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18/06/2012 | FRANCE | N°10/04573

France | France, Cour d'appel de metz, Chambre sociale, 18 juin 2012, 10/04573


Minute no 12/00412 ----------- 18 Juin 2012 ------------------------- RG 10/04573 ----------------------- Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FORBACH 29 Septembre 2010 F09/537 ----------------------RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE METZ
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU
dix huit juin deux mille douze
APPELANTE :
SAS COKES DE CARLING prise en la personne de son représentant légal Rue de Metz 57490 CARLING
Représentée par Me HOUSSAIN (avocat au barreau de STRASBOURG), substitué par Me BERTRAND (avocat au barreau de STRASBOURG)<

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INTIMEE :
Madame Magali X... ... 57550 FALCK
Représentée par Me Sarah SCHI...

Minute no 12/00412 ----------- 18 Juin 2012 ------------------------- RG 10/04573 ----------------------- Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FORBACH 29 Septembre 2010 F09/537 ----------------------RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE METZ
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU
dix huit juin deux mille douze
APPELANTE :
SAS COKES DE CARLING prise en la personne de son représentant légal Rue de Metz 57490 CARLING
Représentée par Me HOUSSAIN (avocat au barreau de STRASBOURG), substitué par Me BERTRAND (avocat au barreau de STRASBOURG)

INTIMEE :
Madame Magali X... ... 57550 FALCK
Représentée par Me Sarah SCHIFFERLING-ZINGRAFF (avocat au barreau de SARREGUEMINES)

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Madame Monique DORY, Président de Chambre
ASSESSEURS : Madame Marie-José BOU, Conseiller Madame Gisèle METTEN, Conseiller
*** GREFFIER (lors des débats) : Madame Céline DESPHELIPPON, Greffier *** DÉBATS :
A l'audience publique du 30 avril 2012, l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 18 juin 2012 par mise à disposition publique au greffe de la chambre sociale de la cour d'appel de METZ.

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant demande enregistrée le 22 octobre 2009, Madame Magali X... a fait attraire devant le conseil de prud'hommes de FORBACH son ex-employeur, la SAS COKES DE CARLING, aux fins d'obtenir dans le dernier état de ses prétentions, sa condamnation à lui verser, après requalification de ses contrats de mission en contrat à durée indéterminée :
• 2 023,42 euros nets à titre d'indemnité de requalification, • 2 023,42 euros bruts à titre d'indemnité de préavis, • 202,34 euros bruts à titre d'indemnité de congés payés sur préavis, • 404,68 euros à titre d'indemnité de licenciement, • 43 640,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, • 23 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination, • 1 200,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
La défenderesse s'opposait à ces prétentions et sollicitait la condamnation de la demanderesse à lui verser 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement rendu le 29 septembre 2010, le conseil de prud'hommes de FORBACH statuait ainsi qu'il suit :
"Requalifie les contrats de mission du 15 septembre 2008 au 9 octobre 2009 de Madame Magali X... en contrat à durée indéterminée en qualité de salariée de la SAS COKES DE CARLING ;
Condamne la SAS COKES DE CARLING à payer à Madame Magali X... :
2 023,42 euros bruts (deux mille vingt trois euros quarante deux centimes) à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
202,34 euros bruts (deux cent deux euros trente quatre centimes) à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;
404,68 euros nets (quatre cent quatre euros soixante huit centimes) à titre d'indemnité légale de licenciement ;
Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2009 ;

2 023,42 euros nets (deux mille vingt trois euros quarante deux centimes) à titre d'indemnité de requalification ;
23 000 euros nets (vingt trois mille euros) à titre d'indemnité pour rupture abusive du contrat à durée indéterminée ;
400,00 euros (quatre cents euros) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 2010 ;
Déboute Madame Magali X... de sa demande au titre de la discrimination ;
Déboute la SAS COKES DE CARLING de sa demande reconventionnelle ;
Condamne la SAS COKES DE CARLING aux entiers frais et dépens de l'instance y compris ceux liés à son exécution ;
Rappelle que la présente décision est exécutoire de plein droit à titre provisoire concernant la requalification des contrats de mission, l'indemnité de requalification, les indemnités de préavis, de congés payés sur préavis et de licenciement ;
Déclare que la présente décision est exécutoire à titre provisoire concernant l'indemnité pour rupture abusive et l'article 700 du Code de Procédure Civile, hormis les dépens."

Suivant déclaration de son avocat par lettre recommandée avec accusé de réception adressée au greffe de la cour d'appel de METZ le 16 décembre 2010, la SAS COKES DE CARLING, à laquelle le jugement avait été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception signé le 19 novembre 2010, a interjeté appel du jugement.
Par conclusions de son avocat présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, la SAS COKES DE CARLING demande à la cour de déclarer son appel recevable et bien fondé, d'infirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il déboute les salariés de leur demande relative à la discrimination, de statuer à nouveau en déclarant la demande irrecevable et mal fondée, de débouter la salariée de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à lui verser 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à assumer la charge des entiers frais et dépens.
Par conclusions de son avocat présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, la salariée formant appel incident, demande à la cour la confirmation du jugement sauf en ses dispositions concernant les indemnités compensatrices de préavis, de congés payés afférents, l'indemnité de licenciement et les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Elle sollicite en conséquence la condamnation de la SAS COKES DE CARLING à lui verser :
• 4 046,84 euros bruts d'indemnité compensatrice de préavis, • 404,68 euros bruts d'indemnité compensatrice de congés payés afférents, • 544,77 euros nets à titre d'indemnité de licenciement, • 43 640 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Elle sollicite en outre la condamnation de la SAS COKES DE CARLING à lui verser :
• 23 000 euros de dommages et intérêts pour inégalité de traitement, • 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à assumer la charge de l'intégralité des frais et dépens d'instance et d'appel ;

SUR CE,
Vu le jugement entrepris,
Vu les conclusions des parties déposées le 9 janvier 2012 pour la SAS COKES DE CARLING et le 24 janvier 2012 pour Madame X..., présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens invoqués et prétentions émises ;
Attendu que des explications et pièces produites contradictoirement par les parties, il ressort que la société CHARBONNAGES DE FRANCE a exploité jusqu'en 2004 le site de la Cokerie de CARLING dont elle a cédé l'activité, dans une optique d'externalisation, à la SAS COKES DE CARLING ; qu'afin de permettre la poursuite en faveur des salariés des mesures afférentes au pacte charbonnier national conclu en 1994, le personnel affecté à l'activité cédée n'a pas été transféré, mais a été mis à disposition de la société cessionnaire, laquelle n'avait aucun personnel propre et n'a embauché des salariés qu'au fur et à mesure des besoins créés par les départs des salariés de CHARBONNAGES DE FRANCE mis à sa disposition ;

Qu'il est acquis aux débats, puisque reconnu par les parties que la SAS COKES DE CARLING a cessé l'exploitation de l'activité cédée le 18 octobre 2009 après la mise en oeuvre, faute de repreneur, d'une procédure de plan de sauvegarde de l'emploi et de licenciements pour motif économique ;

Sur la requalification
Attendu que Madame Magali X... a été embauchée par l'entreprise de travail temporaire, la société VEDIORBIS devenue RANDSTAD, pour être mise à la disposition de la SAS COKES DE CARLING en qualité de technicienne de commandes centralisées, pour accroissement temporaire d'activité :
• du 15 septembre 2008 au 14 décembre 2008 (contrat de mission du 15 septembre 2008),
• du 15 décembre 2008 au 14 juin 2009 (contrat de mission du 12 décembre 2008),
• du 1er avril 2009 au 14 juin 2009 (contrat de mission du 1er avril 2009),
• du 15 juin 2009 au 11 septembre 2009 (contrat de missions du 15 juin 2009),
• du 1er août 2009 au 11 septembre 2009 (contrat de mission du 1er août 2009),
• du 12 septembre 2009 au 9 octobre 2009 (contrat de mission du 9 septembre 2009) ;
Attendu que la SAS COKES DE CARLING conteste la décision du conseil de prud'hommes qui a requalifié ces contrats de mission en contrat à durée indéterminée, faisant valoir que le motif d'accroissement temporaire d'activité, lié à la réorganisation des équipes suite à des démissions, ou à l'organisation des équipes dans l'attente d'un repreneur potentiel suite à l'annonce de difficultés économiques de l'entreprise, se trouve caractérisé par la nécessité dans laquelle elle s'est trouvée, d'une part de procéder à la réalisation d'opérations de sécurisation et de mise en conformité du site dans un contexte de fermeture éventuelle de celui-ci qui a finalement eu lieu, et d'autre part de maintenir les activités obligatoires de l'entreprise auxquelles étaient occupés les salariés permanents ; qu'elle ajoute que précisément, les salariés intérimaires, dont faisait partie Madame X..., ont été chargés, notamment, par glissement de fonctions, des opérations de sécurisation et mise en conformité du site, constitutives d'une tâche occasionnelle précisément définie et non durable, ne relevant pas de l'activité normale de l'entreprise, et de travaux urgents, qui caractérisent ainsi que l'énonce la circulaire DRT 90-18 du 30 octobre 1990 des cas d'accroissement temporaire d'activité ;

Qu'au contraire, Madame X... conteste le motif de ses contrats de mission, exposant que la réorganisation des équipes dont fait état l'employeur, pour caractériser le motif d'accroissement temporaire d'activité est en réalité constitutive du motif de remplacement d'un salarié absent ; qu'elle précise que si elle a été embauchée, c'est bien pour faire suite à des vacations de postes liées à l'activité normale et permanente de l'entreprise, et consécutives aux départs d'autres salariés permanents (notamment par voie de démissions) et non pour faire face à une réorganisation trouvant son origine dans la mise en veille de l'activité du site et la réalisation de travaux liés à sa fermeture probable qui n'ont été annoncées que le 29 mai 2009, au cours d'une réunion extraordinaire du comité d'entreprise ;
Attendu que dans le premier contrat de mission conclu le 15 septembre 2008, Madame X... est embauchée pour un motif d'accroissement temporaire d'activité ayant pour cause, aux termes mêmes du contrat, une "réorganisation des équipes suite démissions" ; qu'en outre les caractéristiques du poste concerné sont ainsi énoncées : "Surveillance suivi et contrôle du gaz / comptabilisation des flux / pilotage des fours / identification des anomalies / respect des consignes de sécurité et port de l'EPI ";
Que les tâches ainsi décrites, entrant dans les fonctions de " technicien salle de commandes centralisées" pour lesquelles Madame X... a été embauchée relèvent de l'activité normale et permanente de la SAS COKES DE CARLING ayant pour objet la production de coke destiné à la société allemande ROGESA ;
Attendu que si le remplacement de salariés démissionnaires a pu être à l'origine de la réorganisation des équipes, pour autant il n'est nullement justifié d'un accroissement temporaire d'activité lié à de telles circonstances ;
Que la société COKES DE CARLING ne caractérise du reste nullement en quoi aurait consisté précisément la réorganisation consécutive aux démissions, à l'origine du surcroît d'activité justifiant l'embauche de Madame X... dans le poste concerné ;
Que si des démissions ont été à l'origine d'une réorganisation des équipes rendue nécessaire par la vacation de postes pourvus par "glissement" ou "cascade" au moyen d'embauches de salariés intérimaires, un tel phénomène ne saurait être constitutif du motif d'accroissement temporaire d'activité ;
Qu'il caractérise en réalité un remplacement, fût-ce par glissement ou cascade, de salariés démissionnaires ayant occupé durablement des postes participant à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice ;
Que par ailleurs il ne saurait être argué de l'existence d'une tâche occasionnelle, précisément définie et non durable ne relevant pas de l'activité normale de l'entreprise, ou de travaux urgents, liée à l'éventualité de la fermeture du site, pour justifier le motif du contrat de mission litigieux du 15 septembre 2008 alors même que du projet de réorganisation pour motif économique dans sa version du 16 septembre 2009 produit contradictoirement aux débats, il ressort que ce n'est qu'à compter du 29 mai 2009 que la société COKES DE CARLING a projeté, à défaut de trouver un repreneur, la fermeture du site ;
Que surabondamment, il ressort du procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise de la SAS COKES DE CARLING du 16 décembre 2008, que le motif de l'embauche des intérimaires, dont faisait partie la salariée en cause, n'était nullement un accroissement temporaire d'activité, alors qu'à la question qui leur est posée de savoir si les 37 intérimaires de l'entreprise seront concernés par un contrat à durée indéterminée, le directeur Monsieur Y... et le PDG Monsieur Z... répondent, successivement : Monsieur Y... : "ils sont là car nous avons besoin d'eux et qu'ils préparent le remplacement d'agents de L'ANGDM qui quitteront CdC. Nous nous permettons d'avoir des personnes supplémentaires pour pouvoir avoir la ressource le moment venu." Monsieur Z... : "Passer par l'intérim nous permet d'avoir une meilleure sélection avant l'embauche. Il en est de même pour les contrats de professionnalisation. Les meilleurs seront embauchés mais pas tous" ;
Que de l'ensemble de ces énonciations, il s'évince que la preuve du motif d'accroissement temporaire d'activité figurant au contrat de mission du 15 septembre 2008 n'est pas établie et que celui-ci a eu pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice ;
Que dans ces conditions, il y a lieu de procéder à sa requalification en contrat à durée indéterminée en application de l'article L1251-40 du code du travail ainsi qu'à celle des contrats de mission qui lui ont succédé, lesquels relèvent de la même relation de travail à durée indéterminée ;
Que c'est en conséquence à bon droit que le conseil de prud'hommes a alloué à la salariée, en application de l'article L1251-41 du code du travail la somme de 2 023,42 euros, correspondant à un mois de salaire, à titre d'indemnité de requalification ;
Que le jugement doit être confirmé en ce sens ;
Sur la rupture du contrat de travail
Attendu qu'au terme du dernier contrat à durée déterminée, la relation contractuelle de travail requalifiée en contrat à durée indéterminée a pris fin, sans motif le justifiant, de sorte que sa rupture est abusive pour être sans cause réelle et sérieuse ;
Que la salariée peut en conséquence prétendre à l'obtention de dommages et intérêts pour rupture abusive, outre indemnités de rupture ;

Qu'au moment de la rupture de la relation contractuelle de travail, à durée indéterminée, la salariée était âgée de 35 ans, avait une ancienneté dans l'entreprise de 1 an et 4 semaines outre préavis de 2 mois et percevait un salaire mensuel brut de 2 023,42 euros ;
Que c'est la convention collective nationale de la sidérurgie du 20 novembre 2001 qui est applicable aux salariés de la SAS COKES DE CARLING ainsi qu'il résulte du plan de sauvegarde de l'emploi produit contradictoirement aux débats ;

1. Indemnités compensatrices de préavis et de congés payés afférents
Attendu que conformément aux dispositions de l'article 10 de la convention collective nationale précitée, la salariée est fondée à obtenir une indemnité compensatrice du préavis de 2 mois dont elle a été privée, soit la somme de 4 046,84 euros outre indemnité compensatrice de congés payés afférents de 404,68 euros calculée selon la règle du dixième ;

2. Indemnité de licenciement
Attendu que conformément aux dispositions de l'article 11 de la convention collective nationale précitée, la salariée est fondée à obtenir, compte tenu d'une ancienneté à la fin du préavis d'au moins une année, mais inférieure à 17 ans dans l'entreprise, 1/4 de mois par année d'ancienneté ;
Que faute de disposition conventionnelle sur ce point une proratisation mensuelle est applicable ;
Que l'indemnité de licenciement doit être calculée sur la base de la moyenne la plus favorable des 3 ou des 12 derniers mois à la date de la fin du préavis, soit 2 023,42 euros par mois ;
Qu'il convient en conséquence d'allouer à la salariée la somme de 544,77 euros sollicitée à titre d'indemnité de licenciement ;

3. Dommages et intérêts pour rupture abusive
Attendu qu'eu égard à son ancienneté, la salariée relève de l'application de l'article L1235-5 du code du travail ;
Attendu que la salariée en cause a droit à la réparation de l'intégralité du préjudice résultant de la rupture abusive de son contrat de travail ;
Que si un tel préjudice ne peut comprendre les avantages accordés aux salariés licenciés pour motif économique dans le cadre de la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi ayant précédé la fermeture du site, et en vue de cette fermeture, dès lors que ces avantages ne sont pas octroyés au titre d'une rupture abusive du contrat de travail dont le motif n'était pas économique, il doit par contre intégrer la perte de la chance, consécutive à la rupture du contrat de travail pour la salariée, d'avoir pu bénéficier d'un licenciement économique et des avantages du plan de sauvegarde de l'emploi qui s'en suivaient ;
Qu'eu égard à la date de la fin de la dernière mission correspondant à celle de la rupture abusive de son contrat de travail, la salariée en cause, du fait de la rupture abusive de son contrat de travail, a perdu une chance d'être licenciée dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi et par suite de bénéficier des mesures accompagnant un tel licenciement ;
Qu'il ressort en effet du plan de sauvegarde de l'emploi applicable aux salariés de la société COKES DE CARLING en vue de la fermeture du site du 18 octobre 2009, que ceux dont le licenciement ne pouvait être évité, faute de reclassement possible, bénéficieraient d'une indemnité additionnelle de licenciement de 23 000 euros, ainsi que pour ceux ayant accepté un congé de reclassement, d'un montant de 85 % de leur rémunération brute mensuelle moyenne pendant 12 mois hors préavis ;
Que le préjudice pour perte de chance de bénéficier de ces deux mesures doit cependant s'apprécier en tenant compte, d'une part des possibilités de reclassement prévues au plan de sauvegarde de l'emploi (dont la version produite fait apparaître 67 offres) qui auraient pu bénéficier à la salariée en cause, et d'autre part du nombre de salariés ayant vocation à en bénéficier, et dont l'augmentation par le nombre des salariés intérimaires dont les contrats sont requalifiés, était de nature à inciter l'employeur à prévoir une indemnité additionnelle moins importante en son montant, étant précisé que le plan de sauvegarde de l'emploi est un engagement unilatéral de l'employeur ;
Que de l'ensemble de ces énonciations, eu égard à une ancienneté réduite, et compte tenu de la perte de chance précédemment caractérisée, il convient d'allouer à la salariée en cause une somme de 9 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif à la rupture abusive du contrat de travail ;

Sur l'inégalité de traitement
Attendu que la salariée en cause, qui ne fait plus état de discrimination, ne saurait se prévaloir d'une inégalité de traitement tenant à la distinction opérée par le plan de sauvegarde de l'emploi concernant les bénéficiaires de l'indemnité de 23 000 euros, selon qu'ils sont salariés permanents ou intérimaires, (ces derniers n'ayant pas droit), dès lors que son contrat de travail est requalifié en contrat à durée indéterminée et qu'elle est indemnisée, au titre de la rupture abusive de son contrat de travail, de la perte de chance d'avoir pu bénéficier de ladite indemnité ;

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile
Attendu que la SAS COKES DE CARLING qui succombe doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre le montant alloué en première instance, et déboutée de ses propres prétentions sur ce même fondement ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement :
Déclare la SAS COKES DE CARLING recevable en son appel principal et Madame Magali X... recevable en son appel incident, lesdits appels étant dirigés contre un jugement rendu le 29 septembre 2010 par le conseil de prud'hommes de FORBACH ;
Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il condamne la SAS COKES DE CARLING à payer à Madame X... :
• 2 023,42 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, • 202,34 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, • 404,68 euros nets à titre d'indemnité légale de licenciement, Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2009,
• 23 000 euros nets à titre d'indemnité pour rupture abusive du contrat à durée indéterminée,
Réforme le jugement entrepris de ces chefs
et statuant à nouveau dans cette limite :
Condamne la SAS COKES DE CARLING à verser à Madame Magali X...
• 4 046,84 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, • 404,68 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents au préavis, • 544,77 euros nets à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

lesdites sommes portant intérêts au taux légal à compter de la demande, soit du 16 novembre 2009, date de convocation de l'employeur à la première audience en première instance ;
• 9 000 euros nets de dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif à la rupture abusive du contrat de travail avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Ajoutant :
Condamne la SAS COKES DE CARLING à verser à Madame Magali X...
1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Déboute les parties de toute autre demande ;
Condamne la SAS COKES DE CARLING aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été prononcé par mise à disposition publique au greffe de la chambre sociale de la cour d'appel de METZ le 18 juin 2012, par Madame DORY, Président de Chambre, assistée de Madame DESPHELIPPON, Greffier, et signé par elles.

Le Greffier, Le Président de Chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de metz
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/04573
Date de la décision : 18/06/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.metz;arret;2012-06-18;10.04573 ?
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