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14/05/2014 | FRANCE | N°12/03661

France | France, Cour d'appel de metz, Chambre sociale, 14 mai 2014, 12/03661


Arrêt no 14/ 00286

14 Mai 2014--------------- RG No 12/ 03661------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de THIONVILLE 29 Novembre 2012 12/ 0069 AD------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU
quatorze Mai deux mille quatorze
APPELANTE :
SARL PEGASE CONSULTANTS prise en la personne de son représentant légal 10 rue Gallieni 57100 THIONVILLE

Représentée Me BATTLE, avocat au barreau de METZ substitué par Me CATAL, avocat au barreau de METZ
INTIMEE :
Mad

emoiselle Samantha X...... 57190 EBANGE

Représentée par Me TERZIC, avocat au barreau de METZ s...

Arrêt no 14/ 00286

14 Mai 2014--------------- RG No 12/ 03661------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de THIONVILLE 29 Novembre 2012 12/ 0069 AD------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU
quatorze Mai deux mille quatorze
APPELANTE :
SARL PEGASE CONSULTANTS prise en la personne de son représentant légal 10 rue Gallieni 57100 THIONVILLE

Représentée Me BATTLE, avocat au barreau de METZ substitué par Me CATAL, avocat au barreau de METZ
INTIMEE :
Mademoiselle Samantha X...... 57190 EBANGE

Représentée par Me TERZIC, avocat au barreau de METZ substitué par Me BOULKAIBET, avocat au barreau de METZ
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre
ASSESSEURS : Madame Marie-José BOU, Conseiller Monsieur Alain BURKIC, Conseiller

***
GREFFIER (lors des débats) : Melle Morgane PETELICKI,
***
DÉBATS :
A l'audience publique du 17 Mars 2014, tenue par madame Marie-José BOU, Conseiller et magistrat chargé d'instruire l'affaire, lequel a entendu les plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées, et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré pour l'arrêt être rendu le 14 Mai 2014, par mise à disposition publique au greffe de la chambre sociale de la cour d'appel de METZ.

EXPOSE DU LITIGE

Samantha X...a été engagée par la société Pegase Consultants du 24 octobre 2007 au 1er septembre 2009 dans le cadre d'un contrat d'apprentissage destiné à préparer le brevet technicien supérieur (BTS) comptabilité et gestion des entreprises.

Samantha X...n'ayant pas réussi à obtenir son diplôme, un avenant a été conclu entre les parties prolongeant l'apprentissage jusqu'au 31 août 2010. Elle a obtenu le diplôme de BTS comptabilité et gestion des entreprises le 24 juin 2010.
Samantha X...et la société Pegase Consultants ont ensuite signé un nouveau contrat d'apprentissage d'une durée de 24 mois à compter du 1er septembre 2010 destiné à préparer un diplôme de comptabilité gestion (DCG).
Par lettre du 29 octobre 2010, la société Pegase Consultants a notifié à Samantha X...la rupture de son contrat d'apprentissage en précisant que celle-ci intervenait durant l'essai de deux mois, les parties ayant le jour même signé un document de constatation de la rupture aux termes duquel elles déclaraient qu'il était mis fin au contrat d'apprentissage au cours de la période d'essai.
Suivant demande enregistrée le 23 février 2012, Samantha X...a fait attraire son ex employeur devant le conseil de prud'hommes de Thionville.
La tentative de conciliation a échoué.
Dans le dernier état de ses prétentions, Samantha X...a demandé au conseil de prud'hommes de :
Dire et juger que la rupture du contrat de travail d'apprentissage est abusive,
Condamner la SARL PEGASE CONSULTANTS à lui payer les sommes suivantes :- Salaires restant dûs jusqu'au terme du contrat : 19 486, 50 ¿- Congés payés afférents : 1 948, 65 ¿- Dommages et intérêts au titre du préjudice subi : 8 800, 00 ¿- Article 700 du C. P. C. : 1 200, 00 ¿

Ordonner l'exécution provisoire du jugement sur le fondement de l'article 515 du C. P. C.,
Condamner la SARL PEGASE CONSULTANTS aux frais et dépens ainsi qu'au remboursement du timbre fiscal de 35 ¿.
La défenderesse s'est opposée à l'ensemble des demandes et a sollicité la condamnation de la demanderesse au paiement de la somme de 1 000, 00 ¿ au titre de l'article 700 du C. P. C.
Le conseil de prud'hommes de Thionville a, par jugement du 29 novembre 2012, statué dans les termes suivants :
Condamne la SARL PÉGASE CONSULTANTS, prise en la personne de son représentant légal, à verser à Mademoiselle Samantha X...les sommes suivantes :-3 200, 00 ¿ au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,-19 486, 50 ¿ bruts à titre de salaires,-1948, 65 ¿ bruts au titre des congés payés afférents au salaire,

-750, 00 ¿ au titre de l'article 700 du C. P. C.,
Déboute la SARL PÉGASE CONSULTANTS de sa demande au titre de l'article 700 du C. P. C.,
Ordonne l'exécution provisoire sur l'intégralité de la condamnation sur le fondement de l'article 515 du C. P. C.,
Condamne la SARL PÉGASE CONSULTANTS aux entiers frais et dépens y compris le remboursement du timbre fiscal pour un montant de 35, 00 ¿.
Suivant déclaration de son avocat reçue le 12 décembre 2012 au greffe de la cour d'appel de Metz, la société Pegase Consultants a interjeté appel de ce jugement.
Par conclusions de son avocat, reprises oralement à l'audience de plaidoirie par ce dernier, la société Pegase Consultants demande à la Cour de recevoir son appel, d'infirmer le jugement, de débouter Samantha X...de toutes ses prétentions et de la condamner à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions de son avocat, reprises oralement à l'audience de plaidoirie par ce dernier, Samantha X...demande à la Cour de :
Confirmer la décision critiquée en ce qu'elle a dit que la rupture du contrat d'apprentissage liant Mademoiselle Samantha X...et la SARL PEGASE CONSULTANTS est abusive.
Confirmer la décision critiquée en ce qu'elle a condamné l'appelante à payer à l'intimée les sommes suivantes :-19. 486, 50 euros brut, à titre de rappel de salaire ;-1. 948, 65 euros brut, au titre des congés payés sur le rappel de salaire ;

Infirmer la décision critiquée en ce qu'elle a condamné la SARL PEGASE CONSULTANTS à payer à l'intimée la somme de 3. 200 euros, au titre des dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.
Et statuant à nouveau,
Condamner l'appelante à payer à Mademoiselle X...la somme de 8. 000 euros, à titre de dommages et intérêts pour les conséquences des préjudices liés à la rupture abusive de son contrat d'apprentissage.
La condamner à lui payer la somme de 1. 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du CPC.
La condamner aux entiers frais et dépens, y compris les éventuels frais d'huissier dans le cadre de l'exécution de la décision à venir.

MOTIFS DE L'ARRET

Vu le jugement entrepris ;

Vu les conclusions des parties, déposées le 11 février 2013 pour l'appelante et le 11 mars 2014 pour l'intimée, présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises ;
Sur la rupture du contrat d'apprentissage

La société Pegase Consultants fait valoir que le contrat signé le 1er septembre 2010 était un nouveau contrat d'apprentissage visant un diplôme et des fonctions différents du précédent et qu'il a été rompu durant ses deux premiers mois conformément à l'article L 6222-18 du code du travail sans abus ni faute de sa part.

Samantha X...rappelle que le but de la période d'essai est de permettre à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié et à celui-ci d'apprécier si les fonctions lui conviennent de sorte qu'une période d'essai ne se justifie pas s'il s'agit du même salarié sur le même poste, notamment dans le cadre de CDD successifs. Or, elle relève que ses bulletins de paie font tous état de la même mention d'apprentie secrétaire comptable tant au titre du premier que du second contrat d'apprentissage et que son employeur ne pouvait ignorer ses qualités professionnelles, ce dont elle déduit que la rupture de son second contrat d'apprentissage par l'employeur est pour le moins injustifiée et donc abusive.
* * *
Aux termes de l'article L 6222-18 du code du travail, le contrat d'apprentissage peut être rompu par l'une ou l'autre des parties durant les deux premiers mois de l'apprentissage. Passé ce délai, la rupture du contrat ne peut intervenir que sur accord écrit signé des deux parties. A défaut, la rupture ne peut être prononcée que par le conseil de prud'hommes en cas de faute grave ou de manquements répétés de l'une des parties à ses obligations ou en raison de l'inaptitude de l'apprenti à exercer le métier auquel il voulait se préparer.
Si, en principe, chaque partie au contrat de travail est libre de le rompre sans donner de motif pendant la période d'essai, il n'en résulte pas nécessairement que la rupture ne puisse être fautive.
Le délai de deux mois pendant lequel la faculté de résiliation unilatérale du contrat d'apprentissage est ouverte à chacune des parties est de même nature que la période d'essai, la société Pegase Consultants ne s'y étant d'ailleurs pas trompée puisque dans sa lettre du 29 octobre 2010, elle fait état d'une rupture " durant l'essai de deux mois ". Or, à l'égard de l'employeur, celle-ci a pour but de lui permettre d'évaluer les compétences du salarié dans son travail de sorte que la rupture de la période d'essai doit avoir pour cause des considérations professionnelles, sauf à être fautive.
En l'espèce, la société Pegase Consultants a embauché Samantha X...au titre d'un contrat d'apprentissage destiné à la préparer aux épreuves du BTS comptabilité et gestion des entreprises, ce contrat d'une durée initiale de 22 mois ayant été prorogé d'une année supplémentaire du fait de l'échec de l'intéressée au diplôme préparé. A la fin de la prolongation de ce premier contrat, après l'obtention par Samantha X...du BTS susvisé, un second contrat d'apprentissage a été conclu entre les mêmes parties visant à la préparation du DCG, l'intéressée ayant dépendu pour ce second contrat d'apprentissage du même maître d'apprentissage, à savoir Gérald A....
Le BTS comptabilité gestion des entreprises est un diplôme de niveau bac + 2 tandis que le DCG est un diplôme de niveau licence. Le DCG se situe donc immédiatement au dessus du BTS, les deux diplômes relevant de la même spécialité.
En outre, ainsi que le relève justement l'intimée, ses bulletins de salaire indiquent tous, tant au titre du premier que du second contrat d'apprentissage, qu'elle occupe un emploi d'apprentie secrétaire comptable, la société Pegase Consultants ne démontrant pas
en quoi le contenu des tâches confiées à Samantha X...aurait sensiblement différé entre les deux contrats d'apprentissage.
Le second contrat d'apprentissage a ainsi été conclu dans le but d'approfondir la formation initiale de Samantha X..., dans la même entreprise et avec le même maître d'apprentissage, lesquels connaissaient dès lors les qualités professionnelles pour avoir pu les apprécier pendant plus de deux ans et demi sur des tâches si ce n'est identiques du moins très proches.
En conséquence, la rupture du contrat d'apprentissage survenue le 29 octobre 2010 à l'initiative de la société Pegase Consultants est abusive.

Sur les conséquences financières de la rupture du contrat d'apprentissage

Au soutien de son appel, la société Pegase Consultants se borne à contester l'existence d'une faute ou d'un abus de sa part dans la rupture du contrat d'apprentissage mais ne développe aucun moyen et aucune critique propre aux dispositions portant sur les conséquences financières de cette rupture.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Pegase Consultants à payer à Samantha X...la somme de 19 486, 50 euros brut à titre de salaires, représentant les rémunérations qu'elle aurait perçues jusqu'au terme de son contrat, et celle de 1 948, 65 euros brut au titre des congés payés afférents.
Il apparaît que les premiers juges ont justement évalué l'indemnisation du préjudice lié à la perte de chance d'obtenir le DCG auquel Samantha X...se destinait du fait de la rupture abusive du contrat d'apprentissage imputable à l'employeur alors que le fait pour la société Pegase Consultants d'avoir saisi le Premier Président de la cour d'appel de Metz aux fins d'obtenir un sursis à l'exécution du jugement entrepris ne caractérise pas une faute ou un abus mais le simple exercice d'un droit et que Samantha X...ne justifie pas d'un autre préjudice, notamment d'un préjudice indépendant du retard mis au paiement qui est réparé par les intérêts moratoires de la créance. En conséquence, le jugement sera également confirmé sur le quantum des dommages et intérêts.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La société Pegase Consultants, qui succombe, doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel et déboutée de toute demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il y a lieu de la condamner à payer à Samantha X...la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, tant au titre des frais irrépétibles de première instance que de ceux d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement et par arrêt contradictoire :
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné la société Pegase Consultants à payer à Samantha X...la somme de 750 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant dans cette limite et ajoutant :
Condamne la société Pegase Consultants à payer à Samantha X...la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de toute autre demande ;
Condamne la société Pegase Consultants aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été prononcé par mise à disposition publique au greffe de la chambre sociale de la cour d'appel de METZ le 14 Mai 2014, par Monsieur BECH, Président de Chambre, assisté de Melle PETELICKI, Greffier, et signé par eux.
Le Greffier, Le Président de Chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de metz
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/03661
Date de la décision : 14/05/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.metz;arret;2014-05-14;12.03661 ?
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