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20/06/2024 | FRANCE | N°24/05009

France | France, Cour d'appel de Lyon, Retentions, 20 juin 2024, 24/05009


N° RG 24/05009 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PXPZ



Nom du ressortissant :

[O] [X]

PREFETE DU RHÔNE









PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE C/

[X]

PREFETE DU RHÔNE



COUR D'APPEL DE LYON



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





ORDONNANCE SUR APPEL AU FOND

EN DATE DU 20 JUIN 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers







Nous, Isabelle OUDOT, conseillère à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de mad

ame la première présidente de ladite Cour en date du 4 janvier 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de s...

N° RG 24/05009 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PXPZ

Nom du ressortissant :

[O] [X]

PREFETE DU RHÔNE

PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE C/

[X]

PREFETE DU RHÔNE

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE SUR APPEL AU FOND

EN DATE DU 20 JUIN 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers

Nous, Isabelle OUDOT, conseillère à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 4 janvier 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile,

Assistée de Ynes LAATER, greffière

En présence du ministère public, représenté par Jean-Daniel REGNAULT, substitut, près la cour d'appel de Lyon,

En audience publique du 20 Juin 2024 dans la procédure suivie entre :

APPELANT :

Monsieur le Procureur de la République

près le tribunal de judiciaire de Lyon

représenté par le parquet général de Lyon

ET

INTIMES :

M. [O] [X]

né le 28 Mai 1986 à [Localité 3] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne

Actuellement retenu au centre de rétention administrative de [5] 2

Comparant, assisté de Maitre Julie AMBERT MINNI, avocat au barreau de LYON

Mme la PREFETE DU RHÔNE

[Adresse 1]

[Localité 2]

non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître AUGOYARD Marc, avocat au barreau de LYON substituant Me Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON,

Avons mis l'affaire en délibéré au 20 Juin 2024 à 15 h 00 et à cette date et heure prononcé l'ordonnance dont la teneur suit:

SUR CE

FAITS ET PROCÉDURE

Le 24 décembre 2019, une obligation de quitter le territoire français sans délai et avec interdiction de retour pendant 3 ans a été édictée par le préfet de l'Essonne et notifiée le 31 janvier 2020 à [O] [X] alias [O] [T] alias [D] [X] alias [J] [X].

Le 21 août 2022, une obligation de quitter le territoire français sans délai et avec interdiction de retour pendant 24 mois a été notifiée à [O] [X] par le préfet de police.

Le 15 juin 2024 X se disant [O] [T] alias [O] [X] était contrôlé en garde de [4] pour vol de bagages. Le procureur de la République lui faisait notifier une convocation par officier de police judiciaire pour qu'il réponde à l'audience du tribunal judiciaire de Lyon du 15 septembre 2026 des infractions de vol dans un véhicule de transport collectif de voyageurs, rébellion, refus de se soumettre à un prélèvement biologique destiné à permettre l'analyse et l'identification de son empreinte génétique et refus de se livrer aux prises d'empreintes digitales et photographies autorisées par le procureur de la République.

Le 16 juin 2024, l'autorité administrative a ordonné le placement de [O] [X] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire afin de permettre l'exécution de la mesure d'éloignement.

Suivant requête du 17 juin 2024, reçue le jour même à 15 heures, le préfet du Rhône a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir ordonner la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours.

Par conclusions déposées devant le juge des libertés et de la détention l'avocat de [O] [X] a soulevé l'absence de base légale en raison du principe de non-rétroactivité de la loi nouvelle et soutient que l'arrêté de placement doit être déclaré irrégulier.

Dans son ordonnance du 18 juin 2024 à 17 heures, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon a dit que la décision de placement en rétention est irrégulière aux motifs que si l'obligation de quitter le territoire français en date du 21 août 2022 s'impose toujours à l'étranger, même plus d'un an après avoir été prise, il n'en demeure pas moins qu'elle ne saurait plus avoir pour effet de fonder son placement en rétention comme son assignation à résidence en ce que l'entrée en vigueur postérieure de la loi du 26 janvier 2024 ne permet pas de remettre en cause les effets acquis de la situation juridique dans laquelle se trouvait M. [O] [X] depuis le 21 août 2023 et qu'une interprétation différente conduirait à avoir, de facto, un effet rétroactif prohibé par les dispositions de l'article 2 du Code Civil.

Le 18 juin 2024 à 19 H 04 le ministère public a formé appel avec demande d'effet suspensif. Il fait valoir que contrairement à l'argumentaire du premier juge, la mesure d'éloignement prise et notifiée antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 26 janvier 2024 se maintient dans l'ordonnancement juridique après l'expiration du délai d'un an dans la mesure où aucun texte ne prévoit qu'elle serait caduque après cette période, ce dont le juge des libertés et de la détention convient par ailleurs. Par conséquent et en application des articles L. 731-1 et L741-1 du CESEDA, l'autorité administrative était en droit d'envisager le placement en rétention de X se disant [O] [T] alias [O] [X] dans la mesure où celui-ci faisait bien l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise depuis moins de 3 ans sans que l'on ne puisse considérer qu'il y a là application rétroactive de la loi.

Par ordonnance en date du 19 juin 2024 à 15 heures, le délégataire du premier président a déclaré l'appel recevable et suspensif.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 20 juin 2024 à 10 heures 30.

[O] [X] a comparu assisté d'un interprète et de son avocat.

M. l'Avocat Général sollicite l'infirmation de l'ordonnance et reprend les termes des réquisitions du Procureur de la République de Lyon en soutenant que la jurisprudence de la Cour est établie et qu'il doit être fait droit à la requête de la préfecture.

Le préfet du Rhône, représenté par son conseil, s'associe aux réquisitions du Parquet Général et soutient que le juge des libertés et de la détention ne pouvait pas retenir le défaut de base légale alors que l'obligation de quitter le territoire français a été prise moins de 3 ans avant le placement en rétention. L'arrêté est régulier et il doit être fait doit à la requête en prolongation.

Le conseil de [O] [X] a été entendu en sa plaidoirie pour solliciter la confirmation de l'ordonnance déférée. Si l'obligation de quitter le territoire français n'est pas caduque elle ne peut pas produire effet et permettre un placement en rétention, le délai d'un an étant expiré depuis le 21 août 2023.

[O] [X] a eu la parole en dernier. Il explique qu'il s'appelle bien [O] [X] et que s'il n'a pas voulu le dire lors de son audition devant les policiers c'est parce qu'il a subi des violences au moment de son interpellation. Il évoque la vie difficile qu'il a eu et promet qu'il a compris désormais et qu'il quittera le territoire national.

MOTIVATION

Sur le moyen tiré du défaut de base légale de l'arrêté de placement en rétention.

Attendu qu'il résulte de l'article L741-1 dans sa version en vigueur depuis le 28 janvier 2024 que : « l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision. Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente. » ;

Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L731-1 modifié par LOI n°2024-42 du 26 janvier 2024 que l'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans le cas, notamment de l'étranger qui fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins de trois ans auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ;

Attendu que le premier juge a considéré que l'obligation de quitter le territoire français édictée le 21 août 2022 ne permettait pas de fonder la décision de placement en rétention prise le 16 juin 2024 par le préfet du Rhône ;

Attendu que l'expiration du délai d'un an visé par l'article L. 731-1 dans sa version antérieure au 28 janvier 2024 n'a nullement pour effet de rendre caduc l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français qui continue à produire des effets, l'étranger restant d'ailleurs toujours tenu de l'exécuter, ainsi qu'il résulte de l'article L. 711-1 du CESEDA ;

Attendu que les dispositions de la loi du 26 janvier 2024 ont eu pour effet de modifier le délai pendant lequel une exécution d'office pouvait être décidée par l'autorité administrative et que ce délai qui était de un an avant la Loi a été fixé à trois ans ; Que ces dispositions ne sont pas rétroactives, en ce qu'elles ne s'appliquent pas antérieurement à son entrée en vigueur, puisque seule une décision d'assignation à résidence ou de placement en rétention administrative prise postérieurement à la loi nouvelle est susceptible d'avoir pour base légale un arrêté portant obligation de quitter le territoire français pris depuis moins de trois ans ;

Attendu que les dispositions de l'article L 731-1 du CESEDA telles qu'elles résultent de la loi immigration du 26 janvier 2024 sont d'application immédiate ce dont il se déduit qu'une obligation de quitter le territoire français de moins de trois ans au jour de la parution du texte peut fonder une décision de placement en rétention ; Que tel est le cas en l'espèce et que le moyen tiré du défaut de base légale ne pouvait pas prospérer ;

Attendu dés lors et à défaut d'autres moyens soulevés que la décision de placement en rétention est régulière et la décision du premier juge est infirmée ;

Sur la prolongation de la rétention administrative

Attendu que [O] [X] est démuni de tout document de voyage en cours de validité, use de divers alias et que la préfecture justifie avoir saisi les autorités consulaires tunisiennes d'une demande d'identification et de délivrance d'un laissez-passer consulaire ;

Qu'il convient de faire droit à la demande de prolongation de la rétention administrative de [O] [X] qui doit conduire à l'exécution de la mesure d'éloignement de l'intéressé ;

PAR CES MOTIFS

Infirmons en toutes ses dispositions l'ordonnance déférée,

Statuant à nouveau,

Déclarons la procédure de rétention administrative régulière,

Ordonnons la prolongation de la rétention administrative de [O] [X] pour une durée de 28 jours.

Le greffier, Le conseiller délégué,

Ynes LAATER Isabelle OUDOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Retentions
Numéro d'arrêt : 24/05009
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;24.05009 ?
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