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17/12/2014 | FRANCE | N°13/00573

France | France, Cour d'appel de metz, Chambre sociale, 17 décembre 2014, 13/00573


Arrêt no 14/ 00667

17 Décembre 2014--------------- RG No 13/ 00573------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 22 Janvier 2013 11/ 0856 C------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU

dix sept Décembre deux mille quatorze
APPELANTE :
Madame Emmanuelle X...... 55160 MAIZERAY

Représentée par Me GOBERT, avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

SAS MALHERBE EST prise en la personne de son représentant légal Zone Eurotransis 1- GAROLOR Rue

Le Douanier Dousseau 57365 ENNERY

Représentée par Me MORICE, avocat au barreau de CAEN substitué par Me S...

Arrêt no 14/ 00667

17 Décembre 2014--------------- RG No 13/ 00573------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 22 Janvier 2013 11/ 0856 C------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU

dix sept Décembre deux mille quatorze
APPELANTE :
Madame Emmanuelle X...... 55160 MAIZERAY

Représentée par Me GOBERT, avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

SAS MALHERBE EST prise en la personne de son représentant légal Zone Eurotransis 1- GAROLOR Rue Le Douanier Dousseau 57365 ENNERY

Représentée par Me MORICE, avocat au barreau de CAEN substitué par Me SOUSA, avocat au barreau de METZ
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Novembre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre Madame Marie-José BOU, Conseiller Monsieur Alain BURKIC, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Morgane PETELICKI, Greffier
ARRÊT :
contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre, et par Mademoiselle Morgane PETELICKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Metz le 22 janvier 2013 ;
Vu la déclaration d'appel de Mme Emmanuelle X...enregistrée au greffe de la cour d'appel le 18 février 2013 ;
Vu les conclusions de Mme X...datées du 22 juillet 2014 et déposées le 23 juillet 2014 ;
Vu les conclusions de la société MALHERBE EST datées du 29 septembre 2014 et déposées le 2 octobre 2014 ;
* * * * *
EXPOSE DU LITIGE
Par contrat de travail du 16 février 2007, la société TLJ, dont l'activité était le transport routier, a engagé Mme X...comme " exploitante affrètement ", pour une durée d'un an à compter du 16 février 2007.
Le 19 juillet 2007, le nom de la société TLJ a été remplacé par la dénomination ML SOLUTIONS.
Par lettre du 20 juillet 2007 remise à l'employeur, Mme X...a démissionné.

Saisi par Mme X...qui contestait sa démission et demandait la condamnation de la société ML SOLUTIONS au paiement de diverses indemnités et au remboursement de frais, le conseil de prud'hommes de Metz, par le jugement susvisé, déboute Mme X...de ses demandes.

Par ses conclusions susvisées reprises oralement à l'audience des plaidoiries, Mme X...demande à la cour d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Metz, de condamner la société MALHERBE EST, nouvelle dénomination de la société ML SOLUTIONS, à lui payer les sommes de 20 995 ¿ à titre de dommages-intérêts pour rupture sans cause réelle et sérieuse, de 30 000 ¿ à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral, de 3786 ¿ brut à titre d'indemnité de fin de contrat, avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2007, subsidiairement de requalifier le contrat de travail en un contrat du travail à durée indéterminée et de condamner la société MALHERBE EST à lui payer les sommes de 3230 ¿ à titre d'indemnité de requalification, avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2007, de 3230 ¿ brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2007, de 20 995 ¿ à titre de dommages-intérêts pour rupture sans cause réelle et sérieuse et de 30 000 ¿ à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant du harcèlement, et dans tous les cas de condamner la société MALHERBE EST au paiement des sommes de 1701, 97 ¿ brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2007, de 2275 ¿ en remboursement des frais de formation, avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2007 et de 3500 ¿ au titre des frais irrépétibles.
Par ses conclusions susvisées reprises oralement à l'audience des plaidoiries, la société MALHERBE EST, dénomination substituée à ML SOLUTIONS, sollicite la confirmation du jugement entrepris, invoque la prescription pour ce qui concerne la demande de requalification du contrat de travail, demande à la cour de débouter Mme X...de ses demandes et demande la condamnation de cette dernière au paiement de la somme de 2500 ¿ au titre des frais irrépétibles.
Pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions des parties, la cour renvoie expressément à leurs conclusions ci-dessus visées.

DISCUSSION

sur la demande indemnitaire relative au harcèlement moral

Aux termes de l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Il résulte de l'article L 1154-1 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'application de l'article précité, le salarié doit établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et, au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Au soutien de sa demande relative au harcèlement moral, Mme X...se réfère aux indications de fait qu'elle avait données en première instance et selon lesquelles d'une part, elle était régulièrement agressée verbalement par M Didier E... , exploitant de poste, qui lui imputait chaque problème rencontré, et par M Marc B..., président de la société TLJ, qui la pressait de quitter la société et lui transmettait les pressions de la direction de la société mère et, d'autre part, elle s'est retrouvée totalement isolée, les autres salariés ayant reçu l'ordre de ne lui donner aucune information nécessaire à la bonne exécution du contrat de travail et elle était confinée dans un bungalow situé au fond d'un dépôt et cantonnée à la lecture des disques des véhicules et au règlement des problèmes de toute nature.
Mme X...produit plusieurs attestations.
Dans deux attestations des 22 juin 2011 et 6 avril 2012, Mme Christiane C..., ancienne employée de la société MALHERBE EST, indique que " Mme X...Emmanuelle et moi-même n'étions pas dans un bureau, mais dans un bungalow situé au fond du dépôt, et derrière les 2 bureaux des autres employés. Mme X...Emmanuelle n'était pas affectée au service affrètement, mais devait s'occuper uniquement de la lecture des disques des chauffeurs (manuellement puisque le lecteur de disques ne fonctionnait plus), le travail était difficilement supportable sous ces conditions puisque j'avais reçu des directives de ne point communiquer avec Mme X..." et que " A plusieurs reprises, au bureau d'Ennery, j'ai entendu Mr D...faire des réflexions du genre si tu n'es pas contente, tu n'as qu'à partir Il s'adressait à Mme X...Emmanuelle (...) Un jour Mme X...s'est accrochée verbalement avec Didier E...... "

M Eric F..., ancien chauffeur de la société MALHERBE EST, affirme quant à lui dans une attestation du 23 juin 2011que " après la reprise de la société Malherbe et après le déménagement sur Ennery, (il a) pu constater qu'Emmanuelle X...n'occupait pas le poste d'affréteur mais était reléguée dans un bungalow au fond du dépôt et ne faisait que lire les disques des chauffeurs et devait régler les problèmes de tous genres ".

Mme X...produit également un certificat médical du 23 octobre 2007 précisant qu'elle présentait le 23 juin 2007 un état dépressif réactionnel à des difficultés professionnelles.
Si les agressions verbales évoquées par Mme X...ne sont pas établies, l'attestation de Mme C...étant imprécise sur ce point, tant sur la nature et l'intensité de la discussion qui a opposé Mme X...à M E...que sur le contexte qui amenait M B...à tenir les propos qui lui sont prêtés, la médiocrité des conditions matérielles de travail de Mme X...ainsi que son déclassement et sa mise à l'écart sont prouvés. En effet, Mme C...confirme que Mme X...et elle étaient installées dans des installations provisoires à l'arrière du site de l'entreprise et que des instructions de l'employeur avaient été données à Mme C...pour qu'elle évite toute communication avec Mme X..., plaçant cette dernière dans une situation d'isolement. Par ailleurs, Mme C...et M F...attestent que Mme C...était principalement occupée au traitement des disques chronotachygraphes des véhicules de l'entreprise. Or, il ressort du contrat de travail de Mme X...que celle-ci était embauchée pour exercer les fonctions d'affréteur et d'autre part, le protocole du 16 février 2007 réglant la cession par Mme X...et M Laurent G...à M B...et à la société MALHERBE TRANSPORTS des actions constituant le capital de la société TLJ contient une clause selon laquelle les cessionnaires s'engagent à embaucher Mme X..." au titre d'un contrat à durée déterminée d'une année afin de faciliter le maintien de la clientèle en qualité d'affréteuse ", étant précisé que Mme X...avait obtenu en décembre 2006 le certificat de capacité professionnelle au transport national et international par route de marchandises. Les tâches effectivement confiées à Mme X...selon les témoins ne correspondaient ni à la qualification ni surtout au contenu du poste pour lequel elle avait été engagée. Le fait que les attestations de Mme C...et de M F...aient été rédigées plusieurs années après les faits rapportés est sans conséquence dès lors que les témoignages sont suffisamment précis.
Considérés dans leur ensemble, les faits dont la preuve est apportée, par leur nature et leur caractère continu, ainsi que les constatations médicales rapportées dans le certificat médical précité qui fait état d'un état dépressif, laissent présumer l'existence d'un harcèlement moral.
La société MALHERBE EST ne s'explique pas sur les motifs qui ont présidé à l'attribution à Mme X...des tâches décrites par les témoins et qui sont sans rapport avec les fonctions qu'elle aurait dû exercer, à l'organisation matérielle de son travail et aux instructions données à une autre salariée de l'entreprise d'éviter toute relation avec elle. La société MALHERBE EST se borne en effet à développer des considérations générales sur les contraintes qui peuvent s'attacher pour des salariés à l'exercice par l'employeur de son pouvoir de direction ou à la pratique de toute activité processionnelle. La remarque de la société MALHERBE EST selon laquelle Mme X...ne s'est pas plainte des difficultés auxquelles elle était confrontée est inopérante dès lors que leur réalité est établie. Il en est de même du défaut de signalement au service de la médecine du travail.
Les attestations de MM B...et E..., évoquées au demeurant par la société MALHERBE EST uniquement sur la question de la démission, ne sont pas suffisantes pour satisfaire à l'obligation de l'employeur de justifier les faits dénoncés par le salarié. En effet, M B..." réfute avec force les accusations mensongères et diffamatoires du couple Laurent G...et Emmanuelle X...avec lequel la nouvelle société a effectivement connu des litiges importants et pour certains d'entre eux qui ne sont toujours pas soldés " et il ajoute que " l'emploi confié à Madame X...correspondait à des dispositions entendues avec Mr G...Laurent et Madame X...lors de la cession de la société " et que " concernant les conditions de travail, celles-ci
correspondaient à un démarrage d'activité avec un équipement provisoire et déjà bien supérieur aux conditions initiales de leurs anciens bureaux. L'ensemble du personnel y compris moi-même travaillait dans ces mêmes conditions ". Les affirmations de M B...sur les conditions de travail ne sont pas étayées par des explications sur les contraintes réelles rencontrées ni sur l'amélioration alléguée. Quant aux attributions de Mme X..., les assertions de M B..., qui ne sont pas renforcées par la preuve par la société MALHERBE EST d'un accord sur ce point avec Mme X..., sont en contradiction non seulement avec le contrat de travail mais également avec le protocole d'accord de cession d'actions. M E..." affirme que les conditions de travail étaient identiques pour l'ensemble du personnel à la suite de la cession du fonds de commerce. Aucun salarié n'a subi de pression et n'a jamais été témoin d'une quelconque pression exercée sur Madame Emmanuelle X...ou un autre salarié de la société à l'époque des faits ". La même remarque que pour le témoignage de M B...peut être formulée sur l'allégation de la similitude des conditions de travail pour tout le personnel, et l'assurance de l'absence de pression sur Mme X...est sans effet puisque ce grief n'est pas retenu.
La société MALHERBE EST restant défaillante dans la démonstration qui lui incombe que les difficultés ou l'inobservation des prescriptions du contrat de travail relevées par Mme X...étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, il convient de considérer que Mme X...a été victime d'agissements constitutifs de harcèlement.
Outre le certificat médical déjà évoqué, Mme X...produit des avis d'arrêt de travail révélant qu'elle a été placée en arrêt pour maladie à raison d'un " syndrôme dépressif " du 23 juin au 30 juillet 2007, ainsi que des attestations de Mmes Bernadette H...et Claude I..., qui se présentent comme des amies de Mme X...et qui décrivent un état de dépression ayant duré quelques mois, de mai à décembre 2007, Mme H...précisant que Mme X..." pleurait tout le temps " et " n'avait plus goût à rien " et les deux témoins imputant ce comportement à un harcèlement subi dans le milieu professionnel et aux difficultés financières consécutives à la démission de Mme X....
Eu égard à ces éléments, le préjudice subi par Mme X...en relation avec les faits de harcèlement dont elle a été victime peut être évalué à 10 000 ¿.

sur la démission

Mme X...soutient que sa démission était liée à un comportement fautif de son employeur et elle sollicite la requalification de cette décision en une prise d'acte de rupture du contrat de travail.
La lettre par laquelle elle a démissionné n'énonce aucune réserve et n'évoque aucun grief à l'encontre de l'employeur.
Si la démission doit reposer sur une volonté claire et non équivoque du salarié de mettre fin au contra de travail et si dans le cas contraire la démission doit s'analyser en une prise d'acte de la rupture du contrat, il appartient au salarié qui remet en cause sa démission en raison de faits ou manquement imputables à l'employeur d'établir que des circonstances antérieures ou contemporaines à la démission ont rendu celle-ci équivoque.
En l'espèce, Mme X...invoque en premier lieu l'influence sur son libre choix de son état psychologique à la date de la démission. Cependant, le moyen tiré de l'altération de la volonté étant de nature à entraîner l'annulation de la démission, il ne peut valablement être présenté au soutien d'une demande tendant à voir reconnaître la démission comme une prise d'acte de rupture du contrat de travail.
Mme X...reproche ensuite à la société MALHERBE EST de ne pas lui avoir confié d'attributions en rapport avec sa qualification. Mais l'existence d'un manquement de la société MALHERBE EST à cet égard ne suffit pas à disqualifier la démission en l'absence de circonstances antérieures ou contemporaines de celle-ci la faisant apparaître comme équivoque. Or, Mme X...ne justifie pas d'un différend l'ayant opposée à la société MALHERBE EST antérieurement ou concomitamment à sa démission, de sorte qu'aucun lien n'est établi entre les carences reprochées à l'employeur et la démission.
La volonté de Mme X...de rompre le contrat de travail à durée déterminée, qui comme tel ne pouvait être interrompu que pour une faute grave de l'une des parties, ne saurait contrairement à ce que Mme X...soutient induire que sa démission était fondée exclusivement sur la considération d'une faute de cette nature commise par la société MALHERBE EST.
Force est ainsi de constater que Mme X...n'apporte pas d'éléments démontrant que sa démission ne peut être regardée comme une manifestation claire et non équivoque de mettre fin au contrat de travail. Il sera au surplus relevé que ce n'est que plusieurs mois après la démission que Mme X...a remis celle-ci en cause, par une lettre du 31 mars 2008 dans laquelle elle évoque des pressions exercées sur elle pour l'amener à démissionner.
La demande tendant à voir analyser la démission comme une prise d'acte de rupture du contrat de travail ne peut dès lors aboutir. Il en est de même par voie de conséquences de la demande subséquente aux fins d'indemnisation du préjudice né de la rupture du contrat de travail.

sur la demande de requalification du contrat à durée déterminée

Mme X...demande la requalification de son contrat de travail en un contrat à durée indéterminée.
Le contrat a été rompu par la démission intervenue le 20 juillet 2007.
L'application successive des articles 2262 du code civil dans sa rédaction antérieure au 19 juin 2008 et 2224 du même code, avec les précisions données par l'article 26 de la loi no 2008-561 du 17 juin 2008 conduisent à considérer que l'action de Mme X...aux fins de requalification de son contrat de travail devait être exercée, sous peine de prescription, avant le 19 juin 2013.
En introduisant, le 15 juillet 2011, une instance en contestation de son licenciement et en réparation d'un préjudice consécutif à un harcèlement moral, Mme X...a interrompu la prescription non seulement pour ces demandes mais également pour toute autre prétention découlant du même contrat de travail.
La prescription ayant été interrompue avant l'expiration du délai qui l'enfermait, il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par la société MALHERBE EST.
Le contrat de travail à durée déterminée signé par les parties mentionne qu'il est conclu en raison d'un accroissement temporaire d'activité.
Alors que Mme X...conteste la véracité du motif ainsi énoncé, la société MALHERBE EST ne fournit aucun élément démontrant qu'elle devait faire face à l'époque de la conclusion du contrat de travail à un surcroît d'activité. Par ailleurs, l'article 8 du protocole de cessions d'actions du 16 février 2007 visé plus haut stipule que les acheteurs des actions s'engagent à embaucher Mme X...comme affrêteuse par un contrat à durée déterminée " afin de faciliter le maintien de la clientèle ".
L'accord des parties au contrat de travail ne permet pas d'écarter les règles impératives fixant aux termes de l'article L 1242-2 du code du travail les cas de recours au contrat de travail à durée déterminée.
Le contrat litigieux ayant été conclu en dehors des cas limitativement prévus par le texte précité, il doit, en application de l'article L 1245-1 du code du travail, être requalifié en un contrat de travail à durée indéterminée.
En application de l'article L 1245-2 du code du travail, Mme X...a droit à une indemnité de requalification qui ne peut être inférieure à un mois de salaire. Mme X...s'en tenant à ce montant minimum, soit en l'occurrence 3230 ¿, il convient de condamner la société MALHERBE EST au paiement de cette somme. Celle-ci ayant un caractère indemnitaire, elle doit produire des intérêts à compter de la date du présent arrêt.
En revanche, le contrat de travail ayant pris fin par l'effet de la démission de Mme X..., celle-ci ne peut légitimement prétendre, ni à une indemnité compensatrice de préavis, ni à un indemnisation pour rupture injustifiée du contrat.
De même, le contrat ayant été requalifé en un contrat à durée indéterminée pour inobservation des cas de recours au travail à durée déterminée, Mme X...n'est pas fondée à demander le versement de l'indemnité de fin de contrat.
sur la demande d'indemnité compensatrice de congés payés
Pour solliciter une indemnité compensatrice de congés payés, Mme X...fait valoir que, ainsi qu'il ressort de l'attestation destinée à POLE EMPLOI, la société MALHERBE EST ne lui a pas alloué cette indemnité alors qu'elle n'a pris aucun jour de congé durant la période d'exécution du contrat de travail.
Mais contrairement à l'assertion de Mme X..., l'attestation destinée à POLE EMPLOI mentionne au nombre des sommes versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail une indemnité de 1378, 98 ¿ correspondant à 11 jours de congé.
Néanmoins eu égard au montant des salaires versés à Mme X...pendant la durée d'exécution du contrat de travail et conformément à l'article L 3141-22 du code du travail, la somme due au titre des congés payés s'élève à 1701, 97 ¿, de sorte la société MALHERBE EST est redevable d'un solde de 322, 99 ¿. Cette somme produira des intérêts au taux légal à compter de la date de l'audience de plaidoirie au cours de laquelle elle a été présentée contradictoirement.

sur le remboursement des frais de formation

Si Mme X...établit qu'elle a réglé le coût d'une formation relative à l'obtention d'une " attestation de capacité marchandises ", elle ne démontre pas que l'assistance à cette formation était une condition de son embauche. La " lettre d'intention " datée du 14 décembre 2006 à laquelle Mme X...fait référence et qui a précédé la conclusion du protocole de cession d'actions du 16 février 2007 énonce seulement l'engagement par l'acquéreur des actions d'engager Mme X...et ne détermine aucune condition.

La demande de Mme X...en remboursement des frais engagés pour sa formation n'est pas fondée.

sur les frais irrépétibles

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme X...la totalité des frais irrépétibles qu'elle a exposés en première instance et en cause d'appel. En application de l'article 700 du code de procédure civile, la société MALHERBE EST sera condamnée à ce titre au paiement de la somme de 1500 ¿.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement entrepris en ses dispositions constatant que la lettre de démission de Mme Emmanuelle X...est claire et non équivoque, déboutant Mme X...de ses demandes en réparation du préjudice résultant de la cessation prématurée du contrat de travail et en remboursement des frais de formation et déboutant la société MALHERBE EST de sa demande relative aux frais irrépétibles. Infirme le jugement entrepris pour le surplus, statuant à nouveau sur les chefs infirmés et ajoutant :

Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la société MALHERBE EST relativement à la demande de requalification.
Requalifie le contrat de travail conclu entre Mme X...et la société TLJ en un contrat de travail à durée indéterminée.
Condamne la société MALHERBE EST à payer à Mme X...:- la somme de 10 000 ¿ en réparation du préjudice subi en raison du harcèlement moral- la somme de 3230 ¿ à titre d'indemnité de requalification, avec intérêts au taux légal à compter de la date du présent arrêt -la somme de 322, 99 ¿ brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, avec intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2014- la somme de 1500 ¿ au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel.

Déboute Mme X...de ses autres demandes.

Déboute la société MALHERBE EST de ses demandes.

Condamne la société MALHERBE EST aux dépens de première instance et d'appel.
Le Greffier, Le Président de Chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de metz
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/00573
Date de la décision : 17/12/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.metz;arret;2014-12-17;13.00573 ?
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