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26/06/2024 | FRANCE | N°20/05940

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 26 juin 2024, 20/05940


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE



N° RG 20/05940 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NGWJ



Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 5]

C/

[V]

Société [N]



APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 15 Octobre 2020

RG : F 19/01839

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 26 JUIN 2024





APPELANTE :



Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 5]

[Adresse 2]

[LocalitÃ

© 5]



représentée par Me Charles CROZE de la SELARL AVOCANCE, avocat au barreau de LYON substitué par Me Nina VIALY, avocat au barreau de LYON





INTIMÉES :



[S] [V]

née le 14 Juin 1964 à [Local...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 20/05940 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NGWJ

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 5]

C/

[V]

Société [N]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 15 Octobre 2020

RG : F 19/01839

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 26 JUIN 2024

APPELANTE :

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Charles CROZE de la SELARL AVOCANCE, avocat au barreau de LYON substitué par Me Nina VIALY, avocat au barreau de LYON

INTIMÉES :

[S] [V]

née le 14 Juin 1964 à [Localité 4] (CAMEROUN)

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me François DIESSE, avocat au barreau de PARIS

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 69123/2/2020/31976 du 07/01/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

Société [N] représentée par Me [R] [N], ès qualités de mandataire ad'hoc de la société LES SAVEURS EXOTIQUES

[Adresse 6]

[Localité 3]

représentée par Me Aurélien BARRIE de la SELARL POLDER AVOCATS, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 19 Mars 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Catherine MAILHES, Présidente

Nathalie ROCCI, Conseillère

Anne BRUNNER, Conseillère

Assistés pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 26 Juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine MAILHES, Présidente, et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société 'Les saveurs exotiques' a été immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Lyon Le 25 octobre 2013. Elle a acquis le fonds de la Sarl 'Regal Exotic'. Elle avait une activité de restaurant.

Suivant un contrat de travail à durée indéterminée du 1er novembre 2013, Mme [V] a été engagée par la société 'Les saveurs exotiques' en qualité de chef d'équipe, employée polyvalente, le contrat précisant que l'ancienneté de la salariée au 1er août 2006, acquise au sein de la Sarl 'Regal Exotic', était reprise.

Par ordonnance de référé du 20 mai 2015, le Conseil de prud'hommes de Lyon a condamné à titre provisionnel la société ' Les saveurs exotiques' à verser à la salariée les sommes suivantes :

- 7 463,42 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période de janvier 2014 à décembre 2014.

- 746,34 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

- 2 248,32 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période de janvier 2015 à avril 2015.

- 224,83 euros bruts au titre des congés payés afférents.

Le 17 juillet 2015, Mme [V] a saisi au fond le Conseil de prud'hommes de Lyon d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Par jugement en date du 14 mars 2016, le Conseil de prud'hommes de Lyon a homologué le protocole d'accord transactionnel intervenu entre les parties le 25janvier 2016, lequel prévoit que l'employeur :

reconnaît devoir à la salariée des heures supplémentaires impayées de juillet 2013 à décembre 2015 pour un montant de 54 118 euros ;

établit avoir déjà payé la somme de 4 118 euros à déduire de ce montant ;

s'engage à régler le reste en mensualités de 1 000 euros chacune dans l'attente du concours (prêt) bancaire pour solder l'ensemble de ses dettes envers Mme [V].

Par jugement en date du 30 novembre 2016, le tribunal de Commerce de Lyon a prononcé la liquidation judiciaire de la société 'Les saveurs exotiques'.

La date de cessation des paiements a été fixée au 30 mai 2015 et Maître [Z] a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 7 décembre 2016, Maître [Z], es qualités, a convoqué Mme [V] à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 15 décembre 2016, Maître [Z], es qualités, a notifié à Mme [V] à titre conservatoire son licenciement pour motif économique sous réserve de la reconnaissance éventuelle de son statut de salarié et/ou de la réalité de son contrat de travail.

Par jugement en date du 30 mai 2017, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la clôture

de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif.

Le 11 septembre 2017, Mme [V] a saisi le Conseil de prud'hommes de Lyon de demandes contre Maître [Z] es qualités.

Par ordonnance en date du 22 décembre 2017, le tribunal de commerce de Lyon a désigné Maître [Z] en qualité de mandataire ad hoc afin de représenter la société 'Les saveurs exotiques' dans le cadre de l'instance pendante devant le Conseil de prud'hommes de Lyon.

L'affaire a été radiée le 19 mars 2018 et réinscrite par Mme [V] le 8 juillet 2019.

Par une ordonnance du 17 février 2020, le mandat ad hoc confié à Maître [Z] a été transféré à la Selarl [N] représentée par Maître [R] [N].

Par assignation du 9 mars 2020, Mme [V] a fait appeler Maître [N], en sa qualité de mandataire ad hoc de la société 'Les saveurs exotiques' et l'association Unedic devant la formation de référé du conseil de prud'hommes laquelle a jugé, par ordonnance du 12 août 2020, qu'il n'y avait pas lieu à référé.

Par arrêt du 9 avril 2021, cette cour a prononcé la nullité de l'assignation délivrée à Maître [N] par Mme [V] et a prononcé par voie de conséquence la nullité de l'ordonnance de référé rendue par le conseil de prud'hommes de Lyon le 12 août 2020.

A l'audience du 18 juin 2020, l'AGS et la Selarlu [N], es qualités, ont sollicité un renvoi à une audience ultérieure, le demandeur n'ayant pas communiqué ses pièces.

Le Conseil de prud'hommes de Lyon a refusé le renvoi et par jugement du 15 octobre 2020, il a fixé les créances de Mme [V] au passif de la liquidation judiciaire de la société 'Les Saveurs Exotiques' comme suit :

- 6 299,60 euros à titre d'indemnité de préavis ;

- 4 372,72 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

- 10 000 euros concernant l'exécution déloyale pour retard de salaire ;

- 10 127,61 euros à titre de solde de congés payés ;

- 18 898,83 euros à titre de rappel de salaires d'avril à décembre 2016 ;

- 1 889,88 euros pour les congés payés afférents ;

- 1 663,20 euros à titre de primes de repas ;

- 1 632 euros à titre de remboursement de frais professionnel ;

- 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Maître [N], es qualités, a également été condamné à remettre à Mme [V], les documents de fin de contrat sous astreinte de 30 euros par jour de retard et par document.

Par déclaration en date du 28 octobre 2020, l'Unedic Délégation AGS CGEA de [Localité 5] a interjeté appel à l'encontre de cette décision.

Aux termes des dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 26 mai 2021, l'association Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 5] demande à la cour de :

- Réformer le jugement entrepris,

Statuant à nouveau:

- Juger irrecevables les demandes de Mme [V] car initiées postérieurement à la clôture de la liquidation judiciaire,

- Rejeter en conséquence intégralement les demandes de Mme [V],

- Condamner Mme [V] à restituer la somme de 18 898,83 euros avancée par l'AGS en exécution du jugement de première instance à l'AGS,

Subsidiairement :

- Confirmer le jugement entrepris en ce que la contestation du licenciement pour motif économique a été rejeté, en ce que la demande d'astreinte a été rejetée, en ce que la demande d'intérêts de retard a été rejetée,

Subsidiairement :

- Minimiser dans de très sensibles proportions les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a été fait droit à la demande d'indemnité de licenciement et à la demande d'indemnité compensatrice de congés payés,

Statuant à nouveau :

- Débouter Mme [V] de sa demande,

- Condamner Mme [V] à restituer les sommes avancées à tort par l'AGS,

- Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a été fait droit à la demande de rappel de salaires et de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

Statuant à nouveau :

- Débouter Mme [V] de ses demandes,

- Condamner Mme [V] à restituer les sommes avancées à tort par l'AGS,

- Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a été fait droit à la demande de remise de documents sous astreinte,

Statuant à nouveau :

- Débouter Mme [V] de sa demande,

En tout état de cause :

- Dire et juger que la garantie de l'AGS-CGEA de [Localité 5] n'intervient qu'à titre subsidiaire, en l'absence de fonds disponibles ;

- Dire et juger que l'AGS-CGEA de [Localité 5] ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-8 du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des articles L. 3253-20, L. 3253-19 et L. 3253-17 du Code du Travail ;

- Dire et juger que l'obligation de l'AGS CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des éventuelles créances garanties, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé de créance par le mandataire judiciaire, et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L. 3253-20 du Code du Travail ;

- Dire et juger que l'AGS CGEA de [Localité 5] ne garantit pas les sommes allouées sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile et au titre des astreintes ;

- Dire et juger l'AGS-CGEA de [Localité 5] hors dépens.

Selon les dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 7 juillet 2021, Mme [V] demande à la cour de :

-Débouter les défendeurs de leurs demandes, fins et conclusions ;

- Recevoir et dire bien fondée Mme [V] en ses demandes, fins et conclusions.

Y faisant droit,

I.- Sur la prétendue violation du principe du contradictoire par le Conseil

- Constater et dire établie la preuve de la communication à l'AGS des conclusions et pièces devant le Conseil de prud'hommes ;

- Rejeter par conséquent la prétention de violation du principe du contradictoire;

II.- Sur l'intervention de l'AGS CGEA de [Localité 5]

- Confirmer le jugement attaqué qui a dit et jugé acquise en l'espèce la garantie de l'AGS. III.- Sur les demandes de l'AGS présentées pour la première fois en appel

- Déclarer l'irrecevabilité des demandes de l'AGS présentées pour la première fois en

appel ;

Subsidiairement la débouter ;

IV.- Sur la contestation du licenciement et les Indemnités afférentes à la rupture du contrat - Infirmer le jugement attaqué ;

- Dire et juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Sur les dommages et intérêts pour licenciement abusif

- Fixer à ce titre la créance à 20 998 euros ;

- Indemnité compensatrice de préavis et congés afférents

- Confirmer le jugement en ce qu'il a fixé la créance à ce titre à 6 299,60 euros ;

- Mais le réformer et fixer la créance au titre des congés payés afférents à 629,96 euros ;

- Indemnité légale de licenciement

- Confirmer le jugement en ce qu'il a fixé cette créance à 4 374,72 euros ;

- Indemnité compensatrice de congés payés

- Confirmer le jugement en ce qu'il a fixé cette créance à 10 127,61euros ;

- Salaires d'avril à décembre 2016

- Confirmer le jugement attaqué sur cette demande ;

- Primes de repas

- Confirmer le jugement attaqué sur cette demande ;

- Remboursement de frais professionnels

- Confirmer le jugement attaqué ;

V- Rétention abusive des documents de fin de contrat

- Confirmer le jugement attaqué pour cette demande ;

VI- Dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat

- Confirmer le jugement attaqué pour cette demande ;

- Cependant, porter l'indemnisation à ce titre à 15 000 euros pour tenir compte du préjudice postérieur à son licenciement, de décembre 2016 à ce jour ;

VI- Résistance à exécution des décisions existantes

- Infirmer le jugement ;

- Constater la résistance abusive et injustifiée du mandataire et de l'AGS à l'autorité de la chose jugée des deux décisions visées ;

- Assortir cette exécution d'astreinte de 300 euros par décision et par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

- Assortir leur exécution d'intérêts au taux légal à compter la notification de chacune de ces décisions ;

En tout état de cause,

- Dire et juger les différentes créances opposables à l'AGS dans les limites de la garantie légale ;

- Condamner solidairement les parties défenderesses à 2 000 euros au titre de l'article 700 et aux entiers dépens ;

- Dire que toutes les condamnations porteront intérêt au taux légal ;

- Autoriser la capitalisation des intérêts.

Selon les dernières conclusions de son avocat, remises au greffe de la cour le 15 octobre 2021, la Selarl [N] demande à la cour de :

A titre principal :

- Juger que le principe du contradictoire n'a pas été respecté en première instance ;

- Annuler en conséquence le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Lyon le 15 octobre 2020 ;

Par conséquent, sur le fond :

- Prononcer l'irrecevabilité des demandes de Mme [V] en ce qu'elles concernent des créances nées antérieurement à l'ouverture de la procédure collective ;

A défaut

- Juger qu'au jour de l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société 'les saveurs exotiques', Mme [V] n'avait pas la qualité de salariée de cette société ;

- Débouter en conséquence Mme [V] de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement abusif, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents ;

d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de congés payés et de remise sous

astreinte de ses documents de fin de contrat ;

- le cas échéant, si la Cour juge que Mme [V] avait la qualité de salariée de la société

'Les saveurs exotiques' au jour de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire :

- Juger que le licenciement pour motif économique repose sur une cause réelle et sérieuse ;

- Réduire la demande d'indemnité compensatrice de préavis à 2 mois de salaire, soit la somme maximum de 4 199,74 euros bruts, outre 419,97 euros bruts au titre des congés payés afférents;

- Réduire la demande d'indemnité légale de licenciement à la somme maximum de 4 293,06 euros ;

- Débouter Mme [V] de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés ;

- Débouter Mme [V] de sa demande de remise sous astreinte de ses documents de fin de contrat ;

- Débouter Mme [V] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif et le cas échéant, réduire cette demande à de plus justes proportions ;

- Débouter Mme [V] de sa demande de rappel de salaire au titre des mois d'avril à

décembre 2016 et de congés payés afférents ;

- Débouter Mme [V] de sa demande de remise de bulletin de paie sous astreinte ;

- Débouter Mme [V] de sa demande de rappel de primes de repas ;

- Débouter Mme [V] de sa demande de remboursement de frais professionnels ;

- Débouter Mme [V] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- Débouter Mme [V] de l'intégralité de ses demandes au titre de l'exécution de décisions de justices ;

- Débouter Mme [V] de sa demande au titre des intérêts et de la capitalisation ;

- La débouter du surplus :

A titre subsidiaire, si la Cour n'annule pas le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Lyon le 15 octobre 2020 :

1/ Au titre de la rupture du contrat de travail :

- Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- fixé au passif de la Liquidation judiciaire de la société 'Les saveurs exotiques' les sommes suivantes :

6 299,60 euros à titre d'indemnité de préavis,

4 372,72 euros à titre d'indemnité de licenciement,

10 127,61 euros à titre de solde de conges payes,

- condamné Maître [R] [N] es qualités de mandataire ad hoc de la société 'Les saveurs exotiques' à remettre sous astreinte de 30 euros par jour de retard et par document dans un délai de 30 jours après la notification de la présente décision, l'attestation Pôle Emploi et le certificat de travail rectifié ;

Et statuant à nouveau,

- Prononcer l'irrecevabilité des demandes de Mme [V] en ce qu'elles concernent des créances nées antérieurement à l'ouverture de la procédure collective ;

A défaut,

-Juger que Mme [V] n'avait plus la qualité de salariée de la société 'Les Saveurs exotiques' au jour de l'ouverture de la liquidation judiciaire ;

-Débouter en conséquence Mme [V] de ses demandes d'indemnité de préavis et de congés payes afférents d'indemnité de licenciement d'indemnité compensatrice de congés payés et de remise sous astreinte des documents de fin de contrat ;

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [V] de sa demande de

dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

Le cas échéant, si la Cour juge que Mme [V] avait toujours la qualité de salariée de la société ' Les Saveurs Exotiques' au jour de l'ouverture de la liquidation judiciaire,

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que le licenciement pour motif économique

repose sur une cause réelle et sérieuse et débouter Mme [V] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

- Le cas échéant, réduire cette demande à de plus justes proportions ;

- Reformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société 'Les saveurs exotiques' les sommes suivantes :

6 299.60 euros à titre d'indemnité de préavis,

4 372.72 euros à titre d'indemnité de licenciement,

10 127,61 euros à titre de solde de congés payés,

- condamné Maître [R] [N] es qualités de mandataire ad hoc de la société 'Les saveurs exotiques' à remettre sous astreinte de 30 euros par jour de retard et par document, dans un délai de 30 jours après la notification de la présente décision, l'attestation Pôle Emploi et le certificat de travail rectifié ;

Et statuant à nouveau :

- Prononcer l'irrecevabilité des demandes de Mme [V] en ce qu'elles concernent des créances nées antérieurement à l'ouverture de la procédure collective ;

A défaut :

- Réduire la demande d'indemnité compensatrice de préavis à 2 mois de salaire, soit la somme

maximum de 4 199,74 euros bruts, outre 419,97 euros bruts au titre des congés payés afférents;

- Réduire la demande d'indemnité légale de licenciement à la somme maximum de 4 293,06 euros ;

- Débouter Mme [V] de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés ;

- Débouter Mme [V] de sa demande de remise sous astreinte de ses documents de fin de contrat ;

2/ Au titre de l'exécution du contrat de travail :

- Reformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société 'Les saveurs exotiques' les sommes suivantes :

18 898,83 euros à titre de rappel de salaire outre 1 898,83 euros au titre des congés payés afférents,

1 663,20 euros à titre de rappel de primes de repas,

1 632 euros à titre de remboursement de frais professionnels,

10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- condamné Maître [R] [N] es qualités de mandataire ad hoc de la société 'Les saveurs exotiques' à remettre sous astreinte de 30 euros par jour de retard et par document, dans un délai de 30 jours après la notification de la présente décision: les bulletins de paie d'avril à décembre 2016 ;

Et statuant à nouveau,

l- Prononcer l'irrecevabilité des demandes de Mme [V] en ce qu'elles concernent des créances nées antérieurement à l'ouverture de la procédure collective ;

A défaut,

- Débouter Mme [V] de sa demande rappel de salaire et de congés payés afférents ;

- Débouter Mme [V] de sa demande rappel de primes de repas ;

- Débouter Mme [V] de sa demande remboursement de frais professionnels ;

- Débouter Mme [V] de sa demande dommages et intérêts pour exécution déloyale

du contrat de travail ;

- Débouter Mme [V] de sa demande de remise sous astreinte de bulletin de paie ;

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [V] de l'intégralité de

ses demandes au titre de l'exécution de décisions de justice ;

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [V] de ses demandes

au titre des intérêts et de la capitalisation ;

En tout état de cause,

- Débouter Mme [V] du surplus de ses demandes ;

- Condamner Mme [V] aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 février 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité du jugement déféré

La Selarlu [N] conclut à la nullité du jugement déféré au visa des articles 15,16 et 132 du code procédure civile, faute pour Mme [V] d'avoir communiqué ses pièces aux parties et pour le conseil de prud'hommes, d'avoir fait droit à la demande de renvoi.

La Selarlu [N] expose que :

- par mail du 12 juin 2020, le conseil de Mme [V] a transmis au conseil de prud'hommes de Lyon, au nouveau conseil de l'AGS et au conseil de la Selarlu [N], es qualités, de nouvelles écritures dans l'intérêt de sa cliente ainsi que des pièces 18 à 25 ;(Piece adverse n° 34)

- par mail officiel du 12 juin 2020, le conseil de la Selarlu [N], es qualités, a informé le conseil de Mme [V] de sa constitution en vue de l'audience du bureau de jugement du conseil de prud'hommes de Lyon du 18 juin 2020 et a sollicité de ce dernier la communication de ses pièces 1 à 17 ; (Piece n°9)

- Aucune réponse n'a été apportée à ce mail officiel, de sorte que les pièces 1 à 17 n'ont jamais été transmises ni à la Selarlu [N] ou son service SCTS, ni à son conseil malgré la demande officielle en ce sens.

Mme [V] soutient au contraire que :

- par divers échanges en date des 14, 28 février 2018 et 1er mars 2018, les pièces et conclusions déjà communiquées au Conseil, au mandataire et à l'AGS ont été recommuniquées à l'avocat de ce dernier qui venait de se constituer dans ce dossier ;

- le 04/07/2019, après radiation de l'affaire suite au rejet de la demande de renvoi pour régularisation et à l'absence du demandeur, Mme [V] a sollicité le rétablissement de cette affaire, en recommuniquant au Conseil, au mandataire et à l'avocat de l'AGS l'ordonnance de désignation du mandataire ad hoc, ainsi que les conclusions et bordereau de pièces déjà communiquées ;

- le 29/10/2019, la salariée a communiqué ses conclusions et bordereau de pièces actualisées à ses contradicteurs et au Conseil ;

- le 12 juin 2020, les mêmes conclusions ont été recommuniquées à l'ensemble des parties et au Conseil, accompagnées des pièces n°18 à 25.

****

Il résulte des débats et des pièces produites que par courriel du 12 juin 2020, Maître [F], conseil de Mme [V], a communiqué au conseil de prud'hommes et à ses confrères, dont le cabinet Seigle Barrie & associés, ses conclusions actualisées ainsi que ses pièces numérotées de 18 à 25.

En réponse et par courriel du même jour, le cabinet Seigle Barrie & associés indiquait à Maître [F], qu'il venait d'être constitué par la Selarlu [N], es qualités, et qu'il serait contraint, compte tenu de la proximité de la date d'audience, de solliciter un renvoi à une audience ultérieure. Il demandait par ailleurs à Maître [F] de lui communiquer ses pièces numérotées de 1 à 17 visées au terme des conclusions en demande.

Il résulte de la note d'audience du 18 juin 2020 que Maître [F] s'est opposée à la demande de renvoi de la Selarlu [N], en faisant valoir que :

- l'affaire était ancienne et il communiquait depuis le mois de février avec Maître [N] lequel avait reçu les pièces 1 à 17 demandées ;

- il n'était pas sûr d'avoir reçu l'email du 12 juin 2020 sus-visé ;

- il avait communiqué ses pièces au mandataire par un email du 13 mars 2020.

La cour observe qu'il n'y a aucune trace ni d'une communication par RPVA, ni d'un envoi par email à la date du 13 mars 2020 et que Maître [F] n'a justifié ni devant les premiers juges, ni en cause d'appel, avoir satisfait à la demande de communication de ses pièces numérotées de 1 à 17 auprès du conseil de la Selarlu [N].

Il en résulte que la Selarlu [N] n'a pas été en mesure de prendre connaissance des pièces en cause et d'en discuter devant le conseil de prud'hommes, en sorte que Mme [V] n'a pas satisfait à son obligation de faire connaître à ses adversaires l'ensemble des éléments de preuve qu'elle a produit, et que le principe du contradictoire tel qu'il résulte des articles 15, 16 et 132 du code de procédure civile, n'a pas été respecté.

La conséquence est la nullité du jugement déféré.

Sur la recevabilité des demandes de Mme [V]

L'AGS expose que :

- sa prétention tendant à l'irrecevabilité des demandes de Mme [V] n'est pas une demande nouvelle dés lors qu'elle a subi une violation manifeste du principe du contradictoire en première instance ;

- si par extraordinaire, la cour venait à considérer que le moyen invoqué par elle au soutien de sa demande de réformation est une nouvelle prétention, elle ne pourra que retenir qu'il s'agit d'un moyen tendant à faire écarter les prétentions adverses ;

- Mme [V] a saisi le Conseil des Prud'hommes de Lyon postérieurement à la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société 'Les saveurs exotiques';

- les demandes tendaient à obtenir la fixation au passif de créances salariales et le bénéfice de la garantie AGS ;

- de telles demandes étaient nécessairement et inévitablement irrecevables, en ce qu'elles ont été initiées postérieurement à la clôture pour insuffisance d'actif.

A titre subsidiaire, l'AGS demande :

- la confirmation du rejet des demandes afférentes au licenciement pour motif économique ;

- la réformation du jugement qui a fait droit à la demande de remise des documents de fin de contrat sous astreinte ;

- Sur l'indemnité de licenciement, l'AGS retient une ancienneté de 10 ans et 4 mois et non de 10 ans et 5 mois ;

- Sur l' indemnité compensatrice de congés payés obtenue de 10 127,61 euros au titre de 104,5 jours, l'AGS conclut qu'il était impossible que Mme [V] cumule prés de quatre années de congés non pris ;

- sur les rappels de salaire, l'AGS conclut que le CPH s'est contenté des affirmations de la salariée.

La Selarlu [N] fait valoir que :

- au visa des articles 122 et 123 du code de procédure civile, les irrecevabilités ne sont pas des prétentions, mais des fins de non recevoir pouvant être soulevées en tout état de cause, y compris en cause d'appel ;

- au visa des dispositions des articles L. 643-11 du code de commerce et 1844-7 du code civil, les créances de nature salariale de Mme [V] sont nées antérieurement à la procédure collective ouverte par jugement du 30 novembre 2016 et un salarié ne peut solliciter des demandes de nature salariale après la clôture de la liquidation judiciaire qu'à la condition que les créances soient nées régulièrement après l'ouverture de la procédure collective et que le recouvrement soit poursuivi à l'encontre de la société employeur régulièrement représenté en justice par un mandataire désigné à cette fin.

Mme [V] conclut que la demande tendant à l'irrecevabilité de ses demandes est une prétention nouvelle en cause d'appel et donc elle-même irrecevable.

****

L'article 123 du code de procédure civile énonce que 'les fins de non recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt'.

Le moyen opposé par le mandataire ad hoc et l'AGS tend à faire déclarer irrecevable la demande de fixation de créance de la salariée en ce qu'elle a été formulée postérieurement à la clôture de la liquidation judiciaire. Il s'agit bien d'une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, de sorte que les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile au terme desquelles les demandes nouvelles à hauteur d'appel sont par principe irrecevables, ne sont pas opposables au mandataire ad hoc et à l'AGS.

L'article L. 643-11 du code de commerce dispose que le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur, et qu'il est fait exception à cette règle notamment lorsque la créance porte sur des droits attachés à la personne du créancier.

La créance indemnitaire ou salariale du salarié licencié résulte des droits attachés à sa personne de sorte qu'en cas de clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de son employeur, il recouvre l'exercice individuel de son action contre le débiteur, en l'espèce, la société 'Les saveurs exotiques'.

L'article 1844-7 du code civil dispose que la société prend fin, notamment par l'effet d'un jugement ordonnant la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif.

S'il ressort de la combinaison des textes sus-visés que postérieurement au jugement de clôture pour insuffisance d'actif consécutive au prononcé de la liquidation judiciaire de la personne morale dont la personnalité subsiste pour les besoins de la liquidation, le salarié recouvre l'exercice individuel de son action contre l'employeur, concernant ses créances indemnitaires ou salariales considérées comme résultant de droits attachés à sa personne, il convient cependant que les dites créances soient nées régulièrement après l'ouverture de la procédure collective et que le recouvrement soit poursuivi à l'encontre de la société employeur régulièrement représentée en justice par un mandataire désigné à cette fin.

En l'espèce, Maître [Z] a été désigné par ordonnance du tribunal de commerce de Lyon du 4 octobre 2019, en qualité de mandataire ad'hoc pour représenter la société 'Les saveurs exotiques' dans le cadre de l'instance engagée contre cette société par Mme [V] et le mandat ad'hoc de Maître [Z] a été transféré à la Selarlu [N] par ordonnance du 17 février 2020, en sorte que la société 'Les saveurs exotiques' dont la liquidation a été clôturée le 30 mai 2017 est régulièrement représentée dans la présente instance.

Les conditions de recevabilité de l'action engagée par la salariée, par saisine du conseil de prud'hommes du 11 septembre 2017, soit postérieurement au jugement de clôture de la liquidation judiciaire du 30 mai 2017, pour une créance indemnitaire résultant de la notification du licenciement après l'ouverture de la procédure collective sont par conséquent réunies.

Mais, les sommes sollicitées au titre des conséquences du licenciement notifié à la salariée le 15 décembre 2016, correspondant à des créances nées postérieurement au prononcer de la liquidation judiciaire, ne peuvent donner lieu à une fixation au passif de la liquidation judiciaire de la société, mais exclusivement à une condamnation du mandataire ad'hoc ès qualités.

Il s'en évince que la demande de la salariée qui tend à la fixation de ses créances au passif de la liquidation judiciaire doit être analysée comme une demande de condamnation du mandataire ad'hoc de la société liquidée.

Sur les demandes au titre de la rupture du contrat de travail

La Selarlu [N] soutient que :

- les droits de Mme [V] ont été préservés ;

- son licenciement a été notifié à titre conservatoire, dans le délai de 15 jours suivants le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire, afin de permettre, le cas échéant, la mise enjeu de la garantie de L'AGS ;

- le dernier bulletin de paie a été établi pour la période du 19 au 28 juin 2016 et le versement d'une indemnité compensatrice de congés payés est mentionné sur ce bulletin ;

- aux termes de son courrier du 12 février 2018, le conseil de Mme [V] précise :

'Cependant depuis le 28 juin 2016, à la suite d'une mise à pied conservatoire, l'employeur avait cessé de donner du travail à la salariée, et de lui payer les salaires et aurait rompu son contrat de travail en août 2016" (Piece adverse n°16) ;

- il est donc incontestable que le dernier jour travaillé par Mme [V] est le 28 juin 2016 et aucun élément n'est versé aux débats pour justifier de prestations réalisées par Mme [V] postérieurement à cette date ou du fait qu'elle se serait tenue à la disposition permanente de son employeur.

- Mme [V] ne justifie à aucun moment de sa situation et son propre conseil fait état d'une rupture de contrat intervenue en août 2016.

- si la Cour juge que le contrat de travail de Mme [V] n'a pas été rompu antérieurement à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, elle ne pourra que juger que le licenciement pour motif économique repose sur une cause réelle et sérieuse ;

- si la Cour juge que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, elle réduira le montant des demandes à de plus justes proportions.

Mme [V] conteste le motif économique du licenciement. Elle soutient que :

- son licenciement ne remplit pas les critères de l'article L.1233-3 qui impose que le licenciement économique doit être justifié par 'des difficultés économiques' ou par 'des mutations technologiques' ;

- tel n'est pas le cas en l'espèce, où la cause de la liquidation judiciaire de l'employeur qui a conduit à la suppression de son poste réside dans le non-paiement par l'employeur de sa créance envers l'URSSAF, ce qui a conduit cette dernière à l'assigner en liquidation ;

- dés lors, la cause du licenciement est la faute de l'employeur.

****

1°) Le fait que Mme [V] ait laissé sans réponse un courrier de Maître [Z] du 14 décembre 2016 l'invitant à lui indiquer si elle faisait toujours partie des effectifs de la société à la date d'ouverture de la procédure collective, ou la mention sur le dernier bulletin de salaire produit, arrêté au 28 juin 2016, d'une indemnité compensatrice de congés payés, ne sont pas de nature à laisser présumer que le contrat de travail était régulièrement rompu à cette date.

La Selarlu [N] se prévaut par ailleurs d'un courrier adressé par Maître [F] à Maître [Z] le12 février 2018, pour soutenir que le dernier jour travaillé par Mme [V] était le 28 juin 2016. Mais, il résulte des termes employés :

' (...) Cependant, depuis le 28 juin 2016, à la suite d'une mise à pied conservatoire, l'employeur avait cessé de donner le travail à la salariée, et de lui payer les salaires et aurait rompu son contrat de travail en août 2016 (...)' que la rupture est évoquée au conditionnel et qu'en tout état de cause, il ne résulte pas des débats que la salariée ne se serait pas tenue à disposition de son employeur jusqu'à l'ouverture de la procédure collective.

Il en résulte que la Selarlu [N] n'est pas fondée à contester le statut de salarié de Mme [V] jusqu'au 30 novembre 2016, date du prononcé de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.

2°) S'agissant du licenciement, Mme [V] soutient qu'il ne remplit pas les critères de l'article L. 1233-3 dès lors que la cause de la liquidation judiciaire, laquelle a conduit à la suppression de son poste, réside dans le non-paiement par l'employeur de sa créance envers l'Urssaf, c'est-à-dire dans la faute de l'employeur.

Si les difficultés économiques ou financières invoquées ne doivent pas résulter d'une attitude frauduleuse ou d'une faute de l'employeur, la salariée ne démontre pas en quoi le défaut de paiement de la créance de l'Urssaf résulterait d'une fraude ou d'une faute de l'employeur.

Mme [V] s'est vue notifier son licenciement pour motif économique du fait de la fermeture, à la suite de la liquidation judiciaire, de l'entreprise qui l'employait et par voie de conséquence de la suppression de l'ensemble des postes de travail de cette entreprise.

Et la cessation d'activité de l'entreprise, quand elle n'est pas due à une faute de l'employeur ou à sa légèreté blâmable, constitue un motif économique de licenciement.

Il en résulte que le licenciement de Mme [V] repose effectivement sur une cause réelle et sérieuse. Sa demande d'indemnisation au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse est rejetée.

3°) sur les indemnités de rupture :

La salariée sollicite une indemnité compensatrice de préavis de trois mois au visa de l'article 30 de la convention collective nationale du 30 avril 1997, outre les congés payés afférents, ainsi qu'une indemnité légale de licenciement sur la base d'un salaire mensuel de 2 099,87 euros et d'une ancienneté de 10 ans et cinq mois.

La Selarlu [N] demande, à titre subsidiaire, de réduire l'indemnité compensatrice de préavis à deux mois de salaire, faute pour la salariée de pouvoir se prévaloir du statut de cadre. Elle conclut au calcul de l'indemnité de licenciement, conformément aux dispositions de l'article R. 1234-2 du code du travail, dans sa version applicable au litige, sur la base d'une ancienneté de 10 ans et quatre mois.

****

L'article L. 1234-1 du code du travail énonce que 'lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit (...)

3° s'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans, à un préavis de deux mois.

Toutefois, les dispositions des 2° et 3° ne sont applicables que si la loi, la convention ou l'accord collectif de travail, le contrat de travail ou les usages ne prévoient pas un préavis ou une condition d'ancienneté de services plus favorable pour le salarié.'.

L'article R. 1234-2 du code du travail dans sa version en vigueur jusqu'au 27 septembre 2017 énonce :

' L'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté, auquel s'ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d'ancienneté.'

L'article 30 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants ( HCR) du 30 avril 1997, fixe la durée du préavis à trois mois pour les cadres de plus de deux ans et à deux mois pour les agents de maîtrise de plus de deux ans.

Mme [V] dont le contrat de travail mentionne la qualification de chef d'équipe, employée polyvalente, et qui ne justifie pas qu'elle a effectivement occupé un poste d'encadrement, ne peut prétendre au statut de cadre. L'indemnité compensatrice de préavis est de deux mois et son ancienneté du 1er août 2016 au 15 décembre 2016, est de 10 années et 4 mois.

La Selarlu [N], en sa qualité de mandataire ad' hoc de la société 'Les saveurs exotiques', est condamnée à payer à Mme [V] les sommes suivantes :

4 199,74 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 419,97 euros de congés payés afférents,

4 293,06 euros à titre d'indemnité légale de licenciement.

4°) Sur l'indemnité compensatrice de congés payés :

La salariée soutient qu'elle avait acquis 104,5 jours de congés payés à la date du licenciement et demande, à ce titre la somme de 10 127,61 euros se décomposant comme suit : 104,5 j x 7 h x 13,845 euros/h.

La Selarlu [N] et l'Unedic s'opposent à cette demande, cette dernière soulignant qu'elle ne voyait pas comment la salariée aurait pu cumuler 104,5 jours de congés payés non pris, soit l'équivalent de 4 années de travail.

****

L'article L. 3141-28 du code du travail énonce que 'lorsque le contrat de travail est rompu avant que le salarié ait pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit, il reçoit, pour la fraction de congé dont il n'a pas bénéficié, une indemnité compensatrice de congé déterminée d'après les articles L. 3141-24 à L. 3141-27 (...)'

Il en résulte que le salarié a droit à l'octroi d'une indemnité compensatrice de congés payés non pris au cours des années antérieures, ainsi qu'à des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la privation du congé.

Le droit au congé annuel payé est un principe du droit social de L'union Européenne revêtant une importance particulière, auquel il ne saurait être dérogé et dont la mise en oeuvre ne peut être effectuée que dans les limites expressément énoncées par la directive n°2003/88/CE du 4 novembre 2003. Il appartient à l'employeur de prendre des mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement.

En l'espèce, la lecture du dernier bulletin de paye, soit celui du mois de juin 2016, révèle un total de 87,50 jours au titre de N-1 et 2 jours au titre de l'année en cours, restant dus au titre des congés payés. Il est mentionné par ailleurs le paiement d'une indemnité de congés payés de 2 078,35 euros.

Et l'employeur ne justifie pas avoir mis sa salariée en mesure de prendre ses congés payés, en sorte qu'il sera condamné à lui verser la somme de 10 127,61 euros à ce titre, selon les modalités de calcul proposées par la salariée et non remises en cause, même à titre subsidiaire, par la Selarlu [N] et par l'Unedic.

Sur les demandes au titre de l'exécution du contrat de travail

Mme [V] demande le paiement de :

- un rappel de salaires d'avril 2016 à octobre 2016 de 18 898,83 euros, outre les congés payés afférents ;

- primes de repas d'octobre 2014 à octobre 2016 ;

- frais professionnels, soit le remboursement à 50% de son abonnement aux transports publics.

Mme [V] demande en outre des dommages-intérêts :

- au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail

- au titre de la rétention des documents administratifs

- au titre de la résistance à l'exécution des décisions de justice.

La Selarlu [N] et l'Unedic s'opposent à ces demandes en faisant valoir que :

- la salariée ne justifie pas de sa situation postérieurement au 28 juin 2016 ;

- la salariée ne justifie ni des prestations de travail effectuées, ni s'être tenue à disposition de l'employeur ;

- la salariée ne produit pas ses relevés de compte bancaire au titre de la période litigieuse ;

- les demandes au titre des primes de repas et des frais professionnels ne sont fondées ni en leur principe, ni dans leur quantum.

1°) sur la demande de rappel de salaire d'avril à décembre 2016 :

L'Unedic fait valoir à titre subsidiaire que la société ayant été placée en liquidation judiciaire par jugement du 30 novembre 2016, aucune activité n'a été exercée postérieurement à cette date, en sorte que les salaires doivent être arrêtés au 30 novembre 2016.

Il est constant qu'il appartient à celui qui se prétend libéré d'une obligation de justifier le paiement ou le fait qui produit l'extinction de cette obligation. Et la circonstance selon laquelle la salariée n'a pas réclamé le paiement de ses salaires à l'employeur défaillant ne vaut pas renonciation aux sommes dues.

Il s'en évince que nonobstant la délivrance de bulletins de paie, il appartient à l'employeur de prouver qu'il a effectivement versé les salaires à la salariée, ce qui ne résulte pas des pièces de l'administrateur ad'hoc.

Dés lors, compte tenu des développements ci-avant relatifs au statut de salarié de Mme [V], cette dernière est fondée à réclamer un rappel de salaire du 1er avril 2016 au 30 novembre 2016, soit pendant huit mois.

La Selarlu [N], es qualités, est condamnée en conséquence à payer à Mme [V] la somme de 16 798,96 euros ( 2099,87 euros x 8 mois) à titre de rappel de salaire du 1er avril 2016 au 30 novembre 2016.

2°) sur la prime de repas et les frais de transport :

La salariée ne verse aux débats aucun élément justificatif de ce qu'elle remplissait les conditions d'octroi de la prime repas, laquelle est due lorsque l'employeur ne fournit pas de repas directement à ses employés et que ces derniers ne sont pas en mesure de prendre leurs repas chez eux compte tenu de leurs horaires de travail.

S'agissant de la demande de prise en charge de la moitié de son abonnement aux transports publics, au visa des articles L. 3261-2 et suivants du code du travail, il est fait la même observation relative au défaut de tout justificatif d'un abonnement souscrit par la salariée pour ses déplacements entre son domicile et son lieu de travail.

Mme [V] est déboutée de ses demandes de rappels au titre des primes de repas et de ses frais de transport.

3°) sur la demande de dommages-intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail et au titre de la résistance aux décisions de justice :

La salariée invoque le paiement irrégulier des salaires qui l'a mise en difficulté, ses horaires de travail et 'autres contraintes inadmissibles'(sic) et conclut, qu'après la liquidation, Maître [Z] et la Selarlu [N], es qualités, ont poursuivi cette exécution déloyale.

La Selarlu [N] et l'Unedic s'opposent à cette demande.

****

Mme [V] ne justifie d'aucun préjudice distinct de celui qui est réparé par la condamnation de la Selarlu [N] à lui payer un rappel de salaires.

Elle ne conteste pas par ailleurs, que l'AGS lui a versé la somme de 18 898,83 euros le 17 décembre 2020 en exécution du jugement du 15 octobre 2020, en sorte qu'elle ne caractérise nullement la résistance abusive aux décisions de justice qu'elle invoque.

Mme [V] est déboutée en conséquence de sa demande de dommages-intérêts au titre de l'exécution du contrat de travail et au titre de la résistance abusive.

Sur la remise des documents de fin de contrat

Il convient d'ordonner la remise par la Selarlu [N] des documents de fin de contrat et d'un bulletin de salaire rectifié dans un délai de deux mois à compter de ce jour, sans qu'il y ait lieu à astreinte.

Sur la demande d'intérêts au taux légal et de capitalisation des intérêts

L'article L. 622-28 du code de commerce énonce :

' Le jugement d'ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que de tous intérêts de retard et majorations (...)'

Mais les intérêts au taux légal courent à compter de la présente décision conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil.

- Sur les demandes accessoires

Les dépens de première instance et d'appel, suivant le principal, seront supportés par la Selarlu [N].

L'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d'appel dans la mesure énoncée au dispositif.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Dans la limite de la dévolution,

ANNULE le jugement déféré ;

DIT que la demande de Mme [V] tendant à la fixation de sa créance au titre du licenciement abusif, des indemnités de rupture, d'un rappel de salaires, de dommages-intérêts, s'analyse comme une demande de condamnation de la Selarlu [N] en sa qualité de mandataire ad'hoc de la société 'Les saveurs exotiques' et que cette demande est recevable ;

DIT que le licenciement notifié le 15 décembre 2016 à Mme [V] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

DÉBOUTE Mme [V] de sa demande de dommages-intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la Selarlu [N], en sa qualité de mandataire ad'hoc de la société 'Les saveurs exotiques', à payer à Mme [V] les sommes suivantes :

4 199,74 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 419,97 euros de congés payés afférents,

4 293,06 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

16 798,96 euros à titre de rappel de salaire du 1er avril 2016 au 30 novembre 2016, outre les congés payés afférents ;

10 127,61 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés ;

DÉBOUTE Mme [V] de ses autres demandes ;

RAPPELLE que les sommes allouées par la cour sont exprimées en brut ;

DIT que les intérêts au taux légal courent à compter du présent arrêt ;

ORDONNE la remise par la Selarlu [N], es qualités, à Mme [V] des documents de fin de contrat et d'un bulletin de salaire rectifié dans un délai de deux mois à compter de ce jour, sans qu'il y ait lieu à astreinte ;

CONDAMNE la Selarlu [N], es qualités, à verser à Mme [V] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que la garantie de l'AGS-CGEA de [Localité 5] n'intervient qu'à titre subsidiaire, en l'absence de fonds disponibles ;

DIT que l'AGS-CGEA de [Localité 5] ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-8 du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des articles L. 3253-20, L. 3253-19 et L. 3253-17 du Code du Travail ;

DIT que l'obligation de l'AGS CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des éventuelles créances garanties, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé de créance par le mandataire judiciaire, et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L. 3253-20 du code du travail ;

DIT que l'AGS CGEA de [Localité 5] ne garantit pas les sommes allouées sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE la Selarlu [N] aux dépens de l'appel et dit que l'AGS-CGEA de [Localité 5] est hors dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 20/05940
Date de la décision : 26/06/2024
Sens de l'arrêt : Annulation

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;20.05940 ?
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