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10/05/2024 | FRANCE | N°21/07536

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 10 mai 2024, 21/07536


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





N° RG 21/07536 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N4KA





S.A.S. EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES TELECOM SUD EST



C/



[N]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROANNE

du 13 Septembre 2021

RG : F 20/00047



COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 10 MAI 2024







APPELANTE :



S.A.S. EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES TELECOM S

UD EST

[Adresse 6] [Adresse 4]

[Localité 3]



représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat postulant du barreau de LYON et Me Anne VINCENT-IBARRONDO de la SAS VOLTAIRE, avocat plaidant du barreau de PARIS







INTIM...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 21/07536 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N4KA

S.A.S. EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES TELECOM SUD EST

C/

[N]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROANNE

du 13 Septembre 2021

RG : F 20/00047

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 10 MAI 2024

APPELANTE :

S.A.S. EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES TELECOM SUD EST

[Adresse 6] [Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat postulant du barreau de LYON et Me Anne VINCENT-IBARRONDO de la SAS VOLTAIRE, avocat plaidant du barreau de PARIS

INTIMÉ :

[G] [N]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par M. [M] [X] (Délégué syndical ouvrier)

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 01 Février 2024

Présidée par Etienne RIGAL, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Fernand CHAPPRON, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Etienne RIGAL, président

- Nabila BOUCHENTOUF, conseiller

- Françoise CARRIER, conseiller honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 10 Mai 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Nabila BOUCHENTOUF, conseiller pour Etienne RIGAL, Président empêché et par Fernand CHAPPRON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

M. [G] [N] a été embauché par la société Raccordement Toutes Lignes, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er juillet 1991, en qualité de Chef d'équipe, statut ouvrier, niveau II, position 2, coefficient 140 de la convention collective des travaux publics.

En application de l'article L. 1224-1 du code du travail, son contrat de travail a ensuite été transféré au sein de la société R.T.L. à compter du 1er avril 1996, puis au sein des sociétés [Adresse 6], Forclum Infra Sud Est, Forclum Rhône Alpes et Eiffage Energie Télécom devenue Eiffage Energie Systemes - Télécom Sud Est.

M. [N] occupe actuellement le poste de Chef d'équipe, statut ouvrier, niveau III, position 2, coefficient 165 et est affecté à l'établissement [Localité 5] situé [Adresse 6].

Lors des élections du Comité d'entreprise de la Société le 1er février 2016, M. [N] a été élu membre titulaire. Depuis le 11 février 2020, il dispose d'un mandat de titulaire au Comité social et économique de la Société ainsi que d'un mandat de délégué syndical.

M. [N] a été augmenté en avril 2020, son salaire de base ayant été porté de 2.143,10 € bruts à 2.176,46 € bruts. Il perçoit également, comme élément fixe de rémunération non lié à une condition de présence, une prime d'ancienneté (liée à un usage d'entreprise au sein de la Société [Adresse 6], dont les effets ont été maintenus par accord du 1 er juin 2004 pour les salariés dont l'ancienneté était antérieure à la date de signature de l'accord) d'un montant de 235,53 €.

M. [N] a sollicité par lettre recommandée avec accusé de réception, du 5 mai 2020, reçue le 4 juin 2020, intitulée « augmentation de salaire », un réexamen de sa situation en contestant son augmentation de 33,36 € (puisque son salaire a été porté de 2.143,10 € bruts à 2.176,46 € bruts en avril 2020), considérant qu'il avait été décidé dans le cadre des NAO, d'une augmentation salariale de 2,5% dont il aurait dû bénéficier.

La société a répondu à M. [N] par lettre du 30 juin 2020 et lui a indiqué que :

-l'augmentation de 2,5% de la masse salariale prévue par les NAO correspondait à une enveloppe globale à distribuer au niveau de la filiale et à répartir en augmentations individuelles et ne constituait donc pas un pourcentage moyen d'augmentation,

- pour la catégorie N3P2 à laquelle il appartient, l'augmentation moyenne attribuée aux salariés de cette catégorie s'élèvait à 1,39% et que le salaire moyen de l'ensemble des salariés de cette catégorie est de 2.128,75 € bruts.

Le 30 septembre 2020, M. [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Roanne des demandes suivantes :

« Indemnité activité partielle : 20 €

Remise des bulletins de salaire, du panel de comparaison ainsi que des 20% des salariés qui ont évolué en 2020 (anonymisés) sous astreinte de 100 € par jour de retard

Article 700 du Code de procédure civile : 1.000 € »

Le bureau de conciliation s'étant déclaré en partage de voix, l'affaire a été renvoyée à une audience de départage.

Avant dire droit sur ses demandes indemnitaires, M. [N] a sollicité la condamnation de la société Eiffage Energie Systemes - Télécom Sud Est à lui communiquer de bulletins de salaire des mois de décembre 2000 à 2020, des mois de mars et avril de 2000 à 2020 de l'ensemble des chefs d'équipe, ainsi que des bulletins de salaire de mars et avril 2020 des 20% des salariés ayant obtenu une évolution de classification conformément à l'aritlce 4 des NAO 2020 aux fins d'établir l'existence d'une discrimination syndicale à son égard.

Il a formé une demande additionnelle et sollicité, en sus de ses demandes initiales, l'allocation de la somme de 112,74 € au titre du complément de l'indemnité d'activité partielle sur le mois d'avril et identifié sur le mois de mai 2020.

Par jugement de départage du 24 février 2021, le conseil a débouté M. [N] de l'ensemble de ses demandes provisionnelles et a renvoyé l'affaire devant le bureau de jugement s'agissant de la demande formulée au titre du complément de l'indemnité d'activité partielle sur le mois d'avril 2020.

Par jugement du 13 septepmbre 2021, le conseil de prud'hommes a :

- débouté M. [N] de ses demandes de remise de documents,

- débouté M. [N] de sa demande de dommages et intérêts au titre de la discrimination syndicale,

- ordonné à la société Eiffage Energie Systèmes Telecom Sud- Est de payer à M. [N] la somme de 112,47 € au titre de complément de l'indemnité d'activité partielle sur le mois d'avril 2020,

- débouté les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de prpcédure civile,

- dit que chaque partie conserverait la charge de ses dépens.

La société société Eiffage Energie Systèmes Télécom Sud- Est a interjeté appel de ce jugement le 12 octobre 2021.

M. [N] a interjeté appel du jugement de départage du 24 février 2021, le 14 otobre 2021.

Les instances ainsi introduites ont été jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 24 mai 2022.

Aux termes de conclusions régulièrement communiquées, la société Eiffage Energie Systèmes Télécom Sud- Est demande à la cour de :

- déclarer M. [N] irrecevable en ses demandes pour la période relative à l'exécution de son contrat de travail de 1991 à novembre 2015,

- confirmer le jugement du 13 septembre 2021 en ce qu'il a débouté M. [N] de ses demandes de remises de documents et de sa demande de dommages et intérêts au titre de la discrimination syndicale,

- infirmer le jugement en ce qu'il lui a ordonné de payer à M. [N] la somme de 112,74 € au titre de complément de l'indemnité d'activité partielle sur le mois d'avril 2020,

- débouter M. [N] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner M. [N] à lui verser la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Aux termes de conclusions régulièrement communiquées, M. [N] demande à la cour de :

- ordonner à la société Eiffage Energie Systèmes Télécom Sud- Est de lui remettre :

'' le registre d'entrée et de sortie des salariés N3 présents au mois d'août 2000,

'' les bulletins de salaire des salariés concernés des mois d'avril et de décembre de 1999 à 2020, anonymisés avec les mentions d'ancienneté et le numéro de sécurité sociale,

'' les bulletins de salaire des mois de mars et avril 2020, anonymisés, avec le numéro de sécurité sociale, des 20% de salariés ayant bénéficié d'une évolution de classification conformément à l'article 4 des NAO 2020 sur le mois d'avril 2020, anonymisés avec les mentions d'ancienneté et le numéro de sécurité sociale, le tout sous astreinte de 100 € par jour de retard,

- subsidiairement, condamner la société Eiffage Energie Systèmes Télécom Sud- Est à lui payer la somme de 75 000 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale,

- confirmer le jugement en ce qu'il a fait droit à sa demande de complément d'indemnité d'activité partielle,

- condamner la société Eiffage Energie Systèmes Télécom Sud- Est à lui payer la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité des demandes relatives à la période antérieure au 1er janvier 2015

Le 24 novembre 2014, M. [N] avait saisi une première fois le conseil de prud'hommes de Roannes de demandes de rappels de salaires.

Il ressort du jugement de départage du conseil de prud'hommes de Roanne en date du 13 janvier 2016 que la clôture des débats est intervenue à l'audience de départition qui s'est tenue le 18 novembre 2015.

Selon l'article R.1452-6 du code du travail dans sa rédaction applicable à la date de la clôture des débats, toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties font, qu'elles émanent du demandeur ou du défendeur, l'objet d'une seule instance.

Le principe de l'unicité de l'instance alors en vigueur imposait au salarié de formuler l'ensemble des demandes afférentes à son contrat de travail dans le cadre de cette instance.

M. [N] est en conséquence irrecevable à se prévaloir d'une discrimination au titre d'une période antérieure à novembre 2015 et à solliciter la communication de pièces portant sur cette période.

Sur la discrimination

Selon l'article L.2141-5 du code du travail, il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.

Il en résulte qu'un salarié ne doit pas faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte à raison notamment de ses activités syndicales.

Selon l'article L.1134-1 dans sa version applicable au litige, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

La discrimination se traduit par une disparité de traitement au désavantage d'un salarié. En cas de discrimination se traduisant par un blocage de carrière ou par des écarts de rémunération, il appartient au demandeur de se comparer avec des salariés en situation comparable c'est à dire recrutés à la même époque que lui, dans la même catégorie et ayant la même qualification que lui.

En l'espèce, M. [N] fait valoir :

- que son évolution salariale doit au moins être égale aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l'ancienneté est comparable ou, à défaut, aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues dans l'entreprise de sorte qu'il est fondé à obtenir la remise du registre d'entrée et de sortie des salariés N3 présents au mois d'août 2000 et la remise des bulletins de salaire des salariés concernés des mois d'avril et de décembre de 1999 à 2020, anonymisés avec les mentions d'ancienneté et le numéro de sécurité sociale,

- qu'en application de l'accord FPEC de 2019 et au regard de son ancienneté, il est fondé à obtenir la remise des bulletins de salaire des mois de mars et avril 2020, anonymisés, avec le numéro de sécurité sociale, des 20% de salariés ayant bénéficié d'une évolution de classification.

La société Eiffage fait valoir :

- que M. [N] ne produit aucun élément laissant supposer une différence de traitement avec ses collègues de travail,

- qu'il ne produit aucun motif pouvant justifier la production de pièces sollicitée,

- que la remise des pièces demandées serait de nature à porter atteinte à la vie privée des autres salariés, étrangers au litige,

- que l'augmentation de la masse salariale correspond à une enveloppe d'augmentation globale à distribuer au niveau de la filiale et à répartir en augmentations individuelles, qu'il ne s'agit donc pas d'un pourcentage d'augmentation garanti de sorte que pour M. [N] le fait de ne pas avoir obtenu 2,5% n'est pas révélateur d'une discrimination,

- que 75 coallaborateurs n'ont pas été augmentés en 2020 et que M. [N] a perçu une augmentation supérieure à la moyenne de celle attribuée à ses collègues de même catégorie,

- que s'agissant de la demande de communication fondée sur l'article 4 de la NAO 2020, celle-ci supposerait la communication des bulletins de paie de 20% des effectifs soit pas moins de 150 bulletins de paie,

- que le salarié ne produit aucun élément faisant apparaître que l'accord conclu le 28 mars 2019 n'autait pas été respecté

- que les primes exceptionnelles versées en 2020 pour un montant moyen de 868 € concernent tous les salariés de l'entreprise quel que soit leur niveau de sorte que le chiffre moyen de 868 € comparé au montant perçu par M. [N] n'est pas révélateur d'une discrimination,

- que sur les 36 chefs d'équipe seuls 6 ont le niveau IV, 4 d'entre eux ont une ancienneté plus importante que M. [N], et 4 d'entre eux perçoivent un salaireé inférieur au sien,

- que la rémunération de M. [N] est comparable à celle des autres chefs d'équipe niveau III engagés à la même période que lui.

Les dispositions de l'article 145 du code de procédure civile invoquées par l'appelant ne sont pas applicables en la cause, s'agissant de dispositions permettant d'obtenir l'instauration de mesures d'instruction avant tout procès, c'est à dire avant l'introduction de la procédure au fond.

Or en l'espèce, l'instance introduite par le salarié est une instance au fond.

Par contre, l'article 146 du code de procédure civile, applicable dans le cadre d'une instance au fond, dispose qu'une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait dont dépend la solution d'un litige que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas, une mesure d'instruction ne peut être ordonnée pour suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve.

Selon l'article 11 du code de procédure civile, les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction sauf au juge à tirer toute conséquence d'une abstention ou d'un refus.

Si une partie détient un élément de preuve, le juge peut, à la requête de l'autre, lui enjoindre de le produire, au besoin à peine d'astreinte, à la condition que les documents sollicités soient en rapport direct avec le litige, utiles au débat et présentent un intérêt tant pour la solution du litige que pour l'établissement de faits allégués par celui qui en demande la communication.

Il en résulte que la demande de communication ne doit pas être destinée à suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve et qu'elle ne peut s'apprécier qu'autant que la demande principale apparaîsse fondée.

Selon l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, ainsi que l'a justement retenu le conseil de prud'hommes, M. [N] ne produit aucun élément de fait faisant apparaître qu'il serait victime d'une discrimination caractérisée par un décrochement visible de son évolution de carrière par rapport à celle de salariés engagés à la même époque que lui, dans la même catégorie et avec la même qualification.

Il se prévaut du fait que son augmentation au titre de l'année 2020 n'a été que de 1,55% alors que l'augmentation à distribuer était fixée à 2,5% par l'article 1 de la NAO 2020, reconnaissant toutefois, contrairement à ce qu'il avait soutenu en première instance, qu'il n'avait pas vocation à percevoir une augmentation de 2,5%, s'agissant d'un montant global d'augmentation de la masse salariale destiné à être réparti entre augmentations individuelles.

Le tableau relatif à l'augmentation moyenne des ouvriers non promus de la catégorie N3P2 produit par l'employeur fait apparaître que celle-ci est de 1,39% et donc inférieure à celle attribuée à M. [N] de sorte qu'elle n'est pas révélatrice d'une discrimination.

M. [N] se prévaut également du fait que l'article 4 de la NAO 2020 prévoyait que les salariés n'ayant pas bénéficié de promotion professionnelle depuis 5 ans devraient être identifiés, l'entreprise s'engageant à promouvoir 20% de ses salariés.

Toutefois, le texte de l'article 4 ne vise que les salariés n'ayant bénéficié d'aucune mesure d'augmentation salariale au mérite ou de promotion professionnelle depuis 5 ans.

M. [N] ayant été augmenté en 2020, il ne saurait prétendre avoir vocation à bénéficier de cette disposition.

M. [N] invoque enfin l'accord GPEC de 2019 prévoyant en son article 4 que l'augmentation de l'élu ou du mandaté soit intervenir en cohérence avec l'évolution moyenne des salariés ayant le même emploi et la même classification.

Or l'employeur produit un tableau et des bulletins de paie anonymisés faisant apparaître :

- que, sur les 36 chefs d'équipe que compte l'entreprise, seuls 6 sont au niveau IV,

- que quatre d'entre eux ont une ancienneté plus importante que M. [N], les deux autres une ancienneté proche de la sienne,

- que seuls deux d'entre eux ont un salaire supérieur à celui de M. [N],

- que la rémunération de M. [N] est comparable à celle des autres chefs d'équipe niveau III engagés à la même période que lui.

L'ensemble de ces éléments permettant d'écarter l'existence d'une discrimination sans qu'il y ait lieu de recourir aux mesures d'instruction sollicitées, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [N] de ses demandes de ce chef.

Sur la demande de rappel d'indemnité au titre de l'activité partielle d'avril 2020

L'employeur fait valoir :

- que la somme de 233,77 € perçue par M [N] au titre des 4 jours d'activité partielle du 27 au 30 avril 2020 est conforme aux dispositions légales comme correspondant à 70% du salaire mensuel de base et de la prime d'ancienneté,

- que les 233,77 € correspondent aux 70% requis et que M. [N] a été rempli de ses droits,

- qu'il n'y avait pas lieu d'intégrer dans l'assiette de calcul du taux horaire de l'indemnité de l'activité partielle l'indemnité de congés payés, l'indemnité de voyage et le solde RTT qui n'étaient pas versées mensuellement et qui ne dépendaient pas du temps de présence du salarié dans l'entreprise et n'étaient donc pas affectées par l'activité partielle.

Le salarié fait valoir que l'assiette de calcul de la rémunération brute dans le cadre de la déifinition de l'indemnité horaire d'activité partielle est la même que celle de l'indemnité de congés payés telle que fixée par l'article L.3141-24 du code du travail de sorte que doivent y être incluses l'indemnité de congés payés, l'indemnité de voyage et le solde de RTT.

L'article R.5122-18 disposait dans sa rédaction en vigueur au mois d'avril 2020 : Le salarié placé en activité partielle reçoit une indemnité horaire, versée par son employeur, correspondant à 70 % de sa rémunération brute servant d'assiette de l'indemnité de congés payés telle que prévue au II de l'article L. 3141-24 ramenée à un montant horaire sur la base de la durée légale du travail applicable dans l'entreprise ou, lorsqu'elle est inférieure, la durée collective du travail ou la durée stipulée au contrat de travail.

[...] Pour les salariés qui bénéficient d'éléments de rémunération variables ou versés selon une périodicité non mensuelle, le salaire de référence servant au calcul de l'indemnité et de l'allocation d'activité partielle tient compte de la moyenne de ces éléments de rémunération perçus au cours des douze mois civils, ou sur la totalité des mois travaillés si le salarié a travaillé moins de douze mois civils, précédant le premier jour de placement en activité partielle de l'entreprise.

[...] L'indemnité nette versée par l'employeur ne peut excéder la rémunération nette horaire habituelle du salarié. L'indemnité et la rémunération nettes s'entendent après déduction des cotisations et contributions obligatoires retenues par l'employeur.[...].

Selon l'article L.3141-24 dans sa rédaction en vigueur au mois d'avril 2020 disposait :

I.-Le congé annuel prévu à l'article L. 3141-3 ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence.

Pour la détermination de la rémunération brute totale, il est tenu compte :

1° De l'indemnité de congé de l'année précédente ;

2° Des indemnités afférentes à la contrepartie obligatoire sous forme de repos prévues aux articles L. 3121-30, L. 3121-33 et L. 3121-38 ;

3° Des périodes assimilées à un temps de travail par les articles L. 3141-4 et L. 3141-5 qui sont considérées comme ayant donné lieu à rémunération en fonction de l'horaire de travail de l'établissement.

Lorsque la durée du congé est différente de celle prévue à l'article L. 3141-3, l'indemnité est calculée selon les règles fixées au présent I et proportionnellement à la durée du congé effectivement dû.

II.-Toutefois, l'indemnité prévue au I du présent article ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler.

Cette rémunération, sous réserve du respect des dispositions légales, est calculée en fonction :

1° Du salaire gagné dû pour la période précédant le congé ;

2° De la durée du travail effectif de l'établissement.

Le dispositif exceptionnel d'activité partielle mis en place par le gouvernement dans le cadre de l'épidémie de Covid 19 ne modifie pas les modalités de calcul édictées par ces dispositions. En effet, le document produit par le salarié en première instance et invoqué par l'employeur en cause d'appel est la circulaire d'application du décret 2020-435 du 16 avril 2020 qui concerne les salariés visés aux articles 8 et 12 de l'ordonnance 2020-346 du 27 mars 2020 à savoir :les salariés dont la durée du travail est décomptée en jours, ceux qui ne sont pas soumis aux dispositions légales ou conventionnelles relatives à la durée du travail ( personnel navigant de l'aviation civile, journalistes pigistes, voyageurs représentants placiers, salariés à domicile rémunérés à la tâche, artistes, techniciens et ouvriers du spectacle vivant et enregistré, mannequins).

Il en résulte que l'assiette de calcul de l'indemnité et de l'allocation d'activité partielle correspond à celle du calcul de l'indemnité des congés payés selon la règle du maintien de salaire conformément à l'article L.3141-24.

Les parties s'accordent pour dire qu'en l'espèce l'indemnité devait être calculée conformément au II de l'article L.3141-24.

L'employeur ne produit aucun élément démontrant que le montant de l'indemnité réclamée excéderait 70% du salaire qu'aurait perçu le salarié pour la période d'activité partielle, s'il avait continué à travailler à cette période.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fait droit à cette demande.

Sur les demandes accessoires

Il convient de laisser à chaque partie la charge de ses dépens.

Compte tenu de la disparité des situations économiques de chacune des parties, il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la société les frais non compris dans les dépens exposés dans la présente procédure.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme les jugements déférés en toutes leurs dispositions ;

Rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 21/07536
Date de la décision : 10/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-10;21.07536 ?
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