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19/06/2024 | FRANCE | N°21/01840

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 19 juin 2024, 21/01840


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR



N° RG 21/01840 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NOSR



[M]

C/

Société LCL LE CREDIT LYONNAIS



APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 18 Février 2021

RG : F 19/01273





COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 19 JUIN 2024







APPELANTE :



[T] [M]

née le 24 Janvier 1955

[Adresse 1]

[Localité 4]



rep

résentée par M. [H] [S], défenseur syndical







INTIMÉE :



Société LCL LE CREDIT LYONNAIS

[Adresse 2]

[Localité 3]



représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Nic...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 21/01840 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NOSR

[M]

C/

Société LCL LE CREDIT LYONNAIS

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 18 Février 2021

RG : F 19/01273

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 19 JUIN 2024

APPELANTE :

[T] [M]

née le 24 Janvier 1955

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par M. [H] [S], défenseur syndical

INTIMÉE :

Société LCL LE CREDIT LYONNAIS

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Nicolas DURAND GASSELIN de la SCP TNDA, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 Mars 2024

Présidée par Catherine MAILHES, Présidente magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Catherine MAILHES, présidente

- Nathalie ROCCI, conseillère

- Anne BRUNNER, conseillère

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 19 Juin 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine MAILHES, Présidente et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Mme [M] (la salariée) a été engagée le 1er avril 1973 par la société Le crédit lyonnais (LCL - la société) et occupait, au dernier état de la relation contractuelle, le poste de logisticien de proximité, statut cadre, niveau H de la convention collective de la banque.

La société employait habituellement au moins 11 salariés au moment de son départ de l'entreprise.

La médaille d'honneur du travail, créée par décret du 15 mai 1948 est attribuée, depuis un décret du 17 octobre 2000 aux salariés en fonction de leurs années de service ; la médaille argent s'obtient au bout de 20 années, la médaille Vermeil au bout de 30 années, la médaille Or au bout de 35 années et la médaille Grand Or au bout de 40 années.

Jusqu'au 30 avril 2011, ces médailles permettaient aux salariés du LCL l'obtention d'une gratification, laquelle était versée après 25 ans de service pour la médaille Argent, 35 ans de service pour la médaille Vermeil, 43 ans de service pour la médaille Or, et de 48 ans de service pour la médaille Grand Or.

La salariée a obtenu les diplômes de médaille d'honneur du travail :

- « échelon or » le 31 décembre 2008,

- « échelon grand or » le 31 décembre 2013.

Le 24 janvier 2011, un accord salarial a été signé entre la société LCL et deux organisations syndicales, lequel a modifié les conditions de versement des gratifications liées à l'obtention d'une médaille du travail et prévoit désormais le paiement d'une gratification concomitamment à l'obtention d'une médaille du travail.

Le 31 mars 2015, Mme [M] a quitté les effectifs de la société LCL.

Le 9 mai 2019, Mme [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins de voir la société condamnée à lui verser des dommages et intérêts pour discrimination à l'âge (2 000 euros), une somme au titre de la gratification liée à l'obtention de la médaille du travail échelon or (2.679,58 euros).

La société LCL a été convoquée devant le bureau de conciliation et d'orientation par courrier recommandé avec accusé de réception envoyé le 10 mai 2019.

La société Le crédit lyonnais s'est opposée aux demandes du salarié et a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de celui-ci au versement de la somme de 1 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 18 février 2021, le conseil de prud'hommes de Lyon a :

dit que les demandes de Mme [M] sont irrecevables car prescrites ;

en conséquence,

débouté Mme [M] de l'ensemble de ses demandes ;

débouté la société Le crédit lyonnais de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné Mme [M] aux entiers dépens de l'instance.

Mme [M] a interjeté appel de ce jugement le 11 mars 2021, en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes de versement de gratification liée à l'obtention de la médaille du travail échelon or en application des dispositions de l'article 6 de l'accord salarial du 24 janvier 2011, de sa demande de dommages et intérêts pour discrimination à l'âge ayant entraîné un préjudice financier et moral et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe de la cour le 13 février 2024, Mme [M] représentée par M. [S], défenseur syndical, demande à la cour de :

constater que la société LCL (Le crédit lyonnais) a violé l'ensemble des dispositions des articles L. 1132-1, L. 1133-1, L. 1133-2 et L. 3221-3 du code du travail ;

en conséquence,

infirmer la décision rendue par le conseil de prud'hommes de Lyon en date du 18 février 2021 ;

condamner la société LCL à lui verser la somme de 2 679,58 euros correspondant à un treizième de la rémunération brute annuelle, au motif que la différence de traitement dont la demanderesse fait l'objet pour l'obtention de la gratification liée à l'obtention du diplôme de la médaille du travail 'échelon or' entraîne une discrimination liée à l'âge, la demanderesse doit bénéficier des mesures fixées par les dispositions de l'article 6 de l'accord salarial du 24 janvier 2011, en vertu des dispositions de l'article L. 1134-5 du code du travail et de l'article 2224 du code civil ;

condamner la société LCL à lui verser la somme de 2 000 euros de dommages et intérêts pour discrimination liée à l'âge de la demanderesse, en vertu des arrêts rendus par la cour de cassation le 1er février 2017, le 5 mai 2017, le 17 janvier 2018, 17 octobre 2018, le 30 janvier 2019, le 9 octobre 2019, ayant entraîné un préjudice financier et moral lié au fait que Mme [M] aurait dû percevoir cette gratification depuis mai 2011 soit depuis près de 9 ans ;

assortir cette condamnation des intérêts au taux légal à compter de la réception de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes de Lyon par la partie défenderesse ;

condamner la société LCL à lui verser la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société LCL aux entiers dépens de l'instance ;

ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Selon les dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 5 février 2024, la société Le crédit lyonnais demande à la cour de :

à titre principal,

juger que la déclaration d'appel de Mme [M] à l'encontre du jugement du 18 février 2021 ne critique aucun chef du jugement ;

en conséquence,

juger que l'effet dévolutif n'opère pas ;

juger que la cour d'appel n'est donc pas saisie ;

confirmer le jugement dont appel en ce que le conseil de prud'hommes de Lyon a :

« Dit et juge que les demandes de Madame [T] [M] sont irrecevables car prescrites,

Déboute Mme [M] de l'ensemble de ses demandes » ;

débouter Madame [T] [M] de l'ensemble de ses demandes

en tout état de cause,

confirmer le jugement dont appel,

déclarer Mme [M] irrecevable en ses demandes ;

débouter Mme [M] de l'ensemble de ses demandes et notamment du paiement de la gratification liée à l'obtention de la « médaille du travail » et de dommages et intérêts ;

débouter Mme [M] de ses demandes d'exécution provisoire, de paiement d'intérêts légaux et d'anatocisme ;

à titre reconventionnel,

condamner Mme [M] à verser à la société Le crédit lyonnais la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner aux éventuels dépens.

La clôture des débats a été ordonnée le 29 février 2024 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 18 mars 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, sur l'effet dévolutif de l'appel

La société fait valoir que la déclaration d'appel de Mme [M] ne critique pas les chefs de jugement relatifs à la 'prescription' et à l''irrecevabilité' des demandes, que l'appelante a uniquement listé ses demandes sans mentionner expressément les chefs de jugement qu'elle entendait critiquer, de sorte qu'en application des articles 562 et 901 du code de procédure civile, la déclaration d'appel n'emporte pas saisine de la cour et que les demandes de Mme [M] sont irrecevables.

Aux termes de l'article 901 du code de procédure civile, la déclaration d'appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par l'article 57, et à peine de nullité [']

2° L'indication de la décision attaquée ;

3° L'indication de la cour devant laquelle l'appel est porté ;

4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. [']

Aux termes de l'article 562 du code de procédure civile, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

En l'espèce, le conseil de prud'hommes, saisi d'une demande de dommages-intérêts pour discrimination liée à l'âge et d'une demande de versement de la gratification liée à l'obtention de la médaille du travail échelon 'or', a débouté la salariée de l'ensemble de ses demandes.

Cette dernière a fait appel du jugement en ce qu'il l'a débouté 'de sa demande de versement de la gratification liée à l'obtention de la médaille du travail 'Or' en application des dispositions de l'article 6 de l'accord salarial du 24 janvier 2011, de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination à l'âge ayant entraîné un préjudice financier et moral, de sa demande de 1 000 euros au titre de l'article 700".

La cour est donc saisie de l'entier litige, tant quant à la recevabilité qu'au bien-fondé de ses demandes.

Sur la prescription

La salariée fait grief au jugement de déclarer prescrite son action en faisant valoir que :

- si elle avait réuni 35 années de service entre le 1er mai et le 31 décembre 2010, elle aurait bénéficié de la prime liée à l'obtention du diplôme de la médaille du travail 'échelon or' ;

- elle n'a pas bénéficié de cette gratification bien qu'elle ait fourni le diplôme qu'elle a obtenu le 31 décembre 2008 ;

- en application de l'article L.1134-5 du Code du travail, l'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination, et la discrimination dont elle a été victime a été révélée par un arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation en date du 1er février 2017 ;

- la dernière mise à jour des accords collectifs d'août 2012, affichée sur les lieux de travail, ne mentionne pas l'accord du 24 janvier 2011, de sorte qu'il n'a pas été communiqué aux salariés avant janvier 2014 ; en outre, la société LCL ne justifie pas de la date précise à laquelle elle aurait eu connaissance de l'accord litigieux et que l'extrait intranet communiqué par la partie adverse n'est pas daté.

La société soutient que :

- la demande de Mme [M] tendant au paiement d'une gratification liée à l'obtention de la médaille d'honneur du travail " échelon or " est prescrite, la salariée ayant obtenu ses 35 années de service en février 2009 et le nouveau dispositif étant entré en vigueur le 1er mai 2011,

- en application de la prescription biennale prévue par l'article L.1471-1 du code du travail, dans sa version applicable au moment de sa saisine du conseil de prud'hommes, toutes les demandes de Mme [M] sont prescrites et donc irrecevables, cette dernière ayant saisi le conseil de prud'hommes le 9 mai 2019,

- à titre subsidiaire, la demande de la salariée est également prescrite au regard de la prescription triennale prévue par l'article L.3245-1 du code du travail relatif aux créances salariales, antérieures au 9 mai 2016 ;

- à titre plus subsidiaire, si la cour devait retenir la prescription quinquennale de l'article L.1134-5 du code du travail, les demandes de Mme [M] sont également irrecevables, le point de départ du délai de prescription devant être fixé au plus tard le 1er mai 2011, correspondant à la date à laquelle le nouvel accord est entré en vigueur ; la salariée avait connaissance des faits permettant d'exercer son action dès l'entrée en vigueur du nouvel accord le 1er mai 2011, ce d'autant que les organisations syndicales CGT et FO avaient largement communiqué sur l'entrée en vigueur du nouveau dispositif et son caractère discriminatoire et que de nombreux salariés avaient saisi les juridictions prud'homales dès 2012.

***

Aux termes de l'article L.1134-5 alinéa 1 du code du travail, l'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination.

Il convient de prendre en compte non seulement la date à laquelle la salariée a connaissance des agissements constitutifs selon elle de discrimination mais également la poursuite des effets de ces agissements.

Auxbtermes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Aux termes de l'article R.2262-1 du code du travail, il est prévu que :

A défaut d'autres modalités prévues par une convention ou un accord conclu en application de l'article L. 2262-5, l'employeur :

1° Donne au salarié au moment de l'embauche une notice l'informant des textes conventionnels applicables dans l'entreprise ou l'établissement ;

2° Tient un exemplaire à jour de ces textes à la disposition des salariés sur le lieu de travail ;

3° Met sur l'intranet, dans les entreprises dotées de ce dernier, un exemplaire à jour des textes.

La salariée fondant son action sur l'article L.1132-1 du code du travail, les dispositions de l'article L.1134-5 trouvent à s'appliquer de sorte que son action doit être exercée dans le délai de 5 ans à compter de la révélation de la discrimination.

A l'issue de la négociation annuelle obligatoire pour l'année 2010, un accord salarial a été signé le 24 janvier 2011, applicable au 1er mai 2011, entre la société LCL et deux organisations syndicales, la CFDT et le SNB, prévoyant de nouvelles modalités d'attribution de la gratification liée à l'obtention de la médaille du travail, les modifications portant notamment sur le moment du versement de la gratification, en l'alignant sur le calendrier d'obtention de la médaille d'Etat.

L'article 6-1 de l'accord collectif mentionne que 'les nouvelles dispositions se substituent à leur date d'entrée en vigueur, à toutes dispositions résultant d'accord collectif ou de tous autres types d'accord, de décisions unilatérales, de pratiques ou usage applicables aux collaborateurs de LCL en matière de gratification liée à l'obtention de la médaille du travail (médaille d'honneur de l'Etat). Il est toutefois convenu entre les parties qu'un collaborateur pourra demander à bénéficier d'une gratification en application du nouveau dispositif si le nombre d'années de service correspondant à la médaille d'honneur du travail d'Etat demandée est acquis à compter du 1er janvier 2011. "

L'accord collectif prévoyait des dispositions transitoires, destinées aux salariés susceptibles de bénéficier en 2011 ou dans les 4 années suivantes, d'une gratification liée à une médaille du travail obtenue au cours des années précédentes et ne pourront toutefois pas en bénéficier dans les mêmes délais dans le cadre du nouveau dispositif.

Ces dispositions transitoires, sont les suivantes " sous réserve de la transmission du diplôme de médaille d'honneur du travail d'Etat correspondant, les salariés qui, en application du nouveau dispositif et à la date d'entrée en vigueur de ce dernier :

- auraient dû percevoir une gratification au cours des 5 années précédentes,

ET

- ne percevront aucune gratification au cours des 5 prochaines années,

bénéficieront du versement d'une gratification médaille d'honneur du travail d'Etat sur la base du montant prévu conformément au présent accord sous réserve qu'ils ne perçoivent pas une gratification en application de l'ancien ou du nouveau dispositif au titre de la même médaille d'honneur du travail d'Etat.

En tout état de cause, un collaborateur ne pourra percevoir en 2011 plus d'une gratification liée à une médaille d'honneur du travail d'Etat ".

La société LCL verse aux débats une note de la direction des ressources humaines, relative à l'accord salarial, datée du mois de février 2011, qui détaille le nouveau dispositif et les dispositions transitoires et annonce un aménagement complémentaire pour les salariés ayant acquis les 30 et 35 années de service entre le 1er mai 2010 et le 31 décembre 2010, qui peuvent bénéficier du dispositif transitoire s'ils produisent leur diplôme avant le 1er mai 2011.

Un tableau récapitulatif est annexé à cette note.

Ce tableau récapitulatif distingue les salariés qui ont acquis les années de service entre le 1er janvier 2011 et le 1er mai 2011 de ceux ayant acquis les années de service à compter du 1er mai 2011.

L'ancienneté du salarié à la date d'entrée en vigueur de l'accord salarial détermine l'obtention de la gratification liée à l'attribution de la médaille du travail.

L'accord était applicable le 1er mai 2011 et la salariée soutient qu'il instaure une discrimination liée à l'âge, dès lors d'une part que les salariés qui ont plus de 30 ans d'ancienneté au début de l'année 2011 et donc âgés au moins de 48 ans ne vont plus percevoir les gratifications supérieures à un mois de salaire qui étaient prévues et vont être exclus de gratification pour une médaille et d'autre part que les dispositions transitoires créent une différence entre les salariés ayant mois de 30 ans d'ancienneté et ceux ayant plus de 30 ans d'ancienneté.

Il apparaît, à la lecture de cet accord, de la note d'application et de ses annexes que Mme [M], qui a obtenu ses 35 ans de service en 2008, qui aurait dû percevoir la gratification correspondante en 2016 (au bout de 43 ans), selon le dispositif antérieur à l'accord du 24 janvier 2011, et qui a obtenu la médaille 'échelon grand or' au terme de 40 années de service le 12 juillet 2013 et simultanément, la gratification correspondante, conformément à l'application du nouveau dispositif, ne pouvait ignorer qu'elle n'était pas éligible au versement de la gratification afférente à la médaille d'honneur 'échelon or' selon le nouveau dispositif.

La société LCL verse aux débats une capture d'écran de son site intranet, consacré aux médailles du travail, en date du 13 juillet 2012, qui mentionne que 'les conditions et modalités de versement d'une gratification par LCL, liées à l'obtention de la médaille d'honneur d'Etat ont été modifiées par l'accord salarial 2011 du 24 janvier 2011. Ces nouvelles dispositions sont applicables à compter du 1er mai 2011."

Les conditions d'obtention de la gratification sont ensuite détaillées et un exemple est donné 'si, au 1er juillet de l'année N, vous atteignez le nombre d'années de service requis pour bénéficier de la médaille échelon Or (35 ans), vous ne percevrez la gratification correspondante que si vous présentez la copie de votre diplôme avant la fin du mois de juin de l'année N+1.'

Il en ressort clairement que l'année d'obtention du diplôme et celle de la gratification coïncident.

La société LCL verse une autre capture d'écran de son site intranet, certes non datée, mais dont il ressort que l'accord salarial du 24 janvier 2011, avec la précision qu'il porte sur la médaille du travail, a été mis en ligne.

L'arrêt, rendu le 1er février 2017, par la chambre sociale de la Cour de Cassation, n'a pas fait naître de droits pour la salariée.

La non éligibilité aux dispositions transitoires permettant le versement d'une gratification, en application de l'accord salarial du 24 janvier 2011, est un fait ponctuel qui a épuisé ses effets au 1er mai 2011, date d'entrée en vigueur de l'accord.

Il s'en déduit que la salariée aurait dû connaître les faits permettant d'exercer son action, à l'entrée en vigueur, le 1er mai 2011, de l'accord salarial, portant sur la médaille du travail, du 24 janvier 2011.

L'action, engagée le 9 mai 2019, est donc prescrite par l'effet de la prescription quinquennale.

Le jugement entrepris sera confirmé par substitution de motifs en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes de Mme [M] et infirmé en ce qu'il a débouté la salariée de ses demandes.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Mme [M] succombant sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel. Elle sera déboutée de toute demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité ne commande pas de faire bénéficier la société LCL de ces mêmes dispositions et elle sera donc déboutée de sa demande d'indemnité à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Dans la limite de la dévolution

INFIRME le jugement en ce qu'il a débouté Mme [M] de ses demandes,

CONFIRME le jugement en ce qu'il a dit prescrites les demandes de Mme [M] et sur le surplus ;

Y ajoutant,

REJETTE la demande de la société LCL au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 21/01840
Date de la décision : 19/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-19;21.01840 ?
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