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19/04/2024 | FRANCE | N°24/03351

France | France, Cour d'appel de Lyon, Retentions, 19 avril 2024, 24/03351


N° RG 24/03351 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PTWL



Nom du ressortissant :

[C] [V]



[V]

C/

PREFET DE L'AIN



COUR D'APPEL DE LYON



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DU 19 AVRIL 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers





Nous, Nathalie LAURENT, conseiller à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du15 avril 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des

articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile,



Assistée de Charlotte COMBAL, ...

N° RG 24/03351 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PTWL

Nom du ressortissant :

[C] [V]

[V]

C/

PREFET DE L'AIN

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 19 AVRIL 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers

Nous, Nathalie LAURENT, conseiller à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du15 avril 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile,

Assistée de Charlotte COMBAL, greffier,

En l'absence du ministère public,

En audience publique du 19 Avril 2024 dans la procédure suivie entre :

APPELANT :

M. [C] [V]

né le 10 Septembre 2000 à [Localité 3]

de nationalité Marocaine

Actuellement retenu au centre de rétention administrative de [4]

comparant assisté de Maître Nathalie LOUVIER, avocat au barreau de LYON, commis d'office et avec le concours de Madame [H] [W], interpréte en langue arabe, liste CESEDA, ayant prêté serment à l'audience

ET

INTIME :

M. LE PREFET DE L'AIN

non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître AUGOYARD Marc, avocat au barreau de LYON substituant Me Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON,

Avons mis l'affaire en délibéré au 19 Avril 2024 à 16 heures 00 et à cette date et heure prononcé l'ordonnance dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Une obligation de quitter le territoire français sans délai assortie d'une interdiction de retour pendant 30 mois a été notifiée à [C] [V] le 16 avril 2024.

Par décision en date du 16 avril 2024, l'autorité administrative a ordonné le placement de [C] [V] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire à compter du 16 avril 2024.

Suivant requête du 17 avril 2024, reçue le 17 avril 2024, le préfet de l'Ain a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir ordonner la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours.

Suivant requête du 17 avril 2024, réceptionnée par le greffe du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon le 17 avril 2024, [C] [V] a contesté la décision de placement en rétention administrative prise par le préfet de l'Ain.

Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon, dans son ordonnance du 18 avril 2024 à 15 heures 14 a :

' ordonné la jonction des deux procédures,

' déclaré recevable en la forme la requête de [C] [V] et l'a rejetée au fond,

' déclaré régulière la décision de placement en rétention prononcée à l'encontre de [C] [V],

' déclaré recevable la requête en prolongation de la rétention administrative,

' déclaré régulière la procédure diligentée à l'encontre de [C] [V],

' ordonné la prolongation de la rétention de [C] [V] dans les locaux du centre de rétention administrative de Lyon pour une durée de vingt-huit jours.

[C] [V] a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration au greffe le18 avril 2024 à 15 heures 49, faisant valoir, outre l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté, que la décision de placement en rétention était insuffisamment motivée en droit et en fait, que celle-ci était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses garanties de représentation et qu'il n'y avait pas de nécessité de prononcer un placement en rétention. [C] [V] a demandé l'infirmation de l'ordonnance déférée et sa remise en liberté.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 19 avril 2024 à 10 heures 00.

[C] [V] a comparu, assisté d'un interprète et de son avocat.

Il a indiqué qu'il était de passage en France d'où il était prêt à partir pour retourner en Espagne. Il a expliqué quil s'était trompé en disant qu'il voulait partir en Belgique et qu'il avait un billet de train pour [Localité 5] dans le but d'aller en Espagne.

Le conseil de [C] [V] a été entendu en sa plaidoirie. Il a rappelé qu'en première instance, il s'était désisté du moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté en sorte que c'est par erreur que ce moyen figure dans l'acte d'appel. Il s'en est en outre rapporté s'agissant de l'examen de la situation personnelle de [C] [V] dont il estime qu'il a eu lieu. Il a en revanche soutenu l'irrégularité de placement en rétention pour absence de nécessité dès lors que les investigations faites n'ont porté que sur sa situation en Belgique par l'interrogation du CCPD de [Localité 2] et non pas sur sa sitaution en Espagne auprès des CCPD frontaliers avec ce pays. Les autorités administratives n'ont pas vérifié si l'Espagne, où il a son domicile et sa compagne, l'acceptait, étant rappelé qu'il est ressortissant marocain et qu'il a déjà fait l'objet d'une mesure d'éloignement dans son pays d'origine en 2019 et qu'il n'acessé de dire qu'il était de passage en France et voulait retourner en Espagne où il justifie avoir fait une nouvelle demande de titre de séjour en mars 2024.

Le préfet de l'Ain, représenté par son conseil, a demandé la confirmation de l'ordonnance déférée, observant, à l'instar du conseil de l'intéressé que la motivation de la décision de placement en rétention administrative était suffisante et l'examen de la situation individuelle de l'intéressé réel. S'agissant de la nécessité de la mesure, il a fait valoir qu'au vu des éléments confus dont l'autorité administrative disposait au moment de la décision quant à la destination et la provenance de [C] [V], dont il était par définition établi qu'il ne disposait pas de titre de séjour en Espagne, la vérification a dès lors porté sur la Belgique où il a également été constaté qu'il n'était pas accepté, étant précisé que les démarches auprès des autorités marocaines sont également justifiées. Il a en outre observé que la mesure d'obligation de quitter le territoire français qui avait été confirmée par le tribunal administratif le jour de l'audience, s'appliquait à tout l'espace Schengen.

[C] [V] a eu la parole en dernier. Il estime n'avoir aucun problème en Belgique.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel de [C] [V] relevé dans les formes et délais légaux prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) est déclaré recevable ; 

Sur le moyen de l'incompétence de l'acte

Attendu que le conseil de M. [V] précise qu'il s'était désisté de ce moyen en première instance et qu'il se désiste également de ce moyen devant le délégué du premier président ;

Sur le moyen pris de l'insuffisance de la motivation de la décision de placement en rétention administrative et du défaut d'examen de la situation individuelle

Il résulte de l'article L. 741-6 du CESEDA que la décision de placement en rétention est écrite et motivée;

Cette motivation se doit de retracer les motifs positifs de fait et de droit qui ont guidé l'administration pour prendre sa décision, ce qui signifie que l'autorité administrative n'a pas à énoncer, puis à expliquer pourquoi elle a écarté les éléments favorables à une autre solution que la privation de liberté ;

Pour autant, l'arrêté doit expliciter la raison ou les raisons pour lesquelles la personne a été placée en rétention au regard d'éléments factuels pertinents liés à la situation individuelle et personnelle de l'intéressé, et ce au jour où l'autorité administrative prend sa décision, sans avoir à relater avec exhaustivité l'intégralité des allégations de la personne concernée ;

[C] [V] sollicite que les éléments suivants de sa situation soient pris en compte :

- il vit actuellement en Espagne à Barcelone avec sa compagne, ressortissante espagnole, avec laquelle il a pour projet de se marier,

- il a effectué en Espagne les démarches afin de renouveler sa carte de résident,

- lors de son interpellation à la gare de [Localité 1], il rentrait d'Italie pour l'Espagne, avec l'intention d'acheter un billet de train à [Localité 5],

- il n'a aucunement l'intention de rester en France, où il était seulement de passage pour rentrer chez lui,

- sa carte de séjour expirée donnée aux policiers atteste de son identité et de sa bonne foi, même s'il était dépourvu de billet de train pour l'Espagne.

En l'espèce, l'arrêté du préfet de l'Ain a retenu au titre de sa motivation que [C] [V], ressortissant marocain entré irrégulièrement en France depuis 2 jours où il est très défavorablement connu sous plusieurs alias ayant déjà fait l'objet d'une mesure d'éloignement en mai 2019, dépourvu de document d'identité, de justificatif de domicile et déclarant vouloir se rendre en Espagne ou en Belgique où il n'est pas admissible, présente un risque de soustraction avéré à la mesure d'éloignement dont il est l'objet et ne dispose pas de garanties de représentation suffisantes pour couvrir ce risque.

Il est donc acquis que les éléments pertinents de sa situation personnelle au moment de la mesure de rétention ont été pris en compte par le préfet de l'Ain dont la décision est suffisamment motivée, ce qui n'est plus contesté.

Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ne peut être accueilli.

Que s'il déclare aujourd'hui qu'il retournait en Espagne rejoindre sa future épouse sans document d'identité, ni de voyage à cet effet et venait d'Italie, il a été interpelé à [Localité 6] en partance pour [Localité 5] et dans l'intention d'aller en Belgique puis en Espagne comme il l'a déclaré.Qu'il ne justifie en tout état de cause de la réalité des éléments personnnels qu'il invoque à l'exception d'une demande de renouvellement de carte de séjour arrivé à échéance en Espagne. Qu'il est au demeurant connu en France sous de nombreux alias.

Sur le moyen pris de l'erreur d'appréciation des garanties de représentation et de l'absence de nécessité du placement en rétention

L'article L. 741-1 du CESEDA dispose que « L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente.» ;

La régularité de la décision administrative s'apprécie au jour de son édiction, au regard des éléments de fait connus de l'administration à cette date et l'obligation de motivation ne peut s'étendre au-delà de l'exposé des éléments qui sous-tendent la décision en cause ;

En l'état des éléments du dossier au moment de la décision de rétention et notamment de l'intention confusément exprimée par [C] [V] de se rendre en Belgique ou en Espagne tout en ne disposant d'un titre de voyage qu'à destination de [Localité 5] sans que ce passage par la France puisse être compris, de ce qu'il ne disposait que d'un titre de séjour en Espagne expiré depuis 2018 et d'une demande de «renouvellement» de ce titre formée en mars 2024, de ce qu'il n'était pas admis en Belgique suite à l'interrogation des autorités belges et de ce qu'il ne justifiait pas d'un domicile en Espagne, la nécessité de son placement en rétention avec sollicitation des autorités de son pays d'origine ne saurait être remise en cause.

En outre, il n'est pas contesté qu'[C] [V], dépourvu de document d'identité à l'exception de sa demande de titre de séjour en Espagne, d'adresse en France et de justificatif de domicile en Espagne ne présente pas de garanties de représentation suffisantes.

Il n'est pas caractérisé que l'autorité administrative a commis une erreur manifeste d'appréciation et ce moyen ne peut donc pas être accueilli.

Sur la prolongation du placement en rétention

En outre, il n'est pas contesté qu'[T] [S] [P], dépourvu de document d'identité à l'exception de sa demande de titre de séjour en Espagne, d'adresse en France et de justificatif de domicile en Espagne ne présente pas de garanties de représentation suffisantes.

En conséquence, l'ordonnance entreprise sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

Déclarons recevable l'appel formé par [C] [V],

Confirmons en toutes ses dispositions l'ordonnance déférée.

Le greffier, Le conseiller délégué,

Charlotte COMBAL Nathalie LAURENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Retentions
Numéro d'arrêt : 24/03351
Date de la décision : 19/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 27/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-19;24.03351 ?
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