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21/06/2024 | FRANCE | N°24/05047

France | France, Cour d'appel de Lyon, Retentions, 21 juin 2024, 24/05047


N° RG 24/05047 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PXSK



Nom du ressortissant :

[B] [T]





[T]



C/

PREFECTURE DE L'AUBE



COUR D'APPEL DE LYON



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





ORDONNANCE DU 21 JUIN 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers





Nous, Marianne LA MESTA, conseillère à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 4 janvier 2024 pour statuer sur les procé

dures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile,



Assistée de Ynes...

N° RG 24/05047 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PXSK

Nom du ressortissant :

[B] [T]

[T]

C/

PREFECTURE DE L'AUBE

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 21 JUIN 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers

Nous, Marianne LA MESTA, conseillère à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 4 janvier 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile,

Assistée de Ynes LAATER, greffière,

En l'absence du ministère public,

En audience publique du 21 Juin 2024 dans la procédure suivie entre :

APPELANT :

M. [B] [T]

né le 02 Mars 1996 à [Localité 2] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

Actuellement retenu au centre de rétention administrative de Lyon Saint-Exupéry 1

comparant assisté de Maître Morgane MASSOL, avocat au barreau de LYON, commis d'office

ET

INTIME :

M. PREFECTURE DE L'AUBE

non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître Cherryne RENAUD AKNI, avocat au barreau de LYON substituant Me Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON

Avons mis l'affaire en délibéré au 21 Juin 2024 à 19h00 et à cette date et heure prononcé l'ordonnance dont la teneur suit:

FAITS ET PROCÉDURE

Par décision du 20 avril 2024, la préfète de l'Aube a ordonné le placement en rétention de [B] [T] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour l'exécution d'une obligation de quitter le territoire français sans délai assortie d'une interdiction de retour pendant une durée de 2 ans édictée et notifiée le 27 octobre 2023 à l'intéressé par le préfet du Haut-Rhin.

Par ordonnances des 22 avril et 20 mai 2024, dont la seconde a été confirmée en appel le 22 mai 2024, le juge des libertés et de la détention a prolongé la rétention administrative de [B] [T] pour des durées successives de vingt-huit et trente jours.

Suivant requête enregistrée le 18 juin 2024 à 14 heures 40 par le greffe, la préfète de l'Aube a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir ordonner une nouvelle prolongation exceptionnelle de la rétention pour une durée exceptionnelle de quinze jours.

Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon, dans son ordonnance du 19 juin 2024, a déclaré recevable et fait droit à cette requête.

Le conseil de [B] [T] a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration reçue au greffe le 20 juin 2024 à 11 heures 44 en faisant valoir :

- l'irrecevabilité de la requête de la préfète de l'Aube à raison de l'absence dans les pièces jointes de la fiche pénale qu'elle considère comme une pièce utile de nature à établir la menace pour l'ordre public,

- la méconnaissance des dispositions de l'article L. 742-5 du CESEDA dont aucun des critères n'est rempli, en ce que [B] [T] n'a pas fait obstruction à son éloignement et que l'autorité administrative n'établit pas la délivrance à bref délai d'un document de voyage pas plus qu'elle ne démontre qu'il constitue une menace pour l'ordre public.

Le conseil de [B] [T] demande que l'ordonnance déférée soit infirmée, et qu'en conséquence, la requête préfectorale soit déclarée irrecevable ou à tout le moins rejetée, et que l'intéressé soit remis en liberté.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 21 juin 2024 à 10 heures 30.

[B] [T] a comparu, assisté de son avocat.

Le conseil de [B] [T] a été entendu en sa plaidoirie pour soutenir les termes de la requête d'appel.

La préfète de l'Aube, représentée par son conseil, a demandé la confirmation de l'ordonnance déférée.

[B] [T], qui a eu la parole en dernier, indique qu'il a commis des erreurs, mais qu'il a fait sa peine et qu'il n'est plus une menace pour l'ordre public. Il voudrait sortir car cela fait 60 jours qu'il est au centre de rétention sans qu'aucun laissez-passer ne lui ait été délivré.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel du conseil de [B] [T], relevé dans les formes et délais légaux prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), est déclaré recevable.

Sur la recevabilité de la requête de la préfète de l'Aube

Aux termes de l'article R. 743-2 du CESEDA, le préfet doit, à peine d'irrecevabilité, saisir le juge des libertés et de la détention aux fins d'une nouvelle prolongation de la rétention par requête motivée, datée et signée, accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles.

Le conseil de [B] [T] conclut, au visa de ce texte, à l'irrecevabilité de la requête en prolongation de la rétention administrative en estimant qu'elle devait être accompagnée de toutes pièces de nature à établir la menace pour l'ordre public et en particulier la fiche pénale ensuite produite par la préfecture.

Il convient de rappeler que si la loi ne précise pas le contenu de ces pièces justificatives, il est acquis qu'il s'agit de pièces nécessaires à l'appréciation par le juge des libertés et de la détention des éléments de fait et de droit dont l'examen lui permet d'exercer pleinement ses pouvoirs conduisant au contrôle de la légalité de la procédure et du maintien de la rétention administrative.

Le conseil de [B] [T] n'est pas fondé à soutenir de manière générale qu'une catégorie de pièces, en l'espèce celles de nature à appuyer une requête fondée sur une menace pour l'ordre public, puisse être présumée comme constituant une pièce utile au sens du texte susvisé. La grande diversité des pièces susceptibles de venir à l'appui du bien fondé de la requête préfectorale ne permet ainsi pas de procéder ainsi par présomption, alors que seul l'examen des pièces accompagnant cette requête permet de statuer sur ce bien fondé.

La fiche pénale produite devant le premier juge dans le cadre d'un contradictoire non discuté, visait à compléter l'offre de preuve de la préfecture relativement à l'un des moyens qu'elle invoque dans sa requête. Elle ne constituait pas une pièce utile au sens de l'article R. 743-2 du CESEDA et le premier juge s'est contredit en retenant la recevabilité de la requête tout en écartant dans le même temps la pièce régulièrement produite par l'administration.

Dès lors, si le premier juge a retenu à bon droit la recevabilité de la requête en prolongation exceptionnelle présentée par la préfète de l'[Localité 1], il ne pouvait en revanche pas écarter et déclarer irrecevable la fiche pénale produite, une infirmation étant prononcée de ce chef.

Sur le bien-fondé de la requête en prolongation

L'article L. 741-3 du CESEDA énonce qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que le temps strictement nécessaire à son départ et que l'administration doit exercer toute diligence à cet effet.

L'article L. 742-5 du même code dispose que «A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;

2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :

a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;

b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.» 

Le conseil de [B] [T] soutient dans sa requête d'appel que les conditions de ce texte ne sont pas réunies en ce que la situation de l'intéressé ne répond pas aux conditions de la troisième prolongation qui n'a pas commis d'obstruction, tandis que la préfecture n'établit pas la délivrance à bref délai d'un laissez-passer, pas plus qu'elle ne justifie par ses pièces de son passif pénal et donc la menace pour l'ordre public.

En l'espèce, il ressort de la fiche pénale produite par l'autorité administrative que [B] [T] a fait l'objet d'une condamnation très récemment prononcée par le tribunal correctionnel de Mulhouse le 22 novembre 2023 à une peine de 6 mois d'emprisonnement pour des infractions à la législation sur les stupéfiants commises en état de récidive légale. Il doit en outre être relevé que les termes de la décision rendue par le premier président le 22 mai 2024, confirmant la seconde prolongation de la rétention administrative, manifestaient sa pleine connaissance de cette condamnation par les pièces du dossier comportant alors cette fiche pénale comme l'a observé le conseil de la préfecture devant le juge des libertés et de la détention.

Le juge des libertés et de la détention est approuvé par des motifs pertinents qu'il convient d'adopter, en ce qu'il a considéré que cette condamnation récente à la suite d'une réitération d'un comportement délictueux par la commission d'infractions à la législation sur les stupéfiants suffisait à caractériser la menace pour l'ordre public, qui peut à elle-seule conduire à la prolongation exceptionnelle de la rétention administrative.

Les conditions d'une troisième prolongation exceptionnelle au sens des dispositions de l'article L. 742-5 du CESEDA sont donc réunies, ce qui conduit à la confirmation de la décision déférée qui l'a ordonnée, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par [B] [T], étant relevé que les diligences entreprises par l'autorité préfectorale conduisent à retenir qu'il demeure une perspective raisonnable d'éloignement de l'intéressé.

PAR CES MOTIFS

Déclarons recevable l'appel formé par [B] [T],

Confirmons l'ordonnance déférée sauf en ce qu'elle a écarté des débats et déclaré irrecevable la fiche pénale produite par le conseil de la préfète de l'[Localité 1].

Le greffier, Le conseiller délégué,

Ynes LAATER Marianne LA MESTA


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Retentions
Numéro d'arrêt : 24/05047
Date de la décision : 21/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-21;24.05047 ?
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