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30/05/2024 | FRANCE | N°23/08893

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 30 mai 2024, 23/08893


N° RG 23/08893 - N° Portalis DBVX-V-B7H-PKGZ









Décision du Tribunal de Commerce de ST ETIENNE du 25 octobre 2023



RG : 2023f484







[X]



C/



S.E.L.A.R.L. [Z] & ASSOCIÉS - MANDATAIRES JUDICIAI RES

LA PROCUREURE GENERALE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 30 Mai 2024







APPELANT :



M. [C] [X]
r>immatriculé au RM sous le n° [Numéro identifiant 8]

né le [Date naissance 3] 1988 à [Localité 9] (TURQUIE)

[Adresse 7]

[Localité 4]



Représenté par Me Frédéric HORDOT de la SCP BONIFACE-HORDOT-FUMAT-MALLON, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, substitué...

N° RG 23/08893 - N° Portalis DBVX-V-B7H-PKGZ

Décision du Tribunal de Commerce de ST ETIENNE du 25 octobre 2023

RG : 2023f484

[X]

C/

S.E.L.A.R.L. [Z] & ASSOCIÉS - MANDATAIRES JUDICIAI RES

LA PROCUREURE GENERALE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 30 Mai 2024

APPELANT :

M. [C] [X]

immatriculé au RM sous le n° [Numéro identifiant 8]

né le [Date naissance 3] 1988 à [Localité 9] (TURQUIE)

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représenté par Me Frédéric HORDOT de la SCP BONIFACE-HORDOT-FUMAT-MALLON, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, substitué et plaidant par Me DA COSTA VAZ, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMEES :

S.E.L.A.R.L. [Z] & ASSOCIÉS - MANDATAIRES JUDICIAIRES au capital social de 190.000,00 €, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de SAINT-ETIENNE sous le numéro 830 000 451, agissant par Maitre [W] [Z], ès-qualité de Liquidateur Judiciaire de Monsieur [C] [X], entrepreneur individuel, immatriculé au Répertoire des Métiers sous le numéro [Numéro identifiant 8], demeurant à [Localité 4], sis [Adresse 7], désignée à ses fonctions suivant jugement du Tribunal de Commerce de SAINT-ETIENNE du 5 octobre 2022

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Brice LACOSTE de la SELARL LACOSTE CHEBROUX BUREAU D'AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1207

Plaidant par Me VAUTHIER, avocat au barreau de LYON

Mme LA PROCUREURE GENERALE

[Adresse 1]

[Localité 6]

En la personne d'Olivier NAGABBO, avocat général

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 02 Avril 2024

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 04 Avril 2024

Date de mise à disposition : 30 Mai 2024

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Aurore JULLIEN, conseillère

- Viviane LE GALL, conseillère

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 5 octobre 2022, le tribunal de commerce de Saint-''tienne a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire au profit de l'entreprise individuelle de M. [X], exploitant une activité de peinture-plâtrerie en qualité d'entrepreneur individuel. La selarl [Z] et associés a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

Le 5 mai 2023, la selarl [Z], ès-qualités, a assigné M. [X] devant le tribunal de commerce de Saint-''tienne en demande d'extension de la procédure de liquidation judiciaire pour confusion des patrimoines.

Par jugement contradictoire du 25 octobre 2023, le tribunal de commerce de Saint-''tienne a :

- dit que la demande présentée par la selarl [Z] et associés est recevable,

- prononcé la réunion des patrimoines professionnel et personnel de M. [X],

- prononcé l'extension de la liquidation judiciaire du patrimoine professionnel de M. [X] à son patrimoine personnel,

- dit que les publicités relatives à la présente décision seront faites d'office par le greffier,

- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

M. [X] a interjeté appel par déclaration du 28 novembre 2023.

Il a conclu une première fois le 11 janvier 2024 et la selarl [Z] a conclu le 8 février 2014. La procédure a été clôturée par ordonnance du 2 avril 2024, les débats étant fixés au 4 avril 2024.

M. [X] a notifié de nouvelles conclusions le 2 avril 2024, postérieurement à l'ordonnance de clôture rendue le même jour, lesquelles ne modifient pas les prétentions et moyens.

A l'audience, la Selarl [Z] est d'accord pour qu'il soit statué au vu de ces conclusions, elle ne sollicite pas leur rejet ni de délai pour y répondre. Le ministère public ne s'oppose pas non plus à leur prise en compte. Les parties ont toutes souhaité que l'affaire soit retenue à l'audience, sans renvoi.

***

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 2 avril 2024, M. [X] demande à la cour, au visa des articles L. 526-22 et L. 621-2 du code de commerce, de :

- réformer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Saint-''tienne le 25 octobre 2023 en ce qu'il a :

' dit que la demande présentée par la selarl [Z] et associés est recevable,

' prononcé la réunion des patrimoines professionnels et personnel de M. [X],

' prononcé l'extension de la liquidation judiciaire de son patrimoine professionnel à son patrimoine personnel,

' dit que les publicités relatives à la décision seront faites d'office par le greffier,

- déclarer n'y avoir lieu à extension de la liquidation judiciaire de son patrimoine professionnel à son patrimoine personnel,

- débouter la selarl [Z] et associés, ès-qualités, de ses demandes.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 8 février 2024, la selarl [Z] et associés demande à la cour, au visa des articles L. 621-2, L. 526-22 et suivants, R. 526-26 et suivants, et 123-24 du code de commerce et de l'article 613-10 du code de la sécurité sociale, de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Saint-''tienne le 25 octobre 2023 en toutes ses dispositions, notamment en ce qu'il a :

' dit que la demande de la selarl [Z] et associés est recevable,

' prononcé la réunion des patrimoines professionnel et personnel de M. [X],

' prononcé l'extension de la liquidation judiciaire du patrimoine professionnel de M. [X] à son patrimoine personnel,

' dit que les publicités relatives à la présente décision seront faites d'office par le greffier,

' ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de la liquidation judiciaire.

- tirer les dépens en frais privilégiés de la liquidation.

Le ministère public, par avis du 6 mars 2024 communiqué contradictoirement aux parties le 7 mars 2024, a requis la confirmation du jugement compte tenu d'une absence de comptabilité et de tra'abilité permettant de distinguer les ressources et dépenses personnelles et professionnelles, entrainant une imbrication et une confusion complète des patrimoines en justifiant la mesure d'extension décidée.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'extension de la liquidation judiciaire au patrimoine personnel du débiteur

M. [X] conteste l'extension de la liquidation judiciaire à son patrimoine personnel et fait valoir que :

- il exerçait sous le statut fiscal et social de la micro-entreprise ; il n'avait pas l'obligation de tenir un registre des achats mais seulement un livre de recettes et d'établir des factures ; il n'a pas manqué à ces deux obligations, comme il en justifie ; il justifie également de sa comptabilité, en ce compris les mouvements liés à la sous-traitance ;

- il est exact qu'il n'a pas procédé à l'ouverture d'un compte bancaire dédié à son activité professionnelle, mais cette situation n'est pas suffisante pour caractériser la confusion des patrimoines ; l'examen des relevés bancaires démontre que ses dépenses personnelles sont facilement identifiables ; travaillant en tant que sous-traitant, il achetait très peu de matériel.

Le liquidateur judiciaire réplique que M. [X] a sollicité l'ouverture d'une liquidation judiciaire sur son seul patrimoine professionnel, mais qu'il ressort des opérations de liquidation une confusion des patrimoines ; qu'en effet :

- M. [X] utilisait un compte bancaire unique pour ses opérations professionnelles et personnelles ; contrairement à ce que celui-ci soutient, ses dépenses personnelles ne sont pas facilement identifiables ; en tout état de cause, les dispositions réglementaires impliquent la disposition d'un compte bancaire professionnel propre, permettant de distinguer les deux patrimoines ;

- aucune comptabilité n'a pu lui être présentée, l'absence de tenue d'un livre des recettes encaissées ne permettant pas d'isoler les encaissements et les dépenses de nature professionnelle.

Sur ce,

Selon l'article L. 526-22 du code de commerce :

'L'entrepreneur individuel est une personne physique qui exerce en son nom propre une ou plusieurs activités professionnelles indépendantes.

Le statut d'entrepreneur individuel n'est pas accessible aux étrangers ressortissants de pays non membres de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ne disposant pas d'un titre de séjour les autorisant à exercer sous ce statut.

Les biens, droits, obligations et sûretés dont il est titulaire et qui sont utiles à son activité ou à ses activités professionnelles indépendantes constituent le patrimoine professionnel de l'entrepreneur individuel. Sous réserve du livre VI du présent code, ce patrimoine ne peut être scindé. Les éléments du patrimoine de l'entrepreneur individuel non compris dans le patrimoine professionnel constituent son patrimoine personnel.

La distinction des patrimoines personnel et professionnel de l'entrepreneur individuel ne l'autorise pas à se porter caution en garantie d'une dette dont il est débiteur principal.

Par dérogation aux articles 2284 et 2285 du code civil et sans préjudice des dispositions légales relatives à l'insaisissabilité de certains biens, notamment la section 1 du présent chapitre et l'article L. 526-7 du présent code, l'entrepreneur individuel n'est tenu de remplir son engagement à l'égard de ses créanciers dont les droits sont nés à l'occasion de son exercice professionnel que sur son seul patrimoine professionnel, sauf sûretés conventionnelles ou renonciation dans les conditions prévues à l'article L. 526-25.

Les dettes dont l'entrepreneur individuel est redevable envers les organismes de recouvrement des cotisations et contributions sociales sont nées à l'occasion de son exercice professionnel.

Seul le patrimoine personnel de l'entrepreneur individuel constitue le gage général des créanciers dont les droits ne sont pas nés à l'occasion de son exercice professionnel. Toutefois, si le patrimoine personnel est insuffisant, le droit de gage général des créanciers peut s'exercer sur le patrimoine professionnel, dans la limite du montant du bénéfice réalisé lors du dernier exercice clos. En outre, les sûretés réelles consenties par l'entrepreneur individuel avant le commencement de son activité ou de ses activités professionnelles indépendantes conservent leur effet, quelle que soit leur assiette.

La charge de la preuve incombe à l'entrepreneur individuel pour toute contestation de mesures d'exécution forcée ou de mesures conservatoires qu'il élève concernant l'inclusion ou non de certains éléments d'actif dans le périmètre du droit de gage général du créancier. Sans préjudice de l'article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, la responsabilité du créancier saisissant peut être recherchée pour abus de saisie lorsqu'il a procédé à une mesure d'exécution forcée ou à une mesure conservatoire sur un élément d'actif ne faisant manifestement pas partie de son gage général.

Dans le cas où un entrepreneur individuel cesse toute activité professionnelle indépendante, le patrimoine professionnel et le patrimoine personnel sont réunis. Il en est de même en cas de décès de l'entrepreneur individuel, sous réserve des articles L. 631-3 et L. 640-3 du présent code.

Les conditions d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'Etat.'

Les articles R. 526-26 et R.526-27 du même code précisent ces dispositions légales.

En particulier, l'article R. 526-26, 5°, définit les biens, droits, obligations et sûretés de l'entrepreneur individuel, dont 'les fonds de caisse, toute somme en numéraire conservée sur le lieu d'exercice de l'activité professionnelle, les sommes inscrites aux comptes bancaires dédiés à cette activité, notamment au titre des articles L. 613-10 du code de la sécurité sociale et L. 123-24 du présent code, ainsi que les sommes destinées à pourvoir aux dépenses courantes relatives à cette même activité.'

Et l'article R. 526-27 précise que 'chaque compte bancaire dédié à son activité professionnelle ouvert par l'entrepreneur individuel doit contenir la dénomination dans son intitulé.'

Par ailleurs, l'article L. 621-2 du même code, applicable à la liquidation judiciaire en vertu de l'article L. 641-1, prévoit que, 'à la demande de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du débiteur ou du ministère public, la procédure ouverte peut être étendue à une ou plusieurs autres personnes en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ou de fictivité de la personne morale. Dans les mêmes conditions, un ou plusieurs autres patrimoines du débiteur peuvent être réunis au patrimoine visé par la procédure, en cas de confusion avec celui-ci.'

Enfin, l'article L. 123-28 du même code dispose que, 'par dérogation aux dispositions des articles L. 123-12 à L. 123-23, les personnes physiques bénéficiant du régime défini à l'article 50-0 du code général des impôts [régime général des micro-entreprises] peuvent ne pas établir de comptes annuels. Elles tiennent un livre mentionnant chronologiquement le montant et l'origine des recettes qu'elles perçoivent au titre de leur activité professionnelle. Elles tiennent également, lorsque leur commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement, un registre récapitulé par année, présentant le détail de leurs achats. Un décret fixe les conditions dans lesquelles ce livre et ce registre sont tenus.'

Il résulte de l'article L. 526-22 précité, que l'entrepreneur individuel dispose, par l'effet de ce texte, de deux patrimoines : l'un personnel et l'autre professionnel. Ce dernier est constitué, selon l'alinéa 2 du texte, des biens, droits, obligations et sûretés qui sont utiles à l'activité professionnelle de l'entrepreneur.

En l'espèce, M. [X] exerçait son activité de peinture-plâtrerie en qualité d'entrepreneur individuel. Dans sa demande d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, il a visé ses dettes professionnelles (TVA et impôts, Urssaf) et, au titre de ses actifs, son outillage professionnel.

Le tribunal de commerce a ainsi ouvert une procédure de liquidation sur le seul patrimoine professionnel de M. [X], par jugement du 5 octobre 2022.

M. [X] admet n'avoir qu'un seul compte bancaire et ne pas en avoir ouvert pour son activité professionnelle. Ce compte est au nom de M. et Mme [X].

Or, l'examen des relevés bancaire produits par le liquidateur judiciaire établit qu'il n'est pas aisé de distinguer l'affectation des dépenses, notamment, comme l'a justement relevé le tribunal, s'agissant des frais d'essence, de téléphonie ou de restaurant. Il en va de même des remises de chèque dont on ignore s'il s'agit d'une recette professionnelle ou d'une somme créditée au compte à titre personnel.

De plus, si M. [X] justifie d'un livre des recettes (ses pièces n° 3A et 3B), la comparaison de ces documents avec les relevés bancaires établit des incohérences et des absences de mention, comme l'a exactement analysé le tribunal, par des motifs que la cour adopte.

La reconstitution du patrimoine professionnel de M. [X] au cours de la procédure de liquidation, en isolant les dépenses et recettes de l'activité (sa pièce n° 6) et en produisant une attestation des paiements reçu en tant que sous-traitant (sa pièce n° 7), ne permet pas, pour autant, de considérer que les patrimoines étaient, en pratique, séparés.

Au contraire, la confusion des patrimoines est établie. Il convient donc de confirmer le jugement qui prononce l'extension de la liquidation judiciaire du patrimoine professionnel de M. [X] à son patrimoine personnel.

Sur les dépens

Il convient d'ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de la liquidation judiciaire

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement,

Confirme le jugement déféré, en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de la liquidation judiciaire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 23/08893
Date de la décision : 30/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-30;23.08893 ?
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