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12/06/2024 | FRANCE | N°24/04784

France | France, Cour d'appel de Lyon, Retentions, 12 juin 2024, 24/04784


R.G : N° RG 24/04784 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PW6E



Nom du ressortissant :

[V] [R]









[R]

C/

PREFET DE L' AIN



COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT





ORDONNANCE DU 12 JUIN 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers







Nous, Isabelle OUDOT, conseiller à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 04 janvier 2024 pour statuer sur les p

rocédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile



Assistée de Cél...

R.G : N° RG 24/04784 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PW6E

Nom du ressortissant :

[V] [R]

[R]

C/

PREFET DE L' AIN

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DU 12 JUIN 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers

Nous, Isabelle OUDOT, conseiller à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 04 janvier 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile

Assistée de Céline DESPLANCHES, greffier,

En l'absence du ministère public,

En audience publique du 12 Juin 2024 dans la procédure suivie entre :

APPELANT :

M. [V] [R]

né le 02 Août 1987 à [Localité 6]

de nationalité Algérienne

Actuellement retenu au CRA [3],

Comparant assisté de Maitre NICOLAS Etienne, avocats au barreau de LYON, commis d'office

ET

INTIME :

M. PREFET DE L' AIN

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Maitre Léa DAUBIGNEY, avocat au barreau de L'AIN substituant Me Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON

Avons mis l'affaire en délibéré au 12 Juin 2024 à 15h00 et à cette date et heure prononcé l'ordonnance dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Le 30 mai 2022, une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et assortie d'une interdiction de retour pendant 3 ans a été notifiée à [V] [R] par le préfet de la Haute-Savoie.

Le 18 mars 2024, une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et assortie d'une interdiction de retour pendant 3 ans a été notifiée à [V] [R] par le préfet de l'Ain.

Un recours serait actuellement pendant devant le tribunal administratif.

Le 08 juin 2024, l'autorité administrative a ordonné le placement de [V] [R] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire afin de permettre l'exécution de la mesure d'éloignement.

Suivant requête du 08 juin 2024, réceptionnée par le greffe du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon le jour même à 16 heures 44, [V] [R] a contesté la décision de placement en rétention administrative prise par le préfet de l'Ain.

Suivant requête du 09 juin 2024, reçue le jour même à 15 heures 01, le préfet de l'Ain a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir ordonner la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours.

Dans son ordonnance du 10 juin 2024 à 12 heures 19, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon a ordonné la jonction des deux procédures, déclaré régulière la décision de placement en rétention et ordonné la prolongation de la rétention de [V] [R] dans les locaux du centre de rétention administrative de [4] pour une durée de vingt-huit jours.

Le 10 juin 2024 à 21 heures 47, [V] [R] a interjeté appel de cette ordonnance dont il demande l'infirmation et sollicite sa mise en liberté.

Il fait valoir que la décision de placement en rétention est irrégulière pour être dépourvue d'examen sérieux de son état de vulnérabilité. Il soutient également que la prolongation de la rétention n'est pas possible au regard de l'atteinte portée au droit d'être examinée par un médecin en application des dispositions des articles L744-4 et R 744-18 du CESEDA.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 12 juin 2024 à 10 heures 30.

Sur demande du conseiller délégué l'avocat de la préfecture a transmis par courriel du 11 juin 2024 régulièrement communiqué à l'ensemble des parties un certificat médical en date du 10 juin 2024.

Par mail reçu ce jour régulièrement communiqué à l'ensemble des parties, le conseil de [V] [R] a transmis le triplicata d'un certificat médical et un justificatif d'assurance du logement d'Oxyonnax par M. [C].

[V] [R] a comparu et a été assisté d'un interprète et de son avocat.

Le conseil de [V] [R] a été entendu en sa plaidoirie pour soutenir les termes de la requête d'appel. Au regard du certificat médical produit il se désiste du moyen tiré du défaut d'accès au médecin. Il maintient que l'arrêté de placement est irrégulier pour une motivation ne prenant pas en compte l'état de vulnérabilté de l'intéressé.

Le préfet de l'Ain, représenté par son conseil, a demandé la confirmation de l'ordonnance déférée. Elle précise que l'arrêté est suffisamment motivé et que si l'intéressé souffre de problèmes psychiatriques son état n'est pas incompatible avec la rétention.

[V] [R] a eu la parole en dernier. Il explique qu'en prison il y avait un psychiatre alors qu'il n'y en a pas au centre de rétention. Il a vu le médecin qui lui a donné son traitement mais criant de retourner en Algérie où il a été attaché pendant 6 mois, le service de psychiatrie là-bas n'étant pas pareil qu'en France. Il a fait des études, payé ses bêtises et aspire à sortir du centre.

MOTIVATION

Sur la procédure et la recevabilité de l'appel

Attendu que l'appel de [V] [R], relevé dans les formes et délais légaux est recevable ; 

Sur le moyen tiré de l'atteinte aux droit pour défaut d'accès au médecin

Attendu que l'avocat de M. [R] se désiste de ce moyen devant le délégué du premier président au regard du certificat médical transmis qui atteste que l'intéressé a été vu par un médecin ;

Sur le moyen pris du défaut d'examen de la situation individuelle de la personne retenue en ce qui concerne sa vulnérabilité.

Attendu qu'il résulte de l'article L. 741-6 du CESEDA que la décision de placement est écrite et motivée ;

Attendu que l'article L. 741-1 du CESEDA dispose que «L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente.» ;

Que l'article L. 741-4 ajoute que «La décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger.

Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention.»

Que cette motivation se doit de retracer les motifs positifs de fait et de droit qui ont guidé l'administration pour prendre sa décision, ce qui signifie que l'autorité administrative n'a pas à énoncer, puis à expliquer pourquoi elle a écarté les éléments favorables à une autre solution que la privation de liberté ;

Que pour autant, l'arrêté doit expliciter la raison ou les raisons pour lesquelles la personne a été placée en rétention au regard d'éléments factuels pertinents liés à la situation individuelle et personnelle de l'intéressé, et ce au jour où l'autorité administrative prend sa décision, sans avoir à relater avec exhaustivité l'intégralité des allégations de la personne concernée ;

Attendu que le conseil de [V] [R] prétend que l'arrêté de placement en rétention du préfet de l'Ain ne révèle pas un examen sérieux puisque la préfecture ne prend pas en considération la pathologie psychiatrique dont il souffre et que le juge des libertés et de la détention a commis une erreur de droit ne retenant que la décision de placement était motivée sur son état de vulnérabilité ;

Attendu qu'en l'espèce, l'arrêté du préfet de l'Ain est motivé, notamment, par les éléments suivants :

« Vu le procès-verbal d'audition du 9 janvier 2024

Vu l'avis du collège des médecins de l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration (OFII) du 6 mars 2024

Vu les formulaires de vulnérabilité du 9 janvier 2024 et du 8 juin 2024

Considérant ce qui suit :

M. [V] [R] ressortissant algérien né le 2 août 1987 à [Localité 6] (Algérie), actuellement incarcéré au centre pénitentiaire de [Localité 1], a été condamné à une peine de 15 mois d'emprisonnement pour des faits de violence aggravée par trois circonstances, violence avec usage ou menace d'une arme et violence aggravée par deux circonstances. Il est l'objet de la mesure d'éloignement susvisée du 18 mars 2024 décision en cours de jugement devant le tribunal administratif de Lyon. Sa levée d'écrou est intervenue le 8 juin 2024.

Il ressort des éléments du dossier que l'intéressé est défavorablement connu des services de police et de justice pour les faits susmentionnés, et pour des faits de port d'arme blanche de catégorie D usage de stupéfiant, dégradation ou détérioration du bien d'autrui, vol à la roulotte utilisation frauduleuse d'une carte bancaire votée, délits routiers, refus d'obtempérer à une sommation de s'arrêter, conduite sous l'empire d'un état alcoolique, vol à l'étalage et vol simple. Il a également fait l'objet de deux précédentes incarcérations en 2020 et 2022. En raison des faits mentionnés, M. [R] constitue donc une menace grave et actuelle à l'ordre public.

Par ailleurs, si M. [R] allègue d'une résidence à [Localité 5], il est dépourvu de document d'identité et est sans ressources légales. De plus, M. [R] s'est soustrait à deux précédentes mesures d'éloignement prises à son encontre les 16 août 2020 et 30 mai 2022 et n'a pas respecté les modalités de l'assignation à résidence prononcée par le préfet de la Haute-Savoie le 15 mars 2023, carence établie le 11 avril suivant. Au surplus s'il a déclaré lors de son audition " vouloir rentrer en Algérie à l'issue de ses soins et de ses chantiers en cours ", il convient de rappeler qu'il n'a pas déféré aux précédentes décisions déjà mentionnées. Il présente dès lors un risque de soustraction avéré à la mesure d'éloignement dont il fait l'objet au sens de l'article L. 612-3 du Code de t'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et ne justifie pas de garanties de représentation propres à prévenir du risque de soustraction à la mesure d'éloignement dont il est l'objet.

Enfin, si M. [R], indique avoir des problèmes psychiatriques et suivre un traitement, l'avis du collège des médecins de l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration (OFI]) du 6 mars 2024 atteste que les traitements appropriés sont disponibles en Algérie et que l'intéressé peut y voyager sans risque. De plus, il ne fait état d'aucun élément probant laissant présumer que son état de santé, qui n'était pas incompatible avec son incarcération, ferait obstacle à son placement en centre de rétention où il pourra au besoin être visité par un médecin et accéder aux traitements dont il pourrait avoir besoin. »

Attendu que contrairement à ce qui est soutenu, la simple lecture de la décision établit que la préfecture de l'Ain a pris en considération les problèmes psychiques évoqués par l'intéressé, a visé son audition, la grille de vulnérabilité et a pris en considération l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration daté du 06 mars 2024 ; Qu'il ne peut pas être valablement soutenu qu'elle n'a pas procédé à un examen sérieux de la situation de [V] [R] qui, au vu des éléments dont elle disposait, ne présentait pas un état de vulnérabilité susceptible de faire obstacle à une mesure de rétention administrative ;

Que le certificat du médecin du centre de rétention qui a consulté de [V] [R] le 10 juin dernier ne mentionne pas non plus une telle incompatibilité ; Que le certificat médical produit par le conseil de [V] [R] est quasi-illisible et paraît daté de 2023 ; Qu'en tout état de cause il est antérieur à la décision du collège de l'Office français de l'immigration et de l'intégration dont la préfecture fait état ;

Attendu qu'il convient de retenir, ainsi que l'a relevé le premier juge avec pertinence, que le préfet de l'Ain a pris en considération les éléments de la situation personnelle et de la vulnérabilté de [V] [R] tels que portés à sa connaissance au moment où il a pris sa décision pour motiver son arrêté de manière suffisante et circonstanciée ;

Que ce moyen ne pouvait pas être accueilli ;

Attendu qu'en conséquence, à défaut d'autres moyens soulevés, l'ordonnance entreprise est confirmée ;

PAR CES MOTIFS

Déclarons recevable l'appel formé par [V] [R],

Confirmons en toutes ses dispositions l'ordonnance déférée.

Le greffier, Le conseiller délégué,

Céline DESPLANCHES Isabelle OUDOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Retentions
Numéro d'arrêt : 24/04784
Date de la décision : 12/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-12;24.04784 ?
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