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28/06/2024 | FRANCE | N°22/07058

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 28 juin 2024, 22/07058


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







N° RG 22/07058 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OSIK





[E]



C/

[L]

[T]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de Lyon

du 20 Septembre 2022

RG : 19/02622











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 28 JUIN 2024













APPELANTE :



[N] [Y] [E]

née le 04

Janvier 1978 à [Localité 6] (COTE D'IVOIRE)

[Adresse 1]

[Localité 3]



représentée par Me François-Xavier MATSOUNGA, avocat au barreau de LYON







INTIMÉS :



[M] [L] représenté par son tuteur aux biens Monsieur [S] [T], Mandataire Judiciaire à la Protection Des Majeurs

né...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 22/07058 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OSIK

[E]

C/

[L]

[T]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de Lyon

du 20 Septembre 2022

RG : 19/02622

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 28 JUIN 2024

APPELANTE :

[N] [Y] [E]

née le 04 Janvier 1978 à [Localité 6] (COTE D'IVOIRE)

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me François-Xavier MATSOUNGA, avocat au barreau de LYON

INTIMÉS :

[M] [L] représenté par son tuteur aux biens Monsieur [S] [T], Mandataire Judiciaire à la Protection Des Majeurs

né le 19 Mai 1992 à [Localité 5] (69)

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Thomas CRETIER, avocat au barreau de LYON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/022479 du 19/01/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 02 Mai 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Béatrice REGNIER, Présidente

Catherine CHANEZ, Conseillère

Régis DEVAUX, Conseiller

Assistés pendant les débats de Mihaela BOGHIU, Greffière.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 28 Juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Béatrice REGNIER, Présidente, et par Mihaela BOGHIU, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement du 22 janvier 2015, le juge des tutelles de Lyon a placé M. [M] [L] sous le régime de la tutelle et a désigné Mme [W] [F], sa mère, en qualité de tutrice aux biens et à la personne, et M. [Z] [L], son père, en qualité de co-tuteur à la personne.

A la fin de l'été de l'année 2018, Mme [N] [E] a commencé à travailler en qualité d'aide à la personne de M. [M] [L].

Par ordonnance du 7 janvier 2019, le juge des tutelles de Lyon a déchargé Mme [W] [F] de ses fonctions de tutrice aux biens et a désigné à cet effet l'association tutélaire rhodanienne, mandataire judiciaire à la protection des majeurs. Mme [W] [F] et M. [Z] [L] ont été maintenus dans leur fonction de co-tuteurs à la personne.

Par requête reçue au greffe le 11 octobre 2019, Mme [N] [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins de voir condamner M. [M] [L] au paiement de diverses sommes pour dissimulation d'emploi, exécution déloyale de son contrat de travail, ainsi que pour résistance abusive et mauvaise foi.

Par jugement du 19 décembre 2019, le juge des tutelles a prononcé le renouvellement de la mesure de protection, a déchargé l'association tutélaire rhodanienne de ses fonctions de tuteur aux biens et a désigné M. [O] [T], mandataire judiciaire à la protection des majeurs, pour exercer ces fonctions.

Par jugement contradictoire du 20 septembre 2020, le juge départiteur du conseil de prud'hommes de Lyon a :

- dit que la saisine du conseil de prud'hommes est irrégulière ;

- déclaré nul le procès-verbal de non-conciliation du 22 novembre 2019 ;

- déclaré, par voie de conséquence, irrecevable l'intégralité des demandes formulées par Mme [N] [E] ;

- dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [N] [E] aux dépens.

Par déclaration du 20 octobre 2022, Mme [E] a interjeté appel de cette décision, en ce qu'il a dit que la saisine du conseil de prud'hommes est irrégulière, a déclaré nul le procès-verbal de non-conciliation du 22 novembre 2019, déclaré, par voie de conséquence, irrecevable l'intégralité des demandes formulées par Mme [N] [E] et condamné Mme [N] [E] aux dépens.

Par déclaration du 3 janvier 2023, Mme [E] a complété sa déclaration initiale, en demandant l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions.

Par ordonnance du 11 janvier 2023, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des deux procédures.

La clôture de la mise en état était ordonnée le 14 novembre 2023 et l'affaire était renvoyée à l'audience de jugement du 21 décembre 2023.

Par arrêt du 27 décembre 2023, la Cour de céans a renvoyé l'affaire à l'audience du 2 mai 2024, afin qu'il soit procédé au préliminaire de conciliation, cet arrêt valant convocation.

A l'audience du 2 mai 2024, l'intimé n'a pas comparu.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions d'appelante transmises par voie électronique le 9 mai 2023, Mme [N] [E] demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :

- rejeter la demande d'annulation du procès-verbal de non-conciliation et la procédure subséquente,

- déclarer recevables ses demandes et renvoyer les parties devant le conseil de prud'hommes,

A défaut de renvoi,

- condamner M. [M] [L], représenté par son tuteur M. [T], à lui payer les sommes suivantes :

' 7 103 euros au titre des salaires de septembre 2018 à février 2019,

' 2 251 euros au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,

' 7 353 euros au titre de la dissimulation d'emploi,

' 3 000 euros pour résistance abusive et mauvaise foi,

- ordonner à M. [L], représenté par son tuteur M. [T], à lui remettre les bulletins de paie de décembre 2018, janvier et février 2019, sous astreinte de 150 euros par document et par jour de retard à compter du 15 octobre 2019,

- condamner M. [L], représenté par son tuteur M. [T], à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

Mme [E] fait valoir qu'il n'y avait pas lieu de prononcer la nullité du procès-verbal de non-conciliation puisque M. [T], tuteur valablement désigné, a déposé des conclusions devant le conseil de prud'hommes le 15 juin 2021, régularisant ainsi la procédure.

Dans l'hypothèse où la Cour évoque l'affaire, Mme [E] soutient que son employeur a exécuté de manière déloyale le contrat de travail car il a tardé à lui remettre les bulletins de paie pour les mois de septembre, octobre et novembre 2018 et ne lui a remis aucun bulletin de paie pour les mois de décembre 2018 et janvier 2019. Elle conteste être l'auteur des écrits que l'employeur lui oppose, en ce sens que ce dernier conclut qu'elle a alors reconnu que les salaires pour les mois de septembre à novembre 2018 lui ont été payés en espèces. Elle allègue avoir travaillé en février 2019. Elle en déduit que l'employeur doit lui payer les salaires, selon une base mensuelle brute de 1 125,50 euros, et réparer le préjudice. Mme [E] affirme que la dissimulation d'emploi est caractérisée dans la mesure où, si la relation salariale a débuté le 1er septembre 2018, le service du CESU a réceptionné uniquement les déclarations seulement les 5 et 10 décembre 2018, si bien que les bulletins de salaire pour les mois de septembre, octobre et novembre 2018 n'ont été édités que le 10 décembre 2018. Elle souligne que son employeur ne lui a pas remis de bulletins de paie pour les mois de décembre 2018 et janvier 2019. Mme [E] ajoute que son employeur a fait preuve d'une résistance abusive et de mauvaise foi, en dissimulant son emploi et par son comportement devant le premier juge, qui a conduit à tort à l'annulation du procès-verbal de non-conciliation.

Par uniques conclusions d'intimé transmises par voie électronique le 6 mars 2023, M. [M] [L], représenté par son tuteur aux biens, M. [S] [T], demande à la Cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Lyon du 20 septembre 2022 en ce qu'il a :

' déclaré nul le procès-verbal de non-conciliation du 22 novembre 2019 ;

' déclaré, par voie de conséquence, irrecevable l'intégralité des demandes formulées par Mme [N] [E] ;

- débouter Mme [N] [E] de l'intégralité de ses demandes ;

- condamner Mme [N] [E] aux entiers dépens de l'instance ;

A titre subsidiaire,

- réformer le jugement du conseil de prud'hommes de Lyon du 20 septembre 2022,

- débouter Mme [N] [E] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Mme [N] [E] aux dépens de l'instance.

M. [L] soutient que le procès-verbal de non-conciliation est nul puisqu'il n'était pas valablement représenté durant la phase de conciliation, étant précisé que le fait que le tuteur soit intervenu postérieurement, par voie de conclusions, ne permet pas de rendre le procès-verbal de non-conciliation valide. Subsidiairement, il affirme que Mme [E] a travaillé pour son compte au cours des mois de septembre, octobre et novembre 2018, qu'elle a reconnu que les salaires correspondants lui ont été payés en espèces, et encore qu'elle a travaillé quatre demi-journées courant janvier 2019, ce qui a donné lieu à un virement bancaire pour payer son salaire, en février 2019. M. [L] conteste, attestations rédigées d'autres intervenants à son domicile, que Mme [E] ait travaillé en décembre 2018, plus que quatre demi-journées en janvier 2019 ou en février 2019. Il affirme avoir exécuté avec loyauté le contrat de travail, alors qu'il a eu recours au CESU. Il prétend que Mme [E] a été rémunérée pour l'intégralité de ses heures travaillées, que le service du CESU lui a transmis les bulletins de salaire correspondants.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

1. Sur l'exception de nullité du procès-verbal de conciliation

L'article L. 1411-1 du code du travail dispose que le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui s'élèvent à l'occasion de tout contrat de travail et juge les litiges lorsque la conciliation n'a pas abouti.

Le préliminaire de conciliation a un caractère obligatoire et constitue une formalité substantielle (Cass. Soc., 5 décembre 2012, pourvoi n°11-20.004). Le bureau de jugement peut réparer l'omission initiale de tentative de conciliation et ce à tous les stades de la procédure (Cass. Soc., 28 novembre 2006, pourvoi n°04-40.358).

En outre, aux termes de l'article 121 du code de procédure civile, dans le cas où elle est susceptible d'être couverte, la nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le juge statue. Il en résulte que le défaut de préalable de conciliation constitue une irrégularité de fond affectant la saisine des premiers juges, qui est susceptible d'être couverte en cause d'appel (Cass. Soc., 12 novembre 2000, pourvoi n°98-46.100 ; Cass. Soc., 26 avril 2007, n°05-45.096).

En l'espèce, le conseil de prud'hommes de Lyon a déclaré nul le procès-verbal de non-conciliation du 22 novembre 2019, au motif que M. [M] [L], majeur placé sous le régime de la tutelle n'avait pas été représenté à cet acte par son tuteur aux biens légalement désigné.

Par arrêt du 27 décembre 2023, la Cour de céans a renvoyé l'affaire et convoqué les parties, dont M. [T], à l'audience du 2 mai 2024, en vue de procéder à leur conciliation.

En conséquence, la cause de nullité invoquée par l'intimé a disparu et le jugement déféré sera infirmé, en ce qu'il a déclaré nul le procès-verbal de non-conciliation du 22 novembre 2019  et, par voie de conséquence, déclaré irrecevable l'intégralité des demandes formulées par Mme [N] [E].

La Cour retient qu'il est de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive et, faisant application de l'article 568 du code de procédure civile, évoque les points non jugés par le premier juge.

2. Sur l'exécution du contrat de travail

2.1 Sur la demande en rappel de salaires

En droit, la délivrance d'un bulletin de paie n'emporte pas présomption de paiement et la charge de la preuve du paiement du salaire repose sur l'employeur.

En l'espèce, Mme [E] fait valoir que son employeur s'est abstenu de lui payer ses salaires pour la période travaillée allant du 1er septembre 2018 au 28 février 2019 (date à laquelle elle a cessé de travailler pour M. [L]). Elle produit ses bulletins de paie des mois de septembre, octobre et novembre 2018 (pièce n° 6 de l'appelante) et son relevé de compte établi au 15 février 2019, qui porte mention d'un unique virement bancaire de 250 euros effectué le 4 février 2019 par Mme [F] (pièce n° 2 de l'appelante).

M. [T] réplique que les salaires de Mme [E] ont été payés en espèces, pour les mois de septembre, octobre et novembre 2018, et qu'en revanche, cette dernière n'a pas travaillé pour M. [L] au-delà du 31 novembre 2018. Il verse aux débats, pour chacun de ces trois mois, un écrit manuscrit dont il attribue la rédaction à Mme [E] (pièces n° 1 de l'intimé). Ces écrits sont établis de manière identique et mentionnent : « sommes perçues, période du 01 septembre 2018 au 30 septembre 2018 [ou du 01 octobre 2018 au 31 octobre 2018 ou du 01 novembre 2018 au 30 novembre 2018], 96 h x 9,77 euros = 937,52 euros » et sont datés respectivement des 2 octobre 2018, 2 novembre et 4 novembre 2018.

Mme [E] conteste être l'auteur de ces écrits.

La Cour relève qu'aucun de ces écrits ne mentionne qu'il y a eu paiement du salaire en espèces et que l'écrit qui concerne le versement du salaire dû pour le mois de novembre 2018 porte la date du 4 novembre 2018.

Dans ces circonstances, l'employeur échoue à démontrer qu'il a effectivement payé à Mme [E] les salaires dus au titre des mois de septembre, octobre et novembre 2018.

Pour ce qui est des mois de décembre 2018, janvier et février 2019, M. [L] admet que Mme [E] a travaillé seulement durant quatre demi-journées au cours du mois de janvier 2019, sans préciser les dates, lesquelles ont donné lieu au paiement d'un salaire de 250 euros, réglé par virement bancaire le 4 février 2019, et aucunement en décembre 2018 et février 2019.

Pour sa part, Mme [E] allègue avoir fourni une prestation de travail au cours des mois de décembre 2018, janvier et février 2019, en se trouvant placée dans un lien de subordination à l'égard de M. [L]. Elle ne précise pas le nombre d'heures qu'elle prétend alors avoir travaillées.

Dans ses écritures, Mme [E] ne prétend pas que son contrat de travail était à temps plein, ni qu'elle s'est tenue durant cette période à la disposition de son employeur. Elle retient, pour chiffrer le montant demandé au titre du rappel de salaires, que son salaire mensuel brut était de 1 125,50 euros, sans le justifier. Elle réclame 7 103 euros à titre de salaires pour les mois de septembre 2018 à février 2019, en détaillant (uniquement dans le dispositif de ses conclusions) son calcul ainsi : 7 353 ' 250 = 7 103 euros.

La Cour relève qu'ainsi, Mme [E] n'articule aucun moyen à l'appui de sa demande en paiement de salaires pour les mois de décembre 2018, janvier et février 2019, si bien que celle-ci n'est pas fondée.

En définitive, M. [L] sera condamné à payer à Mme [E] la somme de 937,52 euros x 3 = 2 812,56 euros, à titre de rappel de salaire pour les seuls mois de septembre, octobre et novembre 2018.

2.2 Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

Mme [E] soutient que son employeur a exécuté de manière déloyale son contrat de travail en s'abstenant de lui verser ses salaires sur la période allant de septembre 2018 à février 2019.

Toutefois, d'une part, elle ne démontre pas qu'elle avait droit au paiement d'un salaire pour les mois de décembre 2018, janvier et février 2019 ; d'autre part, elle ne rapporte pas la preuve d'avoir subi un préjudice distinct de celui qui est réparé par la condamnation de M. [L] à lui payer les salaires dus pour les mois de septembre, octobre et novembre 2018.

Dès lors, la demande de Mme [E] en dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat sera rejetée.

2.3 Sur la demande en indemnité pour dissimulation d'emploi

Aux termes de l'article L. 8221-5 (2°) du code du travail, dans sa version applicable, est réputé dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10 relatif à la déclaration préalable à l'embauche ; soit le fait de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

L'article L. 8223-1 du même code précise qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l'employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

En l'espèce, Mme [E] soutient que son employeur a intentionnellement dissimulé son emploi en ne déclarant qu'au mois de décembre 2018 son activité, auprès du service CESU, alors que celui-ci reconnaît par ailleurs que la relation de travail a débuté dès le mois de septembre 2018, et qu'il n'a pas fait établir des bulletins de paie pour les mois de décembre 2018 et janvier 2019.

M. [L] réplique qu'il a régulièrement déclaré l'emploi de Mme [E] au service CESU, qui lui a délivré des bulletins de paie pour les mois travaillés, soit de septembre à novembre 2018.

A l'examen des pièces versées aux débats, les bulletins de salaire délivrés par le service CESU pour les mois de septembre à novembre 2018 n'ont été édités que le 10 décembre 2018. En outre, M. [L] ne produit pas le récépissé de déclaration auprès du service CESU de l'emploi occupé par Mme [E], ni un bulletin de salaire pour le mois de janvier 2019, alors même qu'il indique qu'elle a travaillé quatre demi-journées au cours de ce mois.

Dans ces circonstances, M. [L] a intentionnellement dissimulé l'emploi de Mme [E] et sera condamné à lui payer, alors qu'il est acquis que la relation de travail a été rompue courant 2019, une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, soit 5 625,12 euros.

2.4. Sur la demande de production de bulletins de paie sous astreinte

Mme [E] sollicite la remise par son employeur des bulletins de paie pour les mois de décembre 2018, janvier et février 2019, sous astreinte.

Toutefois, l'existence d'une relation de travail n'ayant pas été retenue par la Cour concernant les mois de décembre 2018 et février 2019, cette demande sera partiellement rejetée.

Alors que M. [L] admet que Mme [E] a travaillé pour son compte au cours du mois de janvier 2019, pour un salaire de 250 euros, il sera fait droit à la demande de l'appelante dans cette limite. Les circonstances de l'espèce ne rendent pas nécessaire le prononcé d'une astreinte.

2.5. Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et mauvaise foi

Mme [E] sollicite le paiement de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive et la mauvaise foi dont son employeur a fait preuve, en dissimulant son emploi et par son comportement devant le premier juge, qui a conduit à tort à l'annulation du procès-verbal de non-conciliation.

Toutefois, Mme [E] ne démontre pas avoir subi un préjudice distinct de celui qui a déjà été réparé par le versement de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé, ni que M. [L] a fait preuve, au cours du déroulement de la procédure prud'homale, de mauvaise foi ou d'une résistance abusive.

Sa demande sera donc rejetée.

3. Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

M. [L], partie perdante, sera condamné aux dépens de première instance et de l'instance d'appel.

Pour un motif tiré de l'équité, M. [L] sera condamné à payer à Mme [E] 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement rendu le 20 septembre 2020 par le conseil de prud'hommes de Lyon, en toutes ses dispositions déférées,

Statuant sur les dispositions infirmées, après évocation des points non jugés et ajoutant,

Déclare recevables les demandes formulées par Mme [N] [E] ;

Rejette les demandes de Mme [N] [E] en dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail, d'indemnité au titre de la résistance abusive et de la mauvaise foi, ainsi que de remise de bulletins de paie pour les mois de décembre 2018 et février 2019 ;

Condamne M. [M] [L], représenté par M. [S] [T], à payer à Mme [N] [E] les sommes suivantes :

' 2 812,56 euros à titre de rappel de salaire pour les mois de septembre, octobre et novembre 2018 ;

' 5 625,12 euros à titre d'indemnité pour dissimulation d'emploi ;

Ordonne M. [M] [L], représenté par M. [S] [T], de remettre à Mme [N] [E] un bulletin de salaire pour les heures travaillées en janvier 2019 ;

Condamne M. [M] [L], représenté par M. [S] [T], aux dépens de première instance et de l'instance d'appel ;

Condamne M. [M] [L], représenté par M. [S] [T], à payer à Mme [N] [E] 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 22/07058
Date de la décision : 28/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-28;22.07058 ?
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