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel défini par une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche ;
Qu'en application de l'article 5 1o du décret no 83-40 du 26 janvier 1983 relatif aux modalités d'application des dispositions du code du travail concernant la durée du travail dans les entreprises de transport routiers de marchandises, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles ;
Que la durée du travail effectif ci-dessus mentionnée est égale à l'amplitude de la journée de travail, définie au paragraphe 1 de l'article 6 (soit 52 heures de service maximale hebdomadaire sur une semaine isolée pour le personnel roulant, à l'exception des conducteurs de messagerie et des convoyeurs de fonds), diminuée de la durée totale des coupures et du temps consacré aux repas, à l'habillage, et au casse-croûte ;
Que l'article 5 3o du décret no 83-40 du 26 janvier 1983 précise ainsi que la durée de service des personnels roulants marchandises, à l'exception des conducteurs de messagerie et des convoyeurs de fond, est fixée à 39 heures par semaine, soit 507 heures par trimestre dans les conditions prévues au paragraphe 3 de l'article 4 du présent décret (soit jusqu'à la 39ème heure par semaine ou la 169ème heure par mois) ;
Que les heures supplémentaires accomplies au-delà de la 39ème ouvrent droit pour les personnels roulants à un repos compensateur trimestriel obligatoire dont la durée est égale à une journée à partir de la 41ème heure et jusqu'à la 79ème heure supplémentaire effectuée par trimestre, une journée et demi à partir de la 80ème heure et jusqu'à la 108ème heure supplémentaire effectuée par trimestre, et enfin deux journées et demie au-delà de la 108ème heure effectuée par trimestre ;
Attendu que M. M. Roland X... sollicite en l'espèce la condamnation de la société Solotramo à la contrepartie obligatoire en repos au titre des heures supplémentaires réalisées au bureau de l'entreprise, à son activité d'affréteur, qui lui ont été payées par son employeur entre la 36ème heure et la 39ème heure hebdomadaire ;
Qu'il s'évince cependant des dispositions rappelées ci-dessus que les heures de travail effectuées au-delà de la 35ème heure et jusqu'à la 39ème heure sont certes rémunérées comme des heures supplémentaires, mais n'ouvrent pas droit aux repos compensateurs ou récupérateurs ;
Qu'il convient par conséquent de confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande formée au titre des repos compensateur, ainsi que celle correspondant aux congés payés y afférents, après avoir considéré que ce dernier ne rapportait pas la preuve qu'il aurait dépassé le seuil de déclenchement fixé à 507 heures par trimestre ;
Sur la rupture du contrat de travail

Attendu que lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle, l'employeur doit en énoncer le motif économique ainsi que la mention du bénéfice de la priorité de réembauche soit dans le document écrit d'information sur ce dispositif remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail, soit encore, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié du contrat de sécurisation professionnelle, dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation ;

Qu'en l'espèce, à l'issue de l'entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement pour motif économique, M. Roland X... a accepté, 12 février 2013, un contrat de sécurisation professionnelle ;

Que la convocation à l'entretien préalable qui a été adressée à M. Roland X... énonce le motif économique de la suppression de son poste, en sa qualité d'affréteur chauffeur poids lourds, étant en effet ainsi rédigée : « Nous vous informons que nous sommes amenés à envisager à votre égard une mesure de licenciement pour motif économique. En effet, nos difficultés économiques récurrentes nous contraignent à la cessation de notre activité de transport au sein de la société SOLOTRAMO. Au 30 septembre 2012, nos pertes ont encore augmenté et s'élèvent à 190 000 € (dont 145 000 € liées à la seule partie transport). Les perspectives à venir ne sont pas bonnes du tout : au-delà des baisses de volume, les prix que nous serions tenus de pratiquer pour rester compétitifs ne nous permettent même pas de couvrir nos charges. Le marché du transport se porte au plus mal, notre chiffre d'affaires a considérablement chuté et malheureusement ces difficultés ne sont pas passagères, elles risquent de s'accentuer encore. Nous sommes contraints de procéder à une réorganisation nécessaire pour sauvegarder la compétitivité de la société gravement menacée. Si nous ne prenons aucune mesure, les autres emplois de la société seront en péril et menacés. C'est la raison pour laquelle nous sommes contraints d'envisager la suppression du poste d'affréteur-chauffeur poids lourds. Malgré nos recherches, il n'existe hélas aucune solution de reclassement » ;
Attendu que la réorganisation nécessaire de l'entreprise constitue un motif économique que si elle est effectuée en vue de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, étant indiqué que cette réorganisation peut néanmoins s'accompagner de difficultés économiques actuelles qui seraient invoquées par l'employeur dans la lettre de licenciement ;
Que la convocation du salarié à l'entretien préalable précise en l'espèce que le licenciement de M. Roland X... est motivé par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, compte tenu du caractère déficitaire de l'activité de transport, laquelle faisait peser selon l'employeur une menace sérieuse sur la compétitivité de la société toute entière, assurant concurremment une activité de travaux publics ;
Que contrairement à ce que soutient M. Roland X..., il résulte des termes de cette convocation que la réorganisation de l'entreprise, consistant en la suppression complète de son activité de transport, est motivée par la menace que fait peser cette activité largement déficitaire sur son activité de travaux publics, dont les difficultés économiques seraient moindres au vu des pertes énoncées ;
Attendu qu'il résulte en effet du bilan pour l'exercice 2012 que le chiffre d'affaires de la société Solotramo reste en effet positif, même s'il enregistre une baisse de 278 419, 61 €, passant en effet de 2 164 2016, 67 € au 30 septembre 2012, alors qu'il était de 2 442 636, 28 € l'année précédente ;
Que toutefois, comme il est indiqué dans la convocation en date du 31 janvier 2013, la société Solotramo relève à juste titre que ses pertes annuelles pour sa seule activité de transport s'élèvent à 145 604 € en 2012, sur un total de 190 815, 51 €, ce qui permet d'établir que le maintien de cette activité déficitaire constitue à terme une menace pour la compétitivité de l'entreprise prise dans sa globalité ;

Attendu que M. Roland X... ne conteste pas à cet égard la gravité et l'importance des pertes de l'activité transport de la société Solotramo qui l'employait, de sorte que la suppression de celle-ci qui a été décidée dans le cadre d'une réorganisation de l'entreprise apparaît effectivement justifiée par la nécessité de sauvegarder de sa compétitivité, dans le secteur économique très concurrentiel des travaux publics ;

Qu'il convient en conséquence de considérer que le licenciement du salarié, relevant de l'activité transport repose sur un motif économique, lequel est justifié par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, en procédant à la suppression de l'activité de transport dont l'importance des pertes est établie par l'employeur ;
Attendu que selon l'article L. 1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploid'une catégorie inférieure ;
Que le manquement par l'employeur à son obligation de reclassement préalable au licenciement prive celui-ci de cause réelle et sérieuse et ouvre droit au profit du salarié au paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que conformément à son registre du personnel, la société Solotramo ne conteste pas qu'elle a engagé postérieurement à la rupture du contrat de travail deux conducteurs d'engins, à savoir M. Noël B...le 3 juin 2013, puis M. Nicolas C...le 1er juillet 2013 ;
Que la société Solotramo estime cependant que le reclassement de M. Roland X... sur l'un de ces deux postes n'était pas possible, dans la mesure où elle justifie, par la production de plusieurs attestations d'autres salariés, que l'intéressé n'a jamais été affecté durant sa carrière à la conduite d'engins de chantier, et qu'en tout état de cause il n'est pas titulaire d'un Certificat d'Aptitude à la Conduite en Sécurité d'Engins de Chantier (CACES) ;
Qu'afin de satisfaire à son obligation de reclassement, l'employeur relève qu'il n'avait pas l'obligation d'assurer la formation initiale du salarié à la conduite d'engins, dont il justifie par ailleurs de l'importance de la durée et du coût, en produisant deux devis s'élevant respectivement à 13 545 € pour l'un et 43 272 € pour l'autre ;
Attendu que contrairement aux affirmations de l'employeur, M. Roland X... rapporte toutefois la preuve qu'il est bien titulaire d'un Certificat d'Aptitude à la Conduite en Sécurité d'Engins de Chantier (R 372m), valide jusqu'au 23 janvier 2014, lui permettant d'utiliser tous les engins de chantier, à l'exception des grues à tour, des grues mobiles, des grues auxiliaires, des plates-formes élévatrices mobiles de personnes, et des chariots automoteurs de manutention à conducteur porté, ne relevant pas de la catégorie 9 de l'annexe 1 de l'instruction établie par la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés ;
Que dès lors, la société Solotramo ne démontre qu'elle ne pouvait assurer le reclassement du salarié sur l'un des deux postes de conducteurs d'engins qui ont été recrutés peu de temps après la rupture du contrat de travail de l'intéressé (4 mars 2013), alors que celui-ci, conducteur poids-lourds, possède également un CACES lui permettant d'effectuer des travaux de terrassement et de nivellement, au moyen de l'utilisation d'engins de chantiers ;
Que faute pour l'employeur de justifier du respect de son obligation de reclassement sur un poste de conducteur d'engins de chantier, relevant de l'unique activité de travaux publics conservée, le licenciement de M. Roland X... est sans cause réelle et sérieuse ;

Sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Attendu que M. Roland X... ayant acquis à la date de la rupture de son contrat de travail une ancienneté supérieure à deux ans au sein de la société Solotramo, dont il n'est pas allégué qu'elle emploierait moins de onze salariés, cette rupture du contrat de travail doit donner lieu à l'indemnisation prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois ;

Qu'en l'espèce, M. Roland X..., âgé de 54 ans au jour de la rupture de son contrat de travail, justifie de plus de 29 années d'ancienneté au sein de la société Solotramo où il percevait en dernier un salaire brut d'un montant de 3 510, 90 € par mois ;
Qu'il ne verse cependant aux débats aucun élément sur sa situation professionnelle et financière postérieurement à la rupture de son contrat de travail, et ne fournit même sur ce point à la Cour aucune information ;
Qu'au vu de ces observations, il convient de confirmer le jugement du conseil des prud'hommes de Metz en date du 3 mai 2016, en ce qu'il a condamné la société Solotramo à payer à M. Roland X... la somme de 25 000 €, à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Sur les dépens et les frais irrépétibles

Attendu que la société Solotramo sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et déboutée de ses demandes formées au titre des frais irrépétibles de procédure ;

Que la société Solatramo sera également condamnée à payer à M. Roland X... la somme de 1 000 €, au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement de M. Roland X... est sans cause réelle et sérieuse, condamné la société Solotramo à lui payer la somme de 25 000 €, à titre de dommages-intérêts, celle de 1 500 € au titre des frais irrépétibles de procédure, débouté M. Roland X... de sa demande formée au titre des repos compensateurs et des congés payés y afférents et la société Solotramo de sa demande formée au titre de l'application de l'article 700 du code de procédure civile, et statué sur les dépens ;

- L'infirme pour le surplus ;

Statuant sur les chefs infirmés et ajoutant :

- Condamne la société Solotramo à payer à M. Roland X... les sommes suivantes :
-968, 73 € brut, à titre de rappel de salaire correspondant aux heures supplémentaires,
-96, 87 € brut, au titre des congés payés afférents à ce rappel de salaire,

- Déboute la société Solotramo de sa demande formée au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en cause d'appel ;
- Condamne la société Solotramo aux dépens d'appel.
Le Greffier, La Présidente de Chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de metz
Formation : Chambre sociale-section 1
Numéro d'arrêt : 16/01403
Date de la décision : 14/06/2017
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.metz;arret;2017-06-14;16.01403 ?
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