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01/05/2024 | FRANCE | N°24/03693

France | France, Cour d'appel de Lyon, Retentions, 01 mai 2024, 24/03693


N°RG 24/03693 - N°Portalis DBVX-V-B7I-PUOU



Nom du ressortissant :

[I] [C]



[C]

C/

PREFETE DU RHONE

COUR D'APPEL DE LYON



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DU 01 MAI 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers





Nous, Stéphanie LE TOUX, conseiller à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 4 janvier 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articl

es L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile,



Assistée de Charlotte COMBAL, gr...

N°RG 24/03693 - N°Portalis DBVX-V-B7I-PUOU

Nom du ressortissant :

[I] [C]

[C]

C/

PREFETE DU RHONE

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 01 MAI 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers

Nous, Stéphanie LE TOUX, conseiller à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 4 janvier 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile,

Assistée de Charlotte COMBAL, greffière,

En l'absence du ministère public,

En audience publique du 01 Mai 2024 dans la procédure suivie entre :

APPELANT :

M. [I] [C]

né le 08 Février 2001 à [Localité 2]

de nationalité Algérienne

Actuellement retenu au Centre de rétention administrative [1]

comparant assisté de Maître Stéphanie MANTIONE, avocat au barreau de LYON, commis d'office et avec le concours de [M] [D], interprète assermentée en langue arabe, experte près la cour d'appel de LYON

ET

INTIME :

MME LA PREFETE DU RHONE

non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître Eddy PERRIN, avocat au barreau de LYON substituant Me Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON

Avons mis l'affaire en délibéré au 01 Mai 2024 à 17 heures 00 et à cette date et heure prononcé l'ordonnance dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire avec interdiction de retour durant 36 mois a été notifiée à [I] [C] le 24 juillet 2023 par le préfet de la Haute-Savoie.

Par décision du 14 février 2024, notifiée à l'intéressé le jour même, la préfète du Rhône a ordonné le placement de [I] [C] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire à compter du 14 février 2024.

Par ordonnances des 16 février 2024 confirmée en appel le 20 février 2024, du 15 mars 2024 confirmée en appel le 17 mars 2024 et du 14 avril 2024 confirmée en appel le 16 avril 2024, le juge des libertés et de la détention a prolongé la rétention administrative de [I] [C] pour des durées successives de vingt-huit, trente et quinze jours.

Suivant requête du 26 avril 2024, reçue le 28 avril 2024, la préfète du Rhône a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de LYON aux fins de voir ordonner une dernière prolongation exceptionnelle de la rétention pour une durée de quinze jours.

Dans son ordonnance du 29 avril 2024 à 14 heures 37, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de LYON a fait droit à cette requête.

Par déclaration au greffe le 30 avril 2024 à 12 heures 22, [I] [C] a interjeté appel de cette ordonnance en faisant valoir qu'aucun des critères définis par le CESEDA n'est réuni et que la quatrième prolongation de sa rétention administrative est impossible en ce que aucune action de sa part dans les 15 derniers jours de sa rétention ne peut être regardée comme une menace pour l'ordre public. Il sollicite l'infirmation de l'ordonnance déférée et sa remise en liberté.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 1er mai 2024 à 10 heures 30.

[I] [C] a comparu et a été assisté d'un interprète et de son avocat. Il confirme son identité. Il déclare être en France depuis environ 2 ans, mais avoir passé la dernière année en prison. Il est démuni de documents d'identité. Il affirme avoir auparavant vécu aux Pays-Bas et qu'il vivait en Suisse avant son incarcération. Célibataire, sans enfant, ses parents et sa soeur vivent en Algérie.

Le conseil de [I] [C] a été entendu en sa plaidoirie pour soutenir les termes de la requête d'appel en soulignant que la menace à l'ordre public n'est pas apparue au cours de 15 derniers jours et que si la préfecture a été diligente, elle n'établit pas que la délivrance des documents de voyage par le consulat algérien interviendra à bref délai compte tenu de leur silence depuis février 2024.

La préfète du Rhône, représentée par son conseil, a demandé la confirmation de l'ordonnance déférée en précisant que la menace à l'ordre public est toujours d'actualité et que la préfecture a fait les diligences pour obtenir les documents de voyage.

[I] [C] a eu la parole en dernier. Il déclare être fatigué de la prison et du centre de rétention et être prêt à quitter la France par ses propres moyens.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel de [I] [C] relevé dans les formes et délais légaux prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) est recevable. 

Sur le bien-fondé de la requête

L'article L. 741-3 du CESEDA rappelle qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que le temps strictement nécessaire à son départ et que l'administration doit exercer toute diligence à cet effet.

L'article L. 742-5 du même code dispose que 'A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;

2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :

a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;

b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d'éloignelment n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.

(...)

Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l'avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours'. 

Le conseil de [I] [C] soutient que les conditions de ce texte ne sont pas réunies en ce que sa situation ne répond aux conditions de la quatrième prolongation.

L'autorité administrative fait valoir dans sa requête que:

- le comportement de l'intéressé constitue une menace pour l'ordre public dans la mesure où il a été écroué le 24 juillet 2023, condamné par le tribunal judiciaire de LYON le 27 juillet 2023 à une peine de 10 mois d'emprisonnement pour des faits de vol aggravé par 2 circonstances et fourniture d'identité imaginaire.

- il ne peut justifier de la réalité de ses moyens d'existence effectifs puisqu'il déclare vivre en Suisse sans en justifier et ajoute ne pas travailler.

- il fait l'usage de nombreux alias, dissimulant sa véritable identité, faisant ainsi obstacle à son éloignement vers son pays d'origine. Il a été signalisé aux Pays-Bas qui a refusé sa réadmission le 27 février 2024.

- l'intéressé étant démuni de tout document d'identité ou de voyage en cours de validité, des diligences ont été engagées auprès des autorités consulaires algériennes dès le 8 février 2024. Un jeu d'empreintes et une photo de l'intéressé ont été fournis le 6 mars 2024. Une relance a été effectuée le 14 mars 2024, le 5 avril 2024 et le 19 avril 2024, dans l'attente de leur retour.

La requête de l'autorité administrative repose essentiellement sur des motifs de trouble à l'ordre public, mais également de délivrance des documents transfontaliers à bref délai, dès lors qu'il ne peut être reproché à [I] [C] d'avoir, depuis la dernière décision du 14 avril 2024 confirmée en appel le 16 avril 2024, fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ou présenté une quelconque demande dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement.

Le conseil de [I] [C] soutient que l'article L. 742-5 in fine doit s'entendre comme la recherche d'une menace pour l'ordre public commise dans les 15 derniers jours de la rétention. Or, comme le souligne le juge des libertés et de la détention dans l'ordonnance critiquée, cette interprétation dénature les termes clairs de ce texte qui n'exigent pas que la circonstance prévue par son septième alinéa corresponde à des faits commis dans la période précédente de la rétention administrative, mais que seul le caractère actuel de la menace doit être vérifié. Ainsi, la concrétisation de la menace pour l'ordre public peut être révélée par les éléments antérieurs mis en avant par l'autorité administrative. En l'espèce, [I] [C] a été condamné le 27 juillet 2023 par le tribunal correctionnel de LYON à une peine de 10 mois d'emprisonnement pour des faits de vol aggravé par 2 circonstances et fourniture d'identité imaginaire, si bien que le comportement de l'intéressé constitue toujours une menace pour l'ordre public au regard de sa condamnation récente. En revanche, en dépit des diligences effectuées par l'autorité administrative et malgré une relance auprès des autorités consulaires algériennes le 19 avril 2024, le silence de ces autorités saisies depuis le 8 février 2024 et ayant fait l'objet de 2 relances antérieures, ne permet pas d'établir que la délivrance des documents de voyage puisse intervenir à bref délai à ce stade très avancé de la procédure.

En conséquence, l'ordonnance entreprise est infirmée.

PAR CES MOTIFS

Déclarons recevable l'appel formé par [I] [C],

Infirmons l'ordonnance déférée et statuant à nouveau,

Rejetons la requête en prolongation de la rétention administrative de la préfète du Rhône du 26 avril 2024, reçue le 28 avril 2024 à l'égard de [I] [C],

Ordonnons la remise en liberté immédiate de [I] [C].

Le greffier, Le conseiller délégué,

Charlotte COMBAL Stéphanie LE TOUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Retentions
Numéro d'arrêt : 24/03693
Date de la décision : 01/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-01;24.03693 ?
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