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28/06/2024 | FRANCE | N°21/08713

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale d (ps), 28 juin 2024, 21/08713


AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE





RAPPORTEUR





R.G : N° RG 21/08713 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N7LF





[H]



C/

Caisse CPAM DU RHÔNE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 05 Novembre 2021

RG : 18/00038













































AU NOM DU PEUPLE FRA

N'AIS



COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE D

PROTECTION SOCIALE



ARRÊT DU 28 JUIN 2024







APPELANT :



[U] [H]

né le 10 Avril 1987 à [Localité 3]

[Adresse 4]

[Localité 1]



représenté par Me Emmanuelle BONIN, avocat au barreau de LYON





INTIMEE :



Caisse CPAM DU RHÔNE

Service des...

AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE

RAPPORTEUR

R.G : N° RG 21/08713 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N7LF

[H]

C/

Caisse CPAM DU RHÔNE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 05 Novembre 2021

RG : 18/00038

AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE D

PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU 28 JUIN 2024

APPELANT :

[U] [H]

né le 10 Avril 1987 à [Localité 3]

[Adresse 4]

[Localité 1]

représenté par Me Emmanuelle BONIN, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

Caisse CPAM DU RHÔNE

Service des Affaires Juridiques

[Localité 2]

représentée par Mme [S] [G] (Membre de l'entrep.) en vertu d'un pouvoir général

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 14 Mai 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Présidée par Nabila BOUCHENTOUF, Conseillère, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Claudiane COLOMB, Greffière placée

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

- Delphine LAVERGNE-PILLOT, Présidente

- Nabila BOUCHENTOUF, Conseillère

- Anne BRUNNER, Conseillère

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 28 Juin 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Delphine LAVERGNE-PILLOT, Présidente, et par Christophe GARNAUD, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

M. [H] a été embauché en qualité d'ouvrier en bâtiment et a souscrit une déclaration de maladie professionnelle faisant état d'une sciatique gauche par hernie discale, diagnostiquée le 23 février 2009.

La caisse primaire d'assurance maladie du Rhône (la CPAM) a pris en charge cette maladie au titre de la législation professionnelle.

L'état de santé de M. [H] a été déclaré consolidé le 31 août 2010 avec l'attribution d'un taux d'incapacité de 5%, porté à 7% au vu de la persistance de lombofessalgie gauche par hernie discale après nucléolyse.

Une rechute a été prise en charge par la CPAM selon le certificat médical du 21 mai 2015 faisant état d'une 'récidive lombosciatique gauche avec au scanner discopathie dégénérative L4 L5 et L5 S1 et débord postérieur ' en attente avis rhumatologue'.

Le médecin-conseil de la CPAM a fixé la date de consolidation au 20 juin 2017 et, sur contestation de M. [H], une expertise médicale a été ordonnée.

La CPAM a prononcé la consolidation de l'état de santé de M. [H] avec retour à l'état antérieur au 11 août 2017.

M. [H] a saisi la commission de recours amiable qui a confirmé la date de consolidation des lésions.

Le 8 janvier 2018, M. [H] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale, devenu le pôle social du tribunal judiciaire, en contestation de la décision de la commission de recours amiable.

L'affaire a été enregistrée sous le n° 18/0038.

Une seconde rechute a été déclarée par M. [H] selon le certificat médical du 7 mai 2018 faisant état d''une lombosciatalgie gauche type S1 : aggravation de la douleur ressentie par le patient ' va avoir un corset'.

La CPAM a refusé de prendre en charge cette rechute et, sur contestation de M. [H], une expertise médicale a là encore été ordonnée.

L'expert a conclu qu'il n'existait pas de lien de causalité directe entre la maladie professionnelle et les lésions et troubles invoqués à la date du 7 mai 2018 et que l'état de l'assuré était en rapport avec un état pathologique indépendant de la maladie professionnelle évoluant pour son propre compte justifiant un arrêt de travail et des soins.

Le 23 juillet 2019, M. [H] a saisi le tribunal aux fins de contestation de la décision de refus de prise en charge de la rechute selon certificat médical du 7 mai 2018.

L'affaire a été enregistrée sous le n° 19/2390.

Par jugement du 2 novembre 2020, le tribunal :

- ordonne la jonction de la procédure n° 19/2390 à la procédure n° 18/0038,

- ordonne une nouvelle expertise médicale technique,

- commet pour y procéder le docteur [P] [Z] avec la mission suivante :

* après avoir convoqué les parties et éventuellement les médecins mandatés par elles, s'être fait communiquer l'ensemble des pièces médicales du dossier et avoir entendu les parties en leurs observations :

1. examiner M. [H],

2. dire si l'état de M. [H], victime d'une maladie professionnelle le 23 février 2009 et d'une rechute de cette maladie professionnelle le 21 mai 2015 pouvait être consolidé de cette rechute le 30 août 2017,

3. dans la négative dire si l'état de l'assuré était consolidé ou guéri à la date de l'expertise ou à une autre date qui sera précisée,

4. dire si à la date du 7 mai 2018 il existait des symptômes constituant un état pathologique nouveau correspondant à une aggravation de la lésion initiale après consolidation et qui nécessitent, qu'il y ait ou non une nouvelle incapacité temporaire, la mise en place d'un nouveau traitement médical,

5. dire s'il existe un lien de causalité exclusif entre les lésions et troubles invoqués à l'appui de la demande de rechute du 7 mai 2018 et la maladie professionnelle du 23 février 2009,

- dit que l'expert a un délai de 6 mois pour déposer son rapport,

- dit qu'en cas d'empêchement ou de refus de l'expert d'accomplir sa mission, il sera pourvu à son remplacement par simple ordonnance du président du tribunal,

- dit que les frais d'expertise sont à la charge de la caisse primaire en application de l'article R. 141-7 du code de la sécurité sociale,

- sursoit à statuer sur les autres demandes,

- réserve les dépens.

L'expert a rendu son rapport le 14 septembre 2018.

Par jugement du 5 novembre 2021, le tribunal :

- confirme la date de consolidation de la rechute du 21 mai 2015 fixée au 30 août 2017,

- confirme le refus de prise en charge par la caisse de la rechute du 7 mai 2018,

- déboute M. [U] (sic) de ses demandes,

- laisse les dépens exposés à compter du 1er janvier 2019 à la charge de M. [U] (sic).

Par déclaration enregistrée le 9 décembre 2021, M. [H] a relevé appel de cette décision.

Dans le dernier état de ses conclusions notifiées par voie électronique le 1er août 2023 et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, il demande à la cour de :

- réformer le jugement,

Statuant à nouveau,

- dire et juger que le certificat de rechute du 7 mai 2018 est totalement justifié et correspond bien à une rechute de sa maladie professionnelle,

En conséquence,

- dire et juger que la CPAM doit prendre en charge cette rechute en lien avec son activité professionnelle à compter du 7 mai 2018 et jusqu'à nouvel ordre,

- ordonner une nouvelle expertise médicale aux frais avancés de la CPAM,

- A défaut, statuer sur ses demandes,

- réserver les dépens.

Par ses dernières écritures reçues au greffe le 26 mars 2024 et reprises oralement sans ajout ni retrait au cours des débats, la CPAM demande à la cour de confirmer le jugement.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La cour relève liminairement que M. [H] ne discute pas à hauteur d'appel, le chef du jugement ayant fixé au 30 août 2017 la date de consolidation de la rechute du 21 mai 2015.

SUR LA DEMANDE DE PRISE EN CHARGE DE LA RECHUTE DU 7 MAI 2018

M. [H] soutient que de nouveaux symptômes ont bien été à l'origine de l'aggravation de son état de santé puisqu'il ressent de vives douleurs, une motricité réduite avec une jambe engourdie, l'obligeant à porter un corset au quotidien, ces douleurs impactant sa vie personnelle et familiale, et ne lui permettant plus d'exercer une activité professionnelle. Il maintient qu'il existe un lien entre sa rechute de 2018 et sa maladie professionnelle, ce que confirmeraient d'ailleurs les derniers examens médicaux qui ont objectivé une aggravation de sa pathologie. Il ajoute qu'il existe bien une progression de sa hernie discale justifiant une prise en charge.

En réponse, la CPAM se prévaut des rapports d'expertise technique pour justifier son refus de prise en charge et soutenir la confirmation du jugement entrepris. Elle précise que M. [H] ne produit aucun élément susceptible de contredire les conclusions claires des experts désignés qui s'appuient tant sur l'examen clinique que sur les éléments du dossier.

L'article L. 443-1 du code de la sécurité sociale dispose que sous réserve des dispositions du deuxième alinéa du présent article, toute modification dans l'état de la victime, dont la première constatation médicale est postérieure à la date de guérison apparente ou de consolidation de la blessure, peut donner lieu à une nouvelle fixation des réparations.

Aux termes de l'article L. 443-2 du code de la sécurité sociale, si l'aggravation de la lésion entraîne pour la victime la nécessité d'un traitement médical, qu'il y ait ou non nouvelle incapacité temporaire, la caisse primaire d'assurance maladie statue sur la prise en charge de la rechute.

Il résulte donc de ces dispositions que la rechute, qui peut donner lieu à une nouvelle fixation des réparations, est caractérisée par toute modification dans l'état de la victime dont la première constatation médicale est postérieure à la date de guérison apparente ou de consolidation de la blessure.

L'aggravation ou les nouvelles lésions doivent présenter un lien de causalité direct et exclusif avec l'accident du travail pour caractériser une rechute.

L'article L. 141-2 du code de la sécurité sociale, applicable à l'expertise réalisée par le docteur [N], dispose que l'avis technique de l'expert s'impose à l'intéressé comme à la caisse et qu'au vu de celui-ci, sur demande d'une partie, le juge peut ordonner une nouvelle expertise.

En l'espèce, le certificat médical initial de rechute du 7 mai 2018 mentionne 'une lombosciatalgie gauche type S1 : aggravation de la douleur ressentie par le patient ' va avoir un corset'.

L'expertise technique du docteur [N] conclut que 'l'état de santé de l'assuré est en rapport avec un état pathologique indépendant de la maladie professionnelle évoluant pour son propre compte justifiant un arrêt de travail et des soins'. Le docteur [N] précise en son rapport que la maladie professionnelle du 23 février 2009 'était une sciatique S1 gauche par hernie discale L4 L5 traitée par nucléolyse en 2009 et consolidée le 31 août 2010 avec attribution d'une IP de 7%. Le 21 mai 2015 une rechute est accordée, le patient est vu en expertise le 30 août 2017 par le docteur [K] (médecin-conseil de la caisse) qui constate un tableau de déconditionnement lombaire sans nouveau projet thérapeutique ni justification de nouvel examen complémentaire et il fixe la consolidation de cette rechute au premier jour de son expertise, soit le 30 août 2017.'

Dans le cadre de sa mission, l'expert précise avoir pris connaissance de la radiographie rachis-thoraco-lombaire du 16 janvier 2015, du scanner du rachis lombaire du 27 avril 2015, de l'IRM du rachis lombaire du 5 mars 2017, d'une radiographie du rachis lombaire du 6 février 2018 et d'une IRM du 7 mars 2018, et tenant compte de ces examens et, après avoir rappelé les doléances exprimées par M. [H], il souligne que 'les examens réalisés ne montreront aucune récidive de hernie discale mais un tableau dégénératif significatif avec une prise en charge d'une instabilité lombaire constituant un état pathologique indépendant de la maladie professionnelle'.

Le docteur [Z] confirme quant à lui les conclusions du docteur [N], retenant qu'il n'existe pas de symptômes constituant un état pathologique nouveau correspondant à une aggravation de la lésion initiale après consolidation, et qu'il n'existe donc pas de lien de causalité exclusif entre les lésions et troubles invoqués à l'appui de la demande de rechute du 7 mai 2018 et la maladie professionnelle du 23 février 2009.

A hauteur de cour, M. [H] produit des prescriptions médicales de 2020 comportant la prise d'antalgiques et d'anti-inflammatoires qui lui sont prescrits depuis 2018. Il excipe également d'une IRM pratiquée le 15 juin 2020 qui conclut à la présence d'une 'hernie à grand rayon de courbure, occupant toute la partie antérieure du canal pouvant être à l'origine d'un conflit radiculaire de type L5, surtout à gauche'.

Néanmoins la cour relève, tout d'abord, que cet examen est bien postérieur à la date de la rechute alléguée et qu'il ne permet pas, en tout état de cause, à lui seul de retenir un lien direct et exclusif avec la maladie professionnelle, ce d'autant moins que l'assuré produit également un compte-rendu d'IRM du rachis lombaire pratiqué le 21 février 2019, soit quelques mois auparavant, qui met en évidence une 'protrusion discale L4-L5 médiane à l'origine d'un rétrécissement des défilés inter-disco-articulaires autour des racines L5 en association avec une arthropathie interarticulaire postérieure', sans faire état de l'existence d'une hernie, ni d'une aggravation de la lésion initiale.

Le jugement entrepris doit, en conséquence, être confirmé en ce qu'il a débouté M. [H] (et non M. [U] comme indiqué à tort aux termes du jugement) de sa demande de prise en charge de la rechute mentionnée sur le certificat médical initial du 7 mai 2018.

SUR LA DEMANDE D'EXPERTISE

M. [H] estime que l'expert n'a pas pris en considération l'ensemble des éléments de son dossier et, notamment, les complications qu'il connaît ces dernières années. Il sollicite, en conséquence, le prononcé d'une nouvelle expertise.

Or, et au vu des expertises claires et non équivoques qui ont repris l'ensemble des documents médicaux, M. [H] ne justifie pas d'une aggravation en lien direct avec la maladie professionnelle du 23 février 2009, de sorte qu'en l'absence de tout élément objectif contredisant ces pièces et en l'absence de persistance d'un litige d'ordre médical, il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

Succombant en ses prétentions, l'appelant doit être condamné aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour, sauf à préciser que, par une erreur purement matérielle, le jugement mentionne le nom de 'M. [U]' alors qu'il faut lire 'M. [H]',

Y ajoutant,

Rejette la demande d'expertise,

Condamne M. [H] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale d (ps)
Numéro d'arrêt : 21/08713
Date de la décision : 28/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-28;21.08713 ?
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