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11/07/2024 | FRANCE | N°24/05642

France | France, Cour d'appel de Lyon, Retentions, 11 juillet 2024, 24/05642


N° RG 24/05642 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PY76



Nom du ressortissant :

[U] [P]

PREFETE DU RHÔNE



PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE

C/

[P]

PREFETE DU RHÔNE



COUR D'APPEL DE LYON



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE SUR APPEL AU FOND

EN DATE DU 11 JUILLET 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers





Nous, Nabila BOUCHENTOUF, conseillère à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présiden

te de ladite Cour en date du 4 janvier 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séj...

N° RG 24/05642 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PY76

Nom du ressortissant :

[U] [P]

PREFETE DU RHÔNE

PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE

C/

[P]

PREFETE DU RHÔNE

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE SUR APPEL AU FOND

EN DATE DU 11 JUILLET 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers

Nous, Nabila BOUCHENTOUF, conseillère à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 4 janvier 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile,

Assistée de Ynes LAATER, greffière,

En présence du ministère public, représenté par Laurence CHRISTOPHLE, substitut, près la cour d'appel de Lyon,

En audience publique du 11 Juillet 2024 dans la procédure suivie entre :

APPELANT :

Monsieur le Procureur de la République

près le tribunal de judiciaire de Lyon

représenté par le parquet général de Lyon

ET

INTIMES :

M. [U] [P]

né le 21 Avril 1990 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

Actuellement retenu au centre de rétention administrative de [4] 2

Comparant et assisté de Me Nathalie LOUVIER, avocat au barreau de LYON et avec le concours de Madame [E] [B], interprète en langue arabe, expert près la cour d'appel de LYON

Mme PREFETE DU RHÔNE

[Adresse 1]

[Localité 2]

non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître IRIRIRA NGANGA Dan, avocat au barreau de LYON substituant Me Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON

Avons mis l'affaire en délibéré au 11 Juillet 2024 à 15h00 et à cette date et heure prononcé l'ordonnance dont la teneur suit:

FAITS ET PROCÉDURE

Par décision du tribunal correctionnel de Villefranche sur Saône en date du 29 mars 2019, [U] [P] a été condamné notamment à une peine complémentaire d'interdiction du territoire français pour une durée de 5 ans.

Le 10 mai 2024, la préfète du Rhône a pris un arrêté fixant le pays de renvoi.

Par décision du 10 mai 2024, l'autorité administrative a ordonné le placement de [U] [P] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire à compter du même jour.

Par ordonnance du 12 mai 2024 confirmée en appel le 14 mai 2024 et par ordonnance du 9 juin 2024 confirmée en appel le 11 juin 2024, le juge des libertés et de la détention a prolongé la rétention administrative de [U] [P] pour des durées successives de vingt-huit et trente jours.

Suivant requête du 8 juillet 2024, le préfet du Rhône a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir ordonner une prolongation exceptionnelle de la rétention pour une durée de quinze jours.

Dans son ordonnance du 9 juillet 2024 à 12h11, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon a dit n'y avoir lieu à prolongation exceptionnelle de la rétention administrative de [U] [P].

Le 9 juillet 2024à 16 heures 32, le ministère public a formé appel avec demande d'effet suspensif, en faisant valoir que les conditions d'une troisième prolongation sur le fondement d'une menace à l'ordre public sont réunies au regard du nombre et de la gravité des infractions pour lesquelles l'intéressé a été condamné.

Il sollicite l'infirmation de l'ordonnance déférée et la prolongation de la rétention administrative.

Par ordonnance en date du 10 juillet 2024 à 10h30, le délégataire du premier président a déclaré l'appel recevable et suspensif.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 11 juillet 2024 à 10h30.

[U] [P] a comparu assisté et de son avocat et d'un interprète en langue arabe.

Mme l'avocat général sollicite l'infirmation de l'ordonnance et reprend les termes de la requête d'appel du procureur de la République de Lyon en demandant la prolongation de la rétention administrative.

Le préfet du Rhône, représenté par son conseil, s'associe aux réquisitions du ministère public et soutient la délivrance à bref délai d'un laissez-passer consulaire, outre la menace que représente l'intéressé à l'ordre public..

Le conseil de [U] [P] a été entendu en sa plaidoirie pour solliciter la confirmation de l'ordonnance déférée.

[U] [P] a eu la parole en dernier.

MOTIVATION

Sur le bien-fondé de la requête en prolongation exceptionnelle

Attendu que l'article L. 741-3 du CESEDA rappelle qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que le temps strictement nécessaire à son départ et que l'administration doit exercer toute diligence à cet effet ;

Attendu que l'article L. 742-5 du même code dispose que «A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;

2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :

a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 9° de l'article L. 611-3 ou du 5° de l'article L. 631-3 ;

b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai» 

Il sera rappelé que les critères énoncés ci-dessus n'étant pas cumulatifs, il suffit à l'administration d'établir l'un d'eux pour justifier d'une prolongation de la rétention.

Le conseil de [U] [P] a soutenu devant le juge des libertés et de la détention et dans le cadre de l'appel du ministère public que les conditions de ce texte ne sont pas réunies en ce que la situation de l'intéressé ne répond pas aux conditions de la troisième prolongation.

Pour rejeter la requête du préfet du Rhône, le juge des libertés et de la détention a considéré d'une part, qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que [U] [P] a fait obstruction à son éloignement au cours des 15 derniers jours, d'autre part, que le caractère infructueux des démarches ne permet pas de tenir pour établi que la délivrance des documents de voyage par les autorités consulaires algériennes et tunisiennes interviendra à bref délai, et enfin, que les condamnations de [U] [P] sont anciennes et qu'il n'est pas établi que son comportement soit constitutif d'une menace réelle, actuelle et suffisamment grave affectant un intérêt fondamental de la société.

Il n'est ici pas justifié d'une obstruction imputable à [U] [P] à l'exécution de sa mesure d'éloignement dans les quinze derniers jours.

En outre, sur les diligences de l'administration, si les autorités consulaires algériennes et tunisiennes ont été saisies dès le placement en rétention administrative de [U] [P], au début du mois de mai 2024, et régulièrement relancées depuis, force est de constater qu'elles n'ont, en l'état, toujours pas répondu à la demande d'identification et qu'il est assez peu probable que des documents de voyage soient délivrés à bref délai.

S'agissant de la menace à l'ordre public, elle impose, compte tenu du caractère dérogatoire et exceptionnel des deux dernières prolongations du placement en centre de rétention, une vigilance particulière sur les conditions retenues pour qualifier ladite menace qui doit se fonder sur des éléments positifs, objectifs et démontrés par l'administration. Elle a pour objectif manifeste de prévenir, pour l'avenir, les agissements dangereux commis par des personnes en situation irrégulière sur le territoire national.

La menace pour l'ordre public doit faire l'objet d'une appréciation in concreto, au regard d'un faisceau d'indices permettant, ou non, d'établir la réalité des faits, la gravité, la récurrence ou la réitération, et l'actualité de la menace selon le comportement de l'intéressé.

La commission d'une infraction pénale n'est pas de nature, à elle seule, à établir que le comportement de l'intéressé présenterait une menace pour l'ordre public.

En l'espèce, il ressort de la lecture du casier judiciaire versé au dossier que [U] [P] a été condamné à 6 reprises entre avril 2016 et mars 2019, date de sa dernière condamnation, les signalements TAJ sous d'autres alias révélant également plusieurs faits dont le plus récents remontent à 2020.

Dans ces conditions, et alors que la libération de [U] [P] date de novembre 2019, les condamnations prononcées à son encontre ne suffisent pas à caractériser une menace grave et actuelle à l'ordre public, susceptible de motiver, à elle seule, un maintien en rétention.

Dès lors, c'est à juste titre que le juge des libertés et de la détention a considéré qu'une prolongation n'était pas possible en ce qu'aucune des conditions légales de la prolongation n'est remplie, et sa décision sera confirmée.

PAR CES MOTIFS,

CONFIRMONS l'ordonnance déférée,

RAPPELONS à l'intéressé en tant que de besoin, qu'il demeure frappé par une interdiction du territoire;

DISONS que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

DISONS que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à [U] [P] par l'intermédiaire du greffe du centre de rétention administrative par truchement d'un interprète en tant que de besoin, à son conseil et à l'autorité administrative.

Le greffier, Le conseiller délégué,

Ynes LAATER Nabila BOUCHENTOUF


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Retentions
Numéro d'arrêt : 24/05642
Date de la décision : 11/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-11;24.05642 ?
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