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01/10/2014 | FRANCE | N°12/02417

France | France, Cour d'appel de metz, Chambre sociale, 01 octobre 2014, 12/02417


Arrêt no 14/ 00478

01 Octobre 2014--------------- RG No 12/ 02417------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 17 Juillet 2012 10/ 01248 C------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ
CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU

Premier Octobre deux mille quatorze
APPELANTE :
Société ISS PROPRETE venant aux droits de la Société ISS ABILIS FRANCE, prise en la personne de son représentant légal 12 Rue Fructidor 75839 PARIS CEDEX 17

Représentée par Me ZUCK, avocat au barreau de METZ subst

itué par Me DILLENSCHNEIDER, avocat au barreau de METZ
INTIMÉS :
Monsieur Franck X...... 57000 ME...

Arrêt no 14/ 00478

01 Octobre 2014--------------- RG No 12/ 02417------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 17 Juillet 2012 10/ 01248 C------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ
CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU

Premier Octobre deux mille quatorze
APPELANTE :
Société ISS PROPRETE venant aux droits de la Société ISS ABILIS FRANCE, prise en la personne de son représentant légal 12 Rue Fructidor 75839 PARIS CEDEX 17

Représentée par Me ZUCK, avocat au barreau de METZ substitué par Me DILLENSCHNEIDER, avocat au barreau de METZ
INTIMÉS :
Monsieur Franck X...... 57000 METZ

Représenté par Me GOBERT, avocat au barreau de METZ
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 8773-07. 02. 14 du 07/ 02/ 2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)
POLE EMPLOI Rue du Pont à Seille 57000 METZ

Non comparant non représenté

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 Juin 2014, en audience publique, devant la cour composée de :
Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre Madame Marie-José BOU, Conseiller Monsieur Alain BURKIC, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Morgane PETELICKI, Greffier

ARRÊT :

réputé contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre, et par Mademoiselle Morgane PETELICKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur X...a été embauché par la société ISS-ABILIS FRANCE le 11 avril 2001, selon contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel, en qualité d'Agent de propreté, AS1A.
En dernier lieu, le salarié exerçait les fonctions d'Agent qualifié de service, AQS1A, à raison de 35 heures par semaine pour une rémunération mensuelle de 1. 398, 40 euros.
Le 23 septembre 2010, l'employeur a convoqué Monsieur X...à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement fixé au 5 octobre 2010.
Le 27 septembre 2010, l'employeur a notifié au salarié une mise à pied conservatoire.
Monsieur X...a été licencié par lettre du 21 octobre 2010 pour faute grave.
La lettre de licenciement est ainsi libellée :
« A la suite de notre entretien du 05 Octobre 2010, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave. Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, cette mesure prendra effet dès présentation de ce courrier et votre solde de tout compte sera arrêté à cette date, sans préavis ni indemnité de licenciement.

Cette décision est motivée par les faits suivants : Vous êtes actuellement affecté à l'équipe TE (travaux exceptionnels) et, pour des raisons de sécurité, certaines interventions nécessitent la présentation de votre carte d'identité pour accéder sur le site de nos clients. Nous vous avions envoyé les courriers en date des 21 mai, 6 juillet, 23 juillet et 1er septembre afin de nous fournir une copie de votre pièce d'identité valide pour compléter votre dossier et ainsi vous permettre d'accéder sur les sites sécurisés. Or force est de constater que malgré nos nombreuses relances nous n'avons rien reçu à ce jour. Votre insubordination a eu pour conséquence le retrait de chantiers, car malgré votre habilitation pour les travaux en hauteur, votre pièce d'identité est nécessaire pour avoir accès au site, face à votre refus et le mécontentement de nos clients et/ ou pour répondre aux attentes de nos clients, nous avons dû former en urgence d'autres agents au permis nacelle, ce qui a engendré des frais supplémentaires. »

Suivant demande enregistrée le 2 novembre 2010, Monsieur X...a fait attraire devant le Conseil de Prud'hommes de METZ son ancien employeur, la société ISS-ABILIS FRANCE, en la personne de son représentant légal, aux fins d'obtenir sa condamnation au paiement de diverses sommes au titre de créances salariales et indemnitaires.
Par jugement du 17 juillet 2012, le Conseil de Prud'hommes de METZ a statué en ces termes :
« DIT que le licenciement pour faute grave dont a fait l'objet Monsieur X...Franck n'est pas fondé ; REQUALIFIE le licenciement pour faute grave de Monsieur X...Franck en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; En conséquence de quoi, CONDAMNE la société ISS PROPRETE venant aux droits de la SAS ISS ABILIS FRANCE, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Monsieur X...Franck les sommes suivantes :-2 908, 68 ¿ brut à titre d'indemnité de préavis ;-290, 87 ¿ brut à titre de congés payés y afférents ;-2 835, 96 ¿ à titre d'indemnité de licenciement ;-1 323, 29 ¿ brut au titre de rémunération de la mise à pied conservatoire ;-132, 32 ¿ brut au titre de congés payés sur la mise à pied conservatoire ; avec intérêts de droit à compter du jour de la demande (02/ 11/ 20 10) ;-9 000, 00 ¿ au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; avec intérêts de droit à compter du jour du présent jugement ; CONDAMNE la société ISS PROPRETE venant aux droits de la SAS ISS ABILIS FRANCE, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Monsieur X...Franck :-300, 00 euros au titre de l'article 700 du C. P. C.

ORDONNE à la société ISS PROPRETE venant aux droits de la SAS ISS ABILIS FRANCE, prise en la personne de son représentant légal, de remettre à Monsieur X...Franck les documents de fin de contrat rectifiés, et ce sous astreinte de 15, 00 ¿ par jour de retard et par document à compter du 21éme jour du prononcé du présent jugement. DIT qu'il y a lieu à l'exécution provisoire sur fondement de l'article 515 du Code de Procédure Civile. ORDONNE à la société ISS PROPRETE venant aux droits de la SAS ISS ABILIS FRANCE, prise en la personne de son représentant légal, de rembourser aux ASSEDIC les indemnités de chômage qui ont été versées à Monsieur X...Franck, par cet organisme, dans la limite de six mois d'indemnités et ce, sur le fondement de l'article L. 1235-4 du Code du Travail ; DIT que conformément à la loi n º 92-1466 du 31 décembre 1992, il y a lieu de transmettre ledit jugement à PÔLE EMPLOI, TSA 32001, 75987 PARIS CEDEX 20 ; DEBOUTE la société ISS PROPRETE venant aux droits de la SAS ISS ABILIS FRANCE sa demande sur l'article 700 CPC ; CONDAMNE la société ISS PROPRETE venant aux droits de la SAS ISS ABILIS FRANCE aux entiers frais et dépens. »

Suivant déclaration reçue au greffe de la Cour le 2 août 2012, la société ISS PROPRETE a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions de son avocat présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, la société ISS PROPRETE demande à la Cour de :
« DECLARER l'appel formé par la SAS ISS PROPRETE recevable et bien fondé ; DEBOUTER l'appelant reconventionnel de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; En conséquence : INFIRMER le jugement no 12/ 0796 rendu par le Conseil de prud'hommes de METZ le 17 juillet 2012 en ce qu'il a déclaré le licenciement pour faute grave de Monsieur X...sans cause réelle et sérieuse. CONDAMNER Monsieur X...à payer à la Société ISS PROPRETE la somme de 2. 000, 00 EUROS par application des dispositions de l'article 700 du CPC. Le CONDAMNER en tous les frais et dépens. »

Par conclusions de son avocat présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, Monsieur X...forme un appel incident et demande pour sa part à la Cour de :
« CONSTATER que la société ISS PROPRETÉ ne soutient pas son appel ; Subsidiairement : Le DECLARER recevable mais néanmoins mal fondé RECEVOIR Monsieur Franck X...en son appel incident Le DECLARER recevable en la forme et bien fondé ; En conséquence : CONFIRMER le jugement entrepris en toute ses dispositions à l'exception du quantum des dommages-intérêts alloués à Monsieur Franck X...au titre du défaut de cause réelle et sérieuse de son licenciement ; Et statuant à nouveau : CONDAMNER la société ISS PROPRETÉ à payer à Monsieur Franck X...la somme de dix-huit mille sept cent vingt-huit Euros et huit cents Euros (18. 728, 08 ¿) avant déduction du précompte salarial à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; Y ajoutant CONDAMNER la société ISS PROPRETE à payer à Monsieur Franck X...la somme de trois mille Euros (3. 000, 00 ¿) à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral ; CONDAMNER la société ISS PROPRETÉ à payer à Monsieur Franck X...la somme de vingt-deux mille cent vingt-huit Euros (22. 128, 00 ¿) avant déduction du précompte salarial et majorations légales incluses, à titre de rappel d'heures supplémentaires de travail demeurées impayées avec intérêts de droit calculés au taux légal à compter du 22 octobre 2010, date de la rupture effective du contrat de travail ; CONDAMNER la société ISS PROPRETÉ à payer à Monsieur Franck X...la somme de deux mille deux cent douze Euros et quatre-vingt cents (2. 212, 80 ¿) avant déduction du précompte salarial à titre d'indemnité compensatrice de congés payés « sur rappel d'heures supplémentaires » avec intérêts de droit calculés au taux légal à compter du 22 octobre 2010, date de la rupture effective du contrat de travail ; CONDAMNER la société ISS PROPRETÉ à payer à Monsieur Franck X...la somme de vingt-deux mille cent vingt-huit Euros (22. 128, 00 ¿) à titre de dommages-intérêts destinés à compenser le préjudice subi par lui du fait de la privation des repos compensateurs afférents à son temps de travail supplémentaire avec intérêts de droit calculés au taux légal à compter du 22 octobre 2010, date de la rupture effective du contrat de travail ; Dans tous les cas : CONDAMNER société ISS PROPRETÉ à payer à Monsieur Franck X...la somme de deux mille cinq cents Euros (2. 500, 00 ¿) en compensation des frais irrépétibles exposés par lui à hauteur de Cour. »

Pôle Emploi régulièrement convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception signé le 26 septembre 2013 n'était ni présent, ni représenté à la procédure.

SUR CE

Vu le jugement entrepris,

Vu les conclusions écrites des parties du 12 juin 2014 pour Monsieur X...et du 15 juin 2014 pour la société ISS PROPRETE, présentées en cause d'appel et

reprises oralement à l'audience de plaidoirie auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises ;

Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement

Attendu que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ;
Que l'employeur supporte la charge de la preuve de la faute grave et de son imputation certaine au salarié ;
Que, dans ses conclusions, la société ISS PROPRETE prétend que c'est le refus de Monsieur X..., malgré les mises en demeure, de présenter un quelconque document d'identité, valide ou non, à l'entrée des sites sécurisés de ses clients, et plus particulièrement du site PHILIPS à Pont à Mousson, et le fait de ne pas pouvoir ainsi exécuter sa prestation prévue au contrat de travail, qui lui sont reprochés ;
Que ces assertions ne correspondent pas exactement au motif de licenciement énoncé dans la lettre de rupture adressée au salarié ;
Qu'il résulte de la lettre de licenciement, dont les termes fixent les limites du litige, que la société ISS PROPRETE a entendu mettre fin à la relation contractuelle qui l'unissait à Monsieur X...au regard d'un grief unique prétendument constitutif d'une faute grave, à savoir une insubordination consécutive à son refus de fournir à son employeur, malgré plusieurs injonctions, une copie de sa pièce d'identité valide pour compléter son dossier et lui permettre ainsi d'accéder aux sites sécurisés des entreprises clientes, comportement ayant occasionné « le retrait de chantiers » et des frais supplémentaires liés à la formation en urgence d'autres agents au permis nacelle ;
Qu'il est constant que Monsieur Franck X...était détenteur d'une carte nationale d'identité délivrée par les services de la Préfecture de la Moselle le 8 novembre 1990, dont la copie se trouvait dans le dossier personnel détenu par la société ISS PROPRETE, ladite carte étant périmée depuis le 8 novembre 2000 ;
Que Monsieur Franck X...fait valoir qu'il n'a jamais refusé de justifier de son identité lorsqu'il accédait au site d'un client de son employeur, y compris par la présentation de sa carte nationale d'identité périmée, et n'avoir jamais rencontré la moindre difficulté d'accès s'agissant du site de la société PHILIPS de Pont-à-Mousson, où il était principalement affecté à compter de l'année 2001, le portier ainsi que tous autres préposés chargés du contrôle des entrées ayant fini par le connaître personnellement et par se satisfaire du visa du badge ;
Que si la société ISS PROPRETE évoque dans la lettre de licenciement, de manière générale, la nécessité pour Monsieur X...de présenter une carte nationale d'identité pour accéder « sur le site de nos clients », l'argumentation et les éléments de preuve documentaires fournis par l'appelante concernent uniquement l'accès au site de la société PHILIPS dont un nouveau préposé à l'accueil aurait exigé une telle présentation, refusée par le salarié ;
Qu'à l'appui de ses allégations, la société ISS PROPRETE produit aux débats l'attestation d'une de ses employées, Madame A..., laquelle relate ce qui suit : « Suite à une visite sur le site PHILIPS à Pont-à-Mousson, lors d'un entretien avec notre nouvel interlocuteur, Monsieur B..., ce dernier m'a informé que l'un de mes agents lui a dit qu'il travaillait chez ISS sans avoir aucune pièce d'identité. Après vérification, il s'est avéré qu'il s'agissait de Monsieur X.... » ;
Qu'outre le fait que ladite attestation émane d'une salariée de la société ISS PROPRETE ayant elle-même conduit la procédure de licenciement jusqu'à son terme et se bornant à rapporter les propos d'une tierce personne, force est de constater que le témoin n'y relate pas l'indication d'une impossibilité pour Monsieur X...d'accéder dorénavant au site de la société PHILIPS en raison d'une carte nationale d'identité périmée pas plus qu'un quelconque refus du salarié de présenter une pièce d'identité en cours de validité ;
Que la société ISS PROPRETE verse également aux débats copie d'un courriel adressé par Monsieur B...à Madame A...contenant un extrait de la « procédure de tenue du registre des visiteurs » ainsi libellé :
« n º 11- Procédure de tenue du registre des visiteurs :
Toute personne entrant sur notre site doit porter un badge d'identification
2- Visiteurs du site :
Chaque visiteur doit déposer une pièce d'identité à l'accueil. L'agent en poste renseigne le registre des visiteurs :- date et heure d'arrivée-nom et société-nom de la personne visitée Remet à chaque visiteur un badge différencié par la couleur du cordon-cordon bleu pour les visiteurs Philips-cordon vert pour les visiteurs General Lighting-cordon noir pour tous les autres Appelle la personne visitée qui vient chercher son ou ses invités à l'accueil A la sortie du visiteur, il reprend le badge, note l'heure de départ sur le registre et restitue la pièce d'identité ; » ;

Qu'outre le constat d'une reproduction sélective du document interne révélée par la discontinuité des indications chiffrées, il convient de relever que ledit document concerne l'accueil des « visiteurs » du site, la procédure prévoyant, notamment que l'agent en poste, après avoir rempli le registre ad hoc et remis un badge contre le dépôt d'une pièce d'identité, appelle « la personne visitée qui vient chercher son ou ses invités à l'accueil », situation qui ne correspond en rien à celle d'une prise de poste journalière d'employés d'une société chargée du nettoyage des locaux ;
Que la mention selon laquelle « toute personne entrant sur notre site doit porter un badge d'identification » n'est pas incompatible avec les déclarations du salarié faisant d'une entrée sur le site au visa du badge ;
Qu'il importe aussi et surtout de souligner que le courriel en cause ne fait aucune référence à la situation spécifique de Monsieur X...et à une quelconque impossibilité pour ce dernier d'accéder au site en l'absence une pièce d'identité en cours de validité ;
Qu'il résulte du procès-verbal d'audience devant le conseil de prud'hommes de METZ qu'une note en délibéré devait être déposée par la société ISS PROPRETE avec le justificatif d'une objection explicite de la société PHILIPS quant à l'accès de Monsieur X...sur son site mussipontin ;
Qu'un tel document, non produit devant les premiers juges, ne l'est pas davantage devant la Cour ;
Que la société ISS PROPRETE prétend qu'elle a, du mois de mai au mois de septembre 2010, attribué d'autres missions à Monsieur X..., étant donné qu'il ne pouvait plus accéder sur les sites sécurisés des clients de la société et dans l'attente de la clarification de la situation, telles que la remise en état avant ouverture de magasins et le nettoyage des cabines téléphoniques, sans même indiquer les noms des clients concernées ni fournir une pièce justificative de ses allégations d'une affectation exclusive du salarié à d'autres chantiers ;
Qu'il convient de relever que, à l'appui de sa revendication de rappel de salaire pour des heures de travail non réglées, Monsieur X...a établi pour chaque mois de la période allant du 1er janvier au 30 septembre 2010 un tableau mentionnant pour chaque journée l'exercice ou non d'une activité professionnelle ainsi que le lieu d'accomplissement de la prestation de travail ;
Qu'il résulte dudit tableau que le salarié a travaillé sur le site de PHILIPS à Pont à Mousson les :-10 et 11 mai 2010 ;-8 et 9 juin 2010 ;-6 et 7 juillet 2010 ;

Que l'employeur n'a formulé aucune observation concernant ce tableau produit aux débats par le salarié ;

Que l'appelante n'a également fourni aucun élément concret de nature à justifier l'allégation, contenue dans la lettre de licenciement, de « retrait de chantiers » ou de « mécontentement » de clients prétendument consécutif à l'insubordination du salarié quant à la fourniture d'une carte d'identité valide ;
Qu'en l'absence de preuve de l'existence d'une opposition de la société PHILIPS, ou de toute autre entreprise cliente, à l'accès de Monsieur X...à leur site, il y a lieu de constater que les raisons professionnelles alléguées par la société ISS PROPRETE pour exiger du salarié la fourniture d'une carte nationale d'identité en cours de validité puis pour le sanctionner pour non-remise d'un tel document ne sont pas justifiées ;
Que le licenciement de Monsieur X...est, dès lors, dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré sur ce point ;

Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse

Attendu que Monsieur X...comptait lors du licenciement plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise employant de manière habituelle au moins onze salariés de sorte qu'elle relève du régime d'indemnisation de l'article L 1235-3 du code du travail ;
Qu'il résulte des dispositions précitées que si le licenciement survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse le juge peut proposer la réintégration du salarié ou en cas de refus par l'une ou l'autre des parties allouer au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure au montant des salaires bruts perçus pendant les six derniers mois d'activité ;
Qu'au-delà de l'indemnité minimale, le salarié doit justifier de l'existence d'un préjudice supplémentaire ;
Que Monsieur X...produit aux débats des courriers de Pole emploi l'informant qu'il ne remplissait plus les conditions nécessaires au maintien de son inscription sur la liste des demandeurs d'emploi à compter du 27 décembre 2010 et de l'arrêt de la procédure de recouvrement d'un indû au titre du versement d'allocations pour la période allant du 11 janvier au 27 février 2011 et au motif d'une absence de présentation d'une pièce d'identité en cours de validité ;
Que lors du licenciement Monsieur X...comptait 9 ans et 6 mois d'ancienneté et était âgé de 48 ans ;
Que le salaire mensuel perçu était de 1. 398, 40 euros ;
Que l'ensemble de ces éléments justifie que soit allouée à Monsieur X...une somme de 12000, 00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Que le jugement entrepris est donc infirmé s'agissant du montant de dommages et intérêts alloué ;
Que Monsieur X...sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce que ce dernier a condamné la société ISS PROPRETE à lui payer les sommes suivantes :-2 908, 68 ¿ brut à titre d'indemnité de préavis ;-290, 87 ¿ brut à titre de congés payés y afférents ;-2 835, 96 ¿ à titre d'indemnité de licenciement ;-1 323, 29 ¿ brut au titre de rémunération de la mise à pied conservatoire ;-132, 32 ¿ brut au titre de congés payés sur la mise à pied conservatoire ;

Que le principe même de ces créances est indiscutable au regard du caractère abusif de la rupture ;
Que la société ISS PROPRETE n'a formulé aucune observation en ce qui concerne le quantum des sommes réclamées ;
Qu'il y a lieu, partant, de confirmer le jugement entrepris au titre des condamnations susvisées ;

Sur la demande de réparation d'un préjudice moral

Que Monsieur X...soutient que la démarche « incessante » de l'employeur visant à la communication d'une carte d'identité nationale en cours de validité et sa demande auprès des services préfectoraux, initiative inappropriée et attentatoire à son honneur et à sa dignité, ont occasionné un préjudice moral dont il demande réparation à hauteur de la somme de 3. 000, 00 euros ;
Que la double mise en demeure de l'employeur, par lettres recommandées, d'avoir à lui fournir une carte d'identité nationale en cours de validité ne saurait être considérée comme l'expression d'une forme de harcèlement moral du salarié, étant rappelé que l'absence de fondement d'une telle démarche a justifié la qualification de rupture abusive ;
Que si la société ISS PROPRETE a effectivement pris attache, par lettre du 17 juin 2010, auprès des services de la préfecture de la Moselle, c'est au regard de la complexité objective de la situation administrative de Monsieur X..., telle que rapportée par lui-même à son employeur, à savoir le fait qu'il soit né en 1962 en Algérie et l'impossibilité d'obtenir un extrait d'acte de naissance requis pour le renouvellement de sa carte d'identité ;
Que nonobstant une certaine maladresse rédactionnelle quant aux « doutes » exprimées quant aux déclarations du salarié sur cette impossibilité, la démarche de la société ISS PROPRETE visant à obtenir des éclaircissements auprès de services administratifs ne peut être considérée comme fautive ;
Que la demande indemnitaire de Monsieur X...sera rejetée ;

Sur le rappel de salaire

Attendu que Monsieur X...formule une demande de rappel de salaires, à hauteur de 22. 128, 00 euros, afférents à des heures supplémentaires de travail demeurées impayées ;
Que l'article L 3171-4 du code du travail dispose qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, et qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande le juge forme sa conviction après avoir ordonné en cas de besoin toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;
Que s'il résulte de l'article précité que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des deux parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient néanmoins à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ;
Que le salarié affirme qu'il accomplissait chaque semaine une « moyenne » de huit heures supplémentaires non payées ;
Qu'en dépit de cette évaluation approximative effectuée par le salarié lui-même, ce dernier fonde sa réclamation sur un nombre fixe de 8 heures de travail hebdomadaires supplémentaires pendant 240 semaines, pour la période allant du 2 novembre 2005 au « 2 novembre 2010 » alors même que le salarié a fait l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire le 27 septembre 2010 et a été licencié pour faute grave le 21 octobre 2010 ;
Que Monsieur X...ne produit aucun tableau ou décompte pour la période allant du 2 novembre 2005 au 31 décembre 2009 ;
Que s'agissant de la période allant du 1er janvier au 30 septembre 2010, Monsieur X...a établi pour chaque mois concerné un tableau mentionnant pour chaque journée l'exercice ou non d'une activité professionnelle, le lieu d'activité et, pour certaines journées, des indications sur le nombre d'heures de travail effectuées ; que le salarié a également fourni des indications détaillées pour plusieurs journées du mois de juin, juillet et septembre 2010 et annoté de manière manuscrite les bulletins de paie desdits mois ;
Que la comparaison entre ces tableaux et les bulletins de salaire, lesquels comportent des informations journalières sur la durée de travail, ne font pas apparaître de contradictions à l'exception des mois de juin, juillet et septembre 2010 ;
Que s'agissant de la journée du 24 juin 2010, Monsieur X...fait valoir que l'employeur a retiré sans motif légitime 4, 5 heures de travail sur les 7 heures effectuées ce jour ;
Que la société ISS PROPRETE n'a présenté aucune observation ni justification concernant cette retenue ;
Que s'agissant de la semaine du lundi 28 juin 2010 au dimanche 4 juillet 2010, Monsieur X...indique qu'il a travaillé, sur le site de la fromagerie BEL à Cléry le Petit, 9 heures les 29 et 30 juin 2010 ainsi que le 1er et le 2 juillet 2010, alors que seules 7 heures de travail lui ont été réglées par l'employeur ;
Que la société ISS PROPRETE n'a présenté aucune observation ni justification concernant le volume horaire de travail de Monsieur X...les jours concernés ;
Que s'agissant de la semaine du lundi 30 août au dimanche 5 septembre 2010, Monsieur X...indique qu'il a travaillé, sur le site de l'usine CLASS de Saint Rémy, 7 heures le 1er septembre 2010, alors que seules 5 heures de travail lui ont été réglées par l'employeur ;
Que la société ISS PROPRETE n'a présenté aucune observation ni justification concernant le volume horaire de travail de Monsieur X...les jours concernés ;
Que s'agissant de la semaine du lundi 20 septembre au dimanche 26 septembre 2010, Monsieur X...indique qu'il a travaillé, sur le site de l'usine CLASS de Saint Rémy, 8 heures le 23 septembre 2010, alors que seules 7 heures de travail lui ont été réglées par l'employeur ;
Que la société ISS PROPRETE n'a présenté aucune observation ni justification concernant le volume horaire de travail de Monsieur X...les jours concernés ;
Qu'il s'évince des motifs qui précèdent que la société ISS PROPRETE reste à devoir la somme de 59, 93 euros, représentant 6, 5 heures de travail normales non réglées, et 103, 72 euros, représentant 9 heures de travail supplémentaires non réglées, soit un rappel de salaire de 163, 65 euros, outre 16, 36 au titre des congés payés y afférents ;
Que le nombre d'heures de travail supplémentaires effectuées par Monsieur X...n'ouvre pas droit à une contrepartie obligatoire en repos, en l'absence du dépassement du contingent annuel de 220 heures ; que le salarié ne peut, dès lors, invoquer une quelconque indemnisation à ce titre ;
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile
Attendu que l'appelante, qui succombe pour l'essentiel, doit être condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'au paiement d'une somme de 15000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, conformément à l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société ISS PROPRETE à payer à Monsieur X...la somme de 9000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Statuant à nouveau dans cette limite ;
CONDAMNE la société ISS PROPRETE à payer à Monsieur X...la somme de 12000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;
Ajoutant ;
CONDAMNE la société ISS PROPRETE à payer à Monsieur X...la somme de 163, 65 euros au titre d'un rappel de salaire, outre 16, 36 au titre des congés payés y afférents ;
CONDAMNE la société ISS PROPRETE à payer à Monsieur X...la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
DEBOUTE les parties de toute autre demande ;
CONDAMNE la société ISS PROPRETE aux dépens d'appel.
Le Greffier, Le Président de Chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de metz
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/02417
Date de la décision : 01/10/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.metz;arret;2014-10-01;12.02417 ?
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