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06/06/2024 | FRANCE | N°21/06256

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 06 juin 2024, 21/06256


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





N° RG 21/06256 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NY5Q





SAS LES AMBASSADEURS



C/



[N]

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 7]

SELARL MJ SYNERGIE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT ETIENNE

du 06 Juillet 2021

RG : F 20/00034





COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 06 JUIN 2024







APPELANTE :



SAS LES AMBASSADEURS

[Adresse 2]

[Localité 4]



représentée par Me Vincent DE FOURCROY de la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat postulant du barreau de LYON et Me Solange VIALLARD-VALEZY, avocat plaidant du ba...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 21/06256 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NY5Q

SAS LES AMBASSADEURS

C/

[N]

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 7]

SELARL MJ SYNERGIE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT ETIENNE

du 06 Juillet 2021

RG : F 20/00034

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 06 JUIN 2024

APPELANTE :

SAS LES AMBASSADEURS

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Vincent DE FOURCROY de la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat postulant du barreau de LYON et Me Solange VIALLARD-VALEZY, avocat plaidant du barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMÉ :

[E] [N]

né le 18 Octobre 1980 à

[Adresse 1]

[Localité 6]

représenté par Me Marylise BIDAUX, avocat au barreau de LYON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2021/028632 du 04/11/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

PARTIES INTERVENANTES

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 7]

[Adresse 5]

[Localité 7]

représentée par Me Cécile ZOTTA de la SCP J.C. DESSEIGNE ET C. ZOTTA, avocat au barreau de LYON

SELARL MJ SYNERGIE représentée par Maître [L] [H], es qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société LES AMBASSADEURS

[Adresse 8]

[Localité 3]

non comparante

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 23 Mai 2024

Présidée par Françoise CARRIER, Conseillère honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Fernand CHAPPRON, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Delphine LAVERGNE-PILLOT, présidente

- Nabila BOUCHENTOUF, conseillère

- Françoise CARRIER, conseillère honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 06 Juin 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Delphine LAVERGNE-PILLOT, Présidente et par Fernand CHAPPRON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

La société Les Ambassadeurs (la société) a ouvert un restaurant à [Localité 4] le 14 février 2019.

Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 13 février 2019, elle a engagé M. [E] [N] en qualité de Chef Cuisinier, Niveau IV, Echelon 1, moyennant un salaire brut de 1 800 € pour un horaire de 35 heures par semaine.

Le contrat prévoyait une période d'essai de deux mois soit jusqu'au 13 avril 2019.

Suite à l'incarcération le 28 mars du dirigeant de la société, M. [C], il a été demandé à M. [N] de ne plus revenir travailler à compter du 31 mars.

Par jugement du 5 juillet 2019, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a ouvert une procédure de redressement judiciaire de la SAS Les Ambassadeurs et désigné la SARL MJ Synergie en qualité de mandataire judiciaire.

Par requête reçue au greffe le 30 janvier 2020, M. [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Etienne à l'effet d'obtenir le paiement de rappels de salaire et de congés payés, d'heures supplémentaires, d'une indemnité pour travail dissimulé, des dommages et intérêts pour absence de mutuelle, pour exécution déloyale du contrat de travail, pour rupture abusive du contrat de travail et pour irrégularité de la procédure de licenciement, d'une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents.

Par jugement du 16 septembre 2020, le tribunal de commerce a arrêté le plan de redressement de la société Les Ambassadeurs.

La SARL MJ Synergie commissaire à l'exécution du plan et l'AGS CGEA de [Localité 7] ont été régulièrement appelées à l'instance.

Par jugement du 6 juillet 2021, le conseil de prud'hommes a :

- déclaré l'AGS-CGEA, hors de cause,

- fixé le salaire moyen de M. [E] [N] à la somme de 1800 € bruts,

- condamné la SAS Les Ambassadeurs à verser à M. [E] [N] les sommes suivantes :

'' 102,85 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents au salaire

du mois de février 2019,

'' 1 800 € bruts à titre de rappel de salaire pour le mois de mars 2019, outre 180,00 €

bruts au titre des congés payés afférents,

- débouté M. [E] [N] de sa demande de paiement d'heures supplémentaires et de sa demande d'indemnité au titre du travail dissimulé,

- condamné la SAS Les Ambassadeurs à verser à M. [E] [N] :

'' 500 € nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi faute de complémentaire santé,

'' 3 600 € nets à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de

travail,

'' 3 600 € nets à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

- débouté M. [E] [N] de sa demande de dommages et intérêts au titre du non respect de la procédure de licenciement et de sa demande au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés afférents,

- ordonné à la SAS Les Ambassadeurs de délivrer à M. [E] [N] les bulletins de salaire des mois de février 2019 et mars 2019, une attestation Pôle Emploi, un certificat de travail et un reçu pour solde de tout compte conformément à la présente décision, ce sous une astreinte de 100€ par jour de retard et par document à compter du 30ème jour de la notification de la présente décision et jusqu'à la délivrance de l'intégralité des documents,

- débouté M. [E] [N] de sa demande au titre de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991,

- condamné la SAS Les Ambassadeurs aux dépens.

La SAS les Ambassadeurs a interjeté appel.

Aux termes de conclusions notifiées le 22 avril 2022 aux parties constituées et signifiées à la Selarl MJ Synergie le 17 novembre 2021, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SAS les Ambassadeurs au paiement de diverses sommes au 'Pilat' de M. [N] et dit que la rupture du contrat de travail lui était imputable et était abusive,

- fixer la créance salariale de M. [N] à la somme de 638,70 € pour la période du 21 au 31 mars 2019,

- débouter M. [N] de ses demandes et le condamner aux dépens.

Aux termes de conclusions notifiées le 24 janvier 2022, M. [N] demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce que :

'' il a fixé son salaire moyen à la somme de 1 800 € bruts,

'' il l'a débouté de sa demande de paiement d'heures supplémentaires, de sa demande d'indemnité au titre du travail dissimulé, de sa demande de dommages et intérêts au titre du non respect de la procédure de licenciement, de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, ainsi que de sa demande au titre de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991,

- condamner la société les Ambassadeurs à lui payer les sommes suivantes :

' 3 506,39 € bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre 350,63 € bruts au titre des congés payés afférents,

' 19 390,14 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

' 1 800 € nets à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement,

' 900 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 90 € bruts au titre des

congés payés afférents,

' 2 000 € à titre d'indemnité qualifiée d'honoraires auprès de Maître Marylise BIDAUX, Conseil de Monsieur [E] [N], au titre de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile,

- fixer à 3 231,69 € bruts le salaire moyen de référence,

- confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions.

Aux termes de conclusions notifiées le 25 janvier 2022, l'AGS CGEA demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il l'a mise hors de cause,

- subsidiairement, infirmer le jugement en ce qu'il a fait droit aux demandes de M. [N] et débouté ce dernier de ses demandes sauf à statuer comme il appartiendra sur le salaire du mois de mars et des congés afférents ainsi que sur les congés payés dus sur le salaire du mois de février 2019,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [N] de ses demandes d'indemnité pour travail dissimulé et d'heures supplémentaires, de dommages et intérêts au titre de la procédure de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents,

- en tout état de cause, dire qu'elle ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19 et L 3253-17 du code du travail et que l'obligation de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire,

- la mettre hors dépens.

La SELARL MJ Synergie, commissaire à l'exécution du plan, régulièrement assignée par acte remis à personne morale le 23 septembe 2021, n'a pas constitué avocat. Il sera donc statué par arrêt réputé contradictoire.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la mise hors de cause de l'AGS

C'est par une exacte analyse et de justes et pertinents motifs que le conseil de prud'hommes a mis hors de cause l'AGS/CGEA. Le jugement est en conséquence confirmé sur ce point.

Sur la demande en paiement de l'indemnité de congés payés au titre du mois de février 2019 et du salaire du mois de mars 2019

M. [N] fait valoir :

- qu'il a commencé à travailler dès le 11 février 2019 et qu'il a perçu le 8 mars une somme de 801,51 € sans qu'un bulletin de salaire lui soit remis,

- que, sur la base d'un salaire mensuel de 1 800 €, son salaire du mois de février était de de 1 157 € et qu'il lui est dû la somme de 115,70 € au titre des congés payés afférents,

- qu'il n'a pas été payé au mois de mars 2019 et qu'il est fondé à se voir allouer la somme de 1 800 € à ce titre.

La société Les Ambassadeurs fait valoir ;

- que M. [N] ne s'est pas présenté le 13 février et n'a commencé son activité que le 14, qu'il est arrivé à plusieurs reprises en retard de sorte que la somme de 801,51 € correspond au salaire dû pour février,

- qu'en raison de difficultés financières elle n'a pas pu honorer le salaire de la période du 21 au 31 mars 2019 soit 638,70 €.

C'est par de justes et pertinents motifs que le conseil de prud'hommes a fait droit aux demandes du salarié de sorte que le jugement est confirmé sur ce point.

Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires

En application de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, la preuve des horaires de travail effectués n'incombe spécialement à aucune des parties.

Si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir à l'appui de sa demande des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

La majoration des heures réalisées au delà du nombre d'heures contractualisé est due même en dépit de l'opposition de l'employeur si ces heures sont indispensables à l'accomplissement des tâches à réaliser.

L'employeur qui, en parfaite connaissance de cause, laisse un salarié effectuer des heures supplémentaires sans s'y opposer y consent implicitement.

En l'espèce, M. [N] fait valoir :

- qu'il a commencé à travailler au sein du restaurant les 11 et 12 février 2019 afin de terminer les travaux de la cuisine,

- que le restaurant ne fermait ses portes que sur 3 services par semaine, le mardi ou le mercredi et le dimanche soir et qu'il était le seul cuisinier,

- que sa charge de travail le contraignait à effectuer de nombreuses heures supplémentaires.

L'employeur fait valoir :

- que le tableau établi unilatéralement par le salarié n'est corroboré par aucun autre élément,

- que ce tableau est en tout état de cause contredit par les échanges de SMS ou de courriers intervenus entre les parties,

- qu'en tout état de cause, M. [N] n'effectuait pas plus de 7 à 8 heures par jour.

Le salarié produit au soutien de ses prétentions, un relevé détaillé de ses heures de travail jour par jour aux mois de février et mars 2019 faisant apparaître 210 heures supplémentaires non rémunérées.

L'employeur ne fournit aucun élément de nature à justifier les horaires que le salarié aurait réellement effectués ni à faire la preuve de ses allégations quant au début et à la fin de la période d'emploi.

Il ne discute par le fait que M. [N] était le seul cuisinier ni que le restaurant assurait deux services par jour sauf le dimanche soir et un autre jour de la semaine ce dont il ressort à l'évidence que le salarié ne pouvait pas assumer sa charge de travail sans effectuer des heures supplémentaires.

Il résulte en outre des échanges de SMS du 9 mars 2019 que M. [N] pouvait être amené à terminer son service après 23 heures.

Il convient en conséquence de faire droit à la demande de rappel de salaire à hauteur des sommes réclamées soit 3 506,39 € outre 350,63 € au titre des congés payés afférents.

Le salaire moyen de référence de M. [N] se calcule en incluant les heures supplémentaires et doit en conséquence être fixé à la somme de 3 231,69 € bruts.

Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé

L'article L. 8221-5 du code du travail répute travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur notamment de se soustraire intentionnellement à la délivrance de bulletins de paie ou de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Selon l'article L.8223-1, « En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. »

En l'espèce, il est acquis qu'aucun bulletin de paie n'a été délivré au salarié, en particulier pour le mois de février alors qu'aucune procédure collective n'était ouverte et que le dirigeant de la société n'était pas incarcéré.

Il ressort d'autre part des éléments précédemment analysés quant à la charge de travail de M. [N] que l'employeur avait nécessairement conscience de ce que celui-ci était contraint d'effectuer régulièrement des heures supplémentaires et qu'il a néanmoins omis de rémunérer ces heures.

Il convient en conséquence de faire droit à la demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé à hauteur de la somme réclamée soit 19 390,14 € bruts correspondant à six mois de salaire sur la base d'un salaire mensuel moyen de 3 231,69 € incluant les heures supplémentaires.

Sur la mutuelle

Il est acquis que M. [N] et l'employeur ont signé un bulletin d'affiliation à la mutuelle HCR.

L'employeur ne rapporte pas la preuve d'avoir fait les diligences nécessaires auprès de la mutuelle mais, en tout état de cause, M. [N] ne rapporte pas la preuve du préjudice que lui a causé cette omission de sorte qu'il convient de le débouter de ce chef de demande et de réformer le jugement sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

M. [N] fait valoir :

- que les éléments afférents à son contrat de travail n'ont pas été versés,

- qu'il s'est trouvé sans rémunération et sans emploi,

- qu'il a été contraint d'effectuer des horaires de travail importants sans que l'employeur respecte les durées maximales de travail et les temps de repos.

L'employeur fait valoir :

- qu'il n'a jamais eu la volonté de se soustraire à ses obligations,

- que ses omissions sont la conséquence des difficultés de l'entreprise et de l'incarcération de son dirigeant.

Le tableau d'heures supplémentaires produit par le salarié fait apparaître que l'employeur n'a pas respecté la législation sur la durée du travail et le temps de repos et que le salarié a accompli son travail dans des conditions difficiles.

Compte-tenu de la brièveté de la période d'emploi, le préjudice subi de ce chef sera justement réparé par une indemnité de 500 € à titre de dommages et intérêts.

Les autres manquements de l'employeur sont réparés par les sommes précédemment allouées à titre de rappel de salaire, de congés payés, d'heures supplémentaires et pour travail dissimulé.

Sur la rupture du contrat de travail

M. [N] fait valoir qu'il a été privé de son emploi sans qu'une procédure soit mise en oeuvre.

L'employeur fait valoir que le contrat a pris fin durant la période d'essai et qu'aucun formalisme n'était requis.

Il résulte des articles L.1221-19, L.1221-21, L. 1221-25 et L. 1231-1 du code du travail que si chacune des parties peut discrétionnairement et, sauf dispositions particulières, sans forme, mettre fin aux relations contractuelles pendant la période d'essai, la rupture doit être explicite.

En l'espèce, le salarié ne saurait prétendre n'avoir pas été informé de la rupture de son contrat alors qu'il reconnaît que l'employeur lui a demandé de ne plus venir travailler d'une part et que d'autre part, il a retrouvé un emploi dans une tierce entreprise à compter du 1er avril 2019 ce qui traduit sa complète conscience de ce que le contrat litigieux était rompu.

M. [N] n'est dès lors pas fondé en ses demandes en paiement d'une indemnité de préavis et des congés payés afférents ni de dommages et intérêts pour rupture abusive.

Il convient en conséquence de réformer le jugement déféré en ce qu'il a fait droit à sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif et de le confirmer en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande en paiement de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents.

Sur la demande de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure

Il est acquis que l'employeur n'a respecté aucun délai de prévenance ni remis à M. [N] les documents de fin de contrat et le solde de tout compte de sorte que celui-ci s'est trouvé démuni.

Le préjudice souffert par le salarié du fait de ces manquements est justement réparé par l'allocation d'une somme de 1 800 €. Le jugement est également réformé sur ce point.

Sur les demandes accessoires

La SAS Les Ambassadeurs sera condamnée à remettre à Monsieur [N] les documents légaux rectifiés conformément aux dispositions du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette remise d'une astreinte.

Aux termes de l'article 700 2° du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

En l'espèce, M. [N] étant bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle, il convient de condamner la société Les Ambassadeurs qui succombe et supporte les dépens à payer à Me Marylise Bidaux, avocate de M. [N], la somme de 2 000 € en application de l'article 700 2° du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- déclaré l'AGS-CGEA, hors de cause,

- condamné la SAS Les Ambassadeurs à verser à M. [E] [N] les sommes suivantes :

'' 102,85 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents au salaire du mois de février 2019,

'' 1 800 € bruts à titre de rappel de salaire pour le mois de mars 2019, outre 180,00 €

bruts au titre des congés payés afférents,

- condamné la SAS Les Ambassadeurs aux dépens.

Le réforme en ce qu'il a :

- condamné la SAS Les Ambassadeurs à payer à M. [E] [N] :

'' 500 € nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi faute de complémentaire santé,

'' 3 600 € nets à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

'' 3 600 € nets à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

- débouté M. [E] [N] de sa demande de dommages et intérêts au titre du non respect de la procédure de licenciement,

- débouté M. [E] [N] de sa demande en paiement d'heures supplémentaires et d'indemnité au titre du travail dissimulé,

- ordonné à la SAS Les Ambassadeurs de délivrer à M. [E] [N] les bulletins de salaire des mois de février 2019 et mars 2019, une attestation Pôle Emploi, un certificat de travail et un reçu pour solde de tout compte conformément à la présente décision, ce sous une astreinte de 100 € par jour de retard et par document à compter du 30ème jour de la notification de la présente décision et jusqu'à la délivrance de l'intégralité des documents,

- débouté M. [E] [N] de sa demande au titre de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.

Statuant à nouveau,

Condamne la société Les Ambassadeurs à payer à M. [N] les sommes suivantes :

- 3 506,39 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires outre 350,63 € au titre des congés payés afférents,

- 19 390,14 € bruts à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

Déboute M. [N] de sa demande de dommages et intérêts pour non affiliation à une Mutuelle,

Condamne la SAS Les Ambassadeurs à payer à M. [N] les sommes suivantes :

- 500 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- 1 800 € pour irrégularité de la rupture ;

Dit que les sommes allouées supporteront, s'il y a lieu, le prélèvement des cotisations et contributions sociales ;

Déboute M. [E] [N] de sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ;

Fixe le salaire moyen de référence de M. [N] à la somme de 3 231,69 € bruts ;

Ordonne à la SAS Les Ambassadeurs de délivrer à M. [E] [N] les bulletins de salaire des mois de février 2019 et mars 2019, une attestation Pôle Emploi, un certificat de travail et un reçu pour solde de tout compte conformément à la présente décision, sans astreinte ;

Condamne la SAS Les Ambassadeurs à payer à Me Marylise Bidaux, avocate de M. [N], la somme de 2 000 € en application de l'article 700 2° du code de procédure civile ;

Dit que si Me [D] recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat et que s'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat ;

Dit que si, à l'issue du délai de quatre ans à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée, elle n'a pas demandé le versement de tout ou partie de la part contributive de l'Etat, elle est réputée avoir renoncé à celle-ci.

Condamne la SAS Les Ambassadeurs aux dépens d'appel.

Le greffier La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 21/06256
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;21.06256 ?
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