La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/06/2011 | FRANCE | N°10/03564

France | France, Cour d'appel de metz, 05, 20 juin 2011, 10/03564


Minute no 11/ 00298

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE METZ

CONTESTATION D'HONORAIRES D'AVOCATS

ORDONNANCE DU 20 Juin 2011

RG : CH 10/ 03564

Décision Au fond, origine Bâtonnier de l'ordre des avocats de THIONVILLE, décision attaquée en date du 02 Septembre 2010,

Madame Saïda X...épouse Y...
...
57300 MONDELANGE
Représentée par : Me ANANDAPPANE (avocat au barreau de METZ)

DEMANDERESSE

Maître Fatima A...
...
57100 THIONVILLE

Comparante

DÉFENDER

ESSE

Les débats ayant eu lieu en chambre du conseil, à l'audience du 11 Avril 2011, tenue par Monsieur STAECHELE, Président de Chambre, agissant ...

Minute no 11/ 00298

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE METZ

CONTESTATION D'HONORAIRES D'AVOCATS

ORDONNANCE DU 20 Juin 2011

RG : CH 10/ 03564

Décision Au fond, origine Bâtonnier de l'ordre des avocats de THIONVILLE, décision attaquée en date du 02 Septembre 2010,

Madame Saïda X...épouse Y...
...
57300 MONDELANGE
Représentée par : Me ANANDAPPANE (avocat au barreau de METZ)

DEMANDERESSE

Maître Fatima A...
...
57100 THIONVILLE

Comparante

DÉFENDERESSE

Les débats ayant eu lieu en chambre du conseil, à l'audience du 11 Avril 2011, tenue par Monsieur STAECHELE, Président de Chambre, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de METZ, assisté de Mme LAUER, f. f. de Greffier, l'affaire a été mise en délibéré et le prononcé a été fixé au 20 Juin 2011.

Et, le jour dit :

Nous, Monsieur STAECHELE, Président de Chambre à la Cour d'Appel de METZ, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de METZ, assistée de Mme LAUER, f. f. de Greffier,

FAITS ET PROCEDURE
Saïda X...-Y... a confié à Me Fatima A...la défense de ses intérêts dans une procédure de divorce. Le 18 novembre 2003, elle obtenait le bénéfice d'une décision d'aide juridictionnelle totale.
Le 9 octobre 2003, une ordonnance de non-conciliation lui attribuait une pension alimentaire de 1800 € par mois.
En 2006, Me Fatima A...a fait signer à sa cliente une convention d'honoraires à concurrence de 3000 € hors-taxes, pour le cas où le bénéfice de l'aide juridictionnelle lui serait retiré. Par la suite, elle a demandé à sa cliente de signer une nouvelle convention, toujours dans le même cadre juridique, à hauteur de 8 000 € hors-taxes. Saïda X...-Y... a refusé de signer cette nouvelle convention.
Par lettre reçue le 23 septembre 2009, Saïda X...-Y... a saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau de THIONVILLE d'une contestation en expliquant que Me Fatima A...a abusé de sa situation en lui faisant signer une convention d'honoraires, et en la menaçant de ne pas la défendre si elle ne la signait pas, alors qu'elle était bénéficiaire d'une décision d'aide juridictionnelle totale.
Le 23 décembre 2009, Me Fatima A...a répondu à la demande d'observations de son Bâtonnier en justifiant de ses diligences et lui a demandé de taxer ses honoraires, en cas de retrait de l'aide juridictionnelle à la somme de 8000 € HT.
Par lettre du 5 janvier 2010, le Bâtonnier a écrit à Saïda X...-Y... en lui indiquant qu'il ne s'agissait que d'une convention d'honoraires sous condition, au cas où le bénéfice de l'aide juridictionnelle lui serait retiré et que, de son point de vue, les diligences accomplies par Me Fatima A...justifiaient la demande d'honoraires conditionnels qu'elle a présentée.
Une ordonnance du juge aux affaires familiales du 3 février 2010 a attribué la jouissance à titre gratuit du domicile conjugal à Saïda X...-Y... et a fixé, avec effet rétroactif au 24 novembre 2008, le montant de la pension mise à la charge de son mari au titre du devoir de secours à 2000 € par mois. Une indemnité de 1500 € était également accordée à Saïda X...-Y... par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par courrier du 1er mars 2010, Me Fatima A...a déclaré maintenir sa demande de taxe pour ce montant.
Par lettre du 5 mars 2010, le Bâtonnier a demandé ses observations à Saïda X...-Y... à propos de la demande de taxation de ses honoraires de Me Fatima A....
Saïda X...-Y... lui a répondu en contestant les diligences alléguées par Me Fatima A..., en lui faisant observer qu'elle était toujours bénéficiaire de l'aide juridictionnelle et qu'elle ne comprenait pas la demande de taxation présentée par Me Fatima A....
Par lettre du 1er avril 2010, le Bâtonnier a alors écrit à Me Fatima A...pour lui rappeler que sa cliente est toujours bénéficiaire de l'aide juridictionnelle et que l'article 19 alinéa 3 du décret du 12 juillet 2005 prévoit que « l'avocat qui succède à un confrère intervenant au titre de l'aide juridictionnelle ne peut réclamer des honoraires que si son client a expressément renoncé au bénéfice de celle-ci. Il informe auparavant son client des conséquences de cette renonciation. En outre, il informe de son intervention son confrère précédemment mandaté, le bureau d'aide juridictionnelle et le bâtonnier. »
Le bâtonnier a en conséquence invité Me Fatima A...à se rapprocher de Me C..., apparemment appelé à lui succéder, pour savoir ce qu'il advient de la décision d'aide juridictionnelle.
Par lettre du 22 juillet 2010, Me Fatima A...a informé son bâtonnier de ce que, à sa demande, le bénéfice de l'aide juridictionnelle accordé à sa cliente lui avait été retiré. Elle a en conséquence demandé au bâtonnier de taxer ses honoraires.
Par décision du 2 septembre 2010, régulièrement notifiée à Saïda X...-Y..., le Bâtonnier a condamné celle-ci à payer à Me Fatima A...la somme de 8 000 € hors-taxes, soit 9 568 € TTC au titre des prestations réalisées par cette avocate dans le cadre de sa procédure de divorce.
Pour statuer comme il l'a fait, le Bâtonnier a rappelé que les articles 36 et 50 de la loi No 91-647 du 10 juillet 1991 prévoient la possibilité pour le tribunal de retirer le bénéfice de l'aide juridictionnelle à une partie dont la situation financière, à l'issue de la procédure, excède le plafond d'obtention de l'aide et à son avocat qui a obtenu une décision de justice la ramenant à meilleure fortune et autorise ipso facto l'avocat à demander des honoraires à hauteur de ses peines et soins.
Il a observé que Me Fatima A...aurait pu se prévaloir de ce texte au moment de l'ordonnance de non-conciliation qui a accordé à sa cliente une pension alimentaire au titre du devoir de secours, d'un montant mensuel de 1800 €.
Il a estimé qu'il était parfaitement normal, au regard des diligences accomplies, que la convention d'honoraires ait été signée entre Mme A...et Mme Y...le 1er février 2006 ; que rien ne permet de penser que le consentement de la cliente a été obtenu par des moyens indélicats, d'autant que le texte de l'acte signé est parfaitement explicite ; que cet avenant prévoyait un honoraire hors taxes de 8 000 € parfaitement légitime ; Que l'avocat est contraint de procéder ainsi, faute de quoi, après le retrait de l'aide juridictionnelle, il se trouverait dépourvu de toute convention sur le montant de ses honoraires vis-à-vis de son client ; qu'en outre, la démarche est conforme aux intérêts du client qui, sachant que son aide juridictionnelle risque fort d'être retirée, peut ainsi décider de l'ampleur des diligences dont il va ou non demander l'exécution à son conseil.
Cette décision a été notifiée à Me Fatima A...par lettre du 10 septembre 2010 et à Saïda X...-Y... par lettre recommandée dont elle a signé l'accusé de réception le 9 septembre 2010.
Par lettre du 27 septembre 2010, reçue à la Cour d'appel le 4 octobre 2010, Me Joseph E..., avocat, agissant pour le compte de Saïda X...-Y... a formé un recours contre cette décision en faisant valoir :
- que s'il est vrai que Saïda X...-Y... a obtenu des décisions favorables, dans les faits ses revenus n'ont nullement augmenté, malgré toutes les voies d'exécution qu'elle a tenté de mettre en œ uvre ;
- qu'elle est toujours dans une situation financière extrêmement précaire et que c'est à tort que l'aide juridictionnelle lui a été retirée.
Me Fatima A...a été convoquée à notre audience du 11 avril 2011 par une lettre recommandée dont elle a signé l'accusé de réception le 16 février 2011.
Saïda X...-Y... a été convoqué par la même voie. La lettre recommandée n'a cependant pas pu lui être distribuée, l'avis de passage du facteur mentionnant « boîte non identifiable »
Les deux parties ont comparu à notre audience du 11 avril 2011.
L'avocat de l'appelante a réitéré ses explications antérieures et a ajouté que sa cliente vivait du RSA et qu'elle s'était vu retirer l'aide juridictionnelle.

MOTIFS
Le recours régulièrement interjeté dans le délai légal et recevable
Sur le fond,
S'il est vrai qu'un avocat ne saurait exiger un honoraire d'un client bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, aucun texte ne lui interdit cependant de proposer à son client de signer une convention d'honoraires pour le cas où l'aide juridictionnelle lui serait retirée, compte tenu de l'évolution du litige.
Tel est le cas en l'espèce. Au demeurant, le client signataire d'une telle convention ne saurait faire état d'un intérêt actuel et légitime à faire annuler cette convention, dès lors que rien ne lui est réclamé tant qu'il reste bénéficiaire de l'aide juridictionnelle.
Il est constant par ailleurs que l'aide juridictionnelle a été retiré à Saïda X...-Y... et que celle-ci a bénéficié de décisions judiciaires qui condamnent son mari à lui verser des subsides de nature à lui permettre de subvenir normalement à ses besoins. Le moyen tiré de son impécuniosité n'est cependant pas suffisant pour justifier le rejet de la demande de l'avocat, d'autant que dans le cas d'espèce, Me A..., indique que, si elle sollicite la taxation de ses honoraires, elle n'en exige pas le paiement immédiat et accepte de le différer jusqu'au moment de la réalisation de la vente des immeubles communs de sa cliente, sur le produit de laquelle elle devrait percevoir un montant considérable, qui lui permettra de faire face sans difficulté au paiement de ses honoraires.
S'agissant du montant des honoraires, les règles fixées par le règlement intérieur national du barreau prévoient que, à défaut de convention entre l'avocat et son client, les honoraires sont fixés selon les usages, et notamment, de chacun des éléments suivants conformément :
ole temps consacré à l'affaire,
ole travail de recherche,
ola nature et la difficulté de l'affaire,
ol'importance des intérêts en cause,
ol'incidence des frais et charges du cabinet auquel il appartient,
osa notoriété, ses titres, son ancienneté, son expérience et la spécialisation dont il est titulaire,
oles avantages et le résultat obtenus au profit du client par son travail, ainsi que le service rendu à celui-ci,
ola situation de fortune du client.
Dans le cas d'espèce, il ressort des pièces fournies par Me A...que celle-ci a assisté sa cliente pendant plus de 3 ans ; qu'elle l'a reçue à de nombreuses reprises, a eu avec elle d'innombrables échanges par téléphone, fax ou mel ; qu'elle a rédigé de nombreuses conclusions en son nom et l'a assistée devant les juridictions que l'affaire, que l'affaire, compte tenu de l'importance des intérêts en cause, présentait un degré de complexité important ; que les démarches accomplies par l'avocat ont amélioré sensiblement la situation de sa cliente, au moins sur le plan juridique.
Compte tenu des critères ci-dessus évoqués, notamment de la notoriété de l'avocat, de son expérience, des diligences accomplies, le montant des honoraires réclamés par Me Fatima A...est justifié.
Il convient en conséquence de confirmer purement et simplement la décision entreprise.
DECISION
Par ces motifs, nous, François Staechelé, Président de chambre à la cour d'appel de Metz, par délégation du premier président, statuant publiquement, en dernier ressort, par ordonnance rendue après avoir contradictoirement entendu les parties ou leur représentant,
Vu les articles 174 et suivant du décret No 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ;
Déclarons recevable le recours de Saïda X...-Y... ;
au fond,
Le disons mal fondé et le rejetons, confirmant ainsi la décision entreprise du Bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau THIONVILLE.

Le GreffierLe Premier Président par délégation


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de metz
Formation : 05
Numéro d'arrêt : 10/03564
Date de la décision : 20/06/2011
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.metz;arret;2011-06-20;10.03564 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award