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20/06/2024 | FRANCE | N°21/02048

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 20 juin 2024, 21/02048


N° RG 21/02048 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NPCI















Décision du Tribunal Judiciaire de LYON

Au fond du 05 janvier 2021

(4ème chambre)



RG : 19/00247















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 20 Juin 2024







APPELANT :



M. [W] [E]

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 6]r>
[Adresse 3]

[Localité 4]



Représenté par la SCP COTTET-BRETONNIER, NAVARRETE, avocat au barreau de LYON, toque : 2349









INTIMEE :



S.A. GENERALI FRANCE ASSURANCE

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représentée par la SCP AXIOJURIS LEXIENS, avocat au barreau de L...

N° RG 21/02048 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NPCI

Décision du Tribunal Judiciaire de LYON

Au fond du 05 janvier 2021

(4ème chambre)

RG : 19/00247

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 20 Juin 2024

APPELANT :

M. [W] [E]

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par la SCP COTTET-BRETONNIER, NAVARRETE, avocat au barreau de LYON, toque : 2349

INTIMEE :

S.A. GENERALI FRANCE ASSURANCE

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par la SCP AXIOJURIS LEXIENS, avocat au barreau de LYON, toque : 786, avocat postulant

Et ayant pour avocat plaidant L'AARPI VG&B AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de CANNES

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 08 Mars 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 Février 2024

Date de mise à disposition : 20 Juin 2024

Audience présidée par Thierry GAUTHIER, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Séverine POLANO, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Anne WYON, président

- Julien SEITZ, conseiller

- Thierry GAUTHIER, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Le 28 mai 2016, M. [E] a fait l'acquisition d'un bateau, le « Sirtaki », pour la somme de 35'000 euros et pour lequel il a souscrit un contrat d'assurance auprès de la société Generali France Assurance (l'assureur), à effet du 28 mai 2016.

La gestion du bateau a été confiée à la société Mer et passion, puis à la société Sail in Blue.

Le 10 juillet 2016, le bateau a connu une avarie alors qu'il était utilisé par un locataire, M. [B], pour la période du 9 au 13 juillet.

Après deux rapports d'expertises amiables contradictoires, le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan a, par ordonnance du 7 juin 2017, ordonné une expertise judiciaire, confiée à M. [I], qui a déposé son rapport le 22 octobre 2018.

Le 20 décembre 2018, l'assureur ayant refusé sa garantie, M. [E] l'a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Lyon en indemnisation de son préjudice.

Par jugement du 5 janvier 2021, la formation de vue unique du tribunal judiciaire de Lyon a :

- débouté M. [E] de ses prétentions ;

- condamné M. [E] aux dépens ;

- admis les avocats qui en font la demande et qui peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- condamné M. [E] à payer à la société Generali France Assurance la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles de l'instance ;

- rejeté toutes les autres demandes plus amples au contraires formées par les parties.

Par déclaration transmise au greffe le 19 mars 2021, M. [E] a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions, n° 2, déposées le 10 janvier 2022, M. [E] demande à la cour de :

- infirmer, en toutes ses dispositions, la décision attaquée ;

- en conséquence :

- condamner la société Generali France Assurance à garantir les conséquences du sinistre qu'il a subi, comme propriétaire du bateau Sirtaki, au titre de la police d'assurance n° AP549268 ;

- condamner la société Generali France Assurance à lui payer les sommes de ;

- 6 000 euros au titre des frais de réparation du bateau ;

- 10'548,32 euros au titre du préjudice qu'il a subi en raison du retard engendré par le comportement « deshonnête » (sic) de la société Generali France Assurance ;

- 10'000 euros à titre de dommages-intérêts pour cause de résistance abusive ;

- 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Generali France Assurance aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire ;

- en tout état de cause, rejeter l'intégralité des demandes, fins et prétentions formulées par la société Generali France Assurance.

Dans ses conclusions n° 2 déposées le 13 janvier 2022, la société Generali France Assurance demande à la cour de :

- à titre principal, confirmer le jugement ;

- à titre subsidiaire, débouter M. [E] de l'ensemble de ses demandes ;

- en tout état de cause, condamner M. [E] à lui verser la somme de 4 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 8 mars 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se reporter aux conclusions des parties ci-dessus visées, pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la garantie de la société Generali France Assurance

À titre infirmatif, l'appelant soutient que l'assureur ne peut refuser sa garantie en raison du changement de gestionnaire de bateau puisqu'il a accepté tacitement un tel changement. Il indique en effet que, le 27 juin 2017, son bateau a subi une avarie interne qu'il a déclarée à l'assureur et que celui-ci l'a prise en charge, en tenant compte dès lors nécessairement de ce que le gestionnaire de bateaux n'était plus celui qu'il avait initialement déclaré au contrat, soit la société Mer et passions, mais la société Sail in blue. Il considère que de ne pas admettre cette acceptation tacite serait contraire aux principes de loyauté et de bonne foi contractuelle.

Il soutient en outre, au regard de la police d'assurance qu'il a souscrite notamment pour « pertes et avaries, vol total » et de ses conditions générales, qu'il résulte du rapport d'expertise du 22 octobre 2018 que l'avarie est due à une ou plusieurs erreurs de pilotage, ayant détérioré et affaibli la solidité du matériel, et non à la vétusté du bateau comme le soutient l'assureur. Il écarte en conséquence toute absence d'aléa.

Il se prévaut du préjudice chiffré par l'expert à la somme totale de 17'400,16 euros (p.16 des écritures), qui correspond notamment au préjudice de jouissance qu'il a subi à la suite des annulations de contrats, aux refus de location, à la perte de la location de l'emplacement entre le 1er août 2016 et le 15 août 2016 (10 518,32 euros) ainsi qu'aux frais de dépannage et de réparation (6 581,84 euros).

À titre confirmatif, l'assureur fait valoir que le fait d'avoir indemnisé un sinistre postérieur à celui litigieux ne vaut pas renonciation de sa part à l'application des conditions particulières du contrat. Il considère que l'exigence contractuelle imposant à l'assuré de désigner la société gestionnaire du bateau constitue une condition de garantie qui, lorsqu'elle n'est pas réalisée, exclut toute prise en charge du sinistre.

Il souligne que la société gestionnaire désignée dans le contrat était la société Mer et passion alors que, le jour du sinistre, c'est la société Sail in blue qui a été désignée comme gestionnaire, ces deux entreprises étant complètement indépendantes juridiquement l'une de l'autre. Il indique que le changement de société gestionnaire serait intervenu deux mois et demi après la souscription du contrat et que l'assuré ne peut prétendre avoir oublié en si peu de temps son engagement de notifier à l'assureur tout changement sur ce point.

Il précise que la société Sail in blue n'existe plus depuis le 16 juin 2018 et que, dans ces conditions, elle ignore l'identité de la société actuellement gestionnaire du bateau.

Subsidiairement, il soutient, au regard des dispositions de l'article 1108 du code civil, que le contrat d'assurance ne peut produire des effets, en raison de l'absence d'aléa résultant de l'avarie invoquée par l'assuré.

Il indique que le locataire du bateau a été formel dans ses déclarations et a démenti tout choc lors de la navigation et que l'expert judiciaire a considéré que le dommage résultait de l'accumulation de forces appliquées successivement, ce qui exclut l'existence d'un événement précis unique et accidentel durant l'utilisation du bateau, qui a eu raison de la solidité de la « matière constituante » et qui n'était pas décelable. Il tire également argument de ce que la remise en état du bateau a consisté dans le remplacement de la platine avec conservation de l'embase pour un montant de 5 424,48 euros TTC. Il conteste ainsi tout caractère accidentel au dommage.

Il soutient par ailleurs que la perte de jouissance est exclue conventionnellement des garanties, en page 8 des conditions générales.

Sur ce,

Selon l'article 1134 alinéa 1er, devenu 1103, du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qu'ils ont faits.

En l'espèce, selon la page 4 des conditions particulières du contrat d'assurance souscrit entre les parties (pièce n° 1 de l'intimée) il est prévu que « le contrat produit ses effets exclusivement si le bateau est géré par la personne ou la société mentionnée aux dispositions particulières.

Le souscripteur du contrat s'engage à déclarer tout changement de gestionnaire du bateau. L'assureur se réserve le droit d'accepter ou non ce changement, en cas de refus assureur, le souscripteur à la faculté de résilier le contrat. »

De ce même document (p. 2) ressort que M. [E] a déclaré comme gestionnaire du bateau la société Mer et Passions.

M. [E] demande la prise en charge du sinistre survenu le 10 juillet 2016 alors qu'il est constant qu'il avait alors changé de société gestionnaire du bateau, qui était devenue la société Sail in blue et, ce, sans le déclarer à l'assureur.

A l'examen de l'extrait Kbis de ces deux sociétés (pièces n° 2 et 3 de l'intimée), ces sociétés sont bien distinctes.

Contrairement à ce que fait valoir l'appelant, les deux sociétés gestionnaires ne peuvent être considérées comme les mêmes au motif qu'elles auraient le même représentant légal, ce qui serait contraire au principe de l'autonomie juridique des personnes morales.

En outre, il sera souligné que les conditions particulières du contrat prévoient que l'assureur se réserve le droit d'accepter ou non tout changement de société gestionnaire. En effet, même dirigées par la même personne, les deux sociétés gestionnaires peuvent présenter des caractéristiques économiques, juridiques ou de gestion différentes qui peuvent influer sur l'appréciation du risque par l'assureur.

C'est ainsi de manière inopérante que l'appelant soutient qu'une telle absence de changement ne ferait pas grief à l'assureur, étant en outre précisé que cette affirmation est purement péremptoire.

Ainsi, il ne peut qu'être constaté que M. [E] n'a pas respecté ses obligations contractuelles en ne déclarant pas à son assureur le changement de société gestionnaire de son bateau.

L'assuré se prévaut d'une acceptation tacite de changement de société gestionnaire.

Il invoque à cette fin la prise en charge par l'assureur d'un sinistre survenu le 27 juin 2017, soit postérieurement au premier.

Pour en justifier, il s'appuie sur la reproduction d'un courriel du 26 juillet 2017 (sa pièce n° 28) adressé par le représentant de l'assureur dans lequel celui-ci informait l'assuré de la prise en charge du sinistre et du montant de son indemnisation. Ce message est communiqué en copie à une adresse courriel qui concerne, explicitement, la société Sail in blue.

L'assuré en déduit que l'assureur a alors considéré que les conditions de garanties étaient réunies et, dès lors, que l'assuré n'avait pas méconnu ses obligations.

Cependant, le respect par les parties des obligations conventionnelles qu'elles ont souscrites doit être apprécié au moment du fait litigieux invoqué à titre de manquement contractuel.

A cet égard étant rappelé que la déclaration de sinistre litigieuse a été effectuée le 12 juillet 2016 et que deux expertises amiables ont été réalisées les 31 octobre 2016 et 1er février 2017 (pièces n° 5 et 6 de l'assureur), il sera relevé que le refus de prise en charge du sinistre par l'assureur - même si aucun document n'est versé sur ce point par les parties - est nécessairement antérieur à l'ordonnance de référé ayant prescrit une expertise judiciaire (7 juin 2017), qui résultait du litige né entre les parties concernant la mise en 'uvre des garanties contractuelles.

En conséquence, le refus de prise en charge litigieux est antérieur à l'acceptation de prise en charge du sinistre survenu le 27 juin 2017.

S'il résulte effectivement de l'indemnisation du sinistre de 2017 que l'assureur n'a pas relevé le changement, non déclaré, de sociétés gestionnaire, il ne saurait en être déduit que l'acceptation implicite qui en découle puisse porter effet rétroactivement. Cette prise en charge du sinistre par l'assureur ne saurait ainsi avoir d'influence sur les conditions de prise en charge du sinistre litigieux, survenu le 12 juillet 2016.

Au demeurant, l'appelant ne justifie en aucune manière d'avoir régularisé la désignation de la société gestionnaire. Ainsi, en l'état du dossier, si l'assureur a pris en charge le sinistre du 27 juin 2017 en l'absence de cette régularisation - ce qui aurait pu justifier son refus - l'appelant, qui a manqué ses obligations contractuelles, est donc particulièrement malvenu à invoquer un manquement à la loyauté ou à la bonne foi de l'assureur.

Il ne peut, dès lors, qu'être retenu que les conditions de la garantie contractuelle n'étaient pas remplies, concernant le sinistre litigieux, puisque l'assuré n'avait pas déclaré, comme il le devait, le changement de société gestionnaire du bateau.

Dès lors, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les autres demandes

Au vu de ce qui précède, la demande au titre de la résistance abusive présentée par l'appelant ne peut être considérée comme fondée et elle sera rejetée.

Pa ailleurs, l'équité commande de condamner l'appelant à payer à l'intimée la somme de

4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y AJOUTANT,

Condamne M. [E] à supporter les dépens d'appel ;

Condamne M. [E] à payer à la société Generali France Assurance la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et rejette sa demande au titre des frais irrépétibles ;

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 21/02048
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;21.02048 ?
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