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04/09/2024 | FRANCE | N°19/01063

France | France, Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 04 septembre 2024, 19/01063


N° RG 19/01063 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MGBX









Décision du Tribunal de Grande Instance de Lyon au fond du 08 janvier 2019



RG : 10/16401





SARL HM TRANSACTIONS



C/



[M]

Compagnie d'assurances L'AUXILIAIRE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



8ème chambre



ARRÊT DU 04 Septembre 2024







APPELANTE :



La SARL H.M Transactions inscri

te au RCS de Lyon sous le numéro B315 429 936 dont le siège est sis désormais [Adresse 6], à [Localité 3] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège



Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYO...

N° RG 19/01063 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MGBX

Décision du Tribunal de Grande Instance de Lyon au fond du 08 janvier 2019

RG : 10/16401

SARL HM TRANSACTIONS

C/

[M]

Compagnie d'assurances L'AUXILIAIRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

8ème chambre

ARRÊT DU 04 Septembre 2024

APPELANTE :

La SARL H.M Transactions inscrite au RCS de Lyon sous le numéro B315 429 936 dont le siège est sis désormais [Adresse 6], à [Localité 3] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938

Ayant pour avocat plaidant Me Pascale ULINE, avocat au barreau de LYON, toque : 299

INTIMÉS :

M. [I] [M]

né le 14 Juin 1952 à [Localité 8]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représenté par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547

Ayant pour avocat plaidant Me Amandine BIAGI, avocat au barreau de LYON

La compagnie L'AUXILIAIRE, immatriculée au RCS de LYON sous le numéro B 775 649 056, dont le siège est sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualité audit siège

Représentée par Me Laure-cécile PACIFICI de la SELARL TACOMA, avocat au barreau de LYON, toque : 2474

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 07 Février 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 05 Mars 2024

Date de mise à disposition : 15 Mai 2024 prorogée au 04 Septembre 2024

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Bénédicte BOISSELET, président

- Véronique MASSON-BESSOU, conseiller

- Véronique DRAHI, conseiller

assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport,

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La SARL HM Transactions, exerçant une activité de marchand de biens, a acquis une ancienne orangerie sise [Adresse 4]) en vue de sa réhabilitation en 15 logements et de la construction de 14 abris-voiture.

Suivant contrat signé le 21 juillet 2005, la société HM Transactions a confié à M. [I] [M] un marché de «'coordination des travaux'» au prix de 43'500 € HT (soit 52'026 € TTC) dont un acompte de 20% (soit 8'700 € HT) payable à la commande. Ce contrat mentionnait une date prévisionnelle de début de travaux en «'novembre ou décembre 2005'» et un délai d'exécution de 14 mois, sous réserve des journées d'intempéries.

Suivant contrat signé le 21 juillet 2005 également et dénommé «'acte d'engagement'», la société HM Transactions a confié à M. [I] [M], en sa qualité de coordonnateur SPS (coordonnateur de sécurité et de protection santé), une prestation de «'coordination en matière de sécurité-santé des travailleurs'» dans le cadre de l'opération de construction au prix de 4'500 € HT dont un acompte de 50% payable à la commande. Ce contrat mentionnait une durée de mission de 14 mois.

Le descriptif quantitatif estimatif des travaux établis par M. [M], tous corps d'état et suivant les plans d'un permis de construire, mentionnait un prix total de travaux de 1'066'793,41 € HT (soit 1'275'884,92 € TTC), sous la réserve suivante': «'En attente des services pour devis EDF GDF EAU'».

Le 16 avril 2010, le maître d''uvre a émis une facture dite «'facture définitive ' prise des lieux pour location ' réception avec les entreprises du 6 avril 2009 ' l'année de bon achèvement étant passée'», présentant un solde de 31'968 €.

Prétendant que cette facture demeurait impayée, M. [M] a, par acte d'huissier en date du 18 novembre 2010, fait assigner la société HLM Transactions en paiement. Par jugement avant-dire droit rendu le 7 mars 2013, le tribunal de grande instance de Lyon a constaté le caractère lacunaire des pièces produites par chacune des parties au soutien de leurs prétentions respectives pour ordonner une mesure d'expertise judiciaire confiée à M. [L] [B], mettant la consignation à la charge de M. [M] demandeur à l'instance.

La consignation n'ayant pas été versée, l'expertise est devenue caduque et l'instance a été reprise. Par exploit du 22 décembre 2014, la société HM Transactions a fait appeler en intervention forcée la société L'Auxiliaire, assureur de M. [I] [M].

Au contradictoire de ces parties et par jugement rendu le 8 janvier 2019, le Tribunal de Grande Instance de Lyon a':

Condamné la société HM Transactions à verser à M. [M] la somme de 31'968 euros portant intérêts calculés selon le taux de base bancaire majoré de trois points à compter du 18 juillet 2007 sur la somme de 20'486,40 euros et à compter du 16 avril 2010 pour le surplus ;

Débouté la société HM Transactions de sa demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de M. [M] et de la société L'Auxiliaire ;

Débouté M. [M] de sa demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de la société HM Transactions pour résistance abusive ;

Condamné la société HM Transactions à verser à M. [M] la somme de 2'000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamné la société HM Transactions à verser à la société L'Auxiliaire la somme de 1'500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamné la société HM Transactions aux dépens ;

Ordonné l'exécution provisoire.

Le tribunal a retenu en substance :

Que l'inexécution par M. [I] [M] de sa mission de maîtrise d''uvre n'étant pas démontrée, la société HM Transactions ne saurait donc faire valoir une quelconque exception d'inexécution pour être déchargée du paiement du reliquat des honoraires dus à M. [M] et doit être condamnée au paiement à son profit d'une somme de 31'968 euros TTC ;

Qu'aucune faute imputable à M. [I] [M] n'est caractérisée par la société HM Transactions ; qu'au surplus il convient de relever le fait que celle-ci ne justifie en rien de son préjudice'; que la responsabilité de M. [I] [M] ne saurait donc être retenue et que la société HM Transactions doit être déboutée de ses prétentions indemnitaires à son égard ;

Que le seul fait que la société HM Transactions succombe à l'instance après ne pas avoir payé le reliquat des honoraires de M. [I] [M], faisant valoir la mauvaise exécution par celui-ci de sa prestation, ne signifie pas que sa résistance présente un caractère abusif, lequel n'est pas davantage démontré par M. [I] [M] qui doit donc être débouté de sa demande indemnitaire.

Par déclaration en date du 11 février 2019 la société HM Transactions a interjeté appel de cette décision en tous ses chefs.

Par ordonnance rendue le 11 décembre 2019, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de radiation formée par M. [M] en constatant que la société HM Transactions était dans l'impossibilité financière d'exécuter la décision de première instance.

***

Aux termes de ces dernières conclusions déposées par voie électronique le 7 février 2022 (conclusions d'Appel n° 8 récapitulative en réponse aux dernières conclusions des intimés), la société HM Transactions demande à la cour :

A- Au principal :

Vu les articles 12 et 455 du Code de procédure civile et les moyens développés dans le cadre des présentes conclusions ;

Prononcer l'annulation du jugement frappé d'appel rendu par la 3° chambre civile du tribunal de grande instance de Lyon entre les parties le 8 janvier 2019 ;

En conséquence renvoyer la cause et les parties devant ladite chambre du tribunal de grande instance de Lyon pour que la procédure y soit reprise en l'état où elle se trouvait avant l'ordonnance de clôture en date du 29 mai 2017 et en tous les cas avant le rendu du jugement du 8 janvier 2019 ;

B - Subsidiairement pour le cas où il ne serait pas fait droit à la demande d'annulation et vu ensemble les anciens articles 1134, 1315, 1147, 1134 et 1382 du Code civil alors applicables, les articles 9, 12,455, 564 à 566, et 700 du nouveau Code de procédure civile, les pièces communiquées aux débats par les parties, les moyens contenus de droit comme de fait contenus dans les présentes conclusions et celles des intimés ;

Accueillir comme recevable et bien fondé l'appel et infirmer en tous ses chefs le jugement frappé d'appel ;

En conséquence et statuant à nouveau :

Débouter M. [M] de la totalité fins, demande et moyens à l'encontre de la société HM Transactions ;

En conséquence dire et juger que la responsabilité contractuelle de M. [M] est engagée pleinement et entièrement ;

Débouter la société L'Auxiliaire de l'ensemble de ses moyens et retenir qu'elle doit garantie à la société HM Transactions sur le fondement de l'ancien article 1382 du Code civile ;

En conséquence condamner in solidum M. [M] et L'Auxiliaire à payer à HM Transaction 1'800'029,75 euros au titre des dommages-intérêt lui revenant ;

C - Plus subsidiairement :

Ordonner une expertise judiciaire pour évaluer le préjudice subi par la société HM Transactions ;

Condamner in solidum les intimés d'avoir à lui payer 500 000 euros à titre de provision sur l'indemnisation lui revenant ;

D - Dans tous les cas :

Débouter les intimés de la totalité de leurs moyens, fins et prétentions ;

Condamner les mêmes intimés à payer à la société HM Transactions 8'000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés par Lexavoué Lyon représentée par Maître Laffly.

Elle y soutient, au principal, que le jugement du tribunal de grande instance de Lyon en date du 8 janvier 2019 prend le contre-pied et ne fait aucune référence au jugement avant-dire droit du 7 mars 2013 rendu dans la même instance. Or, elle souligne l'inconciliabilité radicale entre ces deux décisions et elle rappelle que, dans le cadre de ses conclusions récapitulatives et additionnelles n°3 notifiées le 10 février 2017, elle faisait précisément des termes du jugement avant-dire droit l'un des moyens de fond pour conclure au rejet des prétentions de M. [M]. Elle considère que le tribunal n'y a pas répondu et que dès lors sa décision doit être annulée selon la jurisprudence en vigueur.

A titre subsidiaire, elle expose que M. [M] a été défaillant dans l'exécution du contrat de coordination des travaux et engage sa responsabilité contractuelle la société HM Transactions au titre de l'ancien article 1147 du Code civil en ne respectant pas le délai de réalisation qu'il stipulait, sous la seule réserve d'intempéries dont il ne rapporte pas la preuve et en ne tenant pas compte des courriers que lui adressait la société HM Transactions, qu'il ne conteste pas avoir reçu, dans lesquels cette dernière l'alertait, lui proposait une rupture amiable, lui réclamait d'être informée de l'état de ses diligences pour éviter des retards ' Elle se réfère à la clause du contrat de coordination signé par les parties prévoyant un délai de réalisation de 14 mois sous la seule réserve de journées d'intempéries pour considérer, qu'en retenant que M. [M] n'était tenu que d'une obligation de moyen concernant le respect de ce délai, les premiers juges ont dénaturé le contrat liant les parties et ont opéré un renversement de la charge de la preuve.

Elle sollicite la garantie de la société L'Auxiliaire pour le sinistre causé par son assuré. A supposer qu'il y ait une discordance entre l'attestation d'assurance délivrée et les polices d'assurance, elle se prévaut de l'attestation et de la théorie de l'apparence pour rechercher la responsabilité de L'Auxiliaire sur le fondement de l'ancien article 1382 du Code civil. Elle relève ensuite que l'assureur, qui invoque la faute intentionnelle et dolosive de son assuré, n'en rapporte pas la preuve. Elle se défend pour finir de la part de responsabilité dans le sinistre que lui impute l'assureur, jugeant irréaliste de considérer qu'elle aurait dû poursuivre la résiliation judiciaire du contrat avec M. [M] compte tenu de la durée d'une procédure judiciaire et de la difficulté à trouver un remplaçant.

Elle renvoie au rapport de l'expertise diligentée par M. [C] qu'elle a mandaté suite à la caducité de la mesure d'expertise judiciaire que le tribunal avait précédemment ordonnée, lequel rapport retient et analyse tous les préjudices causés par le dépassement du délai d'achèvement du chantier. Elle affirme que ce rapport doit être retenu à titre de pièce et de preuve au soutien de la demande indemnitaire formulée à l'encontre de la société L'Auxiliaire et de M. [M] (1'800'029,75 euros).

En réponse à l'argumentation de M. [M], elle considère que ce dernier, demandeur à l'action en paiement, doit rapporter la preuve, soit qu'il a tenu ses engagements s'agissant des délais, soit que des intempéries justifient le retard. Elle relève que les procès-verbaux de réception dont le maître d''uvre se prévaut, même si ces documents sont une farce, constituent un aveu judiciaire puisqu'ils attestent d'un retard, même en deçà de la réalité. Elle estime que M. [M] ne rapporte pas la preuve que le retard serait imputable aux entreprises intervenues sur le chantier, à des problèmes de livraison des matériaux ou à des termites. Elle estime qu'il incombait au maître d''uvre de faire les demandes EDF GDF EAU en temps utiles, d'autant que cette prestation est mentionnée comme lui incombant aux termes du devis qu'il produit. Elle ajoute que l'absence de souscription d'une assurance dommage-ouvrage ne le dispensait pas de respecter les délais.

En réponse à l'argumentation de la société L'Auxiliaire, elle affirme qu'il lui est loisible d'agir contre l'assureur, soit au titre de l'action directe dont elle dispose en sa qualité de tiers lésé, soit au titre de la responsabilité délictuelle de l'assureur, ce deuxième fondement emportant que les conditions générales et particulières des contrats d'assurance, en cas d'attestation de nature à induire en erreur, ne lui sont pas opposables. Elle estime que la clause de garantie subséquente invoquée par L'Auxiliaire, génératrice d'une obligation sans cause, ne peut qu'être déclarée non écrite.

A titre subsidiaire, elle demande à la cour d'ordonner une expertise judiciaire pour chiffrer son préjudice et elle se défend de l'irrecevabilité de cette demande formée en cause d'appel puisqu'elle tend aux mêmes fins que ses demandes présentées devant les premiers juges, la demande d'expertise en étant la conséquence ou le complément.

***

Aux termes de ces dernières conclusions déposées par voie électronique le 4 février 2022 (conclusions d'intimé n°6), M. [I] [M] demande à la cour :

Vu les articles 1134, 1147, 1382 et 1315 anciens du Code Civil ;

Vu les articles 482 et 564 du Code de Procédure Civile ;

Vu l'article L242-1 du Code des assurances ;

Vu les explications qui précèdent et les pièces à l'appui dont la liste est annexée aux présentes ;

A titre principal :

Rejeter la demande de nullité de la société HM Transactions ;

En conséquence :

Confirmer le jugement rendu le 8 janvier 2019 par le tribunal de grande instance de Lyon en toutes ses dispositions ;

A titre subsidiaire :

Dire et juger que M. [M] n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ;

Dire et juger que les préjudices invoqués par la société HM Transactions ne sont ni prouvés ni imputables à M. [M] ;

Dire et juger que seule la société HM Transactions est responsable des préjudices allégués ;

En conséquence :

Débouter la société HM Transactions de l'intégralité de ses demandes ;

Débouter la société HM Transactions de sa demande d'expertise et de provision à valoir sur ses prétendus préjudices ;

Si par extraordinaire, la cour ordonnait une expertise :

Dire et juger que les frais d'expertise seront à la charge intégrale de la société HM Transactions qui en a fait la demande ;

Dire et juger que si une provision devait être allouée à la société HM Transactions, son montant ne pourra qu'être symbolique. Cette provision devra être consignée ;

A titre infiniment subsidiaire :

Dire et juger recevable la demande de garantie formée par M. [M] à l'encontre de la compagnie L'Auxiliaire ;

Dire et juger que si la responsabilité de M. [M] devait être engagée, les sommes mises à sa charge seront intégralement garanties par la compagnie L'Auxiliaire ;

En tout état de cause :

Condamner la société HM Transactions à verser à M. [M] la somme de 8'000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner la société HM Transactions aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Il y soutient que le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lyon en 2013 se borne à ordonner une mesure d'expertise judiciaire sans se prononcer sur le fond du litige et n'a pas l'autorité de la chose jugée aux termes de l'article 482 du Code de procédure civile. Il demande en conséquence la confirmation du jugement rendu en 2019.

A titre subsidiaire, il estime que la société HM Transactions ne rapporte pas la preuve qu'il serait à l'origine du retard de chantier, le respect des délais de construction ne constituant pour le maître d''uvre qu'une obligation de moyen. Il affirme que le retard du chantier est imputable uniquement à la société HM Transactions, laquelle n'a pas formulé de demandes auprès des services techniques de diverses entreprises publiques (EDF, GDF ') pendant la phase de dépôt du permis de construire, n'a pas réalisé les diagnostics techniques indispensables avant l'ouverture du chantier, lesquels ont finalement révélé la présence de mercure et de termites, n'a pas tenu compte de ses avertissements sur l'absence de fiabilité des sociétés en charge des lots «'maçonnerie'» et «'plomberie'» dont les ouvriers ont été absents du chantier, a payé ces deux sociétés sur la base de décomptes non-vérifiés par le maître d''uvre, se privant ainsi de la possibilité d'opérer des retenues à titre de pénalités pour retard.

Il affirme qu'en ne souscrivant pas d'assurance dommage ouvrage dès l'ouverture du chantier, et en ne réglant pas ses factures, sans démontrer de faute contractuelle de sa part, la société HM Transactions a manqué à ses obligations légales et contractuelles.

Il fait valoir que le rapport de M. [C] sur les préjudices subis par la société HM Transactions n'est étayé par aucun justificatif et qu'il ne lui est opposable à défaut d'être contradictoire. Il ajoute que le préjudice allégué est en réalité fictif puisque les travaux ont été terminés et que les bâtiments ont été loués via une autre société du dirigeant de la société HM Transactions.

Il considère que les demandes d'expertise aux fins d'évaluation de ses préjudices et d'allocation d'une provision de 500'000 euros de la part de la société HM Transactions sont irrecevables suivant l'article 564 du Code de procédure civile. En tout état de cause, il estime qu'en l'absence de preuve du moindre manquement de sa part, il ne doit pas supporter les frais d'une éventuelle expertise. Il ajoute que la somme de 500'000 euros demandées serait exorbitante dans de telles circonstances et doit être réduite à un montant symbolique.

A titre infiniment subsidiaire, il sollicite la garantie de la société L'Auxiliaire auprès de laquelle il avait souscrit trois polices d'assurance. Il précise que la société d'assurance a résilié les contrats le 7 décembre 2010, soit à une date où il avait engagé son action en paiement contre la société HM Transactions. Il se défend du caractère nouveau de sa demande, estimant que cette demande en garantie de l'assureur est le complément nécessaire de ses prétentions initiales au sens de l'article 566 du Code de procédure civile.

***

Aux termes de ces dernières conclusions déposées par voie électronique le 4 février 2022 (conclusions d'intimé n°3), la société L'Auxiliaire demande à la cour :

Vu les articles 1134, 1147, 1382 et 1315 anciens du Code civil,

Vu l'article 480 du Code de procédure civile,

Vu l'article 564 du Code de procédure civile,

Vu le jugement du 8 janvier 2019,

Vu les faits et les pièces de la cause,

A TITRE PRINCIPAL

CONFIRMER le jugement rendu le 8 janvier 2019 par le Tribunal de grande instance de Lyon en toutes ses dispositions,

A TITRE SUBSDIAIRE

REJETER la demande de nullité soulevée par la société HM Transactions comme étant non fondée,

REJETER la demande nouvelle de garantie formulée par M. [M] contre la compagnie L'Auxiliaire comme étant irrecevable,

DIRE ET JUGER que la police responsabilité civile professionnelle de la compagnie L'AUXILIARE est en base réclamation et qu'elle a été résiliée le 7 décembre 2010,

DIRE ET JUGER qu'aucune déclaration de sinistre n'est intervenue en cours de validité du contrat,

DIRE ET JUGER que la compagnie L'Auxiliaire n'est tenue à aucune garantie subséquente,

En conséquence,

DIRE ET JUGER que la garantie responsabilité civile professionnelle de la compagnie L'Auxiliaire n'a pas vocation à être mobilisée,

METTRE purement et simplement hors de cause la compagnie L'Auxiliaire,

DIRE ET JUGER que la compagnie L'Auxiliaire n'a commis aucune faute de nature délictuelle à l'encontre de la société HM Transactions relativement aux attestations d'assurance fournies à M. [M],

En conséquence,

REJETER les demandes de condamnation formulées à l'encontre de la compagnie L'Auxiliaire,

DIRE ET JUGER que les manquements reprochés à la M. [M] relèvent de faits intentionnels lesquels excluent la mobilisation de la police civile professionnelle de la compagnie L'Auxiliaire,

En conséquence,

DIRE ET JUGER que la garantie responsabilité civile professionnelle de la compagnie L'Auxiliaire n'a pas vocation à être mobilisée,

METTRE purement et simplement hors de cause la compagnie L'Auxiliaire,

DIRE ET JUGER que la société HM Transactions ne rapporte par la preuve d'une faute imputable à M. [M],

DIRE ET JUGER qu'aucun des préjudicies allégués par la société HM Transactions n'est justifié,

DIRE ET JUGER qu'aucun lien de causalité n'est établi entre les prétendus manquements de M. [M] et les prétendus préjudices de la société HM Transactions,

DIRE ET JUGER que seule la société HM Transactions est fautive et responsable des préjudices allégués,

En conséquence,

REJETER toute demande de condamnation à l'encontre de la compagnie L'Auxiliaire,

DIRE ET JUGER que la compagnie L'Auxiliaire est fondée à opposer sa franchise et son plafond de garantie tels que définis aux conditions particulières de sa police,

EN TOUT ETAT DE CAUSE

CONDAMNER la société HM Transactions à payer à la compagnie L'Auxiliaire la somme de 5'000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Elle y soutient que le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lyon en 2013 se borne à ordonner une mesure d'expertise judiciaire sans se prononcer sur le fond du litige et n'a pas l'autorité de la chose jugée.

A titre subsidiaire, elle indique que les garanties souscrites par M. [M], résilié le 7 décembre 2010, étaient en «'base réclamation'» ce qui implique que le sinistre, pour être garanti, doit avoir été déclaré pendant la période de validité du contrat. Or, elle affirme qu'elle n'a pu avoir connaissance du sinistre le 18 novembre 2010, l'assignation de M. [M] n'étant pas dirigée à son encontre mais uniquement à l'encontre de la société HM Transactions. Elle observe que M. [M] ne demandait pas sa garantie à titre subsidiaire en première instance pour en conclure que cette demande est une demande nouvelle en cause d'appel irrecevable au sens de l'article 564 du Code de procédure civile.

Elle fait valoir que la garantie souscrite est une assurance facultative qui n'a pas vocation à être mobilisée après la période de validité de la police, sauf application d'une garantie subséquente prévue au contrat, laquelle est soumise à la condition de régler une prime afférente qui n'a pas été payée par M. [M]. Elle estime que les arguments de la société HM Transactions ont pour objectif de contourner les dispositions du contrat souscrit entre la compagnie L'Auxiliaire et M. [M] et elle considère que l'ensemble de ces moyens est inopérant du fait que M. [M] a signé les conditions particulières du contrat, il appartenait à la société HM Transactions de réclamer l'ensemble des dispositions de la police avant de s'engager avec M. [M] et il n'y a aucune discordance entre les termes des attestations produites et les termes du contrat souscrit par M. [M]. Elle conclut en sa mise hors de cause en l'absence de mobilisation de sa garantie.

En tout état de cause, elle invoque une exclusion de garantie tenant au fait que les manquements de M. [M] allégués par la société HM Transactions (absence de rédaction de comptes-rendus de chantier, défaut d'établissement de planning de travaux et défaut de présentation de certaines entreprises intervenant sur le chantier) s'analysent en un fait intentionnel voir dolosif. Elle indique en outre qu'ils constituent un manquement aux règles de l'art faisant échec à la mobilisation de la police au titre de son article 11.

Elle conclut au rejet des demandes indemnitaires de la société HM Transactions qui se prévaut d'un préjudice de 1'800'029,75 euros sans démontrer ni la faute de M. [M], ni la réalité de son préjudice et sans établir le lien de causalité entre les deux. En effet, elle considère que l'obligation de tenir les délais de M. [M] n'était qu'une obligation de moyen dont le manquement fautif n'est pas prouvé par la société HM Transactions. Elle souligne en particulier qu'en laissant perdurer la situation pendant 5 ans, la société HM Transactions est responsable de son propre préjudice.

Elle relève encore que le rapport de M. [C] sur lequel la société HM Transactions fonde sa demande de préjudice n'a aucune valeur juridique en ce qu'il est dépourvu de tout caractère contradictoire et n'est accompagné d'aucune pièce venant justifier les conclusions qui y sont contenues. Elle souligne que le retard trouve sa cause dans les travaux, prestation matérielle n'entrant pas dans la mission de M. [M], maître d''uvre, et dans le manque de diligence des entreprises qui ne peut lui être reproché. Elle considère qu'il n'est pas établi que le maître d''uvre serait responsable du surcoût des chantiers. Elle ajoute qu'en cas de condamnation, elle est fondée à opposer les franchises et plafonds de garanties tels que prévus aux conditions particulières de sa police.

***

Il est renvoyé aux écritures des parties pour plus ample exposé des moyens venant à l'appui de leurs prétentions.

MOTIFS,

A titre liminaire, il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes des parties tendant à voir la cour «'constater'» ou «'dire et juger'» lorsqu'elles ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du Code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions.

Sur la demande en annulation du jugement pour défaut de motivation':

L'article 455 du Code de procédure civile énonce notamment que le jugement doit être motivé et il est jugé que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif.

En l'espèce, la société HM Transactions prétend que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen qu'elle aurait développé dans ses conclusions récapitulatives et additionnelles n° 3 consistant à faire valoir que, même si les motifs du jugement avant dire droit rendu le 7 mars 2013 sont dénués d'autorité de chose jugée, cette décision existe et elle constitue l'un des éléments du dossier. Elle souligne en particulier que la motivation de ce jugement avant dire droit est éclairante concernant la charge de la preuve qui pèse sur le demandeur à l'action en paiement d'un solde honoraire, et concernant les retards pris dans l'exécution du chantier alors tenus pour évidents.

Or, l'appelante ne produit pas les dernières conclusions qu'elle avait soumises aux premiers juges de sorte que la cour n'est pas en mesure de vérifier leur contenu à l'effet d'apprécier le défaut de réponse allégué.

La société HM Transaction sera en conséquence déboutée de sa demande, présentée à titre principal, en annulation du jugement attaqué.

Sur la demande en paiement du solde de la facture définitive:

En vertu des articles 1103 et 1104 du Code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et ils doivent être exécutés de bonne foi.

Aux termes de l'article 1353 de ce même code, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, M. [M] verse d'abord aux débats le marché de «'coordination des travaux'» signé le 21 juillet 2005 et l'acte d'engagement de «'coordination en matière de sécurité-santé des travailleurs'» signé le même jour. Or, la société HM Transactions quant à elle produit un unique contrat correspondant, en page 1, à la première page de l'acte d'engagement de «'coordination en matière de sécurité-santé des travailleurs'» et, en page 2, à la deuxième page du contrat de «'coordination des travaux'». Cette pièce produite par la société appelante sera écartée comme ne reflétant pas la réalité des conventions liant les parties, à savoir deux contrats distincts. En effet, la cour relève, à l'instar des premiers juges, que le devis du 4 août 2005, paraphé par le représentant de la société HM Transactions, présente une ventilation des prix des prestations confiées à M. [M], lesquelles correspondent exactement aux deux contrats signés par les parties le 21 juillet 2005, soit des prestations de «'coordination des travaux'» au prix total de 43'500 € HT et une prestation de «'coordination en matière de sécurité-santé des travailleurs'» au prix total de 4'500 € HT.

L'entrepreneur justifie ensuite des factures qu'il a émises au fur et à mesure de l'avancement du chantier et, dans ses écritures, M. [M] liste, sans être démenti, les paiements reçus. La cour relève ainsi que la facture dite «'facture définitive ' prise des lieux pour location ' réception avec les entreprises du 6 avril 2009 ' l'année de bon achèvement étant passée'», émise le 16 avril 2010 reprend l'ensemble des paiements encaissés et qu'elle présente un solde restant dû, non-contesté dans son quantum, de 31'968 € TTC.

Pour contester être tenue au paiement de ce solde, la société HM Transactions fait valoir que M. [M] a engagé sa responsabilité contractuelle et elle liste les défaillances de l'entrepreneur qu'elle tient pour responsable d'un retard inadmissible des travaux. Or, cette argumentation présentée sans aucune référence à une exception d'inexécution, est uniquement de nature à fonder, le cas échéant, la demande reconventionnelle en dommages et intérêts qui sera examinée ci-après. Cette argumentation, telle qu'elle est présentée, ne constitue en revanche pas un moyen de défense de nature à faire échec à la demande en paiement. Il s'ensuit que sans renverser la charge de la preuve, c'est par des motifs exacts et pertinents tant en droit qu'en fait et que la cour adopte expressément que les premiers juges ont constaté que M. [M] rapportait la preuve du principe et du montant de sa créance. La cour ajoute que dans la mesure où, d'une part, il n'est en réalité pas contesté que la prestation de coordination des travaux facturée a été in fine réalisée, et d'autre part, que les retards pris par le chantier ne sont pas invoqués au soutien d'une exception d'inexécution, cette créance est exigible.

Le jugement attaqué, en ce qu'il a condamné la société HM Transactions à payer à la M. [M] la somme de 31'968 € avec intérêts, sera confirmé.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts:

Aux termes de l'ancien article 1147 du Code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Le maître d''uvre, interface entre le maître de l'ouvrage et les entreprises, n'exécute pas lui-même les travaux. Dès lors, son obligation de veiller au respect des délais d'exécution des travaux, obligation essentielle de sa mission de coordination, est nécessairement une obligation de moyen. Le maître d''uvre sera ainsi tenu pour responsable du retard pris par le chantier à la condition que le maître de l'ouvrage rapporte la preuve que ce retard lui est effectivement imputable.

En l'espèce, en mentionnant une date prévisionnelle de début de travaux en «'novembre ou décembre 2005'» et un délai d'exécution de 14 mois, sous réserve des journées d'intempéries, le marché de «'coordination des travaux'» signé par les parties le 21 juillet 2005 n'emporte aucune obligation de résultat de M. [M] concernant le respect de ces délais. En effet et par nature, sa mission de coordination des travaux ne peut que lui imposer une obligation de moyen comme retenu par les premiers juges sans aucune dénaturation du contrat.

Sous cette remarque liminaire, il résulte d'abord des pièces produites par les parties et de leurs explications que la date prévisionnelle de début des travaux, fixée à «'novembre ou décembre 2005'», n'a pas été respectée mais que, par une lettre recommandée du 23 novembre 2005, M. [M] en avait averti la société HM Transactions. L'entrepreneur y expliquait que la date prévisionnelle de début des travaux ne serait pas respectée à raison, d'une part, de ses démarches en cours auprès des «'services techniques EDF, GDF, EAU, TEL et VILLE'» alors que «'toutes ces demandes auraient dû être faites pendant la phase dépôt de permis et sont en partie responsable de ces retards'», et d'autre part, d'un rendez-vous fixé le 25 novembre 2005 avec un géomètre pour résoudre le «'problème'» de l'absence de bornage contradictoire car «'les services techniques ne peuvent passer sans servitudes de tréfonds'».

La cour relève que ce retard de démarrage des travaux ne peut pas être imputé à la responsabilité de M. [M] puisque le devis du 4 août 2005, présentant une ventilation des prix des missions qui lui étaient confiées, mentionne que parties des phases «'étude'», «'dépôt de permis'» et «'travaux'» ne donneraient lieu à aucun paiement à l'entrepreneur. La mention «'architecte'», au lieu et place du prix, indique en effet que les prestations correspondantes relevaient de l'intervention d'un tiers. Or, aux titres des missions non-confiées à M. [M] figurent justement «'la consultation des services EDF GDF EAU'» (phase «'étude'»), les «'plans VRD (réseaux humides, réseaux secs)'», les «'déplacements (DDE, DDA, EDF, GDF, EAU, TEL)'» (phase «'dépôt de permis'») et les «'OPC (ordonnancement pilotage coordination suivi de chantier contact EDF GDF EAU)'» (phase «'travaux'»). Il s'ensuit que la société HM Transactions se méprend lorsqu'elle laisse entendre que les démarches nécessaires à la viabilisation du terrain incombaient à M. [M], puisque le devis du 4 août 2005 indique expressément que ces démarches relevaient de l'architecte. Au demeurant, l'absence de réalisation préalable de ces démarches s'infère également du descriptif quantitatif estimatif des travaux établis par M. [M] comportant la réserve expresse «'En attente des services pour devis EDF GDF EAU'».

La cour relève ensuite, bien que les parties ne s'expliquent pas spécialement sur ce point, que celles-ci justifient chacune d'un permis de construire différent. Ainsi, le maître de l'ouvrage produit la photographie de l'affichage de l'autorisation d'urbanisme apposé sur le terrain mentionnant un permis de construire en date du 22 août 2005. M. [M] quant à lui justifie d'un permis de construire délivré par arrêté du maire de la commune de [Localité 5] le 12 mars 2007 sur la base des plans de M. [T] [Z], architecte. Quelque soient les raisons de cette succession de permis de construire pour une même opération de construction, il en résulte nécessairement que les travaux ne pouvaient pas débuter, du moins utilement, avant l'obtention du second permis de construire. Cette chronologie est confirmée par la date à laquelle M. [M] a émis ses factures puisque, postérieurement à la facture d'acompte du 6 août 2005, acquittée par chèque encaissé le 16 août 2005, il n'a émis ses factures dites «'situation 1'» et «'situation 2'» qu'en juillet et septembre 2007, soit après l'obtention du permis de construire du 12 mars 2007. Ainsi, la thèse de M. [M], selon laquelle le non-respect de la date prévisionnelle de démarrage des travaux est imputable à l'absence de démarches préalables concernant la viabilisation du terrain, est suffisamment établie par la succession de permis de construire ci-avant relevée, étant rappelé que, ni l'obtention du permis de construire, ni les démarches nécessaires à la viabilisation du terrain, n'incombaient pas à M. [M] en l'état des pièces contractuelles liant les parties.

Dès lors, les courriers de relance que la société HM Transactions a adressés à M. [M] courant 2006, lui reprochant l'absence de planning des entreprises et l'absence de date de début de chantier, ainsi contextualisés comme étant antérieurs à l'obtention du permis de construire sur la base duquel les travavaux ont été réalisé, ne sont pas de nature à établir un quelconque manquement de l'entrepreneur.

Concernant la durée des travaux fixée à 14 mois, elle doit donc être appréciée à compter de l'obtention du second permis de construire, soit une date d'achèvement prévisible aux alentours du mois de mai 2008. Sous cette précision, la cour observe que la société HM Transactions conteste la date d'achèvement des travaux dont le maître d''uvre justifie en produisant une série de 10 procès-verbaux de réception qu'il a signés le 6 avril 2009 avec chacune des entreprises intervenues sur le chantier. Bien que ces procès-verbaux ne soient pas signés par la société HM Transactions elle-même comme cela aurait dû être le cas, le maître de l'ouvrage ne justifie pas, qu'à cette date, les travaux n'étaient pas en l'état d'être reçus. En particulier, la société appelante ne produit aucun procès-verbal de constat par commissaire de justice pour, le cas échéant, établir une absence de finalisation des travaux qui serait en conséquence incompatible avec une réception à cette date. En outre, la société appelante ne convainc pas lorsqu'elle prétend que la convocation par le maître d''uvre de l'ensemble des intervenants à une réunion fixée le 8 septembre 2010 établirait que la réception n'était pas intervenue à cette date. En effet, à la lueur des échanges alors en cours entre la société HM Transactions et M. [M] concernant le paiement de la facture définitive émise par ce dernier, cette convocation semble n'avoir trait qu'à la problématique d'un compte à faire entre les parties. Au demeurant, la société HM Transactions ne fournit aucune explication sur la date à laquelle elle a pris possession de l'ouvrage.

A cet égard, il y a lieu de relever qu'il résulte de l'ordonnance de référé rendue sur assignation de Mme [W] que cette dernière a acquis un lot par un acte de vente notarié du 31 juillet 2008 aux termes duquel le vendeur, la société HM Transactions, s'engageait à finaliser les travaux au plus tard le 30 septembre 2008. Cette ordonnance de référé enseigne également qu'un procès-verbal de réception a finalement été signé par Mme [W] et la société HM Transactions le 12 décembre 2008. En l'état de ces éléments établissant une réception à la date du 12 décembre 2008, tant bien même celle-ci ne concernerait qu'un seul lot, il apparaît suffisamment plausible et cohérent que la réception des autres lots ait été formalisée suivant procès-verbaux de réception signés le 6 avril 2009. En tout état de cause, le maître de l'ouvrage échoue à en rapporter la preuve contraire. Il en résulte que les travaux réalisés sous la maîtrise d''uvre de M. [M], ont été réalisé avec un retard, non pas de plus de 3 ans comme le soutient l'appelante, mais de, au plus, onze mois.

Pour autant, la société HM Transactions ne peut imputer ce retard au maximum de onze mois à M. [M] qu'à la condition de rapporter la preuve que ce retard résulter d'un défaut de coordination de la part de ce dernier. Or, c'est par des motifs exacts et pertinents, tant en fait qu'en droit que les premiers juges ont relevé que les courriers que le maître de l'ouvrage a adressé à M. [M] pour lui reprocher une absence de coordination de chantier ne sont pas probants en vertu de la règle selon laquelle «'nul ne peut se constituer de preuve à soi même'». La cour relève en effet que le grief de défaut de coordination n'est pas étayé par une analyse globale du déroulement du chantier qui aurait pu être réalisée dans le cadre de l'expertise judiciaire ordonnée avant dire droit, expertise devenue caduque en l'absence de paiement par M. [M] de la consignation de la provision et en l'absence de diligences de la société HM Transactions qui aurait pu verser cette provision puisqu'elle avait également intérêt à cette mesure d'instruction.

Concernant le grief tenant à une absence de comptes-rendus de chantier, il est exact que l'entrepreneur, seul en capacité de justifier de la réalisation de ces documents, ne produit aucune pièce à ce sujet. Ainsi, la société appelante est fondée à relever que les premiers juges, en lui reprochant de ne pas rapporter la preuve de cette absence de comptes-rendus de chantier, ont inversé la charge de la preuve puisque, par hypothèse, une partie ne peut pas rapporter la preuve d'un fait négatif sauf à exiger d'elle une preuve impossible. En l'état de l'absence de comptes-rendus produits par M. [M] ou d'explications fournis par ce dernier à ce sujet, il est ainsi suffisamment établi que le maître d'oeuvre a manqué à l'une de ses obligations contractuelles en ne formalisant pas de comptes-rendus de chantier.

Pour autant, la cour observe, à l'instar des premiers juges, que ce défaut de formalisation de l'exécution de sa mission ne suffit pas, à elle seule, à lui imputer le retard pris par le chantier, étant rappelé que le maître d''uvre n'exécute pas lui-même les travaux et qu'il est en grande partie tributaire des entreprises en charge des différents lots. Au contraire, il résulte des télécopies et courriers produits par les parties que M. [M] avait pris soin d'alerter le maître de l'ouvrage qu'il faisait son travail «dans de mauvaises conditions» à raison du «'retard accumulé par certaines entreprises'» (télécopie du 16 décembre 2008 produite par la société appelante) sans pouvoir leur appliquer de pénalités de retard puisque le maître de l'ouvrage a réglé les factures des entreprises TS (en charge du lot «'maçonnerie'») et UNIVOK (en charge du lot «'plomberie chauffage'») avant un visa de sa part (lettre recommandée du 18 août 2009). Le différend opposant ces deux dernières entreprises à M. [M] est d'ailleurs illustré par les courriers versés aux débats par la société HM Transactions, sans que la seule teneur de ces courriers ne permette à la cour de départager les professionnels concernés sur le bien fondé de leurs griefs respectifs. Il s'ensuit que la société HM Transactions ne rapporte pas suffisamment la preuve que le retard pris par le chantier serait imputable à des manquements de M. [M] à ses obligations contractuelles plutôt qu'aux entreprises en charge des lots «'maçonnerie'» et «'plomberie'». En tout état de cause, il résulte des courriers des sociétés TS et UNIVOK versés aux débats par la société appelante que le maître d''uvre leur a adressé de nombreuses relances, remplissant en cela son rôle de coordination et de suivi des entreprises afin que celles-ci respectent les délais d'exécution des travaux. La société HM Transactions ne contestant pas avoir payé les factures des sociétés TS et UNIVOK sans visa préalable du maître d''uvre, il est en outre suffisamment établi que M. [M] a été empêché de vérifier les décomptes de ces entreprises pour y imputer, le cas échéant, des pénalités de retard, sous réserve d'éventuelles journées d'intempéries.

Concernant la tardiveté de la souscription d'une assurance dommage-ouvrage, le maître de l'ouvrage n'est évidemment pas fondé à la reprocher à M. [M], sauf à enfreindre la règle selon laquelle «'nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude'». En effet, la souscription de cette assurance obligatoire légalement avant le commencement des travaux relève de la responsabilité de la société HM Transactions, tandis qu'à supposer que l'intervention d'un professionnel du bâtiment lui était nécessaire pour l'obtention de cette assurance, la cour relève que le maître de l'ouvrage déclarait, aux termes du marché de «'coordination des travaux'» signé le 21 juillet 2005, avoir déjà souscrit une telle assurance. Il s'ensuit que l'attestation de M. [T] [Z], architecte, aux termes de laquelle celui-ci certifie avoir été témoin de l'engagement de M. [M] de faire une remise de 11'000 € pour participer au surcoût de l'assurance dommage-ouvrage non-prévue au budget initial, n'est pas suffisante, ni à contredire l'engagement contractuel du maître de l'ouvrage qui déclarait avoir déjà souscrit cette assurance, ni à établir que la souscription tardive d'une assurance dommage-ouvrage serait imputable à un manquement contractuel de M. [M].

Au final, la société HM Transactions échoue à rapporter la preuve, à défaut notamment de réalisation de l'expertise judiciaire qui aurait permis de retracer les étapes d'avancement du chantier et de déterminer parmi les nombreux intervenants lesquels seraient à l'origine d'un non-respect des plannings, que le retard d'exécution des travaux, même ramené à la durée maximum de onze mois comme ci-avant retenue, serait imputable à des manquements contractuels de M. [M].

Le jugement attaqué, en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle en dommages et intérêts présentée par la société HM Transactions à l'encontre de M. [M], mais également à l'encontre de son assureur L'Auxiliaire, sera confirmé.

Sur la demande présentée à titre subsidiaire d'expertise et de provision:

Aux termes de l'article 144 du Code de procédure civile, les mesures d'instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause, dès lors que le juge ne dispose pas d'éléments suffisants pour statuer.

Selon l'article 565, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.

En l'espèce, la société HM Transactions sollicite une mesure d'expertise judiciaire à l'effet de voir chiffrer son préjudice. Cette demande, en ce qu'elle tend aux mêmes fins que sa demande indemnitaire présentée en première instance, n'est pas nouvelle et elle est en conséquence parfaitement recevable à hauteur d'appel.

Cela étant, il a été vu ci-avant que la société appelante échoue à rapporter la preuve de la défaillance du maître d''uvre de sorte que l'expertise sollicitée, portant uniquement sur l'évaluation du préjudice qui serait résulté d'une défaillance de l'entrepreneur, est inutile à la solution du litige.

La demande présentée de ce chef sera rejetée, ainsi que la demande en paiement d'une provision dans l'attente des conclusions du rapport d 'expertise.

Sur les autres demandes':

En l'absence de condamnation de M. [M], sa demande de garantie formée à l'encontre de la société L'Auxiliaire est sans objet. Il n'y a dès lors pas lieu de statuer, ni sur la recevabilité de cette demande, ni sur son bien fondé.

La cour confirme la décision attaquée qui a condamné la société HM Transactions, partie perdante, aux dépens et à payer à M. [I] [M] et à la société L'Auxiliaire les sommes respectives de 2'000 € et 1'500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, montants justifiés en équité.

La société HM Transactions, partie perdante, est condamnée aux dépens à hauteur d'appel.

La cour condamne à hauteur d'appel la société HM Transactions à payer à M. [M] et à la société L'Auxiliaire, les sommes respectives de 2'500 € et 1'500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement rendu le 8 janvier 2019 par le tribunal de grande instance de Lyon en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la SARL HM Transactions, prise en la personne de son représentant légal, aux dépens de l'instance d'appel,

Condamne la SARL HM Transactions, prise en la personne de son représentant légal, à payer à M. [I] [M] la somme de 2'500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la SARL HM Transactions, prise en la personne de son représentant légal, à payer à la société L'Auxiliaire la somme de 1'500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/01063
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;19.01063 ?
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