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20/12/2010 | FRANCE | N°08/00570

France | France, Cour d'appel de metz, Chambre sociale, 20 décembre 2010, 08/00570


COUR D'APPEL DE METZ
CHAMBRE SOCIALE

Arrêt no 10/ 00409

20 Décembre 2010--------------- RG No 08/ 00570------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 17 Janvier 2008 06/ 641 I------------------

APPELANTE :
SAS FRANCE TRANSFO prise en la personne de son représentant légal Voie Romaine Pont de Semécouirt BP 10140 57280 MAIZIERES-LES-METZ Représentée par Me Hervé HAXAIRE (avocat à la Cour d'Appel de METZ)

INTIMES :
Monsieur Daniel X...... 57535 MARANGE-SILVANGE Représenté par Me Robert COLAS (avocat au barreau de METZ)



ASSEDIC DE LA MOSELLE Rue du Pont à Seille 57000 METZ Non comparante non représentée

CO...

COUR D'APPEL DE METZ
CHAMBRE SOCIALE

Arrêt no 10/ 00409

20 Décembre 2010--------------- RG No 08/ 00570------------------ Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de METZ 17 Janvier 2008 06/ 641 I------------------

APPELANTE :
SAS FRANCE TRANSFO prise en la personne de son représentant légal Voie Romaine Pont de Semécouirt BP 10140 57280 MAIZIERES-LES-METZ Représentée par Me Hervé HAXAIRE (avocat à la Cour d'Appel de METZ)

INTIMES :
Monsieur Daniel X...... 57535 MARANGE-SILVANGE Représenté par Me Robert COLAS (avocat au barreau de METZ)

ASSEDIC DE LA MOSELLE Rue du Pont à Seille 57000 METZ Non comparante non représentée

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Madame Monique DORY, Président de Chambre
ASSESSEURS : Madame Christine DORSCH, Conseiller Madame Annie MARTINO, Conseiller

GREFFIER (lors des débats) : Mme Myriam CERESER,
DÉBATS :
A l'audience publique du 23 Novembre 2010, tenue par Madame Monique DORY, Président de Chambre et magistrat chargé d'instruire l'affaire, lequel a entendu les plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées, et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré pour l'arrêt être rendu le 20 Décembre 2010, par mise à disposition au greffe.

EXPOSE DU LITIGE

Suivant demande enregistrée le 19 mai 2006, Monsieur Daniel X... a fait attraire devant le Conseil de Prud'Hommes de METZ son ex-employeur, la S. A. S. FRANCE TRANSFO aux fins d'obtenir sa condamnation à lui verser :

-51. 669, 12 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,-6. 458, 64 euros nets à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

L'ensemble de ces indemnités demandées portant intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2006.
-1. 000, 00 euros nets au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le tout avec exécution provisoire.

La tentative de conciliation échouait.

La défenderesse s'opposait aux prétentions du demandeur et sollicitait sa condamnation à lui verser 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement rendu le 17 janvier 2008, le Conseil de Prud'Hommes de METZ statuait dans les termes suivants :

" DIT ET JUGE le licenciement de Monsieur Daniel X... dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
En conséquence,
CONDAMNE la société FRANCE TRANSFO SAS, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Monsieur Daniel X... les sommes de :
-30. 000, 00 euros (trente mille euros) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement ;
-500, 00 euros (cinq cents euros) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
La condamne aux entiers frais et dépens de la présente instance ;
DEBOUTE Monsieur Daniel X... du surplus de ses demandes ;
ORDONNE le remboursement par la société FRANCE TRANSFO aux organismes concernés les indemnités de chômage qu'ils ont éventuellement versées à Monsieur Daniel X... à concurrence de trois mois ;
Y ajoutant,
ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement conformément à l'article 515 du Nouveau code de Procédure Civile "

Suivant déclaration de son avocat, enregistrée le 31 janvier 2008 au greffe de la Cour d'appel de METZ, la société FRANCE TRANSFO a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions de son avocat, présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, la société FRANCE TRANSFO demande à la Cour de :
Recevoir l'appel en la forme et le déclarer bien fondé,
Y faisant droit en infirmant le jugement entrepris,
Débouter Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Le condamner à rembourser à la Société FRANCE TRANSFO les sommes versées en application de l'exécution provisoire du jugement entrepris,
Condamner Monsieur X... à payer à la Société FRANCE TRANSFO la somme de 1. 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du C. P. C.,
Le condamner aux entiers dépens.

Par conclusions de son avocat, présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, Monsieur X... formant appel incident, demande à la Cour de :

- Recevoir la société FRANCE TRANSFO en son appel mais la déclarer mal fondée.
- Débouter la société FRANCE TRANSFO de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
- Confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de METZ du 17 janvier 2008 en ce qu'il a déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur Daniel X...
- L'infirmer pour le surplus et statuant à nouveau :
- Condamner la société FRANCE TRANSFO à payer à Monsieur Daniel X... à titre d'indemnisation la somme de 51. 669, 12 € nets correspondant à 24 mois de salaire avec intérêts aux taux légal à compter du 17 janvier 2008 ;
- Condamner la société FRANCE TRANSFO à payer à Monsieur Daniel X... une somme de 6. 458, 64 € nets, correspondant à trois mois de salaire, au titre de dommages et intérêts pour préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter du 17 janvier 2008 ;
- Condamner la société FRANCE TRANSFO à payer à Monsieur Daniel X... une somme de 1. 000, 00 € en application des dispositions de l'article 700 du CPC ;
- Condamner la société FRANCE TRANSFO aux entiers frais et dépens de l'instance ;

Bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec avis de réception signé par le destinataire l'ASSEDIC n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter.

SUR CE

Vu le jugement entrepris,
Vu les conclusions des parties (enregistrées le 15 novembre 2010 pour la société FRANCE TRANSFO et le 23 novembre 2010 pour Monsieur Daniel X...) présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises ;
Attendu que Monsieur X... a été embauché suivant contrat à durée déterminée du 4 juin 1991 suivi d'un contrat à durée indéterminée du 1er janvier 1992 par la société FRANCE TRANSFO à compter du 1er juin 1991, en qualité d'ouvrier catégorie P1 ;
Que par lettre recommandée avec avis de réception du 23 janvier 2006, Monsieur X... était convoqué à un entretien préalable à licenciement fixé au 1er février 2006 ;
Que par lettre recommandée avec accusé de réception du 9 février 2006, il était licencié pour faute ainsi caractérisée :
" Le 19 janvier 2006 à 17H30, vous avez organisé, avec vos 4 collègues un pot pendant les heures de travail et sans autorisation de la hiérarchie. De plus, à cette occasion, il a été introduit de l'alcool, ce qui est formellement interdit par notre règlement intérieur. Enfin, il a été constaté que les 5 verres étaient servis avec de l'alcool.
Lors de l'entretien vous avez reconnu l'ensemble de ces faits et confirmé que sans l'intervention du responsable de production, vous auriez consommé cet alcool.
Personne ne pouvait ignorer que de tel agissement ne pourrait être tolérer au sein de France Transfo. Il nous est impossible d'admettre un tel comportement. "

Sur le bien fondé du licenciement

Attendu que la société FRANCE TRANSFO conteste la décision du Conseil de Prud'Hommes qui a considéré que le licenciement litigieux était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Qu'elle fait valoir en effet que :
- il n'est pas d'usage à FRANCE TRANSFO d'autoriser des pots, alcoolisés ou non et que les salariés n'avaient pas une telle autorisation ;
- compte tenu de son activité consistant à construire et réparer notamment des transformateurs, et nécessitant l'utilisation de machines dont certaines sont dangereuses, le règlement intérieur applicable à l'entreprise comporte en page 1 l'énoncé des interdictions suivantes : • entrer dans l'entreprise sous l'emprise de l'alcool ou de produits stupéfiants • introduire ou faciliter l'introduction de boissons alcoolisées ou de produits stupéfiants sur les lieux de travail • consommer de l'alcool ou des produits stupéfiants sur les lieux de travail. A noter que seules les consommations alcoolisées proposées dans le cadre du restaurant d'entreprise pour accompagner les repas sont autorisées.

- il est indifférent de savoir si Monsieur X... est à l'origine de l'introduction de la bouteille de whisky dans un atelier alors même que l'impossibilité de déterminer qui avait introduit l'alcool résulte de la solidarité entre les salariés ;
- il est indifférent que le salarié n'ait pas été en état d'ivresse ni qu'il n'ait pas bu l'alcool dans le verre qu'il tenait à la main alors que les faits se sont produits vers 17 heures, que Monsieur X... terminait son poste de travail à 20 heures 30, que les faits ont été interrompus par l'intervention du supérieur hiérarchique et que l'alcool utilisé était un alcool fort ;
Qu'elle ajoute qu'elle aurait pu, sur la base de l'arrêt de la cour de cassation du 25 janvier 1995 qui a considéré que la consommation d'alcool constituait une faute grave lorsqu'elle est interdite dans l'entreprise, justifier le licenciement du salarié en cause par une faute grave privative de préavis ;

Que Monsieur X... au contraire expose que :

- Il n'a pas reconnu, de même que les autres salariés avoir introduit de l'alcool de sorte que son licenciement n'est pas justifié dès lors qu'il apparaît que pour l'employeur c'est l'introduction d'alcool dans l'entreprise qui est la cause réelle du licenciement puisqu'il a été proposé à chacun des 5 salariés concernés, postérieurement au licenciement, de se dénoncer pour avoir introduit de l'alcool dans l'entreprise, moyennant quoi les 4 autres salariés seraient réintégrés ;
- La consommation d'alcool n'a pas eu lieu, puisqu'il a été mis fin au pot avant que les salariés aient consommé ;
- l'appréciation de la gravité de la faute doit s'apprécier " in concreto ", au regard de : • la mise en cause ou non de la sécurité dans l'entreprise • le trouble ou non au bon fonctionnement de l'entreprise • les antécédents professionnels ou disciplinaires du salarié et son ancienneté dans l'entreprise ;

- la légèreté de la faute commise par Monsieur X... qui a contesté à deux reprises avoir introduit de l'alcool, et dont le comportement répréhensible se trouve constitué par le seul fait d'avoir participé à une réunion avec quatre autres salariés pour prendre un pot non consommé par obéissance aux ordres du chef de production aurait du au pire être sanctionnée par une mise à pied ;
Qu'il conclut qu'en réalité l'employeur a voulu se débarrasser des salariés concernés dans le cadre d'une politique de réduction des effectifs, puis se rendant compte de ce qu'ils étaient expérimentés, a vainement tenté de se rattraper en proposant la réintégration de quatre d'entre eux, le cinquième reconnaissant avoir introduit de l'alcool ;
Attendu qu'il est constant que le règlement intérieur de FRANCE TRANSFO interdit pour raison de sécurité l'introduction et la consommation d'alcool dans l'entreprise ;
Attendu qu'il ressort de l'attestation établie le 5 décembre 2006 par Monsieur José Z... responsable d'unité autonome de production, que le 19 janvier 2006 à la suite d'un problème technique urgent apparu dans la réparation d'un transformateur, le témoin ainsi que le responsable du bureau d'études, un technicien qualité et le coordinateur du secteur se sont rendus au local de réparation afin d'essayer de trouver une solution au problème rencontré par l'opérateur et qu'à leur arrivée vers 17 heures 30, ils se sont retrouvés en présence de cinq personnes : Messieurs X..., A..., B..., D... et E... qui se trouvaient debout autour d'un établi transformé en table et sur lequel se trouvaient posés des " gâteaux apéritifs ", une bouteille de whisky à moitié pleine et une bouteille de coca cola ; que le témoin précise que les cinq salariés tenaient chacun leur verre à la main, qu'ils ont été surpris de les voir arriver, qu'ils ont sans attendre posé leur verre et ont immédiatement regagné leurs postes de travail respectifs ;
Que dans une nouvelle attestation établie le 11 décembre 2006 par le même témoin, ce dernier rapporte que lors des entretiens des salariés du 1er février 2006, ces derniers ont reconnu l'ensemble des faits, ont dit ne pas avoir bu dans la mesure où ils avaient été surpris mais avoir indiqué que dans le cas contraire ils auraient consommé l'alcool ;
Attendu que Monsieur X... reconnaît la réalité des faits énoncés dans la lettre de licenciement ;
Qu'il s'évince de l'ensemble de ces énonciations que les cinq salariés avaient organisé un " pot " au cours duquel ils devaient boire du whisky, introduit dans l'entreprise, qu'ils étaient sur le point de boire cet alcool et n'en ont été empêchés que par l'arrivée de quatre autres salariés parmi lesquels se trouvait un responsable hiérarchique, Monsieur Z... ;
Que l'organisation de ce pot par les cinq salariés et leur participation à celui-ci au mépris des dispositions du règlement intérieur interdisant l'introduction et la consommation d'alcool dans l'entreprise caractérisent un comportement fautif des salariés en cause et notamment de Monsieur X... dont il n'est pas contesté par ce dernier qu'il devait après le pot rejoindre son poste de travail, puisqu'il terminait son service, le jour des faits à 20 heures 30 ;
Attendu que les termes de la lettre de licenciement fixent les limites du litige ;
Que s'il ressort de l'attestation de Monsieur André C..., délégué CFDT, qu'après le licenciement, et plus précisément le 14 février 2006, il a été amené à faire au nom de la direction la proposition selon laquelle, en cas de reconnaissance par l'un des cinq salariés de ce qu'il avait introduit l'alcool, les quatre autres seraient réintégrés, une telle intention, subordonnée à une condition qui n'a jamais été réalisée, ne saurait caractériser rétroactivement la volonté de l'employeur de ne sanctionner au moment du licenciement que l'introduction de l'alcool dans l'entreprise ;
Attendu que l'ancienneté du salarié dans l'entreprise ne saurait être constitutive d'une circonstance atténuante alors précisément qu'elle était de nature à lui conférer une conscience accrue du danger lié à l'introduction et la consommation d'alcool à raison des machines utilisées pour la construction et la réparation de transformateurs ;
Attendu qu'il apparaît en conséquence que le comportement fautif du salarié tel qu'il se trouve caractérisé dans la lettre de licenciement est établi et est constitutif d'une cause réelle et sérieuse de licenciement ;
Qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de débouter le salarié de l'intégralité de ses demandes :

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Attendu que Monsieur X... qui succombe doit être condamné au dépens de première instance et d'appel et débouté de sa demande fondée sur l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Que la situation économique respective des parties justifie le rejet de la demande de la société FRANCE TRANSFO, au titre de ses frais irrépétibles ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire ;
- DÉCLARE la société FRANCE TRANSFO recevable en son appel principal et Monsieur Daniel X... recevable en son appel incident, lesdits appels étant dirigés contre un jugement rendu le 17 janvier 2008 par le Conseil de Prud'Hommes de METZ ;
- INFIRME le jugement entrepris, et statuant à nouveau :
- DÉBOUTE Monsieur Daniel X... de ses demandes ;
- DÉBOUTE la société FRANCE TRANSFO de sa demande fondée sur l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- CONDAMNE Monsieur Daniel X... aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été prononcé par mise à disposition publique au greffe le 20 Décembre 2010, par Madame DORY, Président de Chambre, assistée de Mme VAUTRIN, Greffier, et signé par elles.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de metz
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08/00570
Date de la décision : 20/12/2010
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.metz;arret;2010-12-20;08.00570 ?
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