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14/05/2014 | FRANCE | N°12/00091

France | France, Cour d'appel de metz, Chambre sociale, 14 mai 2014, 12/00091


COUR D'APPEL DE METZ
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU quatorze Mai deux mille quatorze
Arrêt no 14/ 00254
14 Mai 2014--------------- RG No 12/ 00091------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 09 Décembre 2011

APPELANTE :
SAS CASTORAMA FRANCE prise en la personne de son représentant légal Route de Metz 57130 JOUY AUX ARCHES

Représentée par Me WAMBEKE, avocat au barreau de LILLE

INTIMES :

Madame Livia X... ... 57950 MONTIGNY LES METZ

Représentée Me PETIT, avocat au barreau de METZ

POLE EMPLOI Rue du Po

nt à Seille 57000 METZ

Non comparant non représenté

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDE...

COUR D'APPEL DE METZ
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU quatorze Mai deux mille quatorze
Arrêt no 14/ 00254
14 Mai 2014--------------- RG No 12/ 00091------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 09 Décembre 2011

APPELANTE :
SAS CASTORAMA FRANCE prise en la personne de son représentant légal Route de Metz 57130 JOUY AUX ARCHES

Représentée par Me WAMBEKE, avocat au barreau de LILLE

INTIMES :

Madame Livia X... ... 57950 MONTIGNY LES METZ

Représentée Me PETIT, avocat au barreau de METZ

POLE EMPLOI Rue du Pont à Seille 57000 METZ

Non comparant non représenté

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre
ASSESSEURS : Madame Marie-José BOU, Conseiller Monsieur Alain BURKIC, Conseiller

***
GREFFIER (lors des débats) : Melle Morgane PETELICKI,
***
DÉBATS :
A l'audience publique du 17 Mars 2014, tenue par madame Marie-José BOU, Conseiller et magistrat chargé d'instruire l'affaire, lequel a entendu les plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées, et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré pour l'arrêt être rendu le 14 Mai 2014, par mise à disposition publique au greffe de la chambre sociale de la cour d'appel de METZ.
EXPOSE DU LITIGE

Livia X... a été engagée à compter du 25 mai 1979 en qualité d'aide comptable par la société Castorama et exerçait en dernier lieu des fonctions de directrice gestion logistique au magasin de Metz.

Convoquée par lettre du 26 septembre 2009 à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 6 octobre suivant, elle a été licenciée pour faute grave aux termes d'une lettre recommandée du 12 octobre 2009 rédigée comme suit :
" Par courrier du 26 septembre 2009 remis en mains propres contre décharge et envoyé en Recommandé avec Accusé de Réception, nous vous avons mis à pied à titre conservatoire et invité à un entretien préalable à licenciement qui a eu lieu le 6 octobre 2009. Au cours de cet entretien, vous étiez assistée par Didier Z..., Délégué Syndical, Représentant Syndical au CE, Délégué du Personnel suppléant et Conseiller Prud'homal ; Lionel A..., Directeur du Magasin était, quant à lui, assisté par Nadine B..., Responsable Ressources Humaines du magasin.
A cette occasion, nous vous avons exposé les motifs qui nous amenaient à envisager à votre encontre une mesure de licenciement, et que nous vous rappelons ci-après.
Vendredi 18 septembre 2009, Pascal C..., Responsable logistique magasin, a fait part à Nadine B..., RRH magasin, de votre appel à son domicile lundi 7 septembre 2009 aux environs de 16 heures.
Il a déclaré : « Je me suis fait incendier pendant 1/ 2 heure alors que j'étais en train de faire les devoirs avec ma fille. Là, j'ai pris un coup et je suis au bout du rouleau. Personne ne m'engueule devant ma fille. Je me suis senti personnellement atteint dans ma dignité. »

Nadine B... a informé Lionel A..., Directeur du magasin, de cette situation lundi 21 septembre 2009, en début de matinée, juste avant son départ en formation pour 3 jours. A son retour, jeudi matin 24 septembre 2009, il a souhaité recevoir Pascal C... pour l'entendre.
Ce dernier lui a confirmé les faits, à savoir : « Pendant 1/ 2 heure au téléphone : réprimandes et engueulades de la part de Livia X..., alors que je faisais les devoirs avec ma fille ». Il ajoute que le lendemain, lorsqu'il vous a vue, il vous a signifié que la méthode n'était pas acceptable. Au cours de l'entretien avec Lionel A..., il précise que votre management passe par la soumission. Il n'a pas le droit à la parole, n'a pas d'autonomie. Nous le citons : « Je me sens harcelé, je suis au taquet. Je serais mieux à Queuleu. Je n'ai pas la force de combattre. Je pense à partir et à démissionner, me mettre en maladie et ne plus venir au travail. Pourtant, j'aime faire ce que je fais. Je ne sais pas comment sortir de là. Je suis à plat partout, plus d'envies. Je baisse la tête. Le pire est qu'elle m'a appelé chez moi. Cela a commencé à s'amplifier après mon intervention lors des groupes de travail ` client attitude'sur l'organisation de la mise en rayon (après cette réunion, elle m'appelait ` bonjour suceur ou lèche-bottes'.) A cause de cela, je suis sur la défensive et je suis agressif. J'ai l'impression d'être le ` gros con'. Je ne veux plus m'investir pour le magasin et je sens que cela n'est pas moi. C'est une situation que je ne connaissais pas, mais je ne peux plus... même à la maison... J'ai besoin d'être aidé. J'ai peur de ma réaction à venir envers elle ».

Après cet entretien, suivait une réunion logistique, organisée de 12 à 14 h, co-animée par vous-même et Pascal C....
Peu après 14 heures, à l'issue de cette réunion, Pascal C... est venu au bureau de Nadine B... et l'a informée que la réunion ne s'était pas bien déroulée, et que suite à cela, vous l'aviez convoqué pour le lundi suivant, puisque vous étiez en repos le lendemain vendredi. Pascal C... a alerté Nadine B... sur le fait qu'il ne reviendrait peut-être pas, de peur de ne pouvoir se contrôler vis-à-vis de vous.

Effectivement, il nous a appelé le lendemain, vendredi 25 septembre 2009, pour nous informer qu'il était en arrêt de travail pour maladie jusqu'au 9 octobre 2009 inclus.
Lionel A... a alors pris contact avec lui par téléphone. Au cours de cet entretien, Pascal C... lui a précisé qu'il était dans un état dépressif et qu'il pensait que cette maladie était pire que la grippe. Nous le citons : « on ne sait pas comment s'enlever ces idées morbides de la tête ».
Depuis, Lionel A... a eu différents entretiens avec d'autres collaborateurs, qui lui ont rapporté des comportements similaires de votre part à leur encontre.
Par ailleurs, le sujet a été clairement évoqué par les Délégués du personnel lors de la réunion du 30 septembre 2009 : « Certains de nous subissent du harcèlement moral de leur supérieur, qu'allez-vous faire pour arrêter cette pratique ? »

Question à laquelle nous avons répondu de la manière suivante : Suite aux éclaircissements demandés par la direction, les Délégués du Personnel ont cité Livia X..., directeur gestion logistique magasin, comme étant à l'origine de ces pratiques. La personne exprimant les faits de harcèlement moral est le Responsable logistique, Pascal C.... Par ailleurs, Lionel A..., Directeur magasin, a déjà eu un entretien avec le Responsable logistique pour l'entendre sur ces états de faits. Il précise aux Délégués du Personnel qu'une procédure disciplinaire est en cours à l'encontre de Mme X... et qu'une sensibilisation sur le harcèlement moral a été faite le jour même auprès de l'encadrement du magasin.

Au cours de l'entretien préalable du 6 octobre 2009, vous dites que vous trouvez la situation grotesque et niez tous les faits. Vous déclarez que Pascal C... est quelqu'un que vous estimez et que, d'ailleurs, vous avez fait grandir. Mais que c'est une personne qui n'accepte pas les remarques. La raison de votre appel à son domicile réside dans le fait qu'il aurait modifié les plannings de son équipe, gestion dont il a la charge, sans vous en informer. Vous pensez qu'il établit des horaires de complaisance. Vous avouez vous être emportée et déclarez : « la colère m'a pris ».

Quant au déroulement de la réunion logistique, vous prétendez que Pascal C... vous aurait manqué de respect en déclarant, alors que vous veniez de féliciter les chauffeurs pour le travail réalisé sur la saison : « et moi, vous ne me félicitez pas, j'ai 45 heures de récupération (générées par les heures réalisées au-delà de la planification).
De manière générale, vous estimez que vous avez toujours laissé l'autonomie à vos collaborateurs, que vous les respectez. Vous ajoutez que vous êtes une personne ambitieuse, que vous avez fait beaucoup pour le magasin en réalisant toujours un travail irréprochable dans le respect des règles et procédures.

Les explications que vous nous avez fournies lors de l'entretien préalable du 6 octobre 2009 ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet. Par conséquent, nous vous informons de notre décision de vous licencier pour faute grave.
Vos agissements sont caractéristiques de harcèlement moral qui ont pour effet la dégradation des conditions de travail de certains collaborateurs ; ils ont porté atteinte à la dignité de ces collaborateurs et ont altéré leur santé physique et morale. Vous vous êtes livrée à des actes de soumission sans répit et des attaques incessantes et réitérées à l'encontre de ces mêmes collaborateurs.
Ceci est d'autant plus inadmissible que nous vous avons déjà alerté sur ce défaut de comportement lors des différents entretiens que vous avez pu avoir avec vos Responsables hiérarchiques (à savoir les différents Directeurs de magasin que vous avez connus).
La mesure de licenciement pour faute grave prendra effet, sans indemnité de licenciement ni de préavis, à la date de première présentation de la présente à votre domicile par les services postaux ".
Suivant demande enregistrée le 27 novembre 2009, Livia X... a fait attraire son ex employeur devant le conseil de prud'hommes de Metz.
La tentative de conciliation a échoué.
Par jugement du 8 avril 2011, le conseil de prud'hommes a ordonné la comparution personnelle de Livia X... et l'audition de témoins.
Dans le dernier état de ses prétentions, Livia X... a demandé au conseil de prud'hommes de :
Dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Condamner la défenderesse au paiement des sommes suivantes :-1 978, 00 ¿ bruts au titre de la mise à pied conservatoire ;-197, 80 ¿ bruts au titre des congés payés sur la mise à pied conservatoire ;-12 471, 00 ¿ bruts au titre du préavis ;-1 247, 10 ¿ bruts au titre des congés payés sur préavis ;-44 895, 60 ¿ au titre de l'indemnité de licenciement ; avec intérêts de droit à compter du jour de la demande et exécution provisoire par application des dispositions de l'article R. 1454-28 du Code du Travail ;-149 652, 00 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; avec intérêts de droit à compter du jour du jugement à intervenir et exécution provisoire par application des dispositions de l'article 515 du Code de Procédure Civile ;-1 000, 00 ¿ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Condamner la défenderesse aux entiers frais et dépens.
La société Castorama s'est opposée à ces prétentions et a sollicité la condamnation de la demanderesse à lui régler la somme de 2 500, 00 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le conseil de prud'hommes de Metz a, par jugement du 9 décembre 2011, statué dans les termes suivants :
DIT que le licenciement de Madame Livia X... ne repose pas sur un motif de faute grave ;
CONDAMNE la SAS CASTORAMA, prise en la personne de son Président, à verser à Madame X... les sommes suivantes :
-1 978, 00 ¿ bruts (MILLE NEUF CENT SOIXANTE DIX HUIT EUROS) au titre de la mise à pied conservatoire ;
-197, 80 ¿ bruts (CENT QUATRE VINGT DIX SEPT EUROS ET QUATRE VINGTS CENTIMES) au titre des congés payés sur la mise à pied conservatoire ;
-12471, 00 ¿ bruts (DOUZE MILLE QUATRE CENT SOIXANTE ET ONZE EUROS) au titre du préavis ;

-1 247, 10 ¿ bruts (MILLE DEUX CENT QUARANTE SEPT EUROS ET DIX CENTIMES) au titre de congés payés sur préavis ;
-44895, 60 ¿ nets (QUARANTE QUATRE MILLE HUIT CENT QUATRE VINGT QUINZE EUROS ET SOIXANTE CENTIMES) au titre de l'indemnité de licenciement ;
DIT que le licenciement de Madame Livia X... ne repose pas sur un motif réel et sérieux ;
CONDAMNE la SAS CASTORAMA, prise en la personne de son Président, à verser à Madame Livia X... la somme de 90 000, 00 ¿ nets (QUATRE VINGT DIX MILLE EUROS) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
CONDAMNE la SAS CASTORAMA à verser à Madame X... des intérêts moratoires calculés à compter de la demande en justice pour toutes les condamnations au titre des éléments de salaire, soit la réintégration des salaires au titre de la mise à pied, l'indemnité de préavis, les congés payés afférents et l'indemnité de licenciement, et devra verser des intérêts moratoires à compter de la date du prononcé du jugement pour les dommages et intérêts et l'indemnité due au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
ORDONNE l'exécution provisoire du versement des sommes mises à la charge de la SAS CASTORAMA au titre ses salaires et de l'indemnité de licenciement à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, conformément à l'article R. 1454-28 du Code du Travail, la moyenne des trois derniers mois de salaire s'établissant à 4 157, 00 ¿ bruts ;
ORDONNE l'exécution provisoire du versement des sommes mises à la charge de la SAS CASTORAMA à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, conformément à l'article 519 du Code de Procédure Civile, selon les modalités suivantes : 100 % du montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit la somme de 90 000, 00 ¿ (QUATRE VINGT DIX MILLE EUROS), sous forme d'un dépôt de garantie auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations au profit de Madame Livia X... ;

CONDAMNE SAS CASTORAMA, prise en la personne de son Président, à verser à Madame X... la somme de 750, 00 ¿ (SEPT CENT CINQUANTE EUROS) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
ORDONNE le remboursement par la SAS CASTORAMA, prise en la personne de son Président, à l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage concerné les indemnités de chômage versées à Madame Livia X... dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;
DÉBOUTE la SAS CASTORAMA de sa demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
AUTORISE la DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DE MEURTHE-ET-MOSELLE à restituer la somme de 300, 00 ¿ (TROIS CENTS EUROS) à Madame Livia X... et la somme de 300, 00 ¿ (TROIS CENTS EUROS) à la SAS CASTORAMA ;
DIT que les éventuels dépens sont à la charge de la défenderesse ".
Suivant déclaration de son avocat expédiée le 6 janvier 2012 par lettre recommandée au greffe de la cour d'appel de Metz, la société Castorama a interjeté appel de ce jugement.
Par conclusions de son avocat, reprises oralement à l'audience de plaidoirie par ce dernier, la société Castorama demande à la Cour de :
"- Réformer le jugement du Conseil de Prud'hommes ;
- Dire les agissements de Madame X... constitutifs des faits de harcèlement moral ;
- Dire le licenciement pour faute grave de Madame X... bien fondé ;
- La Débouter en conséquence de l'ensemble de ses demandes ;
- Condamner Madame X... au remboursement de la somme de 37 413 ¿ perçue au titre de l'exécution provisoire ;
- Dire et juger que la somme de 90 000 ¿ consignée à la caisse des dépôts et consignation sera restituée à la société CASTORAMA ;
- Condamner Madame X... à régler à la société CASTORAMA la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
A titre subsidiaire :
- Dire et juger que les éventuels dommages et intérêts alloués à madame X... s'entendent en valeur brute de cotisation sociales et contributions salariales ".
Par conclusions de son avocat, reprises oralement à l'audience de plaidoirie par ce dernier, Livia X... demande à la Cour de :
" DIRE et JUGER l'appel de la SAS CASTORAMA recevable mais mal fondé.
En conséquence,
CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et alloué à la salariée les salaires injustement maintenus par la période de mise à pied conservatoire avec les congés payés afférent aux condamnations salariales.
DIRE que ces indemnités porteront au taux légal à compter du jour de la demande.
REFORMER le jugement entrepris quant au montant des dommages et intérêts alloués à la salariée à hauteur de 90 000, 00 euros.
CONDAMNER la SAS CASTORAMA à payer à Madame X... la somme de 149 652, 00 euros nets à titre de dommages et intérêts avec intérêts à compter du jour du jugement.
ORDONNER la déconsignation de la somme de 90 000, 00 euros versée à la Caisse des Dépôts et des Consignations par l'employeur conformément à la condamnation du Conseil de Prud'hommes de METZ.
CONDAMNER la SAS CASTORAMA à payer à Madame X... la somme de 2. 000, 00 euros au titre de l'article 700 du CPC.
CONDAMNER la SAS CASTORAMA aux entiers frais et dépens ".
Bien que régulièrement convoqué par lettre recommandée avec avis de réception signé le 10 juillet 2013, Pôle Emploi n'est pas représenté.
MOTIFS DE L'ARRET
Vu le jugement entrepris ;
Vu les conclusions des parties, déposées le 17 mars 2014 pour l'appelante et l'intimée, présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises ;

Sur le licenciement

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.
L'employeur supporte la preuve de la matérialité de la faute grave et de son imputation certaine au salarié.
Les griefs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les limites du litige.
En l'espèce, Livia X... a été licenciée pour avoir commis des agisssements de harcèlement moral.
Comme le fait valoir la société Castorama, l'article L 1152-5 du code du travail dispose que tout salarié ayant procédé à des agissements de harcèlement moral est passible d'une sanction disciplinaire.
Mais c'est à tort que la société Castorama se prévaut des règles de preuve édictées à l'article L 1154-1 du code du travail compris dans le chapitre relatif aux actions en justice en matière de harcèlements. En effet, celles-ci ne sont pas applicables lorsque survient un litige relatif à la mise en cause d'un salarié auquel sont reprochés des agissements de harcèlement moral. Dans un tel cas et si la faute grave est invoquée, il appartient à l'employeur de prouver que les faits de harcèlement moral sont établis.
En l'occurrence, la société Castorama verse aux débats une attestation de Pascal C..., responsable logistique placé sous la subordination de Livia X..., qui relate que le management de celle-ci a toujours été exigeant mais qu'elle ne lui a jamais manqué de respect jusqu'au mois de juin 2009, époque à laquelle il a participé à une réunion sur le projet " Client Attitude " devant différents cadres de la région et du magasin, dont Livia X..., et y a présenté le projet de son groupe. Il indique qu'il était très motivé par ce projet et a essayé d'être le plus dynamique possible lors de cette présentation. Or, il affirme que le lundi qui a suivi, Livia X... l'a accueilli par un tonique " bonjour suceur ", lui reprochant d'avoir fait le " lèche-bottes " à l'occasion de la présentation, et qu'il a eu droit au surnom de " suceur " jusqu'au mercredi, jour où il a dit à Livia X... qu'il ne supportait plus cette insulte.
Il indique qu'elle a alors systématiquement critiqué ses décisions et initiatives, jugeant qu'il était trop mou et sans organisation, qu'elle ne lui a plus laissé d'autonomie et qu'elle n'a eu de cesse de le harceler notamment par mails.
Selon lui, le paroxysme a été atteint le 7 septembre 2009, jour où elle lui a téléphoné à son domicile à 16 heures, alors qu'il aidait sa fille à faire ses devoirs, pour l'" engueuler " pendant une demi heure car il avait changé le planning d'une collaboratrice, lui disant qu'il était un " incapable ", un " imbécile qui ne savait pas gérer un service " et un " bon à rien, vraiment con ". Il précise que sa fille a même téléphoné à son épouse pour lui faire part de ce qu'il se faisait réprimander par son supérieur.
Il ajoute que le lendemain, alors qu'il souhaitait une explication, Livia X... a réitéré ses propos de la veille.
Il relate encore que s'étant étonné qu'elle ait besoin de deux personnes de la logistique pour effectuer l'inventaire prévu le 6 octobre 2009, Livia X... lui a répondu " je m'en fous ".
Il ajoute que sa dernière réunion logistique s'étant mal passée et s'étant vu convoquer verbalement par Livia X... pour le lundi suivant, il a " craqué " et a été placé en arrêt maladie, bien que sur l'insistance de Nadine B..., responsable ressources humaines du magasin, il lui ait confié l'incident du 7 septembre 2009 et ait été entendu par le directeur du magasin le 24 septembre 2009.
Les explications données par Pascal C... lors de son audition par les membres du bureau du jugement ne contredisent pas le contenu de son attestation, l'intéressé ayant apporté des précisions sur certains points en indiquant notamment que s'il avait tardé à révéler les faits, c'est qu'il avait eu des difficultés à avouer qu'il était harcelé.
Si Livia X... conteste l'ensemble des déclarations de Pascal C..., hormis avoir contacté téléphoniquement ce dernier pour un changement d'horaire mais sans jamais l'insulter, il n'en demeure pas moins que celles-ci ont été recueillies sous la forme d'une attestation dont la régularité n'est pas discutée et qui a été corroborée par l'audition faite devant les premiers juges après que Pascal C... s'est vu rappeler les peines encourues en cas de témoignage mensonger et a juré de dire la vérité. Ainsi, lesdites déclarations présentent toutes garanties de sincérité alors que Livia X... n'argue d'aucune raison ayant pu motiver Pascal C... à l'accuser de manière injustifiée, l'intimée faisant au contraire valoir qu'elle a toujours soutenu son subordonné.
Le fait que les témoins entendus à la demande de Livia X..., à savoir Françoise D... et Didier Z..., aient indiqué ne pas avoir connaissance de faits de harcèlement commis par Livia X... à l'égard de Pascal C... n'exclut pas que ceux-ci aient pu se produire, ce d'autant que seule Françoise D... travaillait dans le service logistique et que Didier Z..., qui était vendeur, n'était présent qu'un jour par semaine au magasin du fait de différents mandats. La pétition de salariés disant avoir toujours eu de bons rapports avec Livia X... ne saurait par ailleurs être prise en compte dès lors qu'elle ne permet pas de s'assurer si ses signataires ont été en contact professionnel direct avec cette dernière, ni des conditions dans lesquelles ces signatures ont été recueillies.
En tout état de cause, d'autres éléments étayent les dires de Pascal C....
La société Castorama verse ainsi aux débats une attestation de Nadine B..., responsable ressources humaines du magasin Castorama litigieux, qui indique qu'alors que Pascal C... est une personne engagée et dynamique, elle a constaté le 8 septembre 2009 qu'il était particulièrement triste et qu'elle s'est donc inquiétée de son état mais que celui-ci est resté fermé. Elle relate que lorsqu'elle l'a vu le 18 septembre 2009, elle a noté que son état ne s'était pas amélioré (visage défait, cheveux longs), ce qui n'était pas dans ses habitudes, et qu'il lui a alors fait part de l'appel téléphonique reçu à son domicile le 7 septembre précédent vers 16h de la part de Livia X... au cours duquel celle-ci l'avait " incendié " pendant une demi-heure alors qu'il était avec sa fille, Pascal C... lui ayant indiqué qu'il avait pris un coup et se sentait particulièrement atteint dans sa dignité. Elle précise qu'elle a alerté le directeur du magasin, que celui-ci a reçu Pascal C... le 24 septembre 2009, qu'après la réunion logistique tenue le même jour de 12 à 14h, Pascal C... l'a avisée que celle-ci s'était mal passée, que Livia X... l'avait convoqué pour le lundi suivant, qu'il craignait de ne pouvoir revenir et qu'en effet, le lendemain il a été arrêté pour maladie.
Entendue en qualité de témoin par les premiers juges, Nadine B... a confirmé ses dires.
Ce témoignage corrobore donc celui de Pascal C... en ce qu'à l'époque des faits, celui-ci lui a fait part non seulement de l'existence mais aussi du contenu violent de l'appel téléphonique de Livia X... et en ce que Nadine B... a été le témoin de la dégradation de l'état psychique de Pascal C..., tant avant qu'après que celui-ci lui parle pour la première fois de l'incident du 7 septembre 2009.
Annie E..., chef d'équipe logistique, a également témoigné par écrit et oralement. Elle a indiqué qu'au début du mois de septembre 2009, Livia X... lui avait déclaré sur un ton virulent " Pourquoi Carine quitte à 15h et pas à 16h. Pascal n'a pas à changer les horaires, j'ai interdit de les modifier ", le témoin précisant que Pascal C... avait simplement adapté les horaires en fonction de la charge de travail et du personnel présent, que Livia X... avait ensuite téléphoné à son responsable chez lui pour le fustiger avec des éclats de voix et que le lendemain, Pascal C... était complètement abasourdi et démoralisé.
Ce témoignage confirme ainsi l'état d'énervement de Livia X... contre Pascal C... ce jour-là, la violence verbale dont elle a fait preuve lors de son appel téléphonique et le fait que ce dernier était particulièrement affecté immédiatement après. Il justifie également de la réalité d'un autre fait évoqué par Pascal C... dans son attestation, à savoir de ce qu'il arrivait à Livia X... de critiquer de manière virulente ses initiatives devant son équipe.
Carine F..., équipière logistique, a quant à elle attesté par écrit qu'elle a constaté une modification considérable dans le comportement de Pascal C... qui a perdu son enthousiasme et sa confiance en lui pour connaître une véritable descente aux enfers, ce témoignage corroborant les dires de Pascal C... sur l'évolution de son caractère et l'état de dépression qu'il a fini par connaître.
La réalité de l'altération de l'état de santé de Pascal C... est au demeurant confirmée par les éléments médicaux versés aux débats, à savoir :- un certificat du docteur G..., médecin généraliste, qui indique avoir vu Pascal C... en consultation le 25 septembre 2009, que celui-ci présentait des troubles psychologiques en rapport avec son activité professionnelle et que son état de santé a justifié un arrêt de travail, prolongé ensuite le 12 octobre 2009 ;- une attestation de Dominique H..., psychologue de la cellule médico-psychologique d'aide aux victimes de catastrophe des CHR Jury les Metz et Metz/ Thionville qui indique, le 19 janvier 2010, prendre en charge Pascal C... depuis le mois d'octobre 2009 dans le cadre de consultations post-traumatiques suite à des problèmes sur son lieu de travail ;

lesdits éléments établissant qu'à l'époque, ces troubles ont été reliés à l'activité professionnelle de Pascal C....
La société Castorama verse encore aux débats des mails adressés par Livia X... à Pascal C....

Le 13 juillet 2009, Livia X... reproche à ce dernier d'avoir accordé un congé ancienneté sans son accord et lui rappelle qu'elle s'oppose à l'octroi de congés sans qu'elle soit mise au courant, finissant son courriel par " MERCI D'EN PRENDRE NOTE " et adressant ce mail en copie à la responsable ressources humaines et au directeur du magasin.

Le 28 juillet 2009, elle relève qu'un employé a travaillé de 6h à à 13h alors qu'il était programmé jusqu'à 14h, ajoutant " c'est la dernière fois que je te rappelle à l'ordre ", et adresse également son message en copie au directeur du magasin, ce à quoi Pascal C... répond qu'il gère l'équipe logistique dans son ensemble, y compris pour l'application du planning horaire, que les horaires de l'intéressé sont respectés peut-être pas à la journée mais en termes de volume horaire semaine et que la modification a été décidée pour s'adapter à la réalité en fonction des variations des flux de la plate forme de Châtres.
Livia X... fait valoir que ces courriels ne sont que l'expression légitime de son pouvoir hiérarchique.
Selon le lexique des compétences directeur gestion logistique, cette fonction implique de contrôler la cohérence des plannings horaires de son équipe et de s'assurer de l'allocation par le responsable logistique des ressources nécessaires un service client optimal. Il suit de là que l'affectation des moyens humains dépend du responsable logistique sous le contrôle final du directeur gestion logistique. Or les mails susvisés démontrent que Livia X... n'entendait laisser aucun pouvoir à son subordonné, allant jusqu'à lui interdire d'opérer un changement portant sur une heure de travail d'un employé, alors même qu'elle n'invoque pas dans ses conclusions que les initiatives prises par Pascal C... auraient nui à la qualité du service.
Ces mails, de même que le témoignage d'Annie I... d'ailleurs, confirment ainsi l'absence d'autonomie et les critiques émanant de Livia X... décrites par Pascal C..., celles-ci pouvant porter sur des détails mineurs tout en étant exprimées de façon abrupte voire menaçante et en faisant l'objet d'une communication auprès du directeur du magasin non justifiée au regard des enjeux en cause, ce qui était de nature à rabaisser l'intéressé.
Il s'ensuit que différents éléments de preuve corroborent les déclarations de Pascal C..., lesquelles apparaissent dès lors dans leur ensemble crédibles.
Par ailleurs, plusieurs témoins se plaignent d'avoir eux aussi été victimes du comportement de Livia X.... Si pour certains, à savoir Nadine B... et Annie I..., les faits qu'ils relatent sont très anciens, tel n'est pas le cas de Marie-Hélène J..., secrétaire assistante au magasin Castorama, dont l'attestation mentionne, contrairement à ce que soutient Livia X..., des faits précis imputables à cette dernière.
En effet, celle-ci indique qu'à la suite de l'arrivée du nouveau directeur, fin septembre 2008, des modifications ont été faites consistant en un déplacement du standard à la caisse centrale et de son bureau près de celui de sa responsable et que depuis lors, Livia X... est venue, à l'occasion des absences de sa responsable pour des réunions extérieures ou durant ses congés, lui faire les remarques suivantes : " que vas tu faire de tes journées ? " " Tu n'es pas réactive, on ne peut pas compter sur toi, la polyvalence tu ne connais pas ! " " Sache que des bruits courrent dans le magasin depuis que tu es dans ce bureau " " Je suis à l'écoute des salariés, je sais ce que pensent tes collègues, tu diffuses une mauvaise image ".
Or, à cette époque, Marie-Hélène J... était placée sous la seule responsabilité de Nadine B... ainsi qu'il résulte de l'organigramme de Castorama Metz de sorte que Livia X... n'avait pas qualité pour porter une quelconque appréciation à son sujet, qui plus est sur un ton désobligeant, alors que Nadine B... atteste de surcroît de la parfaite polyvalence de Marie-Hélène J....
Pour mettre en cause la légitimité de son licenciement, Livia X..., outre la contestation des faits relatés par les témoins, argue de plusieurs circonstances, la première tenant à ce que ses difficultés sont nées avec l'arrivée du nouveau directeur en novembre 2008.
Or, aucun témoin n'a évoqué de faits précis sur ce point alors que l'évaluation de Livia X... faite le 6 décembre 2008 par le nouveau directeur est globalement élogieuse comme l'intimée le relève elle-même. Ainsi, la réalité d'un lien entre l'arrivée de ce nouveau directeur et le licenciement de Livia X... n'est pas établie.
Livia X... invoque également sa compétence et son implication dans ses fonctions.
Si les évaluations de l'intéressée sur plusieurs années sont dans leur ensemble très positives, force est de constater qu'elles relèvent des manques en matière de communication et des améliorations attendues sur le plan relationnel et du management. L'entretien 2006 mentionne ainsi " être plus souple mais surtout éviter le favoritisme " " points faibles : ne laisser personne de côté " " attention à l'affectif j'aime ou j'aime pas ", celui de 2008 fait état de ce que la capacité à communiquer de l'intéressée est partiellement maîtrisée. Au demeurant, Livia X... en avait conscience puisqu'elle notait dans certains des compte rendus d'évaluation " il faut que j'accepte que chaque personne est différente ; être plus pédagogue et plus subtile ", " apprendre à mieux écouter les autres et être plus tolérante ".
Les témoignages de Nadine B... et d'Annie I..., qui, pour la première, évoque les difficultés relationnelles qu'elle a eues avec Livia X... entre octobre 2002 et mai 2007 du fait du discrédit que celle-ci portait sur elle soit auprès d'une subordonnée soit directement auprès d'elle et qui, pour la seconde, évoque une série de faits précis et datés ayant eu lieu entre 2003 et 2008 où Livia X... s'est emportée à son encontre en ayant eu une attitude menaçante ou vexatoire, corroborent d'ailleurs les manques ainsi constatés dans les évaluations et crédibilisent encore les faits plus récents relatés par Marie-Hélène J... et par Pascal C....
Livia X... se prévaut aussi de la brusque rupture dont elle a fait l'objet.
Toutefois, l'employeur, tenu à une obligation de sécurité de résultat, doit, lorsqu'il a connaissance de faits de harcèlement moral, agir au plus vite pour éviter leur renouvellement de sorte que si en l'espèce, les agissements de harcèlement sont établis, il ne saurait être reproché à l'employeur d'avoir engagé très rapidement une procédure disciplinaire.
Quant au fait invoqué par Livia X... que dans le compte rendu d'une réunion des délégués du personnel, la direction aurait à tort écrit que les délégués du personnel l'ont citée comme étant à l'origine de pratiques de harcèlement, outre qu'il est indifférent au regard de la réalité des faits qui lui sont reprochés, il est démenti par l'attestation de Véronique K... qui relate que lors de la réunion en cause, elle a elle-même indiqué que la personne qui harcelait était Livia X..., tous les délégués ayant approuvé en ajoutant qu'il y en avait d'autres, mais qu'à la réunion suivante, les délégués ont précisé qu'ils n'avaient jamais cité Livia X... et qu'intimidée par le climat pesant, elle n'a pas osé confirmer ce qu'elle avait dit précédemment.
Livia X... invoque encore les termes de l'évaluation qu'elle a établie pour Pascal C... en 2008, la proposition d'augmentation de salaire de l'intéressé qu'elle a faite ensuite et son changement de coefficient qu'elle aurait favorisé.
Mais ces éléments sont inopérants dès lors que Pascal C... date la modification de comportement de Livia X... de juin 2009, soit plusieurs mois après.
Livia X... se prévaut aussi du caractère violent de Pascal C....
S'il est vrai que les témoins entendus à la demande de Livia X..., à savoir Françoise D... et Didier Z..., en ont fait état devant les premiers juges, force est de constater cependant qu'ils n'ont relaté aucun fait précis dont ils auraient été personnellement été témoins à ce sujet et que les autres personnes entendues par les premiers juges ont indiqué que Pascal C... n'avaient pas de relations difficiles avec les salariés, hormis Livia X.... Et quand bien même Pascal C... aurait eu par le passé un caractère violent, cela n'exclut pas qu'il ait pu lui-même être victime d'un harcèlement moral, ni ne saurait excuser de tels faits commis à son égard alors qu'il n'est pas prétendu que les agissements imputés à Livia X... seraient directement liés à des manifestations de violence de Pascal C....
Les différentes circonstances ainsi invoquées par Livia X... apparaissent donc dénuées d'effet alors qu'il résulte des éléments ci-dessus analysés (témoignages de Pascal C..., de Nadine B..., d'Annie I..., de Carine F... et de Marie-Hélène J..., certificat médical du Docteur G..., attestation de Dominique H... et mails produits) qu'en juin 2009, Livia X... a insulté à plusieurs reprises Pascal C..., qu'elle l'a ensuite privé de toute autonomie en matière de gestion de planning et a critiqué plusieurs fois les quelques initiatives mineures qu'il prenait dans ce domaine, ce de manière injustifiée, abrupte et menaçante en le rabaissant auprès de la direction ou auprès d'une de ses subordonnées, qu'elle l'a longuement insulté et vitupéré contre lui en l'appelant à son domicile, après la fin de son travail, pour un changement d'horaire mineur en réitérant ses dires le lendemain et lui a encore répondu de manière humiliante au sujet d'une question légitime de sa part, cette attitude et les propos de Livia X... étant à l'origine d'une dégradation de l'état psychique de Pascal C..., et qu'elle a également à plusieurs reprises tenu des propos dénigrants à Marie-Hélène J... dont elle n'était même pas la responsable hiérarchique.
De tels agissements sont caractéristiques de harcèlement moral en ce qu'il s'agit de faits répétés, le caractère répétitif étant avéré même si Pascal C... a été en congés deux semaines en juillet 2009 et si Livia X... a elle-même eu des congés en août 2009, qui ont eu pour effet une dégradation des conditions de travail des salariés concernés, laquelle a porté atteinte à leur dignité et a altéré leur santé mentale.
Les faits reprochés dans la lettre de licenciement sont donc établis.
Ces manquements s'analysent en un ensemble de faits imputables à la salariée qui constituait une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien de celle-ci dans l'entreprise pendant la durée du préavis et ce, d'autant plus que comme la lettre de licenciement le relève, Livia X... avait déjà été sensibilisée à ses difficultés en termes relationnels.
En conséquence, le licenciement pour faute grave de Livia X... apparaît fondé, le jugement étant infirmé en ce sens.

Sur les conséquences du licenciement pour faute grave

Le licenciement pour faute grave étant privatif du préavis et de l'indemnité de licenciement, il convient de débouter la salariée de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents et d'indemnité de licenciement.
Livia X... doit être également déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera infirmé en ces sens.
Le licenciement reposant sur une faute grave, la mise à pied est justifiée et le jugement doit être aussi infirmé en ce qu'il a alloué à Livia X... un rappel de salaire à ce titre ainsi que les congés payés afférents.
En outre, il n'y a pas lieu de faire application de l'article 1235-4 du code du travail. Le jugement doit en conséquence être infirmé en ce qu'il a ordonné le remboursement par l'employeur d'indemnités de chômage.

Sur la restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire et des sommes consignées auprès de la Caisse des dépôts et consignations

Le présent arrêt infirmatif constitue le titre ouvrant droit à la restitution et au déblocage desdites sommes. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur cette demande.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Livia X..., qui succombe, doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel et déboutée de toute demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Compte tenu de la situation économique respective des parties, il n'y a pas lieu à condamnation de Livia X... au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire :
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a :
- débouté la société Castorama de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- autorisé la Direction départementale des finances publiques de Meurthe-et-Moselle à restituer la somme de 300, 00 ¿ à Livia X... et la somme de 300, 00 ¿ à la société Castorama ;

Statuant à nouveau dans cette limite et ajoutant :

Déboute Livia X... de toutes ses demandes ;
Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire et des sommes consignées auprès de la Caisse des dépôts et consignations ;
Déboute la société Castorama de sa demande au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
Condamne Livia X... aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été prononcé par mise à disposition publique au greffe de la chambre sociale de la cour d'appel de METZ le 14 Mai 2014, par Monsieur BECH, Président de Chambre, assisté de Melle PETELICKI, Greffier, et signé par eux.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de metz
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00091
Date de la décision : 14/05/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.metz;arret;2014-05-14;12.00091 ?
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