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28/06/2024 | FRANCE | N°21/05543

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 28 juin 2024, 21/05543


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





N° RG 21/05543 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NXBV





[O]



C/

S.A.R.L. LE VIN ET UN PLAT







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 31 Mai 2021

RG : F19/01204











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 28 JUIN 2024







APPELANT :



[J] [O]

né le 12 Août 1981 à [Localit

é 5]

[Adresse 1]

[Localité 3]



représenté par Me Guy NAGEL de la SCP GUILLERMET - NAGEL, avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



Société LE VIN ET UN PLAT

[Adresse 2]

[Localité 4]



représentée par Me Thierry CARRON de la SELARL REQUET CHABANEL, avoca...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 21/05543 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NXBV

[O]

C/

S.A.R.L. LE VIN ET UN PLAT

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 31 Mai 2021

RG : F19/01204

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 28 JUIN 2024

APPELANT :

[J] [O]

né le 12 Août 1981 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Guy NAGEL de la SCP GUILLERMET - NAGEL, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Société LE VIN ET UN PLAT

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Thierry CARRON de la SELARL REQUET CHABANEL, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 24 Mai 2024

Présidée par Catherine CHANEZ, Conseillère magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Fernand CHAPPRON, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Béatrice REGNIER, Présidente

- Catherine CHANEZ, Conseillère

- Régis DEVAUX, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 28 Juin 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Béatrice REGNIER, Présidente et par Mihaela BOGHIU, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

EXPOSE DU LITIGE

La société Le Vin et un Plat (ci-après la société) exerce une activité de restauration.

La convention collective applicable est celle des hôtels, cafés, restaurants.

La société a engagé M. [J] [O] dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel de 24 heures hebdomadaires à compter du 6 juillet 2016, en qualité d'aide-cuisinier.

M. [O] est reconnu travailleur handicapé depuis le 1er octobre 2014.

Le 25 octobre 2016, les parties ont signé un avenant faisant passer la durée hebdomadaire de travail à 39 heures et faisant évoluer le statut du salarié d'aide cuisinier à cuisinier.

Par courrier du 23 février 2018 remis en main propre, la société a notifié un avertissement à M. [O] pour des absences inopinées le 7 et le 8 février, ainsi que le 10 février au matin.

Par courrier du 23 avril 2018, M. [O] a sollicité une rupture conventionnelle afin de « démarrer de nouveaux projets professionnels ».

Le 2 mai 2018, les parties ont conclu une rupture conventionnelle avec un délai de rétractation expirant le 17 mai 2018.

La convention a été homologuée par l'inspecteur du travail et la date de fin de contrat a été fixée au 15 juin 2018.

Par requête du 2 mai 2019, M. [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon afin de voir annuler la rupture conventionnelle et qualifier la rupture de licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que de présenter une demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, outre diverses demandes liées à la rupture.

Par jugement du 31 mai 2021, le conseil de prud'hommes de Lyon a débouté les parties de leurs demandes et condamné M. [O] aux dépens.

Par déclaration du 29 juin 2021, M. [O] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions notifiées, déposées au greffe le 26 septembre 2024, il demande à la cour de :

Infirmer la décision querellée en ce qu'elle l'a débouté de ses demandes et condamné aux dépens ;

Par conséquent, jugeant à nouveau :

Fixer le salaire de référence mensuel brut à la somme de 2 279,41 euros ;

Annuler la rupture conventionnelle ;

Requalifier la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Par conséquent, condamner la société à lui payer les sommes de :

6 831,38 euros à titre de dommages et intérêts en raison du caractère dépourvu de cause réelle et sérieuse de la rupture requalifiée ;

1 092,22 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;

2 279,41 euros au titre de l'indemnité de préavis, outre 227,94 euros de congés payés afférents ;

Condamner la société à lui payer la somme de 27 352,92 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

Condamner la société à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance ;

Condamner solidairement la société à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

Condamner solidairement la société aux dépens, avec recouvrement direct par son conseil.

Aux termes de ses conclusions notifiées, déposées au greffe le 17 décembre 2021, la société demande pour sa part à la cour de :

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [O] de ses demandes et en ce qu'il l'a condamné aux dépens ;

Infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande relative à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant, condamner M. [O] à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et le condamner aux dépens.

La clôture de la procédure a été prononcée le 26 mars 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions dans la mesure où elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques ou qu'elles constituent en réalité des moyens.

Elle n'a pas non plus à fixer le salaire moyen du salarié, s'agissant en réalité d'un moyen à l'appui des demandes indemnitaires ou salariales.

1-Sur la rupture du contrat de travail

L'article 1130 du code civil dispose : « L'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.

Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné. »

Il ressort en outre de l'article 1137 du même code que le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges et de l'article 1140 qu'il y a violence lorsqu'une partie s'engage sous la pression d'une contrainte qui lui inspire la crainte d'exposer sa personne, sa fortune ou celles de ses proches à un mal considérable.

Si, lors de la conclusion de la convention de rupture conventionnelle, le consentement de l'une des parties a été vicié, la rupture conventionnelle est frappée de nullité et la rupture du contrat de travail est sans cause réelle et sérieuse. La nullité de la convention entraîne l'obligation pour le salarié de restituer les sommes perçues.

La charge de la preuve de l'existence d'un vice du consentement repose sur la partie qui l'invoque.

En l'espèce, M. [O] soutient avoir été victime tant de dol que de violence physique et psychologique, en ce qu'il aurait été contraint de signer la rupture conventionnelle en raison des pressions et des moqueries qu'il subissait, de la dégradation de son état de santé causée par les tâches qui lui étaient confiées, dans le mépris des préconisations du médecin du travail, et du non-paiement de ses heures supplémentaires depuis plusieurs mois.

Or le retard apporté au paiement de ses heures supplémentaires contractualisées, réglées après la rupture et sur mise en demeure de son avocat, ne saurait constituer une réticence dolosive constitutive d'un vice du consentement, le salarié ne démontrant pas l'existence d'un lien entre la baisse de sa rémunération, effective depuis janvier 2017, et la signature de la rupture conventionnelle plus d'un an plus tard, d'autant que celle-ci a été sollicitée par lui-même, afin de mener à bien de nouveaux projets professionnels.

Quant à la violence, elle ne saurait être caractérisée par l'absence de prise en compte des préconisations du médecin du travail, d'autant que l'appelant ne démontre aucunement que son état de santé s'est aggravé du fait de ses conditions de travail, le certificat de son médecin traitant, daté du 10 juillet 2019, étant largement postérieur à la fin du contrat de travail, et ne faisant pas référence à son emploi, ni par des moqueries, matérialisées exclusivement, selon les pièces versées aux débats, par un écrit non daté du chef de cuisine reprenant ses diverses absences.

M. [O] fait également valoir que du fait du non-paiement de ses heures supplémentaires, son salaire de référence était amputé, si bien que l'indemnité de rupture a été sous-évaluée. Ce fait ne peut davantage être à l'origine d'un vice du consentement, le salarié ayant précisément accepté de signer la rupture conventionnelle alors que l'indemnité convenue était moindre que celle à laquelle il pouvait prétendre.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté M. [O] de ses demandes portant sur la rupture du contrat de travail.

2-Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

En application de l'article L 1222-1 du code du travail, le contrat de travail s'exécute de bonne foi. Cette obligation est réciproque.

M. [O] soutient que l'employeur a exécuté de façon déloyale ses obligations contractuelles, en l'exposant à des moqueries et à un risque immédiat pour sa santé en l'absence d'aménagement de son poste lui provoquant de vives douleurs et en procédant à des retenues sur son salaire (heures supplémentaires impayées).

Les heures supplémentaires ont certes été réglées par l'employeur avec retard, mais M. [O] ne démontre pas avoir subi un préjudice que n'aurait pas réparé ce paiement.

Quant aux moqueries, le chef de cuisine admet dans une attestation avoir noté sur le mur de la cuisine la liste des absences de M. [O], lesquelles ne sont d'ailleurs pas contestées. Aucune précision n'étant apportée sur la durée d'affichage de cette liste, ni sur les personnes qui ont pu en prendre connaissance, la cour considère que le salarié ne rapporte pas la preuve qu'il a subi un préjudice de ce fait.

Enfin, le médecin du travail avait déclaré à deux reprises M. [O] « Apte avec restriction-Limiter le port de charges », sans plus de précisions. Si le salarié se plaint de ne pas avoir bénéficié de l'aide d'un commis pour les opérations de manutention pendant plusieurs mois, la cour constate que le médecin du travail n'avait pas formé de préconisations portant sur la répartition des tâches au sein de la cuisine.

Il apparaît pourtant que la visite médicale du 26 janvier 2018 avait été sollicitée par l'employeur, avant la date prévue pour la visite périodique, en raison des douleurs dont se plaignait le salarié.

Aucun manquement à son obligation de loyauté ne peut donc lui être reproché.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande de dommages et intérêts.

3-Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les dépens de première instance et d'appel seront laissés à la charge de M. [O].

L'équité commande de le condamner à payer à la société la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Laisse les dépens d'appel à la charge de M. [J] [O] ;

Condamne M. [J] [O] à payer à la société Le Vin et un Plat la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel .

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 21/05543
Date de la décision : 28/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-28;21.05543 ?
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