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10/06/2024 | FRANCE | N°24/00056

France | France, Cour d'appel de Lyon, Jurid. premier président, 10 juin 2024, 24/00056


N° R.G. Cour : N° RG 24/00056 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PQ7J

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT



ORDONNANCE DE REFERE

DU 10 Juin 2024





























DEMANDERESSE :



S.A.S. SED FINANCES

[Adresse 1]

[Localité 4]



avocat postulant : la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON (toque 938)



avocat plaidant : Me FEL Victoria substituant Me Charles KOSKAS, avocat au barreau de PARIS>




DEFENDERESSES :



Société GROUPE SG

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me Yves TETREAU de la SELARL VERNE BORDET ORSI TETREAU, avocat au barreau de LYON (toque 680)



Société SG ARCHITECTE

[Adresse 2]
...

N° R.G. Cour : N° RG 24/00056 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PQ7J

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DE REFERE

DU 10 Juin 2024

DEMANDERESSE :

S.A.S. SED FINANCES

[Adresse 1]

[Localité 4]

avocat postulant : la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON (toque 938)

avocat plaidant : Me FEL Victoria substituant Me Charles KOSKAS, avocat au barreau de PARIS

DEFENDERESSES :

Société GROUPE SG

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Yves TETREAU de la SELARL VERNE BORDET ORSI TETREAU, avocat au barreau de LYON (toque 680)

Société SG ARCHITECTE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Yves TETREAU de la SELARL VERNE BORDET ORSI TETREAU, avocat au barreau de LYON (toque 680)

Audience de plaidoiries du 13 Mai 2024

DEBATS : audience publique du 13 Mai 2024 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d'appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 31 janvier 2024, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée le 10 Juin 2024 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

''''

EXPOSE DU LITIGE

La S.A.S. SED Finances (SED) après avoir acquis différents immeubles à [Localité 5] et Chamonix s'est rapprochée dans le cadre d'un projet de réhabilitation de la S.A.S. SG Architecte, dont la holding est la S.A.S. Groupe SG, en vue d'une collaboration sur la maîtrise d'oeuvre de ce projet.

Par acte du 15 septembre 2023, les sociétés SG Architecte et Groupe SG ont assigné en référé la société SED devant le président du tribunal judiciaire de Lyon, qui par ordonnance contradictoire du 5 février 2024 a condamné la société SED à verser la somme provisionnelle de 45 003 € à la société Groupe SG et la somme provisionnelle de 186 193,79 € à la société SG Architecte, comme des indemnités de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile aux deux demanderesses.

La société SED a interjeté appel de cette décision le 12 février 2024.

Par assignation en référé délivrée le 8 mars 2024, elle a saisi le premier président afin d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire et la condamnation des défenderesses à payer la somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

A l'audience du 13 mai 2024 devant le délégué du premier président, les parties, régulièrement représentées, s'en sont remises à leurs écritures, qu'elles ont soutenues oralement.

Dans son assignation, la société SED soutient au visa de l'article 514-3 du Code de procédure civile l'existence de moyens sérieux de réformation tenant notamment aux contestations sérieuses consécutives à l'absence de signature de contrats entre elle et les sociétés SG Architecte et Groupe SG et de commencement d'exécution d'un contrat, comme au comportement fautif de la société SG Architecte.

Elle prétend que l'exécution provisoire de ce jugement va entraîner des conséquences manifestement excessives en ce qu'elle présente un résultat déficitaire au 30 novembre 2023 et risque d'être conduite à un redressement judiciaire.

Dans leurs conclusions déposées au greffe par RPVA le 23 avril 2024, les sociétés SG Architecte et Groupe SG s'opposent aux demandes de la société SED et sollicitent la condamnation de cette dernière à leur verser à chacune la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elles soutiennent l'absence de moyens sérieux de réformation car le juge des référés a caractérisé les liens contractuels unissant les parties en relevant un commencement d'exécution des contrats non signés et en écartant l'existence des fautes que la société SED leur impute.

Elles contestent l'existence de conséquences manifestement excessives en indiquant que la société SED est une holding qui détient les participations de l'ensemble des autres sociétés du groupe Mostel qui dispose d'actifs immobiliers d'une valeur globale de 38 millions d'euros. Elles ajoutent qu'elle dépend des remontées de dividendes de ses filiales pour couvrir les emprunts souscrits à leur profit. Elle indique que sous la déduction des sommes appréhendées dans le cadre d'une saisie conservatoire, la société SED ne peut voir sa survie menacée par des condamnations à hauteur de 189 270 € qu'elle considère comme insusceptibles de rompre de manière irréversible son équilibre financier.

Elles soulignent que la dernière attestation délivrée par l'expert-comptable fait état de ce que la société SED sera rentable en 2024 alors qu'il est possible pour cette dernière de liquider une partie de ses actifs pour faire face à ses condamnations.

Dans ses conclusions déposées au greffe par RPVA le 7 mai 2024, la société SED maintient les demandes contenues dans son assignation en sollicitant en outre que le délégué du premier président ordonne la restitution de toutes sommes saisies sur ses comptes bancaires et notamment la somme de 41 926 € attribuée aux sociétés SG Architecte et Groupe SG en vertu de la conversion de saisie conservatoire du 11 mars 2024.

Elle relate qu'une conversion de la saisie conservatoire pratiquée entre les mains de la Caisse d'épargne sur son compte bancaire a conduit à l'attribution immédiate de la somme de 41 926 € aux sociétés SG Architecte et Groupe SG.

Elle conteste être une société holding détenant des participations dans le groupe Mostel, qui n'existe pas et indique que si elle détient des actifs immobiliers, elle a dû en céder une partie pour faire face à ses emprunts obligataires.

Il a été relevé d'office par le délégué du premier président la question de son défaut de pouvoir juridictionnel pour statuer sur une demande de restitution de fonds versés ou obtenus au titre de l'exécution provisoire, comme celle de son impossibilité d'arrêter l'exécution provisoire concernant des fonds qui ont déjà été versés.

Sur interpellation du délégué du premier président, la société SED a indiqué que le juge de l'exécution n'a pas été saisie d'une contestation de la saisie conservatoire convertie le 14 mars 2024.

Compte tenu de la date des conclusions déposées par la société SED, les sociétés défenderesses ont été autorisées à déposer une note en délibéré pour le cas échéant leur répliquer.

Par une note en délibéré reçue au greffe le 27 mai 2024, les sociétés SG Architecte et Groupe SG ont précisé que l'affirmation d'un patrimoine de 38 millions d'euros est appuyée par un document établi par la société SED elle-même, joint en annexe de sa note et que la vente des actifs de cette société lui a procuré des liquidités.

Elles ajoutent que la vente récente des actifs immobiliers a été réalisée au profit de la société [Localité 5] invest Immo, détenue par M. [L], actionnaire unique de la société SED et semble caractériser sa volonté de faire échapper une partie de son patrimoine aux poursuites de ses créanciers.

Par une note en délibéré reçue au greffe le 27 mai 2024, la société SED a entendu répliquer aux arguments invoqués par ses adversaires dans leur propre note en délibéré. Elle joint de nouvelles pièces à l'appui de cette réponse.

Par deux courriers reçus au greffe le 3 juin 2024, les parties s'opposent sur le maintien

dans les débats des pièces annexées par les sociétés SG Architecte et Groupe SG à leur note en délibéré reçue le 27 mai 2024. La société SED en demande l'écart des débats et dans la négative une réouverture des débats.

Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions et notes en délibéré régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l'exposé des moyens à l'énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.

MOTIFS

Attendu que l'autorisation donnée aux parties de communiquer une note en délibéré lors de l'audience les a conduites à en faire usage et la société SED a été laissée à même de répliquer à celle déposée par ses adversaires ;

Que le principe du contradictoire a été pleinement respecté en l'état de ce que la note en délibéré autorisée tendait à ce qu'il soit assuré à l'égard des sociétés SG Architecte et Groupe SG au regard d'une tardiveté des conclusions adverses ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu d'écarter la note en délibéré de ces sociétés SG Architecte et Groupe SG parvenue au greffe le 27 mai 2024 ;

Attendu que l'exécution provisoire de droit dont est assortie l'ordonnance de référé rendue le 5 février 2024 par le président du tribunal judiciaire de Lyon ne peut être arrêtée, que conformément aux dispositions de l'article 514-3 du Code de procédure civile, et lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; que ces deux conditions sont cumulatives ;

Attendu que s'agissant de l'existence de conséquences manifestement excessives, il y a lieu de rappeler qu'il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques générés par la mise à exécution de la décision rendue en fonction des facultés de remboursement de l'intimé si la décision était infirmée, mais également de la situation personnelle et financière du débiteur ;

Qu'en outre, le caractère manifestement excessif des conséquences de la décision rendue ne saurait exclusivement résulter de celles inhérentes à la mise à exécution d'une condamnation au paiement d'une somme d'argent, mais ces conséquences doivent présenter un caractère disproportionné ou irréversible ;

Attendu qu'il appartient à la société SED de rapporter la preuve de ces risques occasionnés par l'exécution provisoire ;

Attendu que la société SED invoque l'existence d'exercices déficitaires pour l'année 2022 de 2 097 194,55 € et pour les 11 premiers mois de l'année 2023 de 1 628 929,93 € ;

Qu'elle ne verse aux débats à l'appui de son affirmation de difficultés financières que :

- son compte de résultat pour l'exercice comptable 2022,

- ses bilan et compte de résultat pour l'exercice comptable correspondant aux 11 premiers mois de l'année 2023,

- une attestation d'expert comptable du 10 février 2024 faisant état d'une nécessaire déclaration de cessation des paiements en cas d'obligation immédiate de paiement des condamnations assorties de l'exécution provisoire et d'une rentabilité prévue pour l'exercice 2024 ;

Que le bilan de l'exercice partiel de l'année 2023 permet de constater l'existence d'un actif immobilier passé de 7015 190 € en 2022 à 7 272 810 € en 2023, un montant de participations de 5 898 094 € et des disponibilités passées de 11 254 € en 2022 à 50 389 € en 2023 ;

Attendu que ces seuls documents sont d'ailleurs impropres à faire état de la situation actuelle de trésorerie de la société SED, ainsi qu'a pu le révéler la saisie-conservatoire du 18 août 2023 qui a fait état d'un solde créditeur de 41 926 € sur son compte courant ouvert dans les livres de la Caisse d'épargne Rhône Alpes, l'immobilisation de ce solde laissant ainsi supposer que les disponibilités mentionnées à son bilan n'avaient pas fait l'objet de cette saisie conservatoire ou n'avaient pas été acquises ;

Que l'attestation de l'expert comptable est taisante sur les éléments chiffrés qui fondent une opinion bien péremptoire sur l'avenir de la société SED ;

Attendu que sans entrer dans la controverse des parties sur l'existence ou non d'un groupe Mostel et sur le fait que la société SED en soit la holding en l'état de ce qu'aucun document objectif n'est fourni par les parties à ce sujet, il ressort clairement du seul bilan communiqué que le montant des participations comme le patrimoine immobilier de cette société sont sans équivoque de nature à lui permettre de faire face à ses condamnations ;

Qu'au surplus, la société SED est bien malvenue à invoquer un risque de déclaration de cessation des paiements alors que les seuls éléments qu'elle communique ne sont pas de nature à objectiver que les condamnations prononcées par le juge des référés du tribunal judiciaire de Lyon vont modifier substantiellement ses équilibres financiers, qui seraient selon elle plus qu'obérés avant même que de nouvelles mesures d'exécution forcée soient engagées (avec notamment des capitaux propres largement négatifs depuis l'année 2022) ;

Attendu que les termes même de l'attestation de l'expert comptable, au regard même des déficits cumulés et faisant état d'un retour à la rentabilité, sont révélateurs de la faculté éminente de rebond de la société SED ;

Attendu que cette société défaille ainsi à établir les conséquences disproportionnées ou irréversibles de l'engagement d'autres voies d'exécution par les sociétés SG Architecte et Groupe SG, son absence de saisine du juge de l'exécution en contestation de la récente conversion de saisie conservatoire étant d'ailleurs révélatrice de sa conscience en ses capacités à maintenir son activité malgré une perte de trésorerie d'un montant de 41 926 € ;

Attendu que cette conversion du 11 mars 2024 conduit à rendre irrecevable sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire à hauteur de ce montant, au regard d'une exécution acquise de ses condamnations consécutive au transfert des fonds à ses créancières ;

Attendu que sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire doit être rejetée pour le surplus sans qu'il soit besoin d'apprécier le sérieux des moyens de réformation qu'elle articule ;

Sur la demande de restitution des fonds versés en exécution d'une conversion d'une saisie conservatoire

Attendu que comme cela a été relevé, il n'entre pas d'une part dans les pouvoirs juridictionnels du premier président de statuer sur les voies d'exécution d'ores et déjà engagées ou qui ont atteint leur résultat, ces pouvoirs étant limités à l'arrêt ou à l'aménagement de l'exécution provisoire dès lors qu'elle n'a pas encore atteint ses effets au jour où il statue ;

Qu'en outre, il vient d'être retenu que la conversion récemment intervenue le 11 mars 2024, non contestée devant le juge de l'exécution, a consommé l'exécution provisoire à hauteur du montant de la saisie conservatoire ;

Attendu que cette demande doit être déclarée irrecevable ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Attendu que la société SED succombe et doit supporter les dépens de cette instance en référé comme indemniser ses adversaires des frais irrépétibles engagés pour assurer leur défense ;

PAR CES MOTIFS

Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,

Vu la déclaration d'appel du 12 février 2024,

Déclarons la S.A.S. SED Finances irrecevable en sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire correspondant à la somme de 41 926 € d'ores et déjà attribuée aux S.A.S. SG Architecte et Groupe SG, et en sa demande de restitution de cette somme,

Rejetons pour le surplus la demande d'arrêt de l'exécution provisoire présentée par la S.A.S. SED Finances,

Condamnons la S.A.S. SED Finances aux dépens de ce référé et à verser aux S.A.S. SG Architecte et Groupe SG une indemnité unique de 1 200 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Jurid. premier président
Numéro d'arrêt : 24/00056
Date de la décision : 10/06/2024
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-10;24.00056 ?
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