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24/06/2024 | FRANCE | N°24/00114

France | France, Cour d'appel de Lyon, Jurid. premier président, 24 juin 2024, 24/00114


N° R.G. Cour : N° RG 24/00114 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PWTA

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT





ORDONNANCE DE REFERE

DU 24 Juin 2024





























DEMANDERESSE :



S.A.R.L. WORLD FOOD'S

[Adresse 1]

[Localité 4]



avocat postulant : Me Giulia RIBONI FERET, avocat au barreau de LYON (toque 3719)



avocat plaidant : Me Salim Ben Hamidane, avocat au barreau de PARIS

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DEFENDERESSES :



S.A.S. NEXITY LAMY

[Adresse 3]

[Localité 5]



non comparante







S.C.I. ATLAS société civile immobilière inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON (Rhône) sous le numéro 384 500 682, pris...

N° R.G. Cour : N° RG 24/00114 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PWTA

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DE REFERE

DU 24 Juin 2024

DEMANDERESSE :

S.A.R.L. WORLD FOOD'S

[Adresse 1]

[Localité 4]

avocat postulant : Me Giulia RIBONI FERET, avocat au barreau de LYON (toque 3719)

avocat plaidant : Me Salim Ben Hamidane, avocat au barreau de PARIS

DEFENDERESSES :

S.A.S. NEXITY LAMY

[Adresse 3]

[Localité 5]

non comparante

S.C.I. ATLAS société civile immobilière inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON (Rhône) sous le numéro 384 500 682, prise en la personne de son représentant légal en exercice, ayant pour mandataire administrateur de biens la SAS LAMY société par actions simplifiée, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le N° 487 530 099, prise en son établissement dénommé LAMY LYON GERANCE VAISE I représenté par son directeur en exercice

[Adresse 1]

[Localité 4]

avocat postulant : Me Catherine DUFAUD, avocat au barreau de LYON (toque 993)

avocat plaidant : Me Bénédicte ROCHEFORT (SELARL ROCHEFORT), avocat au barreau de VIENNE

Audience de plaidoiries du 10 Juin 2024

DEBATS : audience publique du 10 Juin 2024 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d'appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 31 janvier 2024, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : réputée contradictoire

prononcée le 24 Juin 2024 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

''''

EXPOSE DU LITIGE

La S.C.I. Atlas propriétaire de locaux commerciaux sis [Adresse 2] les a cédés à bail à la S.A.R.L. World food's suite à une subrogation par acte du 1er juin 2012 du bail auparavant concédé à la société Ginn's café le 21 juillet 2009.

Suite à la délivrance de plusieurs commandements de payer, un autre commandement de payer visant la clause résolutoire a été signifié le 11 avril 2023 à la société World food's.

Par actes du 5 juin 2023, la SCI Atlas a fait assigner en référé sa locataire devant le président du tribunal judiciaire de Lyon en constat de la résiliation du bail. Cette juridiction, par ordonnance réputée contradictoire du 11 septembre 2023, a notamment :

- autorisé l'expulsion de la société World food's,

- condamné cette dernière à verser à la SCI Atlas la somme provisionnelle de 12 106,03 € au titre des loyers et charges arrêtés au 3ème trimestre 2023,outre intérêts au taux légal à compter du 11 avril 2023, comme une indemnité d'occupation provisionnelle d'un montant équivalent à celui des loyers hors taxes et des charges à compter du mois d'octobre 2023 et une somme de 800 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société World food's a interjeté appel de cette décision le 19 mars 2024.

Par assignations en référé délivrées le 22 mars 2024 à la SCI Atlas et à la S.A.S. Nexity Lamy en qualité de mandataire de la bailleresse, elle a saisi le premier président afin d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire attachée à l'ordonnance de référé du 11 septembre 2023, la fixation de l'affaire devant la cour à jour fixe et la condamnation de la SCI Atlas à payer la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

A l'audience du 10 juin 2024 devant le délégué du premier président, les parties, comparantes et régulièrement représentées, s'en sont remises à leurs écritures, qu'elles ont soutenues oralement.

Dans son assignation, la société World food's soutient au visa de l'article 514-3 du Code de procédure civile l'existence de moyens sérieux de réformation tenant à la faculté qu'elle a de solliciter de la cour la suspension des effets de la clause résolutoire en ce qu'elle a apuré son arriéré locatif.

Elle prétend que l'exécution provisoire de ce jugement va entraîner des conséquences manifestement excessives en ce qu'elle va conduire à son expulsion alors qu'elle connaît des difficultés financières et que son dirigeant connaît des problèmes de santé.

Elle indique avoir été avisée dernièrement de l'ordonnance de référé dont elle a relevé appel et n'a pas pu rechercher d'autres locaux pour exercer son activité et que son expulsion la conduira à une procédure collective.

Elle affirme que ses droits sont en péril et sollicite à titre subsidiaire que l'affaire soit audiencée à jour fixe devant la cour d'appel en application de l'article 917 du Code de procédure civile.

Dans ses conclusions déposées lors de l'audience, la SCI Atlas s'oppose aux demandes de la société World food's et sollicite la condamnation de cette dernière à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle conteste l'existence de moyens sérieux de réformation en relevant qu'à la date de l'assignation en arrêt de l'exécution provisoire, elle n'avait pas apuré sa dette locative.

Elle affirme que la société World food's ne justifie d'aucune démarche en vue de trouver un nouveau local commercial et d'aucune difficulté financière.

Elle s'oppose à la demande de fixation prioritaire de l'affaire devant la cour, car le rétablissement du contradictoire invoqué par la société World food's ne correspond pas au péril nécessaire à cet audiencement.

Dans ses dernières conclusions déposées lors de l'audience, la société World food's maintient les demandes contenues dans son assignation.

Elle indique produire de nouveaux éléments sur sa situation financière.

Lors de l'audience, la société World food's s'est désistée de son instance à l'égard de la société Nexity Lamy. La SCI Atlas a indiqué que la dette locative était soldée à ce jour.

La société Nexity Lamy, bien que citée par acte remis à une personne habilitée à le recevoir, n'a pas comparu.

Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l'exposé des moyens à l'énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.

MOTIFS

Attendu qu'en l'absence de comparution de la société Nexity Lamy, assignée à sa personne, la présente ordonnance est réputée contradictoire ;

Attendu qu'il convient de donner acte à la société World food's de son désistement d'instance à l'égard de la société Nexity Lamy, tout en constatant qu'aucune prétention n'était émise à l'encontre de cette dernière, qui n'a d'ailleurs pas été intimée dans le cadre de la procédure d'appel ;

Sur la demande principale d'arrêt de l'exécution provisoire

Attendu que l'exécution provisoire de droit dont est assortie l'ordonnance rendue le 11 septembre 2023 par le président du tribunal judiciaire de Lyon ne peut être arrêtée, que conformément aux dispositions de l'article 514-3 du Code de procédure civile, et lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; que ces deux conditions sont cumulatives ;

Attendu qu'un moyen sérieux ne relève pas d'une simple affirmation ni de la seule reprise des arguments développés en première instance ; qu'en d'autres termes un moyen sérieux est un moyen suffisamment consistant pour mériter d'être allégué ou soutenu, pris en considération et avoir des chances d'être retenu après discussion et réflexion et qui doit en tout état de cause conduire à l'annulation ou à la réformation ;

Que l'absence de pouvoir juridictionnel du premier président pour déterminer les chances de succès de l'appel doit le conduire à ne retenir un moyen que s'il repose sur une base factuelle évidente ;

Attendu que la société World food's n'est pas contestée en ce qu'elle indique avoir couvert l'intégralité de son arriéré locatif, ce qui lui permet de soutenir qu'elle est susceptible d'obtenir de la cour d'appel une suspension des effets de la clause résolutoire en application des dispositions combinées des articles L. 145-41 du Code de commerce et 1343-5 du Code civil, cette mesure lui permettant un maintien dans les lieux dans la limite du respect des délais de paiement qui lui sont nécessairement associés ;

Que ce seul moyen est susceptible de conduire à la réformation de l'ordonnance de référé en appel sans qu'il soit besoin d'examiner ici les circonstances dans lesquelles un arriéré locatif a été accumulé, cette appréciation étant à réaliser par la cour d'appel ;

Attendu que le premier président ne dispose d'aucun pouvoir juridictionnel pour déterminer la pertinence de l'attitude des parties dans leur volonté d'exécuter la décision assortie de l'exécution provisoire et sur les modalités des voies d'exécution engagées ; qu'il est d'ailleurs relevé par les parties que le juge de l'exécution est actuellement saisi d'une contestation du commandement de quitter les lieux ;

Attendu que s'agissant de l'existence de conséquences manifestement excessives, il y a lieu de rappeler qu'il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques générés par la mise à exécution de la décision rendue en fonction des facultés de remboursement de l'intimé si la décision était infirmée, mais également de la situation personnelle et financière du débiteur ;

Qu'en outre, le caractère manifestement excessif des conséquences de la décision rendue ne saurait exclusivement résulter de celles inhérentes à la mise à exécution d'une condamnation au paiement d'une somme d'argent ou d'une décision autorisant l'expulsion, mais ces conséquences doivent présenter un caractère disproportionné ou irréversible ;

Attendu qu'il appartient à la société World food's de rapporter la preuve de ces risques occasionnés par l'exécution provisoire ;

Attendu que cette société demanderesse soutient qu'à raison de la signification récente de l'ordonnance de référé dont elle a relevé appel, opérée le 11 mars 2024, elle n'a pas été en possibilité de rechercher un nouveau local et que le paiement de tout son arriéré locatif a été réalisé alors que son dirigeant connaît des difficultés de santé et a subi le décès récent d'un parent proche après une longue maladie, ce qui n'a pas permis de maintenir l'activité normale du restaurant ;

Qu'elle fait état de l'état actuel du marché immobilier et locatif qui ne permet pas de trouver rapidement un local de remplacement, alors que son expulsion la conduirait à un arrêt d'activité et à une procédure collective, provoquant le licenciement de ses salariés ;

Attendu que la SCI Atlas ne fournit aucune explication sur les raisons qui l'ont conduite à faire signifier l'ordonnance de résiliation du bail du 11 septembre 2023 six mois postérieurement, car elle relève n'avoir pas accordé un quelconque échéancier postérieurement au dernier commandement de payer visant la clause résolutoire ;

Attendu que la société World food's produit ses bilans des années 2019 à 2021 qui sont inopérants à faire état de sa situation financière actuelle alors qu'il vient d'être rappelé que la question même des circonstances dans lesquelles elle a cessé de régler à son échéance son loyer courant ne sera examinée que par la cour dans le cadre de l'examen de son appel ;

Attendu que l'absence actuelle d'un arriéré locatif, même si elle est consécutive à des paiements intervenus depuis peu de temps, combinée au caractère récent de la signification de l'ordonnance de référé et du commandement de quitter les lieux, ce dernier ayant été délivré à la même date que cette signification de l'ordonnance, conduit à retenir que le maintien de l'exécution provisoire et l'expulsion de la société World food's est susceptible d'avoir un caractère disproportionné, en ce que la SCI Atlas est maintenant au devant d'une occupation des lieux assumée financièrement par la société World food's ;

Que l'expulsion est susceptible de conduire au licenciement des salariés de l'entreprise et de conduire à un arrêt de l'activité commerciale, alors que la société World food's n'a pas disposé depuis le 11 mars 2024, date à laquelle elle a été indubitablement informée de la résiliation du bail, d'un délai suffisant pour organiser à bref délai un déménagement de ses locaux ; qu'une telle mesure aura des conséquences irréversibles sur la possibilité d'un maintien d'activité ;

Attendu qu'il convient de retenir en l'espèce l'existence d'un risque de conséquences manifestement excessives ;

Attendu qu'en conséquence il est fait droit à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire, en rappelant à titre superfétatoire qu'il appartient à la société World food's de continuer de couvrir ses échéances mensuelles si elle veut espérer obtenir de la cour une suspension des effets de la clause résolutoire ;

Sur la demande subsidiaire de fixation de l'appel par priorité

Attendu que les termes des articles 917 et 918 du Code de procédure civile supposent pour que le premier président envisage une fixation prioritaire de l'examen de l'appel que la partie qui la sollicite caractérise dans sa requête que ses droits sont en péril ;

Attendu qu'en l'état de l'arrêt ordonné de l'exécution provisoire, cette demande subsidiaire n'a pas à être examinée et en tout état de cause, la société World food's ne peut plus invoquer l'existence d'un péril encouru, son maintien dans les lieux jusqu'à l'audience des plaidoiries du 4 mars 2025 étant assuré ;

Que cette demande subsidiaire est rejetée ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Attendu que la société World food's doit garder à sa charge les dépens de la présente instance en référé, car il résulte du décompte produit par la SCI Atlas qu'elle a terminé de couvrir son arriéré locatif par des chèques encaissés à sa demande les 1er mars et 1er avril 2024, ce dernier paiement étant postérieur à son assignation en arrêt de l'exécution provisoire ;

Que l'équité commande en outre de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la bailleresse et la propre demande présentée par la société World food's au titre des frais irrépétibles ne peut prospérer ;

PAR CES MOTIFS

Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance réputée contradictoire,

Vu la déclaration d'appel du 19 mars 2024,

Donnons acte à la S.A.R.L. World food's de son désistement d'instance à l'encontre de la S.A.S. Nexity Lamy,

Ordonnons l'arrêt de l'exécution provisoire attachée de plein droit à l'ordonnance de référé rendue le 11 septembre 2023 par le président du tribunal judiciaire de Lyon,

Rejetons la demande subsidiaire de fixation prioritaire présentée par la S.A.R.L. World food's,

Condamnons la S.A.R.L. World food's aux dépens de ce référé et à verser à la S.C.I. Atlas une indemnité de 800 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Rejetons la demande présentée par la S.A.R.L. World food's au titre des frais irrépétibles.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Jurid. premier président
Numéro d'arrêt : 24/00114
Date de la décision : 24/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-24;24.00114 ?
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