Arrêt no 14/ 00543
22 Octobre 2014--------------- RG No 12/ 02991------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 13 Septembre 2012 11/ 0810 I------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE METZ CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU
vingt deux Octobre deux mille quatorze
APPELANTE :
SA CRYOLOR prise en la personne de son représentant légal Z. I. des Jonquières 57365 ENNERY
Représentée par Me PIALOUX, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉS :
Monsieur Hakim X... ...57700 HAYANGE
Représenté par M. Y... Délégué syndical muni d'un pouvoir régulier
UL CGT HAGONDANGE, intervenant volontaire 54 rue de la Gare 57300 HAGONDANGE
Représentée par M. Y... Délégué syndical muni d'un pouvoir régulier
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Septembre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-José BOU, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre Madame Marie-José BOU, Conseiller Monsieur Alain BURKIC, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Morgane PETELICKI, Greffier
ARRÊT :
contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre, et par Mademoiselle Morgane PETELICKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Hakim X... a été embauché par l'entreprise de travail temporaire Adia pour être mis à la disposition de la société Cryolor, société spécialisée dans la fabrication de stockages et de matériels de transport pour les gazs liquéfiés, :- en qualité de soudeur, pour accroissement temporaire d'activité lié à " la commande exceptionnelle par le client ALGBM " du 13 novembre 2006 au 24 novembre 2006 (contrat de mission du 13 novembre 2006) ;- en qualité de tuyauteur, pour accroissement temporaire d'activité lié à " la commande exceptionnelle AL Autriche et AL Bulgariea finir dans les délais " du 2 janvier 2007 au 27 juillet 2007 (contrat de mission du 2 janvier 2007) ;- en qualité de tuyauteur, pour accroissement temporaire d'activité lié à " la commande exceptionnelle à l'exprot pour les clients Boc India et Soxal " du 30 juillet 2007 au 21 décembre 2007 (contrat de mission du 30 juillet 2007) ;- en qualité de tuyauteur, pour accroissement temporaire d'activité lié à " la commande exceptionnelle à l'exprot pour les clients Boc India et Soxal " du 7 janvier 2008 au 25 juillet 2008 (contrat de mission du 30 juin 2008) ;- en qualité de tuyauteur, pour accroissement temporaire d'activité lié à " la commande exceptionnelle export pour le client AL Belgique " du 6 octobre 2008 au 31 décembre 2008 (contrat de mission du 6 octobre 2008) ;- en qualité de tuyauteur, pour accroissement temporaire d'activité lié à " la commande exceptionnelle à l'export pour le client Air Liquide Egypte " du 5 janvier 2009 au 27 février 2009 (contrat de mission du 5 janvier 2009).
Suivant demande enregistrée le 28 juin 2011, Hakim X... a fait attraire devant le conseil de prud'hommes de Metz la société Cryolor aux fins d'obtenir notamment la requalification de ses contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée, l'Union locale CGT Hagondange et environs étant intervenue volontairement.
Dans le dernier état de ses prétentions, Hakim X... a demandé la juridiction prud'homale :
De requalifier les contrats de mission en un seul contrat à durée indéterminée en application de l'article L. 1251-40 du code du travail.
De dire que la rupture du contrat de travail est intervenue aux torts de l'employeur et emporte les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
De condamner la société Cryolor lui payer les sommes suivantes-1 744, 20 ¿ nets à titre d'indemnité de requalification du contrat de travail.-17 500 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.-3 837, 24 ¿ bruts au titre du préavis, congés payés y afférent inclus.-755, 82 ¿ nets à titre d'indemnité de licenciement.-1 000 ¿ au titre de l'article 700 du CPC.
L'Union locale CGT Hagondange et environs a demandé de :- dire que son intervention est recevable et bien fondée ;- condamner la société Cryolor à lui verser les sommes de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts et de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le demandeur et l'Union locale CGT Hagondange et environs ont également sollicité le bénéfice de l'exécution provisoire, la condamnation de la société Cryolor aux entiers dépens, de dire que les indemnités porteraient de plein droit intérêts au taux légal et de transmettre copie du jugement à Monsieur le Procureur de la République.
La défenderesse a pour sa part demandé au conseil de prud'hommes de :
" 1) A titre préliminaire, de :
- Juger que le Conseil de Prud'hommes est incompétent pour statuer sur les demandes dont il est saisi, à tort dirigées à l'encontre de la société CRYOLOR, qui n'est pas, et n'a jamais été, l'employeur de Monsieur X...,
En conséquence :- Se déclarer incompétent, pour statuer sur les demandes formulées par Monsieur X... et l'Union Local CGT Hagondange et environs à l'encontre de la Société CRYOLOR, au profit du Tribunal de Grande Instance de Metz.- Mettre la société CRYOLOR, qui n'a jamais été l'employeur de Monsieur X..., purement et simplement hors de cause.
2) A titre subsidiaire, de :
- Juger que les contrats de mission temporaire conclus entre Monsieur X... et la société ADIA, son employeur, sont parfaitement réguliers, justifiés et conformes aux dispositions légales en vigueur,- Juger que Monsieur X... n'a jamais occupé un poste lié à l'activité normale et permanente de la société CRYOLOR,- Juger que la société CRYOLOR s'est parfaitement conformée à ses obligations concernant l'aménagement du terme des missions d'intérim,- Juger que la société CRYOLOR s'est parfaitement conformée à ses obligations concernant la durée des missions d'intérim,- Juger que la société CRYOLOR s'est parfaitement conformée à ses obligations concernant la succession des missions d'intérim et le respect du délai de carence entre deux missions,- Constater que Monsieur X... et l'Union Local CGT Hagondange et environs ne justifient absolument pas leurs demandes,
En conséquence,- Juger Monsieur X... et l'Union Local CGT Hagondange et environs irrecevables et mal fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions,- Les en débouter,- Condamner solidairement Monsieur X...et l'Union Local CGT Hagondange et environs au paiement de la somme de 2, 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du CPC, et aux entiers dépens de la présente instance et de ses suites ".
Par jugement rendu le 13 septembre 2012, le conseil de prud'hommes de Metz a statué dans les termes suivants :
" SE DÉCLARE compétent pour connaître du présent litige.
DIT que la demande de Monsieur X... Hakim est recevable en la forme.
REQUALIFIE les contrats de mission en un seul contrat à durée indéterminée.
DIT que la rupture du contrat de travail est intervenue aux torts de l'employeur et emporte les effets d'un licenciement sans cause réelle est sérieuse.
CONDAMNE la SA CRYOLOR, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Monsieur X... Hakim les sommes de :
-1 744, 20 ¿ nets à titre d'indemnité de requalification du contrat de travail.-10 500 ¿ nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.-3 837, 24 ¿ bruts au titre du préavis et congés payés y afférents inclus.-755, 82 ¿ nets à titre d'indemnités de licenciement.-800 ¿ nets au titre de l'article 700 du CPC.
DIT que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement.
DÉBOUTE Monsieur X... du surplus de ses demandes.
DIT que l'intervention volontaire de l'Union Local CGT Hagondange et environs est recevable.
ORDONNE la transmission d'une copie du présent jugement à Monsieur le Procureur de la République.
DÉBOUTE l'Union Local CGT Hagondange et environs de sa demande à titre de dommages et intérêts.
CONDAMNE la SA CRYOLOR, prise en la personne de son représentant légal, à payer à l'Union Local CGT Hagondange et environs :-200 ¿ nets au titre de l'article 700 du CPC.
DÉBOUTE la SA CRYOLOR de toutes ses demandes, y compris celle au titre de l'article 700 du CPC.
ORDONNE l'exécution provisoire sur la totalité du jugement en application de l'article 515 du CPC.
RAPPELLE qu'elle est de droit en application des articles R1454-28 et D1251-3 du Code du Travail.
CONDAMNE la SA CRYOLOR aux entiers frais et dépens d'instance et d'exécution du jugement rendu ".
Suivant déclaration de son avocat par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 8 octobre 2012 au greffe de la cour d'appelde Metz, la société Cryolor a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions de son avocat présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, la société Cryolor demande à la Cour de :
"- Juger que l'appel de la société CRYOLOR est recevable et parfaitement justifié,
- Juger que les contrats de mission temporaire conclus entre Monsieur X... et la société ADIA, son employeur, sont parfaitement réguliers, justifiés et conformes aux dispositions légales en vigueur,
- Juger que Monsieur X... n'a jamais occupé un poste lié à l'activité normale et permanente de la société CRYOLOR,
- Juger que la société CRYOLOR s'est parfaitement conformée à ses obligations concernant l'aménagement du terme des missions d'intérim,
- Juger que la société CRYOLOR s'est parfaitement conformée à ses obligations concernant les durées minimale et maximale des missions d'intérim,
- Juger que la société CRYOLOR s'est parfaitement conformée à ses obligations concernant la succession des missions d'intérim et le respect du délai de carence entre deux missions,
- Constater que Monsieur X... et l'Union Local CGT Hagondange et environs ne justifient absolument pas leurs demandes,
En conséquence,
- Infirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de Metz du 13 septembre 2012, sauf en ce qu'il a débouté l'Union Local CGT Hagondange et environs de sa demande au titre d'un prétendu préjudice,
- Juger Monsieur X... et l'Union Local CGT Hagondange et environs irrecevables et mal fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- Les en débouter,
- Rappeler, en tant que de besoin, que Monsieur X... et l'Union Local CGT Hagondange et environs devront restituer toutes les sommes qu'ils ont perçues en exécution du jugement du 13 septembre 2012,
- Les condamner à restituer ces sommes à CRYOLOR,
- Condamner solidairement Monsieur X... et l'Union Local CGT Hagondange et environs au paiement de la somme de 2000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du CPC,
- Les condamner solidairement aux entiers dépens de la présente instance et de ses suites ".
Par conclusions de leur mandataire, délégué syndical CGT, présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie par ce dernier, muni de pouvoirs à cet effet, Hakim X... et l'Union locale CGT Hagondange et environs demandent à la Cour :
" De déclarer recevable et bien fondé l'appel incident de Monsieur Hakim X... et de l'Union Locale CGT Hagondange et environs ;
En tirer toutes les conséquences de droits, notamment :
D'infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Metz du 13 septembre 2012 en ce qu'il a octroyé la somme de 755, 82 ¿ nets au titre de l'indemnité de licenciement et en ce qu'il a débouté l'Union Locale CGT Hagondange et environs de sa demande à titre de dommages et intérêts ;
De statuer à nouveau pour condamner la société CRYOLOR à payer 1 075, 59 ¿ nets au titre de l'indemnité de licenciement à Monsieur Hakim X... et 1 500 ¿ à l'Union Locale CGT Hagondange et environs à titre de dommages et intérêts pour préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession ;
De confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Metz du 13 septembre 2012 en ses autres dispositions ;
De condamner la société CRYOLOR à payer à chacun des intimés la somme de 1 000 ¿ au titre de l'article 700 du CPC en cause d'appel ;
De condamner la société CRYOLOR aux entiers dépens d'instances et d'exécution du jugement rendu ;
Et dire que les indemnités porteront de plein droit intérêts légaux ".
MOTIFS DE L'ARRET
Vu le jugement entrepris ;
Vu les conclusions des parties déposées le 9 septembre 2014 pour l'appelante et le 19 août 2014 pour les intimés, présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises ;
Sur la disposition du jugement relative à la compétence
Aucun moyen n'étant développé à l'encontre de cette disposition, celle-ci sera confirmée.
Sur la requalification des contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée
Selon les dispositions combinées des articles L 1251-5 et L 1251-6 du code du travail, le contrat de mission, quelque soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice et il ne peut être fait appel à un salarié temporaire que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et seulement dans des cas limitativement énumérés, notamment en cas d'accroissement temporaire de l'activité.
L'article L 1251-40 du même code dispose que lorsqu'une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d'une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions des articles L 1251-5 à L 1251-7, L 1251-10 à L 1251-12, L 1251-30 et L 1251-35, ce salarié peut faire valoir auprès de l'entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission.
En l'espèce, il résulte des contrats de mission que Hakim X... a travaillé au sein de la société Cryolor de manière presque continue pendant plus de 2 ans et 3 mois à compter du 13 novembre 2006 pour occuper un même emploi de tuyauteur, seul le premier contrat portant sur la qualification de soudeur, en vertu de 6 contrats de mission tous motivés par un accroissement temporaire d'activité lié à des commandes à l'export.
Si deux interruptions plus longues sont survenues entre les deux premiers contrats et entre les quatrième et cinquième contrats, la durée de ces interruptions reste néanmoins très faible au regard de la durée cumulée des différentes missions qui représentent environ 2 ans et de telles interruptions n'excluent pas par elles-même que les missions d'intérim de Hakin X... aient eu pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.
Par ailleurs, si le premier contrat vise une qualification de soudeur différente de celle de tuyauteur mentionnée dans les autres contrats de mission, il convient d'observer que le premier contrat de mission est le plus court de tous et que surtout, ainsi que le font valoir les intimés, le descriptif des tâches confiées au salarié figurant dans ce contrat est exactement identique à celui figurant dans tous les autres contrats, à savoir " réalisation d'opérations de contrôle et de maintenance expertiser les matériels de transport réparer modifier adapter ou dépanner les installations suite aux expertises ". Ainsi, au delà de l'intitulé des postes, il apparaît en l'état de ces indications et en l'absence de tout élément produit par la société Cryolor de nature à établir l'existence d'une différence dans les fonctions exercées par l'intéressé que Hakim X... a toujours occupé le même emploi.
En outre, il ressort des documents comptables de la société Cryolor, des données chiffrées dont celle-ci se prévaut dans ses conclusions et de ses propres explications que le chiffre d'affaires et la production de la société ont constamment augmenté à partir de l'année 2005 jusqu'au début de l'année 2009, le chiffre d'affaires constaté au 31 décembre 2009 étant pour la première fois en recul après plusieurs années consécutives de hausse. Il s'ensuit que les contrats de mission de Hakim X... sont intervenus durant une période d'accroissement durable et constant de l'activité de la société Cryolor.
Si la société Cryolor verse aux débats des documents de nature à établir, selon elle, la réalité des différentes commandes auxquelles étaient liées les missions de Hakim X..., il convient de relever que ces éléments, qui sont au demeurant pour la plupart rédigés dans des langues étrangères sans que l'appelante ait pris le soin d'en fournir une traduction en français, ne justifient pas, en tout état de cause, en eux-même ni du caractère exceptionnel de ces commandes ou de certaines d'entre elles, alors que les contrats de mission font précisément référence à des commandes exceptionnelles, ni même de ce que ces commandes étaient inhabituelles. Et force est de constater que la société Cryolor ne produit pas d'autre élément démontrant que ces commandes particulières auraient excédé le flux normal de commandes et qu'elles auraient provoqué une augmentation temporaire de son activité.
De l'ensemble de ces éléments, il s'évince que, comme le font valoir les intimés, les contrats de mission de Hakim X... se sont inscrits dans le cadre de l'activité habituelle de l'entreprise marquée pendant plusieurs années par un accroissement durable et régulier de ladite activité et qu'ils ont eu pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice et ce, dès le premier jour de la première mission irrégulière.
En conséquence et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens développés au soutien de la demande de requalification, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a requalifié en un contrat à durée indéterminée les contrats de missions et, ajoutant, de dire que la requalification prend effet au 13 novembre 2006.
Sur les conséquences de la requalification du contrat de mission en contrat à durée indéterminée
1. Indemnité de requalification
En application de l'article L 1251-41 du code du travail, le salarié est fondé à solliciter une indemnité de requalification ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.
En l'espèce, il résulte du contrat de mission conclu le 5 janvier 2009 que le dernier salaire de Hakim X... s'élevait à 1 774, 54 euros, ce qui justifie, contrairement à ce que soutient la société Cryolor, du salaire de référence sur lequel celui-ci se base.
En conséquence, le jugement ne peut qu'être confirmé, conformément à ce que demande Hakim X..., en ce qu'il lui a alloué une indemnité de requalification de 1774, 20 euros, y compris sur le point de départ des intérêts au taux légal.
2. Rupture abusive du contrat de travail
Conformément aux dispositions de l'article L 1251-41 du code du travail, le salarié est fondé à obtenir de la société Cryolor, outre l'indemnité de requalification, les indemnités afférentes à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée.
a) indemnités compensatrices de préavis et de congés payés afférents
Hakim X... est d'abord en droit d'obtenir l'indemnité compensatrice du préavis dont il a été privé.
Hakim X... est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le 13 novembre 2006 alors que le contrat de travail a été rompu le 27 février 2009, dernier jour de sa dernière mission.
Compte tenu de l'ancienneté qu'il a ainsi acquise, il est en droit de prétendre à une indemnité compensatrice de préavis égale à deux mois de salaire, soit la somme de 3 488, 40 euros, outre celle de 348, 84 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents calculée selon la règle du dixième, le total de ces deux sommes correspondant à ce qui a été alloué par les premiers juges. Le jugement sera donc confirmé sur ce point, y compris sur le point de départ des intérêts au taux légal.
b) indemnité de licenciement
En application de l'article R 1234-2 du code du travail, Hakim X... est fondé à obtenir une indemnité de licenciement égale à un cinquième de mois par année d'ancienneté dans l'entreprise, les fractions d'année incomplète devant être comptabilisées dans la limite des mois de service accomplis au delà des années pleines, et ce préavis inclus.
Il s'ensuit que le salarié est en droit de prétendre à une indemnité calculée comme suit :
(1 744, 20 x 2 x 1/ 5) + (1744, 20 x 5/ 12 x 1/ 5) = 843, 03 euros net.
Le jugement sera en conséquence infirmé de ce chef, la société Cryolor étant condamnée à payer à Hakim X... ladite somme de 843, 03 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, l'intimé ne sollicitant pas la fixation du point de départ des intérêts à une date antérieure.
c) dommages et intérêts pour licenciement abusif
La fin de la relation de travail avec la société Cryolor, requalifiée en contrat à durée indéterminée, caractérise, alors qu'aucun licenciement n'a été notifié au salarié, un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du 27 février 2009.
En application de l'article L 1235-3 du code du travail, eu égard à son ancienneté et à l'effectif de l'entreprise, Hakim X... est fondé à obtenir une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, soit la somme de 10 465, 20 euros.
Agé de 29 ans et disposant d'une ancienneté de 2 ans et 3 mois lors de la rupture du contrat de travail, Hakim X... ne justifie pas de sa situation professionnelle et de ses revenus à la suite de celle-ci.
Ainsi, il ne prouve pas avoir subi un préjudice autre que celui réparé par l'indemnité minimale si bien que le jugement doit être infirmé en ce qu'il lui a alloué une somme supérieure et qu'il convient de condamner la société Cryolor à lui verser la somme de 10 465, 20 euros, ce avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt en application de l'article 1153-1, dernier alinéa, du code civil.
Ajoutant au jugement, il y a lieu conformément à l'article L 1235-4 du code du travail de condamner la société Cryolor à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à Hakim X... du jour de la rupture du contrat de travail, le 27 février 2009, au jour du jugement dans la limite de deux mois d'indemnité.
Sur la demande de dommages et intérêts de l'Union locale CGT Hagondange et environs
Le recours à un intérimaire en dehors des cas de recours prévus par la loi ayant eu pour effet de pourvoir pendant environ 2 ans un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice a porté atteinte à l'intérêt collectif de la profession et justifie que soit allouée à l'Union locale CGT Hagondange et environs la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que l'intervention de l'Union locale CGT était recevable et de l'infirmer en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
Sur la restitution des sommes versées en exécution du jugement
Le présent arrêt partiellement infirmatif constitue le titre ouvrant droit à ladite restitution de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande.
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile
La société Cryolor doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel et déboutée de toute demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Elle sera condamnée à payer à Hakim X... la somme de 1 000 euros et à l'Union locale CGT celle de 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens qu'ils ont chacun exposés en appel, le jugement étant confirmé sur les frais irrépétibles de première instance.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement en ce qu'il a condamné la société Cryolor à payer à Hakim X... la somme de 10 500 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 755, 82 euros net à titre d'indemnité de licenciement et en ce qu'il a débouté l'Union locale CGT Hagondange et environs de sa demande de dommages et intérêts ;
Statuant à nouveau dans cette limite et ajoutant :
Dit que la requalification des contrats de mission en contrat de travail à durée indéterminée prend effet au 13 novembre 2006 ;
Condamne la société Cryolor à payer à Hakim X... les sommes de :-843, 03 euros net à titre d'indemnité de licenciement ;-10 465, 20 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;-1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Condamne la société Cryolor à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à Hakim X... du jour de la rupture du contrat de travail, le 27 février 2009, au jour du jugement dans la limite de deux mois d'indemnité ;
Condamne la société Cryolor à payer à l'Union locale CGT Hagondange et environs les sommes de :-1 500 euros à titre de dommages et intérêts ;-500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Déboute les parties de toute autre demande ;
Condamne la société Cryolor aux dépens d'appel.
Le Greffier, Le Président de Chambre,