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03/05/2024 | FRANCE | N°21/02165

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 03 mai 2024, 21/02165


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





N° RG 21/02165 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NPLN





[F]



C/

S.A.S. STOKOMANI







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 25 Février 2021

RG : F18/01348











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 03 MAI 2024







APPELANTE :



[B] [F]

née le 28 Avril 1974 à [Localit

é 5]

[Adresse 4]

[Localité 3]



représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Valérie PONCIN-AUGAGNEUR de la SELARL JURI SOCIAL, avocat au barreau de LYON substi...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 21/02165 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NPLN

[F]

C/

S.A.S. STOKOMANI

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 25 Février 2021

RG : F18/01348

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 03 MAI 2024

APPELANTE :

[B] [F]

née le 28 Avril 1974 à [Localité 5]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Valérie PONCIN-AUGAGNEUR de la SELARL JURI SOCIAL, avocat au barreau de LYON substituée par Me Laurent CHABRY, avocat au barreau de LYON,

INTIMÉE :

Société STOKOMANI

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON, et ayant pour avocat plaidant Me Victor ROISIN de la SELAS FACTORHY AVOCATS, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Lara ALTINDAG, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 25 Janvier 2024

Présidée par Régis DEVAUX, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Mihaela BOGHIU, Greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Béatrice REGNIER, Présidente

- Catherine CHANEZ, Conseillère

- Régis DEVAUX, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 03 Mai 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Béatrice REGNIER, Présidente et par Mihaela BOGHIU, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La société Stokomani a pour activité le commerce de détail d'habillement en magasin et de bazar, ainsi que le déstockage d'articles de marques à prix réduits. Elle fait application de la convention collective nationale des maisons à succursales de vente au détail d'habillement (IDCC 675) et emploie plus de dix salariés. Elle a embauché Mme [B] [F] le 22 octobre 2012, dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée à temps plein, en qualité de vendeuse-caissière au sein du magasin d'[Localité 6] (38), puis à compter du mois de janvier 2013, la relation de travail se poursuivait dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.

Par avenant du 12 janvier 2014, Mme [F] a été promue responsable adjointe de magasin. A compter du 14 septembre 2015, Mme [F] a été mutée au magasin de [Localité 7] (69).

Par courrier remis en mains propres du 7 décembre 2017, la société Stokomani a convoqué Mme [F] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 21 décembre 2017 et lui a notifié sa mise à pied à titre conservatoire. Par courrier recommandé avec accusé de réception du 5 janvier 2018, la société Stokomani a licencié Mme [F] pour faute grave.

Par requête reçue au greffe le 11 mai 2018, Mme [B] [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement.

Par jugement du 25 février 2021, le juge départiteur du conseil de prud'hommes de Lyon a :

- dit que le licenciement de Mme [B] [F] repose sur une faute grave ;

- débouté Mme [B] [F] de l'intégralité de ses demandes ;

- rejeté toute autre demande plus ample ou contraire ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [B] [F] aux dépens.

Le 24 mars 2021, Mme [B] [F] a enregistré par voie électronique une déclaration d'appel à l'encontre de ce jugement, le critiquant en ce qu'il a dit que son licenciement repose sur une faute grave, l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes, qui étaient expressément rappelées, et l'a condamnée ux dépens.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 23 juin 2021, Mme [B] [F] demande à la Cour d'infirmer intégralement le jugement rendu le 25 février 2021 et de :

A titre principal,

- dire et juger que son licenciement est abusif et dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Stokomani au versement des sommes suivantes :

2 821 euros à titre d'indemnité de licenciement,

4 297,23 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 429,72 euros de congés payés afférents,

2 163,60 euros à titre de rappel de salaire durant la période de mise à pied conservatoire (28 novembre 2017 au 5 janvier 2018),

30 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Stokomani à rembourser au pôle emploi les indemnités qui lui ont été versées dans la limite de six mois,

A titre subsidiaire, si la Cour reconnaissait l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement,

- condamner la société Stokomani au versement des sommes suivantes :

2 821 euros à titre d'indemnité de licenciement,

4 297,23 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 429,72 euros de congés payés afférents,

2 163,60 euros à titre de rappel de salaire durant la période de mise à pied conservatoire (28 novembre 2017 au 5 janvier 2018),

En tout état de cause,

- condamner la société Stokomani au versement des sommes suivantes :

6 445,85 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi,

2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Stokomani aux dépens.

Mme [F] fait valoir que les griefs invoqués par la société Stokomani pour justifier son licenciement sont erronés et, en tout état de cause, celle-ci ne démontre pas leur matérialité. La salariée ajoute que la pratique des forçages de prix, qui lui est imputée, était régulièrement justifiée compte tenu des défaillances matérielles ou du mauvais enregistrement des promotions.

Dans ses uniques conclusions notifiées par voie électronique le 21 septembre 2021, la société Stokomani, intimée, demande pour sa part à la Cour de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Lyon en date du 25 février 2021 et, en conséquence, de :

- juger que le licenciement de Mme [F] repose sur une faute grave,

- débouter Mme [F] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Mme [F] à lui verser 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de la présente instance, y compris les éventuels frais d'exécution.

La société Stokomani affirme que le licenciement de Mme [F] est justifié parce que celle-ci a réalisé, à plusieurs reprises, des remises de prix fictives, ainsi que des opérations de forçage de prix injustifiées, ainsi que les fiches de caisse produites l'établissent. Elle souligne la gravité de ces comportements fautifs au regard du poste à responsabilité qu'occupait Mme [F]. En tout état de cause, la société Stokomani affirme que les demandes indemnitaires formulées par l'appelante sont injustifiées ou à tout le moins manifestement excessives, puisqu'elle ne fournit aucun élément probant de nature à attester de l'existence ou de l'étendue des préjudices dont elle réclame réparation. En outre, elle soutient qu'il n'y a pas lieu d'écarter l'application du barème issu des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

La clôture de la mise en état était ordonnée le 12 décembre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

1.1 Sur le bien-fondé du licenciement

En application de l'article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

La cause réelle du licenciement est celle qui présente un caractère d'objectivité. Elle doit être exacte. La cause sérieuse suppose une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles.

Aux termes de l'article L. 1232-6 alinéa 2 du code du travail, la lettre de licenciement comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur. Ces motifs doivent être suffisamment précis et matériellement vérifiables. La datation dans cette lettre des faits invoqués n'est pas nécessaire. L'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier des motifs. Si un doute subsiste, il profite au salarié, conformément aux dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce.

Si la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié et les conséquences que l'employeur entend en tirer quant aux modalités de rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués.

En outre, la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il incombe à l'employeur d'en rapporter la preuve.

En l'espèce, la lettre de licenciement adressée le 5 janvier 2018 à Mme [F] est rédigée dans les termes suivants :

« Le 7 novembre dernier, M. [J], directeur des ventes, et M. [S], directeur du magasin, ont pris connaissance que vous commettiez des irrégularités d'encaissement. En effet, à plusieurs reprises, vous avez volontairement pratiqué des remises de prix injustifiées sur des articles neufs et ne présentant aucun défaut et ce au profit des collaborateurs du magasin.

En effet, lors de l'entretien du 21 décembre dernier, vous avez nié les faits et prétendez que tous les forçages de prix que vous validiez faisaient l'objet d'une autorisation préalable de M. [S]. Pour vous dédouaner, vous déclarez que tout le monde peut se servir des badges des responsables des magasins.

Après vérification des listings des forçages de prix, et des plannings du directeur de magasin, il s'avère que ces opérations de forçage de prix n'ont fait l'objet d'aucune autorisation préalable de la part du directeur de magasin, parfois même en repos et contre toute vraisemblance, aucun de ces produits n'était défectueux. Pour illustration, le 10 juillet 2017, sur une plancha au prix de 19,99 euros vous avez effectué une remise de 10 euros à votre profit. Il en est de même pour le 12 août 2017, sur un jean bleu au prix initial de 39,99 euros la remise est de 30 euros à votre profit.

Au surplus, votre collègue de travail Mme [W] témoigne de votre participation active à ces pratiques d'encaissement strictement interdites.

Vous n'êtes pas sans ignorer que les forçages de prix peuvent être effectués par le directeur de magasin, à titre exceptionnel, lorsque les produits sont défectueux ou comportent des erreurs de prix. Force est de constater que vous n'avez pas respecté les procédures d'encaissement pourtant portées à votre connaissance. Ce comportement n'est pas celui que nous sommes en droit d'attendre de la part de nos collaborateurs, et ce tout particulièrement au regard de vos fonctions de responsable adjoint ».

Ainsi, la société Stokomani a licencié de Mme [F] parce qu'elle lui reproche d'avoir pratiqué des forçages de prix, sans autorisation, sur des articles neufs, au profit d'autres salariés du magasin. Elle cite comme exemples des ventes effectuées les 10 juillet et 12 août 2017, à un prix indûment réduit.

Le règlement intérieur de l'entreprise prévoit, en son article 23, dans sa version applicable depuis le 30 juin 2017, qu'il « est strictement interdit de modifier sans instruction le prix de vente des marchandises fixé préalablement. Aucune remise ne peut être consentie sur un prix sans l'accord et la signature de la direction ou d'un cadre agissant par délégation » (pièce n°6 de l'intimée). Egalement, la fiche récapitulant les règles des achats par le personnel, dont Mme [F] a pris connaissance le 12 juin 2017, indique notamment que « le choix de vos achats doit être fait sur votre temps de pause de l'après-midi (20 mn) ou en dehors de vos heures de travail. Les achats sont scannés uniquement par un responsable. En cas de retour il faut rendre les achats à un responsable dès votre arrivée en magasin le retour sera traité par un responsable. (') Il est interdit de prêter son badge » (pièce n°8 de l'intimée).

L'employeur démontre donc que Mme [F] avait parfaitement connaissance des règles applicables en matière de forçage de prix et d'achats par le personnel du magasin.

La société Stokomani expose que, ses systèmes informatiques traitant l'enregistrement des transactions ayant révélé de graves anomalies, le responsable du magasin, M. [S], a procédé à un contrôle inopiné le 7 décembre 2017. Le personnel du magasin a alors été entendu. Le société Stockmani indique que Mme [F] a alors reconnu qu'elle avait effectué des forçages de prix, uniquement concernant des marchandises présentant un état dégradé. Elle précise qu'une autre salariée, Mme [W], a reconnu que la pratique des forçages de prix était habituelle au sein du magasin et qu'elle-même avait eu recours à cette pratique pour acquérir des produits qui ne présentaient aucun défaut.

La Cour relève que la société Stokomani ne rapporte pas la preuve de la teneur précise des déclarations de Mme [F] ou de Mme [W] au sujet de la pratique de forçage des prix.

Dans ses conclusions, Mme [F] ne conteste pas la réalité de la pratique des forçages de prix. Elle explique que ceux-ci étaient nécessaires compte tenu des défaillances matérielles ou du mauvais enregistrement des promotions.

La société Stokomani admet dans ses conclusions que les forçages de prix pouvaient être effectués par le directeur de magasin mais aussi par les responsables adjoints (ce qui étaient les fonctions occupées par Mme [F]), lorsque les produits sont défectueux ou comportent des erreurs de prix.

Il convient d'en déduire que Mme [F] pouvait autoriser un forçage de prix sans enfreindre le règlement intérieur, lorsqu'un produit est défectueux ou bien comporte une erreur de prix.

La société Stokomani verse aux débats une fiche de caisse (pièces n°7b de l'intimée) qui recense 6 ventes (effectuées le 2 janvier et le 8 juillet 2017) dont le prix a été encaissé avec utilisation du badge de Mme [F] et qui ont donné lieu à un forçage de prix, autorisé avec le badge du directeur du magasin, M. [S].

La Cour relève que la société Stokomani ne rapporte pas la preuve que M. [S] était absent du commerce le 2 janvier et le 8 juillet 2017, si bien qu'elle ne peut pas reprocher à Mme [F] d'avoir indûment pratiqué un forçage de prix.

La société Stokomani verse aux débats une fiche de caisse (pièces n°7a de l'intimée) qui recense 12 ventes (effectuées les 17 janvier, 13 et 25 mai, 8 juillet 2017) dont le prix a été encaissé et qui ont donné lieu à un forçage de prix avec utilisation du badge de Mme [F].

En outre, la société Stokomani s'appuie sur une autre fiche de caisse (pièce n°7c de l'intimée) qui recense de nombreuses ventes (effectuées entre le 3 janvier et le 10 novembre 2017) dont le prix a été encaissé par l'une ou l'autre des salariées du magasin et qui ont donné lieu à un forçage de prix, avec utilisation du badge de Mme [F],.

La Cour relève que la société Stokomani ne démontre pas que les achats en cause ont été faits par ses propres salariés travaillant dans le commerce, si bien qu'il n'y a pas à vérifier s'ils ont été effectués conformément aux règles des achats par le personnel.

Par ailleurs, la société Stokomani ne rapporte pas la preuve, pour aucune des transactions litigieuses, que Mme [F] a autorisé un forçage de prix de manière injustifiée : elle ne dit rien de l'état de l'article vendu, ni de l'absence d'erreur sur le prix.

Le seul fait que Mme [F] a autorisé un nombre important de forçages de prix n'est pas, en l'absence de démonstration que cette pratique n'était pas justifiée au regard des règles fixées par l'employeur, fautif.

Dès lors, la société Stokomani échoue à établir le caractère fautif du comportement de Mme [F], visé à titre de grief par la lettre de licenciement. Le licenciement de Mme [F] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

1.2 Sur les conséquences pécuniaires du licenciement

Mme [F] a droit au paiement du salaire qui ne lui a pas été versé durant la période de mise à pied conservatoire du 28 novembre 2017 au 5 janvier 2018, l'indemnité de licenciement, l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

' Il ressort des bulletins de paie délivrés pour les mois de décembre et janvier 2018 que l'employeur a, en conséquence de la mise à pied de Mme [F], opéré une retenue sur le salaire de cette dernière, d'un montant de 2 163,60 euros.

La société Stokomani sera donc condamnée à payer à Mme [F] ce montant, à titre de rappel de salaire.

' En application de l'article 38 de la convention collective nationale des maisons à succursales de vente au détail d'habillement, la durée du délai-congé était fixée, compte tenu de l'ancienneté de Mme [F] (supérieure à 2 ans), à 2 mois.

La société Stokomani sera donc condamnée à payer à Mme [F] une indemnité compensatrice de préavis d'un montant égal à deux mois de salaire, soit 4 297,23 euros, conformément à ce qui est réclamé, outre 429,72 euros de congés payés afférents.

' Selon l'article R. 1234-2 du code du travail, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-1398 du 25 septembre 2017 et applicable au 5 janvier 2018, l'indemnité légale de licenciement ne peut être inférieure à un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à dix ans.

En conséquence, en retenant une rémunération de 2 202,36 euros (correspondant à un tiers des salaires des trois derniers mois, ce qui est plus avantageux que la moyenne mensuelle des douze derniers mois, conformément à l'article R. 1234-4 du code du travail), il est dû à Mme [F], dont l'ancienneté était de 5 années et 4 mois après expiration de son préavis (du 22 octobre 2012 au 5 mars 2018), une indemnité de licenciement d'un montant minimum de : (2 202,36 / 4) x 5,33 = 2 934,65 euros, soit plus que le montant réclamé.

La société Stokomani sera donc condamnée à payer à Mme [F] une indemnité de licenciement de 2 821 euros.

' En application des dispositions des articles L. 1235-3 du code du travail, à défaut de réintégration du salarié dans l'entreprise, celui-ci, dans le cas où son ancienneté est de 5 ans, a droit à une indemnité dont le montant est compris entre 3 et 6 mois de salaires bruts.

En retenant que le salaire mensuel brut de Mme [F] était de 2 209,69 euros, au dernier état de la relation contractuelle, compte tenu des circonstances de la rupture, de l'ancienneté et de l'âge (33 ans) de la salariée au moment du licenciement et de sa capacité à retrouver un emploi équivalent, la Cour estime que le préjudice résultant pour ce dernier de la rupture sera justement indemnisé par le versement de la somme de 13 000 euros.

La société Stokomani a procédé au licenciement de Mme [F] pour faute grave, en mettant en cause sa probité, sans justifier de la cause réelle de cette mesure.

L'employeur a ainsi agi avec une légèreté blâmable, causant à Mme [F] un préjudice moral, qui sera justement réparé par le versement de la somme de 2 000 euros.

Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail qui l'imposent et sont donc dans le débat, d'ordonner d'office à l'employeur de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées au salarié, dans la limite de six mois d'indemnités.

En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en toutes ses dispositions.

La société Stokomani, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, en application de l'article 696 du code de procédure civile. Sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée, tant pour les frais irrépétibles exposés en première instance qu'en cause d'appel.

Pour un motif tiré de l'équité, la société Stokomani sera condamnée à payer à Mme [F] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme le jugement rendu le 25 février 2021 par le conseil de prud'hommes de Lyon en toutes ses dispositions déférées ;

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et ajoutant,

Dit que le licenciement de Mme [B] [F] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société Stokomani à payer à Mme [B] [F] les sommes suivantes :

2 163,60 euros à titre de rappel de salaire,

4 297,23 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 429,72 euros de congés payés afférents,

2 821 euros à titre d'indemnité de licenciement,

13 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

2 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral occasionné par les circonstances vexatoires du licenciement ;

Ordonne à la société Stokomani de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées à Mme [B] [F], dans la limite de six mois d'indemnités ;

Condamne la société Stokomani aux dépens de première instance et de l'instance d'appel ;

Rejette la demande de la société Stokomani en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Stokomani à payer à Mme [B] [F] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 21/02165
Date de la décision : 03/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-03;21.02165 ?
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