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10/09/2014 | FRANCE | N°12/02271

France | France, Cour d'appel de metz, Chambre sociale, 10 septembre 2014, 12/02271


Arrêt no 14/ 00451

10 Septembre 2014--------------- RG No 12/ 02271------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 17 Juillet 2012 11/ 0805 C------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU

dix Septembre deux mille quatorze
APPELANTE :
SARL MEDIATER prise en la personne de son représentant légal 1 Rue Jean Antoine Chaptal 57070 METZ QUEULEU

Représentée par Me FREZARD, avocat au barreau de MULHOUSE substitué par Me BOTTE, avocat au barreau de MULHOUSE r>
INTIMÉE :
Madame Maria X...... 57050 LONGEVILLE LES METZ

Représentée par Me PETIT, avocat ...

Arrêt no 14/ 00451

10 Septembre 2014--------------- RG No 12/ 02271------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 17 Juillet 2012 11/ 0805 C------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU

dix Septembre deux mille quatorze
APPELANTE :
SARL MEDIATER prise en la personne de son représentant légal 1 Rue Jean Antoine Chaptal 57070 METZ QUEULEU

Représentée par Me FREZARD, avocat au barreau de MULHOUSE substitué par Me BOTTE, avocat au barreau de MULHOUSE

INTIMÉE :
Madame Maria X...... 57050 LONGEVILLE LES METZ

Représentée par Me PETIT, avocat au barreau de METZ
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Mai 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Alain BURKIC, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre Madame Marie-José BOU, Conseiller Monsieur Alain BURKIC, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Morgane PETELICKI, Greffier
ARRÊT :
contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre, et par Mademoiselle Morgane PETELICKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Madame X...a été embauchée par la société REXIA le 1er juillet 2004, avec effet au 16 août 2004, en qualité de secrétaire.
Le 9 octobre 2010, Madame X...a adressé la lettre suivante à son employeur, la société MEDIATER :
« Mes fonctions étant réduites depuis plusieurs mois à faire du classement et répondre au téléphone entre autre, je me vois contrainte de quitter votre entreprise. Ces tâches semblent assez éloignées du poste de responsable technico-commercial que j'ai occupé jusqu'à là. En tout état de cause, je me permettrais de vous téléphoner afin que nous évoquions ensemble mes conditions de départ et notamment la période de préavis effectuée ».

Par demande enregistrée au greffe du Conseil de Prud'hommes de METZ le 28 janvier 2011, Madame Maria X...a attrait son ancien employeur, la SARL MEDIATER, prise en la personne de son représentant légal, en vue d'obtenir :
- que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail intervenue le 19 octobre 2010 soit analysée comme produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison de manquements graves de l'employeur à ses obligations contractuelles,
- qu'en conséquence, ledit employeur soit condamné à lui verser : 5 002, 00 ¿ brut à titre d'indemnité de préavis, 500, 20 ¿ brut au titre des congés payés afférents au préavis, 3 008, 00 ¿ à titre d'indemnité de licenciement, 848, 48 ¿ brut à titre de rappel de salaire compensant la perte d'avantage en nature, 84, 34 ¿ brut à titre de congés payée afférents aux avantages en nature, le tout avec intérêts de droit au taux légal à compter du jour de la demande et exécution provisoire sur fondement de l'article R 1454-28 du Code du Travail, 28 104, 36 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement à intervenir et exécution provisoire par application des dispositions de l'article 515 du Code de Procédure Civile, 1 000, 00 sur fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- que l'employeur soit condamné à rectifier le certificat de travail en y mentionnant la qualité de responsable technico-commerciale, ceci sous astreinte de 100 ¿ par jour de retard à compter du jugement à intervenir,
- que l'employeur soit condamné à supporter les entiers frais et dépens de l'instance,
Par jugement du 17 juillet 2012, le Conseil de Prud'hommes de METZ a statué en ces termes :
« DIT ET JUGE les demandes de Madame Maria X...recevables et partiellement bien fondées.
DIT ET JUGE que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de Madame Maria X..., intervenue par courrier du 19 octobre 2010, est imputable à la SARL MEDIATER prise en la personne de son représentant légal et produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, abusif.
CONDAMNE en conséquence la SARL MEDIATER, prise en la personne de son représentant légal, à verser à Madame Maria X...les sommes suivantes :
4 684, 06 ¿ brut â titre d'indemnité compensatrice de préavis, 468, 41 ¿ brut au titre des congés payés afférents au préavis, 2 927, 53 ¿ à titre d'indemnité de licenciement, 848, 48 ¿ brut à titre d'indemnité compensant tes avantages en nature unilatéralement supprimés, 84, 84 ¿ brut à titre d'indemnité de congés payés sur avantage en nature, le tout avec intérêts de droit à compter du jour de la convocation devant le bureau de conciliation et exécution provisoire en application des dispositions de l'article R 1454-23 du Code du Travail, le salaire moyen retenu par mois de travail complet étant de 2 342, 03 ¿ brut, 14 052, 00 ¿ à titre de dommages et intérêts destinés à compenser le préjudice subi en raison de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, ceci avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent jugement et sans qu'il ne soit nécessaire d'ordonner l'exécution provisoire sur fondement de l'article 515 du Code de Procédure Civile.

ORDONNE à la SARL MEDIATER, prise en la personne de son représentant légal, de rectifier le certificat de travail de Madame Maria X...en y mentionnant la fonction de « responsable technico-commercial » au moins pour la période décembre 2008/ octobre 2010, ceci sous astreinte provisoire de 50 ¿ par jour de retard à compter du 15eme jour suivant la notification du présent jugement.
SE RESERVE le droit de liquider l'astreinte.
CONDAMNE la SARL MEDIATER, prise en la personne de son représentant légal, à verser une somme de 500, 00 ¿ sur fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile à Madame Maria X...et MET les frais et dépens de l'instance à la charge de la défenderesse.
DEBOUTE les parties pour le surplus de leurs prétentions en ce compris la demande
reconventionnelle de la SARL MEDIATER. »
Suivant déclaration de son avocat transmise par lettre recommandée avec accusé de réception, expédiée le 24 juillet 2012 et enregistrée le 26 juillet 2012 au greffe de la cour d'appel de METZ, la société MEDIATER a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions de son avocat présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, la société MEDIATER demande à la Cour de :
« DIRE ET JUGER que la rupture du contrat de travail par Madame X...le 19 octobre 2010 doit produire les effets d'une démission,
EN CONSEQUENCE
INFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes de METZ, DEBOUTER Madame X...de l'intégralité de ses demandes, CONDAMNER Madame X...à 2 342, 03 ¿ pour non-respect du préavis, CONDAMNER Madame X...à 10 000 ¿ au titre de l'article 32-1 du CPC pour procédure abusive, CONDAMNER Madame X...à 2 000 ¿ au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers frais et dépens. »

Par conclusions de son avocat présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, Madame X...demande pour sa part à la Cour de confirmer intégralement le jugement déféré et de condamner la société MEDIATER à lui payer la somme de 2 000 ¿ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

SUR CE

Vu le jugement entrepris,

Vu les conclusions écrites des parties, du 10 avril 2014 pour la société MEDIATER et du 22 mai 2014 pour Madame X..., présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises ;

Sur la rupture du contrat de travail

Attendu qu'il convient de rappeler que lorsque le salarié démissionne en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture constitue une prise d'acte et
produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire, d'une démission ;
Qu'en l'espèce, il est manifeste que Madame X...a assorti sa lettre de démission d'un grief explicite à l'encontre de l'employeur, à savoir une réduction de ses tâches depuis plusieurs mois à des activités de classement et de standard téléphonique ;
Que cette lettre doit, dès lors, s'analyser en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur ;
Qu'il convient de rappeler que l'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige et que le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit ;
Que Madame X...indique que, à compter du 1er décembre 2008, elle s'est vue confier des tâches de responsable technico-commercial et bénéficiait même depuis le 1er septembre 2008 d'une voiture de fonction, avantage en nature figurant comme tel dans ses bulletins de paie ; que, en juin 2010, son employeur a supprimé cet avantage en exigeant la restitution du véhicule mais également ses tâches de responsable technico-commercial en lui demandant par courrier du 17 juin 2010 de se « recentrer sur ses missions en assurant le back office des services techniques et commerciaux (taches pour lesquelles un véhicule n'est pas nécessaire) » et en cessant de lui adresser les notes de service concernant les données commerciales de l'entreprise ;
Que Madame X...conclut que la prise d'acte est justifiée par des modifications successives du « contrat » imposées par l'employeur mais affirme également que ce dernier a modifié unilatéralement les « conditions d'emploi » et ce par une réduction de ses tâches de travail, accompagnée d'une mise à l'écart, et la suppression d'un avantage en nature ;
Qu'il y a lieu de rappeler que la modification du contrat de travail, qui implique l'accord du salarié, doit être distinguée du changement des conditions de travail qui est opposable au salarié ;
Que la société MEDIATER indique qu'elle a demandé à Madame X...de prêter main forte à l'équipe commerciale à la suite du départ de plusieurs salariés en assumant des tâches d'assistance commerciale et qu'elle a, à cet égard, mis à disposition de la salariée un véhicule de fonction à partir de septembre 2008, mais souligne qu'il s'agissait d'une situation temporaire qui n'a entraîné aucun avenant au contrat de travail, Madame X...ayant conservé contractuellement son emploi de secrétaire, et qui a pris fin en juin 2010 avec l'embauche d'un commercial ;
Que si la réalité de l'exercice de fonctions de « responsable technico-commerciale », selon la qualification mentionnée dans les bulletins de salaire de Madame X...à compter de décembre 2008, et la mise à disposition d'un véhicule de fonction est établie, force est de constater que la salariée n'allègue ni a fortiori ne justifie d'une contractualisation, par nature expresse et définitive, de ces nouvelles tâches et de cet avantage en nature ;
Que, dans ses écritures, Madame X...reconnaît explicitement qu'aucun avenant au contrat de travail n'a été passé entre les parties ;
Qu'en l'absence de toute contractualisation des nouvelles fonctions et de l'avantage en nature en cause, Madame X...ne saurait utilement invoquer une modification unilatérale du « contrat » justificative d'une prise d'acte aux torts de l'employeur ;
Que la situation professionnelle de Madame X...à compter de septembre 2008 relevait d'une décision unilatérale de l'employeur, acceptée par la salariée, et sur laquelle ce dernier pouvait unilatéralement revenir en demandant à la salariée d'effectuer la prestation de travail contractuellement prévue, sans mise à disposition d'un véhicule de fonction ;
Qu'il y a lieu, dès lors, de considérer que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission et de rejeter l'ensemble des prétentions de Madame X...;
Que le jugement entrepris doit, dans ces circonstances, être infirmé, y compris en ce qu'il ordonne, sous astreinte, la rectification du certificat de travail de la salariée avec la mention de la fonction « responsable technico-commercial » pour la période allant de décembre 2008 à octobre 2010, alors même qu'il a été mis fin à cette fonction en juin 2010 ;

Sur la demande de condamnation au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis

Attendu que lorsque la prise d'acte de la rupture du contrat produit les effets d'une démission, le salarié doit à l'employeur le montant de l'indemnité compensatrice de préavis résultant de l'application de l'article L. 1237-1 du code du travail ;
Que cette indemnité n'est pas due si le salarié a été dispensé d'effectuer son préavis avec l'accord de l'employeur ;
Qu'en réponse à la lettre de Madame X...du 21 octobre 2010 demandant à son employeur de lui confirmer son accord concernant le préavis « ramené à la date du 1er novembre 2010 », la société MEDIATER a indiqué, dans une lettre du 25 octobre
2010, ce qui suit : « nous répondons favorablement à votre demande expresse de dispense de préavis et vous serez donc libérée de vos fonctions au sein de notre société à compter du 1er novembre 2010 » ;
Qu'il y a lieu, dans ces circonstances, de rejeter la demande de la société MEDIATER au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis de 2342, 03 euros ;

Sur la demande de condamnation de la salariée pour procédure abusive

Attendu que la société MEDIATER soutient qu'il est « manifeste que la procédure engagée par Madame X...est particulièrement abusive » et sollicite sa condamnation au paiement d'une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
Que l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'est pas en soi constitutive d'une faute justifiant sa condamnation à des dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Que la société MEDIATER ne fait état ni a fortiori ne justifie de circonstances particulières caractérisant un abus de droit de la part de Madame X...;
Qu'il convient de débouter la société MEDIATER de sa demande de dommages et intérêts ;

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Attendu que l'intimée, qui succombe, doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement d'une somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel, conformément à l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de la société MEDIATER au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et d'une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
INFIRME le jugement entrepris pour le surplus ; Et statuant à nouveau ;

DIT que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de Madame X...produit les effets d'une démission ;
DEBOUTE Madame X...de l'ensemble de ses demandes ;
CONDAMNE Madame X...à payer à la société MEDIATER la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
CONDAMNE Madame X...aux dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier, Le Président de Chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de metz
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/02271
Date de la décision : 10/09/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.metz;arret;2014-09-10;12.02271 ?
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