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08/07/2014 | FRANCE | N°13/02747

France | France, Cour d'appel de metz, Chambre sociale, 08 juillet 2014, 13/02747


Arrêt no 14/ 00432 08 Juillet 2014--------------- RG No 13/ 02747------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 18 Octobre 2011 10/ 0248 C------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D'APPEL DE METZ CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU
huit Juillet deux mille quatorze
APPELANTE :
SA TRANSPORTS KOCH, prise en la personne de son représentant légal Rue du Moulin BP 5 57740 LONGEVILLE LES ST AVOLD Représentée par Me VUILLAUME, avocat au barreau de METZ

INTIMÉ : Monsieur Philippe X...

...57500 SAINT AVOLD ReprésentÃ

© par Me PETIT, avocat au barreau de METZ substitué par Me CABAILLOT, avocat au barrea...

Arrêt no 14/ 00432 08 Juillet 2014--------------- RG No 13/ 02747------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 18 Octobre 2011 10/ 0248 C------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D'APPEL DE METZ CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU
huit Juillet deux mille quatorze
APPELANTE :
SA TRANSPORTS KOCH, prise en la personne de son représentant légal Rue du Moulin BP 5 57740 LONGEVILLE LES ST AVOLD Représentée par Me VUILLAUME, avocat au barreau de METZ

INTIMÉ : Monsieur Philippe X...

...57500 SAINT AVOLD Représenté par Me PETIT, avocat au barreau de METZ substitué par Me CABAILLOT, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Mai 2014, en audience publique, devant la cour composée de : Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre Madame Marie-José BOU, Conseiller Monsieur Alain BURKIC, Conseiller

qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Morgane PETELICKI, Greffier
ARRÊT :
contradictoire Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après prorogation, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Signé par Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre, et par Mademoiselle Morgane PETELICKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur Philippe X... a été engagé par la SA TRANSPORTS KOCH le 3 mai 1999 en qualité de chauffeur poids lourd. Par lettre recommandée en date du 10 décembre 2007, Monsieur X... a été convoqué à un entretien préalable avant licenciement prévu pour le 17 décembre 2007 au siège social de l'entreprise. Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 décembre 2007, l'employeur a licencié le salarié pour faute grave. La lettre de licenciement est ainsi libellée :

« Nous vous licencions pour faute grave aux motifs suivants : 1/ Actes répétés d'insubordination et refus de respecter la réglementation sociale européenne applicable en matière de transports routiers de marchandises, depuis le mois de juin 2007/ jusqu'à ce jour, à savoir :- Vous avez reçu des consignes strictes et des rappels concernant la remise des disques originaux à l'entreprise et la lecture quotidienne des disques. (note de service 31 08 2006, rappel sur programme du 05/ 12/ 07, rappel verbaux,...) Vous avez été parfaitement informé des dispositions réglementaires. Malgré cela vous persistez à ne pas respecter les règles, celles-ci vous imposent de garder les disques originaux de la semaine de travail en cours ainsi que ceux des deux semaines précédentes, les autres disques originaux ne devant plus être conservés par vos soins, mais rendus obligatoirement à l'entreprise.- Vous vous abstenez volontairement, et malgré nos injonctions, de remplir dans les rapports journaliers les rubriques permettant de justifier des temps de travail hors conduite et des temps d'attente.

- Vous avez reçu des consignes sur l'approvisionnement à la pompe de gazole le soir au retour de la tournée, et vous persistez à faire le plein du véhicule le matin. (note de service du 07 09 2006 et rappel du 14 05 2007) Vous avez également reçu des consignes et instructions concernant différents autres points que vous ne respectez pas, notamment le lavage et l'entretien du camion... Vos actes d'insubordination sont réitérés depuis le mois de juin 2007 et vous confirmez le refus de respecter les instructions de votre employeur dans une lettre du 04 décembre 2007. 2/ Sur les factures ORANGE des mois d'octobre et novembre 2007, il apparaît que vos appels téléphoniques à partir du téléphone mis à disposition par l'entreprise dans le camion sont trop souvent personnels (numéros d'appels inconnus de l'entreprise), pour de longues durées (avec parfois le sélecteur tachygraphe en position travail hors conduite ou encore en position attente), ces appels ne sont pas justifiés par les nécessités de votre travail. En outre, certains appels sont donnés alors que vous êtes en conduite étant précisé que votre véhicule n'est pas équipé en main libre. Les infractions au Code de la Route sont caractérisées. 3/ Vous avez commis depuis début novembre 2007 de nombreuses infractions au temps de conduite, à savoir les 8, 12, 13, 16, 19, 20, 22, 26, 29 novembre 2007 et les 3 et 4 décembre 2007 nous avons relevé 11 infractions pour dépassement de la durée maximale de conduite continue. Votre comportement entraîne des préjudices importants pour l'entreprise :

En effet, il nous est impossible de conserver votre contrat de travail sans mettre en péril la sécurité des usagers de la route. En outre, il est impossible au service exploitation de l'entreprise d'organiser votre travail puisque vous ne respectez pas vos obligations (remises de disques, lectures des disques, rapports journaliers complétés,...) La Direction ne peut vérifier la commission d'éventuelles infractions et fraudes de manipulation du sélecteur de chronotachygraphe en l'absence des remises desdits documents originaux. En cas de contrôle de l'entreprise par les services administratifs habilités (DRE et Inspection du Travail), nous serions en infraction du fait de l'absence des disques originaux. Enfin, les infractions commises allant des contraventions aux délits, pourraient être poursuivies pénalement par le Procureur de la République et entraîner de lourdes condamnations pénales voire administratives (retrait des licences) du chef d'entreprise. Cette situation rend impossible votre maintien dans l'entreprise et votre contrat prend fin à la date prévue pour la réception de la présente, soit le 22 12 2007. Il vous sera remis votre salaire, le certificat de travail, le reçu pour solde de tout compte et l'attestation ASSEDIC, à cet effet vous voudrez bien convenir d'une date en appelant nos services. »

Suivant demande enregistrée le 9 mars 2010, Monsieur Philippe X... a fait attraire devant le Conseil de Prud'hommes de METZ son ancien employeur, la société TRANSPORTS KOCH, en la personne de son représentant légal, aux fins d'obtenir sa condamnation au paiement de diverses sommes au titre de créances salariales et indemnitaires. Par jugement du 18 octobre 2011, le Conseil de Prud'hommes de METZ a statué en ces termes : « DIT que le licenciement de Monsieur Philippe X... ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse

CONDAMNE la SA TRANSPORTS KOCH, pris en la personne de son représentant légal, à payer à Monsieur X... Philippe les sommes suivantes :
-4839, 50 ¿ à titre d'indemnités de préavis ;-483, 95 ¿ au titre des congés payés y afférents ;-5969, 46 ¿ au titre des heures supplémentaires ;

-596, 95 ¿ au titre des congés payés y afférents ;-2984, 73 ¿ au titre des repos compensateurs ;-298, 47 ¿ au titre des congés payés y afférents ;

-15000, 00 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;-500, 00 ¿ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile. DEBOUTE Monsieur X... Philippe du surplus de ses demandes.

DEBOUTE la SA TRANSPORTS KOCH de sa demande faite au titre de l'article 700 du Code Procédure Civile. RAPPELLE que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit dans les limites des dispositions de l'article R1454-28 du Code du Travail sans qu'il soit besoin de l'ordonner pour le surplus. MET les éventuels frais et dépens ainsi que les frais d'exécution du présent jugement à la charge de la partie défenderesse. » Suivant déclaration de son avocat reçue au greffe de la Cour le 17 novembre 2011, la société TRANSPORTS KOCH a interjeté appel de cette décision. Par conclusions de son avocat présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, la société TRANSPORTS KOCH demande à la Cour de :

« INFIRMER le jugement du conseil de prud'hommes de METZ du 18 octobre 2011 en toutes ses dispositions. Statuant à nouveau, DEBOUTER M. X... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions. CONDAMNER M. X... à payer à la SA TRANSPORTS KOCH la somme de 2. 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

CONDAMNER M. X... aux entiers frais et dépens tant de première instance que d'appel. » Par conclusions de son avocat présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, Monsieur Philippe X... demande pour sa part à la Cour de : « DIRE et JUGER l'appel de la SA TRANSPORTS KOCH recevable mais mal fondée. En conséquence, DIRE le licenciement de Monsieur X... sans cause réelle et sérieuse CONFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Metz en date du 18 octobre 2011 en ce qu'il a condamné la SA TRANSPORTS KOCH à payer à Monsieur X... les sommes suivantes 4839, 50 euros au titre de l'indemnité de préavis 483, 95 euros au titre des congés payés y afférents 5969, 46 euros au titre des heures supplémentaires 596, 95 euros au titre des congés payés y afférents 2984, 73 euros au titre des repos compensateurs 298, 47 euros au titre des congés payés y afférents 15 000, euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 500 euros au titre de l'article 700 du CPC INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Metz en date du 18 octobre 2011 en ce qu'il a débouté Monsieur X... de sa demande au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement. En conséquence, CONDAMNER la société SA TRANSPORTS KOCH à verser à Monsieur Philippe X... les sommes suivantes :

-4 355, 55 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement CONDAMNER la SA TRANSPORTS KOCH à payer à Monsieur X... la somme de 2000, 00 euros au titre de l'article 700 du CPC. CONDAMNER la SA TRANSPORTS KOCH aux entiers frais et dépens. »

SUR CE
Vu le jugement entrepris,
Vu les conclusions écrites des parties du 1er octobre 2013 et du 16 mai 2014 pour la société TRANSPORTS KOCH et du 7 mai 2014 pour Monsieur Philippe X..., présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises ;

Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement Attendu que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ;

Que l'employeur supporte la charge de la preuve de la faute grave et de son imputation certaine au salarié ; Attendu qu'il résulte de la lettre de licenciement, dont les termes fixent les limites du litige que la société TRANSPORTS KOCH a entendu mettre fin à la relation contractuelle qui l'unissait à Monsieur Philippe X... au regard d'un triple grief prétendument constitutif d'une faute grave, à savoir des actes répétés d'insubordination ainsi que le refus de respecter la réglementation sociale européenne applicable en matière de transports routiers de marchandises, une utilisation du téléphone de l'entreprise à des fins personnelles pendant le temps de conduite et des infractions aux temps de conduite ;

Sur les actes répétés d'insubordination et le refus de respecter la réglementation sociale européenne applicable en matière de transports routiers de marchandises Attendu que l'employeur reproche à M. X... des actes répétés d'insubordination et un refus de respecter la réglementation sociale européenne applicable en matière de transports routiers de marchandises « depuis le mois de juin 2007 jusqu'à ce jour », la lettre de licenciement visant précisément le fait que le salarié n'a pas remis les disques chronotachygraphes originaux à l'entreprise dans le délai prescrit, n'a pas rempli dans les rapports journaliers les rubriques concernant les temps de travail hors conduite et les temps d'attente, a contrevenu aux prescriptions de l'entreprise concernant le moment de réapprovisionner son véhicule en gasoil ainsi qu'en matière de lavage et l'entretien du véhicule ;

Que Monsieur Philippe X... soutient que la faute alléguée est prescrite et ne peut être invoquée à l'appui d'une sanction disciplinaire ; Que si aux termes de l'article L122-44 du code du travail, applicable à l'époque des faits, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, ces dispositions ne font pas obstacle à la prise en considération d'un fait antérieur à deux mois dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi ou répété dans ce délai ;

Que tel est le cas en l'espèce du comportement incriminé d'insubordination du salarié qui a débuté en juin 2007 et s'est poursuivi jusqu'au licenciement ; Qu'il ne saurait, dès lors, être valablement conclu à une prescription de la faute alléguée par l'employeur ; Que, en second lieu, Monsieur Philippe X... conteste l'intégralité des griefs illustrant prétendument une insubordination de sa part et soutient, en tout état de cause, que la réaction tardive de l'employeur exclut toute faute grave ; Que la société TRANSPORTS KOCH fait valoir que, conformément à la législation, la note de service du 31 août 2006 impose aux conducteurs de ne conserver avec eux que les disques de la semaine en cours et ceux des 2 semaines écoulées, tous les autres disques devant être remis à l'employeur et que ce n'est qu'à la suite d'une mise en demeure adressée le 14 décembre 2007, après des rappels verbaux restés sans effets, que Monsieur Philippe X... a remis des disques détenus depuis le 12 juin 2007 ;

Que l'employeur produit aux débats la lettre recommandée adressée au salarié le 14 décembre 2007 lui signifiant que « malgré de multiples rappels et messages laissés à la borne », il n'avait toujours pas rendu les disques originaux de lecture chronotachygraphe ; Que parmi les pièces communiquées par le salarié, lequel soutient que l'entreprise détenait les disques réclamés, figure une lettre recommandée adressé à son employeur le 18 décembre 2007 débutant pas la mention suivante : « Veuillez trouver ci-joint mes disques » ; Que l'employeur a répondu à cette lettre du salarié par courrier recommandé du 28 décembre 2007 en lui indiquant ce qui suit : « nous prenons acte de votre remise tardive du 22-12-2007 des disques chronotachygraphes » ;

Que Monsieur Philippe X... ne fournit aucun élément concret permettant de contredire les preuves documentaires susvisées justifiant le grief tiré d'une remise tardive des disques chronotachygraphes originaux détenus par lui depuis le 12 juin 2007 ; Que le fait que le salarié ait pu, dans sa lettre du 18 décembre 2007, demander à son employeur de lui faire parvenir « en retour » un exemplaire de tous les disques pour les 12 derniers mois passés ne fait que corroborer la réalité du grief ; Qu'il importe, toutefois, de souligner que l'employeur ne rapporte pas la preuve de l'existence des « multiples rappels » ou des « messages laissés à la borne » à l'attention du salarié concernant la remise des disques originaux chronotachygraphes, avant la lettre recommandée adressée au salarié le 14 décembre 2007 ;

Qu'il convient encore de relever que, dans ses écritures, sous le sous-titre consacré au grief tiré de la « non-remise tardive des disques originaux », l'employeur indique ce qui suit : « de plus, le salarié se dispense de lire le disque journalier à la borne prévue à cet effet » et se réfère, à cet égard, à deux notes datées des 5 et 7 décembre 2007 ;
Que si ces deux notes sont mentionnées dans la lettre de licenciement c'est uniquement au titre du fait que le salarié avait « reçu des consignes strictes et des rappels concernant la remise des disques originaux à l'entreprise et la lecture quotidienne des disques », la lettre ne comportant pas la mention précise d'un grief tiré d'un défaut de lecture des disques ; Que l'employeur ne peut, dès lors, invoqué un tel grief dans ses conclusions, les termes de la lettre de licenciement fixant les limites du litige ; Qu'en tout état de cause, les notes datées des 5 et 7 décembre 2007 correspondent à de simples indications manuscrites dont l'auteur demeure inconnu et n'ont aucun caractère contradictoire, ce qui les prive de toute force probante ;

Que la société TRANSPORTS KOCH reproche également à Monsieur Philippe X... de ne pas avoir rempli dans les rapports journaliers les rubriques permettant de justifier des temps de travail hors conduite et des temps d'attente et produit les rapports du salarié des 23, 26, 28 novembre et des 3, 4, 5 et 10 décembre 2014 confirmant le fait que le salarié n'a pas renseigné les rubriques afférentes à la manipulation du tachygraphe lors de chaque interruption de conduite de même que les rapports d'un autre salarié dûment complétés ; Que Monsieur Philippe X... fait valoir qu'il n'a jamais rempli ces rubriques tout au long de l'exécution de son contrat de travail sans réaction de son employeur ; Que si la société TRANSPORTS KOCH justifie d'une note de service datant du 20 février 2003 relative à la rédaction des rapports journaliers, elle ne produit qu'un seul rappel à l'ordre adressé à Monsieur Philippe X... sur cette question par lettre recommandée du 4 décembre 2007 avec avis de réception signé par le salarié le lendemain alors même que la lettre de licenciement évoque un non-respect des instructions, « malgré nos injonctions », depuis juin 2007 ;

Que contrairement aux affirmations de l'employeur, la lettre adressée par le salarié à son employeur le 5 décembre 2007 ne contient pas l'expression non équivoque d'un refus de respecter les instructions mais des interrogations concernant la pertinence des rubriques concernées des rapports journaliers ;
Qu'il convient, néanmoins, de relever que, nonobstant cette mise en demeure explicite du 4 décembre 2007, le salarié a continué de remplir de la même manière ses rapports des 5 et 10 décembre 2007, en omettant de compléter les rubriques concernées ;
Que la société TRANSPORTS KOCH reproche enfin à Monsieur Philippe X... un défaut de respect des consignes sur l'approvisionnement à la pompe de gazole, effectué le soir au retour de la tournée et non le matin, ainsi que sur le lavage et l'entretien hebdomadaire du véhicule ; Que Monsieur Philippe X... ne conteste pas la matérialité du grief mais prétend, sans aucunement étayer ses allégations, que le comportement incriminé trouve son origine dans des journées de travail trop chargées et soutient que ledit grief ne peut justifier une faute grave ; Qu'il convient, à cet égard, de relever que la société TRANSPORTS KOCH, qui fait remonter à juin 2007, le comportement incriminé, fait état de consignes rappelées à l'ensemble du personnel les 7 septembre 2006 et 14 mai 2007 mais d'aucun rappel à l'ordre adressé spécifiquement à Monsieur Philippe X... et produit un historique des prises de carburant démontrant un réapprovisionnement par le salarié du véhicule, le matin, 17 fois entre le « 13 novembre et le 17 décembre 2007 » ;

Que Monsieur Philippe X... conteste, en revanche, la réalité du grief lié au défaut d'entretien du véhicule ; Que force est de constater que la société TRANSPORTS KOCH se borne à produire une lettre du « 6 décembre 2004 » adressée à Monsieur Philippe X... et lui reprochant, notamment, une absence de régularité dans le lavage du véhicule ; Qu'il apparaît ainsi que la société TRANSPORTS KOCH n'a pas satisfait à la charge de la preuve pesant sur elle quant à l'existence même du comportement incriminé ;

Qu'il s'évince des motifs qui précèdent que l'employeur a établi à suffisance de droit un comportement d'insubordination du salarié, lequel ne peut, en raison du comportement de l'employeur, caractériser une faute grave ; Qu'en effet, la réaction tardive de la société TRANSPORTS KOCH à l'égard du comportement incriminé du salarié, remontant à juin 2007 selon les propres déclarations de l'employeur, est de nature à retirer à la faute du salarié son caractère de gravité ;

Sur l'utilisation du téléphone de l'entreprise à des fins personnelles pendant le temps de conduite

Attendu que la société TRANSPORTS KOCH reproche à Monsieur Philippe X... d'avoir, en octobre et en novembre 2007, utilisé le téléphone mis à sa disposition à des fins personnelles et pendant le temps de conduite et produit à l'appui de ses affirmations une facture détaillée des appels passés ainsi que les disques chronotachygraphes pour les journées des 8, 12, 13, 19, 20, 22, 26, 29 novembre 2007 et celle du 3 décembre 2007 ; Que Monsieur Philippe X... indique que l'ensemble des appels passés était justifié par les nécessités du travail et que le véhicule était équipé d'un « kit main libre » ; Que la simple facture produite par la société TRANSPORTS KOCH ne permet pas de rapporter la preuve certaine de l'existence d'appels téléphoniques privés passés par le salarié et de contredire les déclarations de ce dernier sur le fait que le téléphone était utilisé, non seulement pour pouvoir appeler la société TRANSPORTS KOCH mais également pour obtenir des informations concernant le chantier à livrer auprès du chef de chantier ou d'un autre conducteur ayant déjà effectué une livraison ;

Que la société TRANSPORTS KOCH, qui conteste l'existence d'un « kit main libre », ne fournit aucun élément concret de nature à justifier cette allégation ; Qu'il s'évince des motifs qui précèdent que l'employeur n'a pas rapporté la preuve du grief allégué ;

Sur les infractions aux temps de conduite Attendu que la société TRANSPORTS KOCH indique avoir relevé, pour les journées des 8, 12, 13, 16, 19, 20, 22, 26, 29 novembre 2007 et celles des 3 et 4 décembre 2007, 11 infractions pour dépassement de la durée maximale de conduite continue et produit à l'appui de ses allégations :- un document intitulé « visualisation d'une journée » faisant apparaître pour chacune des journées concernées les dépassements incriminés ;- un document de synthèse détaillant pour les journées concernées, à l'exception des 16 novembre et 4 décembre 2007, l'infraction commise par le salarié au regard des temps de pause de ce dernier ;- les disques chronotachygraphes pour les journées concernées, à l'exception des 16 novembre et 4 décembre 2007, avec des indications manuscrites sur leur déroulement en concordance avec les documents précités ;

Que Monsieur Philippe X... n'a formulé aucune observation concernant les documents précités mais soutient, premièrement, qu'il a fait l'objet d'un contrôle de gendarmerie le 28 novembre 2007 portant sur les disques des derniers jours sans qu'aucun procès-verbal n'ait été dressé ; Que le salarié produit aux débats une copie d'un disque chronotachygraphe sans éléments d'identification en son centre, sans aucun marquage d'un quelconque temps de conduite et de repos et comportant une simple mention manuscrite ainsi libellée : « contrôlé le 28/ 11/ 07 à 14h45 gendarmerie Vic sur Seille 57 » ;

Qu'une telle pièce n'est pas de nature à établir la réalité du contrôle allégué et des conséquences attachées à celui-ci ; Que Monsieur Philippe X... soutient, deuxièmement, que les plannings de travail étaient trop chargés et que, si une infraction était commise, l'employeur s'en accommodait fort bien tant que le travail était fait ; Qu'il convient de constater que ces allégations du salarié ne sont aucunement étayées ;

Que Monsieur Philippe X... fait valoir, troisièmement, que les disques étaient « régulièrement » scannés et donnaient lieu à un relevé d'heures détenu par l'employeur, lequel pouvait ainsi vérifier « la durée maximale de travail », et s'interroge, dès lors, sur l'absence de réaction de l'employeur dès la constatation de la première infraction ; Qu'outre l'imprécision des allégations du salarié quant à la périodicité du scannage des disques, l'employeur fait observer, à juste titre, que les infractions reprochées concernent le dépassement de la durée maximale de conduite continue et non la durée maximale journalière de conduite ; Que Monsieur Philippe X... n'a formulé aucune observation sur la précision susvisée ;

Qu'en tout état de cause, l'engagement de la procédure disciplinaire par la lettre recommandée en date du 10 décembre 2007 ne révèle aucune réaction tardive de l'employeur ; Qu'il s'évince des motifs qui précèdent que l'employeur a établi à suffisance de droit l'existence de 11 infractions pour dépassement de la durée maximale de conduite continue commises par Monsieur Philippe X..., conducteur expérimenté, entre le 8 novembre et le 4 décembre 2007, soit dans un court laps de temps ; que ce comportement fautif rendait impossible son maintien dans l'entreprise, les infractions commises étant de nature à engager la responsabilité pénale de l'entreprise et d'entraîner des sanctions administratives ;

Que le jugement du Conseil de Prud'hommes de METZ ayant considéré que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse doit être infirmé ;

Que Monsieur Philippe X... sera, en conséquence, débouté de l'ensemble de ses prétentions liées à la rupture du contrat ;
Sur le rappel de salaire et les repos compensateurs Attendu que l'article L212-1-1 du code du travail, applicable à l'époque des faits, dispose qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; Que s'il résulte de l'article précité que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des deux parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient néanmoins à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ;

Que Monsieur Philippe X... soutient qu'il n'a pas reçu le paiement de 250. 19 heures supplémentaires non rémunérées majorées à 50 % pour l'année 2007, représentant une créance de 5. 969, 46 ¿ brut, et produit à l'appui de ses prétentions :- un tableau récapitulatif faisant apparaître pour chaque semaine de la période de janvier à décembre 2007 le nombre d'heures de travail effectuées chaque semaine, le nombre total d'heures supplémentaires mensuelles, celui du nombre d'heures au-delà de 44h et le montant de la majoration correspondant ;- une copie des relevés des disques pour l'année 2007 ;- un tableau comparatif des heures de travail relevées par le salarié et par l'employeur ;- un « tableau comparatif-récapitulatif des données sur fiche de paie 2007 » ; Que les éléments produits par le salarié sont, a priori, de nature à étayer sa demande ;

Que l'employeur conteste la prétention de Monsieur Philippe X... et fait valoir que cette dernière est « irréaliste » puisqu'elle revient à chiffrer le taux horaire à 23. 86 ¿ l'heure supplémentaire à 150 %, soit 15. 91 ¿ le taux horaire de base, alors même que
M. X... avait, en dernier, un taux horaire de 8. 80 ¿, ce que confirme l'examen des bulletins de salaire ;
Que Monsieur Philippe X... n'a formulé aucune observation en lien avec cette constatation de l'employeur et n'a d'ailleurs produit aucun décompte de la somme de 5. 969, 46 ¿ réclamée, permettant de relier les données figurant dans les documents fournis et le montant de la créance salariale alléguée ; Qu'à cet égard, la société TRANSPORTS KOCH produit aux débats un document « destiné à rectifier l'incohérence des calculs » du salarié établissant une comparaison des heures supplémentaires telles que chiffrées par M. X... dans son tableau récapitulatif, soit 691, 45 heures revendiquées, et celles détaillées sur son document intitulé « tableau comparatif-récapitulatif des données sur fiche de paie 2007 », soit 603, 97 heures comptabilisées et payées, ce qui détermine un solde de 87, 48 heures en faveur du salarié et un rappel de salaire de 1. 201, 10 ¿ selon les propres chiffres et calculs de Monsieur Philippe X... ; Que la société TRANSPORTS KOCH prétend que, en tout état de cause, M. X... a été intégralement rempli de ses droits au titre des heures supplémentaires et verse aux débats la fiche individuelle des salaires de l'année 2007 listant toutes les heures supplémentaires réalisées par le salarié entre le 1er janvier et le 31 décembre 2007, soit au titre des heures à 125 % (exonérées ou non) ou à 150 %, document qui, comparé aux bulletins de paie, permet de constater que M. X... a été réglé de toutes ses heures de travail ;

Que Monsieur Philippe X... n'a formulé aucune observation concernant les documents produits par l'employeur ; Que l'appréciation de la valeur des pièces produites aux débats ne permet donc pas de conclure à l'accomplissement d'heures supplémentaires, tel qu'allégué par le salarié ; Que la demande de paiement d'heures supplémentaires de Monsieur Philippe X... sera rejetée de même que celle subséquente présentée au titre des repos compensateurs et fondée sur l'accomplissement desdites heures ;

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile Attendu que l'intimé, qui succombe, doit être condamné aux dépens de première instance et d'appel ;

Qu'eu égard à l'inégalité économique entre les deux parties, il est équitable de laisser à la charge de la société TRANSPORTS KOCH les frais irrépétibles qu'elle a exposés de sorte que l'appelante est déboutée de sa demande à ce titre ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, INFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté Monsieur Philippe X... de demande au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ; Et statuant à nouveau ;

DIT que le licenciement de Monsieur Philippe X... repose sur une faute grave ; DEBOUTE Monsieur Philippe X... de toutes ses demandes ; DEBOUTE la société TRANSPORTS KOCH de sa demande présentée en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ; CONDAMNE Monsieur Philippe X... aux dépens de première instance et d'appel. Le Greffier Le Président de Chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de metz
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/02747
Date de la décision : 08/07/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.metz;arret;2014-07-08;13.02747 ?
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