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02/05/2024 | FRANCE | N°21/07309

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 02 mai 2024, 21/07309


N° RG 21/07309 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N3XK









Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 07 septembre 2021



RG : 2020j506





S.A.S. DALL'ANESE - PASCALU



C/



S.A.S. XEFI SAINT-ETIENNE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 02 Mai 2024







APPELANTE :



S.A.S. DALL'ANESE - PASCALU enregistrée au RCS de CLERMONT-FER

RAND sous le n°746 580 216, prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée par Me Charlie MENUT, avocat au barreau de LYON, toque : 1993, postulant et ayant pour avocat plaidant Me Arnaud REMEDEM de ...

N° RG 21/07309 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N3XK

Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 07 septembre 2021

RG : 2020j506

S.A.S. DALL'ANESE - PASCALU

C/

S.A.S. XEFI SAINT-ETIENNE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 02 Mai 2024

APPELANTE :

S.A.S. DALL'ANESE - PASCALU enregistrée au RCS de CLERMONT-FERRAND sous le n°746 580 216, prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Charlie MENUT, avocat au barreau de LYON, toque : 1993, postulant et ayant pour avocat plaidant Me Arnaud REMEDEM de la SCP BLANC-BARBIER - VERT - REMEDEM & Associés, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMEE :

S.A.S. XEFI SAINT-ETIENNE enregistrée au registre du commerce et des sociétés de SAINT-ÉTIENNE sous le n° 417 817 392, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès-qualités audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée et plaidant par Me Julien MARGOTTON de la SELARL PRIMA AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : T.1287

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 13 Septembre 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 28 Février 2024

Date de mise à disposition : 02 Mai 2024

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Aurore JULLIEN, conseillère

- Viviane LE GALL, conseillère

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, Greffière et en présence de Léa TRUCHY, Greffière stagiaire,

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La Sas Dall'Anese ' Pascalu (ci-après société Dall'Anese) est spécialisée dans les opérations de découpage et d'emboutissage du métal à destination notamment de l'art coutelier. La Sas Xefi Saint-Etienne (Xefi) a pour activité le conseil en systèmes et logiciels informatiques.

Le 24 mai 2018, les sociétés Xefi et Dall'Anese ont conclu un contrat de prestation de maintenance préventive informatique pour une durée de 36 mois et un montant mensuel de 250 euros HT.

Par courrier recommandé du 21 janvier 2020, la société Dall'Anese a fait part de son mécontentement à la société Xefi après avoir fait l'objet d'une cyber-attaque. Elle a suspendu le prélèvement du mois de janvier 2020.

Par courrier recommandé du 24 janvier 2020, la société Xefi a indiqué à la société Dall'Anese que le champ de leur relation contractuelle ne comprenait pas la sauvegarde des données et la protection du parc informatique. Elle a également précisé ne pas avoir été à l'origine de la cyber-attaque.

Par courrier recommandé du 6 février 2020, la société Xefi a mis en demeure la société Xefi de régler l'échéance impayée. Cette mise en demeure est demeurée sans effet, la société Xefi a procédé à la résiliation du contrat et a exigé le règlement de la totalité du contrat jusqu'à son terme.

Par acte du 27 mai 2020, la société Xefi Saint-Etienne a assigné la société Dall'Anese devant le tribunal de commerce de Lyon afin notamment d'obtenir la somme de 7.497,46 euros TTC au titre des sommes échues à échoir en application du contrat du 24 mai 2018.

Par jugement contradictoire du 7 septembre 2021, le tribunal de commerce de Lyon a :

- jugé valable en toutes ses dispositions le contrat signé entre la société Xefi et la société Dall'Anese,

- jugé comme bien fondée la résiliation prononcée par la société Xefi le 6 mars 2020 aux torts exclusifs de la société Dall'Anese,

- condamné la société Dall'Anese au paiement de la somme de 7.497,46 euros TTC, correspondant aux factures annuelles de 3.748,73 euros TTC pour 2020 et 2021, outre intérêts au taux légal à compter du 6 février 2020,

- condamné la société Dall'Anese à payer à la société Xefi la somme de 40 euros au titre de la facture impayée,

- rejeté comme non fondés tous autres moyens, fins et conclusions contraires des parties,

- condamné la société Dall'Anese à payer 750 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Dall'Anese aux entiers dépens.

La société Dall'Anese a interjeté appel par acte du 1er octobre 2021

***

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 19 mai 2022 fondées sur les articles 1104, 1130, 1131, 1217 et 1231-1 et suivants du code civil et les articles L. 441-6 et D. 441-5 du code de commerce, la société Dall'Anese demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré dans l'ensemble de ses dispositions,

en conséquence :

à titre principal, sur l'irrecevabilité des demandes :

- juger que la société Xefi a manqué à son obligation de conciliation préalable obligatoire,

- juger irrecevables les demandes formées par la société Xefi à son encontre,

- débouter la société Xefi de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

à titre subsidiaire, sur le fond du litige :

- juger que la société Xefi a manqué à ses obligations contractuelles en ne procédant nullement à une maintenance curative,

- juger qu'elle-même n'a nullement manqué à ses obligations,

- juger que de ce fait, elle a été contrainte de s'adresser à un tiers pour la remise en service de son système informatique,

- juger qu'en tout état de cause, son consentement a été vicié lors de la conclusion du contrat en date du 24 mai 2018,

en conséquence,

- juger que le contrat en date du 24 mai 2018 a été résilié le 31 janvier 2020 aux torts exclusifs de la société Xefi,

- juger que le contrat en date du 24 mai 2018 est frappé de nullité à effet au 31 janvier 2020,

- juger que les stipulations de l'article 9 du contrat litigieux sont constitutives d'une clause pénale,

- juger n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 9 du contrat litigieux, en

en conséquence,

- juger qu'elle ne peut être redevable que du montant de la facture d'un montant de 312,27 euros correspondant à la mensualité due au titre du mois de janvier 2020,

à titre reconventionnel,

- juger que les carences et l'inertie imputables à la société Xefi sont constitutives d'un préjudice moral et d'un préjudice économique dont elle a souffert,

- condamner la société Xefi à lui payer et porter les sommes de :

3.012 euros en réparation de son préjudice économique,

5.000 euros en réparation de son préjudice moral,

le tout sous déduction de la facture d'un montant de 312,27 euros correspondant à la mensualité due au titre du mois de janvier 2020,

en tout état de cause,

- débouter la société Xefi de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions, plus amples ou contraires, dirigées à son encontre,

- condamner la société Xefi à lui payer et porter la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

***

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 31 mai 2022 fondées sur les articles 1103, 1104, 1217 et 1231-1 du code civil et les articles L. 441-6 et D. 441-5 du code de commerce, la société Xefi Saint-Etienne demande à la cour de :

- juger recevable et bien-fondé ses conclusions d'intimée,

- juger que l'article 9 des conditions générales de vente n'est pas une clause de conciliation conventionnelle obligatoire,

- juger qu'elle a parfaitement respecté ses obligations contractuelles,

- juger que le contrat conclu le 24 mai 2018 est parfaitement valable et régulier,

- juger que la société Dall'Anese n'a subi aucun préjudice indemnisable par elle,

- juger que la société Dall'Anese ne s'est pas acquittée des échéances de la facture n° DASE2000069 depuis janvier 2020,

- juger que la société Dall'Anese est redevable de la somme de 7.497,46 euros TTC, au titre des obligations qu'elle tient du contrat conclu le 24 mai 2018,

- juger bien fondée sa demande de paiement,

- juger que le contrat a été résilié le 6 mars 2020 aux torts exclusifs de la société Dall'Anese, rendant exigible le montant des échéances dues jusqu'au terme du contrat,

- juger que les dispositions contractuelles stipulant qu'en cas de résiliation anticipée la société Dall'Anese serait redevable de l'intégralité des échéances restant dues jusqu'au terme du contrat constitue une clause de dédit non réductible par le juge,

par conséquent,

- rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions de la société Dall'Anese,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

dès lors,

- condamner la société Dall'Anese à lui payer la somme de 7.497,46 euros TTC au titre des sommes échues et à échoir en application du contrat conclu le 24 mai 2018, outre intérêts au taux prévu à l'article L. 441-6 du code de commerce,

- condamner la société Dall'Anese à lui payer la somme de 40 euros au titre de la facture impayée, conformément aux dispositions des articles L. 441-6 et D. 441-5 du code de commerce,

- prononcer la résiliation du contrat conclu le 24 mai 2018 aux torts exclusifs de la société Dall'Anese, à la date du 6 mars 2020,

- condamner la société Dall'Anese à lui payer la somme de 3.000 euros a en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Dall'Anese en tous les dépens.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 13 septembre 2022, les débats étant fixés au 28 février 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des demandes de l'intimée

La société Dall'Anese fait valoir que l'article 9.2 du contrat du 24 mai 2018 prévoit un préalable obligatoire de conciliation avant toute action en justice ; que l'intimée n'a pas respecté cet engagement avant de solliciter la résiliation judiciaire du contrat, que ses demandes sont donc irrecevables et que le jugement doit être annulé et réformé, que sa volonté de récupérer ses codes administrateurs après avoir été victime de la cyber attaque et en l'absence de solution proposée par l'intimée ne saurait s'interpréter comme une volonté de non conciliation de sa part.

La société Xefi Saint-Etienne réplique que la clause litigieuse n'impose pas la saisine d'un tiers indépendant et impartial chargé de concilier les parties et n'est pas une clause conventionnelle de conciliation obligatoire, mais d'une simple invitation formelle à chercher une solution amiable, qu' elle avait proposé une intervention rapide à l'appelante et a cherché pendant des mois une solution amiable au litige et que la demande de récupération des codes administrateurs par l'appelante a été faite en pure opportunité afin de faire intervenir un tiers, traduisant le défaut de volonté amiable de l'appelante.

Sur ce,

Il résulte de l'article 9.2 du contrat de maintenance que 'pour tout différend non résolu et pouvant intervenir entre les parties à l'occasion de l'exécution du présent contrat ou de son interprétation, les parties s'obligent à rechercher en toute bonne foi une solution amiable, avant toute action en justice ou résiliation des présentes. Chacune des deux parties devra notifier par lettre recommandée avec accusé de réception sa volonté de recourir à la procédure de conciliation'.

Cette clause aux termes imprécis incitant les parties à une recherche préalable de solution amiable et qui ne définit nullement ce que serait la procédure de conciliation (aucune indication sur la désignation d'un tiers indépendant et impartial devant être saisi pour exécuter la mesure) ni ses modalités de mise en oeuvre ne peut cependant être interprétée comme une clause de conciliation conventuelle obligatoire s'imposant au juge. Elle ne prévoit aucune sanction en cas de non respect d'une procédure de conciliation préalable.

Le terme 'procédure de conciliation' qui est employé qualifie donc une simple invitation adressée aux parties et n'est donc pas un obstacle à la procédure judiciaire.

Il est relevé par ailleurs que les parties ont échangé vainement dans le cadre d'une phase amiable (courriers des 21 et 24 janvier 2020) et que l'appelante n'a elle-même pas chercher à mettre en application une quelconque procédure de conciliation préalable, que n'empêchait pas une démarche pour récupérer des codes.

En conséquence, la clause litigieuse ne peut constituer une fin de non recevoir et le jugement est confirmé en ce qu'il a écarté ce moyen d'irrecevabilité.

Sur la nullité du contrat

Ce moyen doit nécessairement être examiné avant celui portant sur des inexécutions contractuelles, en ce qu'il serait de nature à entraîner l'anéantissement du contrat.

La société Dall'Anese fait valoir que :

- elle était habituellement engagée auprès de la société Erenet devenue Xefi pour des contrats de maintenance informatique d'un an renouvelables explicitement et ses interlocuteurs sont demeurés les mêmes ; les parties avaient convenu dans ce contexte que tout contrat devait avoir une durée d'un an, conformément au souhait de la concluante ; or, le contrat du 24 mai 2018 stipule finalement une durée de 3 ans,

- la mention de la durée du contrat manque de clarté et n'apparaît qu'au sein des conditions générales alors qu'elle revêt un caractère substantiel ; elle n'a pas conclu le contrat du 24 mai 2018 dans des conditions lui permettant de prendre la mesure de ses engagements et son consentement n'a pas été libre et éclairé,

- son engagement était à ses yeux annuel et elle a l'habitude de conclure des contrats d'un an,

- l'intimée se prévaut d'une seule obligation préventive, alors que les conditions générales témoignent également sous le même item d'une obligation curative,

- au regard de l'ensemble des éléments, la nullité du contrat du 24 mai 2018 doit être prononcée à effet du 31 janvier 2020 ; les demandes de l'intimée doivent donc être purement et simplement rejetées.

La société Xefi fait valoir que :

- l'appelante invoque une condition potestative à son seul bénéfice pour mettre un terme au contrat, elle ne précise pas le vice du consentement dont elle aurait été victime ni dans quelle mesure la durée du contrat aurait eu un caractère déterminant,

- l'appelante ne démontre pas avoir commis une erreur ni l'engagement de la responsabilité de la concluante ; l'attestation produite est dénuée de force probante dès lors qu'elle émane d'une salariée de l'appelante, soumise à un lien de subordination, et bénéficiant de liens familiaux avec la direction ; c'est une preuve constituée par l'appelante à elle-même, l'appelante se contente d'affirmer qu'elle ne conclut que des contrats d'un an, sans en produire, elle ne s'est pas rapprochée de la concluante en vue d'un renouvellement à la date anniversaire et a pourtant continué à payer postérieurement à cette date les échéances du contrat ; elle savait donc que celui-ci s'exécutait sur plusieurs années,

- la durée du contrat est parfaitement lisible dès lors qu'il s'agit d'une clause des conditions générales de vente intitulée 'Durée' ; l'appelante, professionnelle, doit lire les conditions générales et rechercher une clause qu'elle affirme être déterminante.

Sur ce,

L'appelante invoque les dispositions de l'article 1130 du code civil qui dispose que 'L'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes' ainsi que l'article 1131 qui précise que 'Les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat'.

L'appelante ne précise pas quel vice de consentement elle invoque précisément de sorte que, ne faisant état d'aucun fait de violence, sa demande sera examinée au regard de l'erreur et du dol.

Le contrat stipule très précisément en son article 9.1 que l'appelante s'est engagée pour une durée courant jusqu'au 31 décembre de l'année N +3, le contrat étant renouvelable par tacite reconduction. Aucune erreur sur la durée du contrat ne peut donc être alléguée en raison d'un contrat 'illisible', la précision étant portée dans le chapitre clairement dénommé 'durée, résiliation' et l'appelante, professionnelle, ne pouvait se méprendre sur la durée stipulée.

L'appelante invoque ensuite vainement sans offre de preuve qu'elle avait l'habitude de contracter avec son adversaire pour une durée de un an, que ceci avait été convenu entre elles et revêtait pour elle un caractère déterminant, ne procédant que par allégations. Outre qu'une telle pratique, à la supposer avérée, ne remettrait pas en cause un contrat conclu valablement pour une durée supérieure clairement indiquée, l'attestation de salariés liée par un lien de subordination, outre un lien familial avec le dirigeant, est totalement inopérante, en raison de leur caractère nécessairement subjectif, à rapporter la preuve de manoeuvres dolosives du cocontractant ou d'un consentement vicié par l'erreur du dirigeant lors de la signature du contrat.

Le fait que la facturation soit annuelle est par ailleurs sans emport sur la durée du contrat. Il est en outre relevé que l'appelante a continué le paiement des échéances pendant un an et demi sans interrogation sur la durée du contrat.

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du contrat en raison d'un vice du consentement et estimé le contrat valable.

Sur les manquements contractuels

La société Dall'Anese fait valoir que :

- le centre gouvernemental de veille, d'alerte et de réponse aux attaques informatiques a confirmé que l'intimée a été compromise en janvier 2020 par un rançongiciel 'qui s'est propagé sur les réseaux de ses clients par le biais d'un outil de supervision mais qu'elle n'a pas communiqué sur la conduite à tenir et n'est pas intervenue pour remettre en service son réseau informatique ; la concluante a donc dû faire intervenir en urgence un tiers,

- la cyber attaque a eu lieu par le logiciel de la société Kaseya installé par l'intimée afin de lui permettre d'intervenir sur le réseau informatique de la concluante ; l'intimée est aux termes du contrat responsable de ses installations,

- l'intimée était la seule qui pouvait intervenir sur le logiciel Kaseya dans son installation qui ne disposait pas de ses propres codes administrateurs ; elle avait la garde et la direction de ce logiciel ; l'absence d'intervention est constitutive d'un préjudice au détriment de la concluante,

- un virus informatique ne peut être qualifié de force majeure, de sorte qu'il ne peut exonérer l'intimée de sa carence,

- le dysfonctionnement du logiciel Kaseya ne résulte pas d'une des clauses d'exclusion de responsabilité prévues par l'article 4 du contrat,

- l'intimée n'était pas tenue d'une simple maintenance préventive mais également d'une mission curative mais la maintenance préventive s'est manifestement trouvée inefficace, l'intimée aurait dû faire preuve de diligence pour la résolution de la situation, soit en intervenant de façon curative, soit en permettant à un tiers d'intervenir ; son absence d'intervention curative est constitutive d'une faute,

- à l'inverse, aucune carence n'est imputable à la concluante qui a de bonne foi tenté de joindre l'intimée à de nombreuses reprises, d'abord par téléphone puis par mail, et s'est retrouvée dans l'incapacité d'assurer la continuité de son activité professionnelle dans la mesure où l'intégralité du réseau informatique était affectée,

- la circonstance que la cyber-attaque ait fait l'objet d'une communication de l'Etat ou que celle-ci ressorte de sa compétence n'est pas de nature à exonérer l'intimée,

- la résiliation du contrat du 24 mai 2018 doit être prononcée aux torts exclusifs de l'intimée à la date du 31 janvier 2020.

La société Xefi Saint-Etienne réplique que :

- l'article 10 du contrat du 24 mai 2018 stipule que le défaut de paiement à échéance après mise en demeure donne lieu à l'exigibilité immédiate de toutes les sommes restantes dues,

- elle n'est pas responsable de la cyber attaque, qui a visé la société Kaseya et a affecté par ce biais l'appelante et elle n'est pas responsable des failles informatiques du logiciel Kaseya ; elle n'en avait pas la garde mais en était simple utilisatrice,

- l'utilisation du logiciel Kaseya était nécessaire à l'exécution de son obligation ; l'appelante a accepté l'installation de ce type de logiciel en acceptant les conditions générales de vente ; l'article 13 des conditions générales de vente exclut toute responsabilité de la concluante en cas d'attaque informatique,

- elle n'était tenue que d'une maintenance préventive à raison d'une fois par mois, et non d'une maintenance curative, d'une protection du parc informatique, d'un service de sécurité, d'antivirus, ou de sauvegarde des données ; l'appelante le savait, sa lettre recommandée du 21 janvier 2020 en atteste,

- aucune donnée de l'appelante n'a été divulguée dès lors qu'elles sont cryptées et elle a toujours réalisé les maintenances préventives contractuellement prévues,

- elle a mis en demeure l'appelante par lettre recommandée du 6 février 2020 ; celle-ci étant restée sans effet, de même que la sommation de payer, la résiliation du contrat du 24 mai 2018 doit être confirmée aux torts exclusifs de l'appelante,

- l'appelante ne démontre pas qu'elle aurait été dans l'incapacité d'utiliser son système informatique jusqu'à l'intervention du prestataire tiers,

- la communication par l'Etat sur cette cyber attaque démontre que cette infraction relevait, par son ampleur, de la compétence de l'Etat ; la responsabilité de l'infraction ou de l'absence de communication ne peut donc pas être imputée à la concluante.

Sur ce,

Selon l'article 1103 du code civil, 'Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits'. L'article 1104 précise qu'ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

Selon l'article 1231-1 du code civil, 'Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure'.

Il est constant que l'appelante a cessé de s'acquitter des échéances mensuelles à compter de janvier 2020 et il lui appartient de rapporter la preuve des manquements contractuels qu'elle impute à son adversaire.

Sur l'étendue du contrat, l'article 2 des conditions générales de vente du contrat liant les parties prévoit une maintenance préventive une fois par mois consistant à effectuer une intervention sur site différentes prestations. pour réaliser une vérification de la protection anti-virale par différents contrôles, la mise à jour des systèmes d'exploitation, la vérification de l'état des postes...

Cette seule prestation est précisée et tarifée dans le contrat sous la rubrique 'matériels et systèmes'. L'appelante ne peut donc se prévaloir des dispositions de l'article 2 se rapportant à la maintenance curative qui est hors du champ contractuel, en ce que le contrat ne prévoit pas un service de maintenance curative qui n'est nullement tarifé. C'est donc vainement que l'appelante prétend que ce service est inhérent à tout contrat et elle ne justifie en tout état de cause pas avoir mis en oeuvre les dispositions inhérentes à une maintenance curative et notamment sur l'existence d'une demande écrite.

Il apparaît au contraire que l'appelante a eu recours à un autre prestataire informatique sans en aviser l'intimée, laquelle avait proposé un devis pour intervenir.

L'attestation d'Intersed, par ailleurs concurrent de l'intimée, ne rapporte pas la preuve contraire, son affirmation selon laquelle elle aurait contacté l'intimée n'est confirmée par aucun élément et est sans emport sur les prestations prévues au contrat.

Aucun service de sécurité ou d'antivirus ou de sauvegarde de données n'a été souscrit auprès de l'intimée par ailleurs.

Ensuite, il n'est pas contesté que l'intimée utilise le logiciel Kaseya, logiciel de monotoring dont l'utilité réside dans la maintenance préventive, de sorte qu'il est nécessaire à l'exécution des obligations de l'intimée, ce qui est insuffisant à caractériser un manquement contractuel et ne la rend pas responsable d'une faille informatique au sein de ce logiciel dont l'utilisation n'est nullement fautive. La pièce 17 de l'appelante ne l'établit pas et n'est pas un document probant. Le jugement a ainsi, à juste titre, rappelé que l'intimée n'était pas à l'origine de la cyber-attaque qui a eu pour cible l'éditeur informatique Kaseya et a touché nombre d'entreprises.

L'appelante ne procède ensuite que par affirmations sans offre de preuve lorsqu'elle prétend qu'elle aurait été dans l'impossibilité d'utiliser son système informatique. Elle procède de même en ce qui concerne les dysfonctionnements allégués. Il n'est pas démontré qu'un secret de l'entreprise aurait ainsi été divulgué alors que les données bénéficient d'un système de cryptage.

C'est donc à tort que la société appelante qui ne démontre pas une inexécution contractuelle de son adversaire, a cessé les paiements.

En conséquence de ce qui précède, le jugement est confirmé en ce qu'il dit que la résiliation du contrat par la société Vefi aux torts exclusifs de son cocontractant était fondée.

Sur la clause pénale ou de dédit

La société Dall'Anese fait valoir que la clause de durée du contrat doit être qualifiée de clause pénale dans la mesure où elle a pour but de déterminer à l'avance la sanction applicable au cas où l'une des parties n'exécuterait pas ses obligations, que la clause pénale est excessive eu égard à son montant, à l'absence de préjudice évoqué par l'intimée, et de son intervention en tant que prestataire de service et non en tant que fournisseur de matériel ou matériaux ; qu'elle ne doit que la facture d'un montant de 312,27 euros au titre du mois de janvier 2020.

La société Xefi Saint-Etienne réplique que la clause litigieuse dont l'objet est de permettre aux parties de se libérer unilatéralement est une clause de dédit et non une clause pénale et le juge n'a pas la faculté de la diminuer ou supprimer, que lorsqu'elle conclut un contrat, elle doit réaliser des investissements importants d'organisation interne et déploiement d'outils notamment ; que ces investissements sont ensuite lissés dans la facturation sur l'ensemble du contrat dont la durée du contrat est donc un élément déterminant de la fixation du prix des prestations, de sorte que le client ne peut résilier de façon anticipée qu'en s'acquittant de l'ensemble des mensualités jusqu'au terme du contrat.

Sur ce,

L'article 10 du contrat stipule que le défaut de paiement à échéance après mise en demeure donne lieu à l'exigibilité immédiate de toutes les sommes restant dues.

En droit,  la clause qui stipule une indemnité en cas de résiliation anticipée de la part du client dont le montant était équivalent au prix dû en cas d'exécution du contrat jusqu'à son terme, sans aucune contrepartie et présente, dès lors, un caractère à la fois indemnitaire, puisqu'elle constitue une évaluation forfaitaire du dommage subi à la suite de la résiliation du contrat, et un caractère comminatoire, son montant élevé ayant pour but de contraindre l'adversaire à exécuter le contrat jusqu'à son terme, constitue une clause pénale et non une clause de dédit de sorte qu'elle est réductible par le juge si elle est excessive.

La clause litigieuse présente ainsi les caractères d'une clause pénale au vu de ce qui précède.

L'appelante se contente d'affirmer que la clause pénale en cause emporte par nature des conséquences excessives au regard des engagements réciproques, ce qui est insuffisant à établir son caractère totalement excessif, alors que le contrat de prestation génère investissements et organisation spécifique.

Cependant, le montant de ces coûts reste imprécis de sorte que la clause pénale apparaît en partie excessive et sera réduite à 4.000 euros, le jugement étant infirmé de ce chef.

Sur les préjudices allégués par l'appelante

La société Dall'Anese fait valoir que :

- elle était pendant des jours dans l'incapacité de réaliser la moindre opération informatique, d'utiliser son matériel de découpe laser et de satisfaire les demandes de ses clients en raison de l'inertie de l'intimée,

- l'intimée est responsable des dommages subis par elle consécutivement à la cyber-attaque, et sa carence l'a contrainte à faire intervenir un tiers pour un coût de 3.012 euros TTC ; l'intimée doit être condamnée à payer en réparation ce montant,

- l'inertie de l'intimée et sa mauvaise foi lui ont causé un important préjudice moral de 5.000 euros ; elle a ainsi dû gérer seule la défaillance de son système informatique et sa situation économique, et contacté l'ensemble de ses clients pour les rassurer.

La société Xefi Saint-Etienne réplique que cette demande est artificielle dans son montant, elle n'a commis aucune faute et n'est pas responsable de la cyber attaque et l'appelante ne démontre pas s'être retrouvée paralysée jusqu'à l'intervention du prestataire tiers, elle a fait une proposition d'intervention à l'appelante qui est restée sans réponse, illustrant l'absence de préjudice et d''inertie' de sa part, enfin, l'appelante ne démontre pas la situation économique difficile qu'elle évoque durant le mois de la cyber attaque et il est grotesque pour une société commerciale de solliciter une indemnisation pour préjudice moral.

Sur ce,

Dans la mesure où les manquements contractuels de l'intimée ne sont pas établis, l'appelante ne peut obtenir aucun dommages intérêts indemnisant un préjudice découlant de l'attitude fautive de son adversaire. Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

L'appelante a à sa charge les dépens d'appel et versera en cause d'appel à son adversaire la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les condamnations de première instance à ce titre sont confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a condamné la société Dall'Anese au paiement de la somme de 7.497,46 euros TTC, correspondant aux factures annuelles de 3.748,73 euros TTC pour 2020 et 2021, outre intérêts au taux légal à compter du 6 février 2020.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que les stipulations de l'article 9 du contrat du 24 mai 2018 constituent une clause pénale.

Dit que la clause pénale est excessive.

Condamne la Sas Dall'Anese à payer à la société Xefi Saint-Etienne la somme de 4.000 euros TTC au titre de la clause pénale outre intérêts au taux légal à compter du 6 février 2020.

Condamne la Sas DAll'Anese Pascalu à payer à la société Xefi saint-Etienne une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Condamne la société DAll'Anese Pascalu aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 21/07309
Date de la décision : 02/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-02;21.07309 ?
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