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11/04/2024 | FRANCE | N°20/07393

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 11 avril 2024, 20/07393


N° RG 20/07393 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NKAN















Décision du Tribunal Judiciaire de Lyon

Au fond du 08 décembre 2020

( 4ème chambre)



RG : 18/07135















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 11 Avril 2024







APPELANTS :



M. [J] [U] [W]

né le [Date naissance 3] 1965 à [Local

ité 6] (PORTUGAL)

[Adresse 4]

[Localité 1]



Représenté par Me Samir BELLASRI, avocat au barreau de LYON, toque : 1572





Mme [S] [H] épouse [U] [W]

née le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 7] (PORTUGAL)

[Adresse 4]

[Localité 1]



Représentée par Me Samir B...

N° RG 20/07393 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NKAN

Décision du Tribunal Judiciaire de Lyon

Au fond du 08 décembre 2020

( 4ème chambre)

RG : 18/07135

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 11 Avril 2024

APPELANTS :

M. [J] [U] [W]

né le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 6] (PORTUGAL)

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Samir BELLASRI, avocat au barreau de LYON, toque : 1572

Mme [S] [H] épouse [U] [W]

née le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 7] (PORTUGAL)

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Samir BELLASRI, avocat au barreau de LYON, toque : 1572

INTIMEE :

S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DE RHONE ALPES

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représentée par la SCP AXIOJURIS LEXIENS, avocat au barreau de LYON, toque : 673

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 12 Octobre 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 06 Décembre 2023

Date de mise à disposition : 21 mars prorogée au 11 Avril 2024, les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure civile

Audience présidée par Thierry GAUTHIER, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Julien MIGNOT, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Anne WYON, président

- Julien SEITZ, conseiller

- Thierry GAUTHIER, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par offre émise le 24 avril 2009, Mme et M. [U] [W] (les emprunteurs) ont souscrit un prêt d'un montant de 1 222 317,52 euros auprès de la Caisse d'épargne et de prévoyance de Rhône-Alpes (la banque).

Le 3 février 2018, à la demande des emprunteurs, un expert-comptable leur remettait un rapport concernant notamment la régularité du taux effectif global (TEG).

Par acte d'huissier de justice du 26 juin 2018, les emprunteurs ont fait assigner la banque devant le tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire, de Lyon, motif pris d'une irrégularité du TEG.

Par jugement du 8 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Lyon a :

- déclaré irrecevable, comme étant prescrite, l'action engagée par les emprunteurs ;

- condamné in solidum les emprunteurs à supporter le coût des entiers dépens de l'instance, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Grafmeyer Baudrier Alléaume Joussemet ;

- condamné in solidum les mêmes à payer à la banque la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration transmise au greffe le 25 décembre 2020, les emprunteurs ont relevé appel de cette décision.

Dans leurs conclusions, n° 2, déposées le 20 août 2021, les emprunteurs demandent à la cour de :

- infirmer le jugement contesté en ce qu'il a :

- déclaré irrecevable leur action, comme étant prescrite ;

- les a condamnés in solidum à supporter le coût des entiers dépens de l'instance, avec droit de recouvrement direct au profit du conseil de la banque ;

- les a condamnés in solidum à payer à la banque la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ,

- Statuant à nouveau :

- déclarer leur action recevable et bien fondée.

- constater que le calcul du TEG appliqué par l'organisme prêteur méconnaît les dispositions du code de la consommation ;

- débouter la banque de l'intégralité de ses demandes et prétentions.

A titre principal

- prononcer la nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel fixé dans l'offre de prêt initial entre la banque et les requérants, et lui substituer, jusqu'au terme du contrat, le taux légal en vigueur à la date de souscription du prêt, le taux légal subissant les modifications successives que la loi lui apporte ;

- condamner la banque à fournir un nouvel échéancier au taux d'intérêt légal dans les quinze jours à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

- condamner la banque à leur rembourser les intérêts trop perçus.

- condamner la banque à leur rembourser la somme de 89 115 euros correspondant aux intérêts trop perçus au mois de mai 2018, somme à parfaire à la date de l'arrêt à intervenir ;

A titre subsidiaire,

- prononcer la déchéance du droit aux intérêts à l'encontre de la banque ;

- condamner la banque à leur rembourser les intérêts trop perçus ;

- fixer le montant à leur rembourser par la banque à la somme de 89 115 euros correspondant aux intérêts trop perçus au mois de mai 2018, somme à parfaire à la date de l'arrêt à intervenir ;

- condamner la banque à leur rembourser la somme de 89 115 euros correspondant aux intérêts trop perçus au mois de mai 2018, somme à parfaire à la date de l'arrêt à intervenir ;

En tout état de cause

- condamner la banque à leur payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- infirmer le jugement en ce qu'il les a condamnés in solidum à payer à la banque la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- débouter la banque de l'intégralité de ses demandes et prétentions relatives aux frais irrépétibles ;

- condamner la banque aux entiers dépens tant devant le tribunal qu'en cause d'appel.

Dans ses conclusions déposées le 20 mai 2021, la banque demande à la cour de :

A titre principal

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 8 décembre 2020 ;

- y ajoutant, condamner solidairement les emprunteurs à lui payer une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens distraits au bénéfice de la SCP Grafmeyer Baudrier Alléaume Joussemet, avocat, sur son offre de droit ;

A titre subsidiaire

- débouter les emprunteurs, comme irrecevables, étant prescrits, en ce qui concerne l'offre et en tout état de cause non fondés en leurs contestations contre l'offre de prêt ;

- condamner solidairement les mêmes à lui payer une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens distraits au bénéfice de la SCP Grafmeyer Baudrier Alléaume Joussemet, avocat, sur son offre de droit ;

A titre très subsidiaire

- dire et juger n'y avoir lieu à déchéance de son droit aux intérêts ;

- à défaut, limiter la déchéance de son droit aux intérêts à « 1.00 euros » (sic) ;

- débouter les emprunteurs de l'ensemble de leurs autres prétentions.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 12 octobre 2021.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se reporter aux conclusions des parties ci-dessus visées, pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la prescription du droit d'agir des emprunteurs

À titre infirmatif, les appelants soutiennent que l'organisme prêteur leur a fait croire que le calcul du TEG tenait compte de l'assurance souscrite, des frais de dossier ainsi que de la garantie, conformément à l'article 15 de l'offre de prêt alors qu'il n'en est rien. Ils soutiennent que seul un expert était capable de mesurer l'incidence mathématique de ces irrégularités sur le calcul du TEG et qu'ils ne pouvaient imaginer que l'établissement de crédit ferait preuve de mauvaise foi. Ils considèrent en conséquence que le délai de prescription n'a commencé à courir qu'à partir du moment où ils ont eu connaissance de l'erreur, soit à la date de réception du rapport de l'expert comptable, en février 2018.

À titre confirmatif, la banque considère que, antérieurement à l'acceptation de l'offre de prêt, soit le 5 mai 2009, les appelants ont eu la possibilité de constater que celle-ci, comme ils le soutiennent, serait irrégulière tant en ce qui concerne le calcul des intérêts conventionnels que du taux effectif global ou encore pour les indications qui doivent y être portées.

Elle estime que les griefs invoqués dans l'assignation sont des moyens clairement apparents à la lecture de l'offre.

Elle considère que les appelants ne peuvent ainsi prétendre avoir découvert les erreurs alléguées postérieurement au 5 mai 2014 et leur assignation est tardive.

Sur ce,

L'action en déchéance du droit aux intérêts prévue par l'article L. 312-33 du code de la consommation, seule action possible en considération de la nature des griefs invoqués par les appelants, est soumise à une prescription quinquennale.

Le point de départ du délai de prescription quinquennale de l'action sanctionnant une erreur affectant le taux effectif global est fixé au jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant le taux effectif global.

Toutefois, lorsque la simple lecture de l'offre de prêt permet à l'emprunteur de déceler son irrégularité, le point de départ du délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts se situe au jour de l'acceptation de l'offre, sans report possible tiré de la révélation postérieure d'autres irrégularités.

En l'espèce, les appelants soutiennent que ce n'est qu'à la réception du rapport d'expertise du 3 février 2018, qu'ils ont fait établir de manière unilatérale et non contradictoire, qu'ils ont été en mesure de découvrir les irrégularités du contrat consistant dans l'inobservation par la banque du délai de réflexion de 10 jours, le défaut d'intégration de l'assurance externe de la co-emprunteuse dans le coût du crédit et du TEG, le défaut de prise en compte des coûts de la période de préfinancement pour le calcul du TEG ainsi que le calcul des intérêts conventionnels sur une année de 360 jours et non sur une année civile.

Or, comme l'a retenu le tribunal, la lecture de l'offre de prêt émise le 24 avril 2009, qui comportait une mention explicite à cet égard, permettait aux appelants de se convaincre que le coût de la période de préfinancement n'avait pas été intégré dans le calcul du crédit et du TEG.

Il en est de même pour le calcul des intérêts sur une année de 360 jours, la mention d'une telle durée permettant aux appelants de suspecter une irrégularité, qu'il leur convenait de faire vérifier dans le délai de prescription. En outre, il suffisait aux appelants de reprendre le calcul des intérêts mis en compte dans le tableau d'amortissement - les appelants ne soutenant pas qu'il ne leur a pas été fourni - pour vérifier qu'ils correspondaient à 30/360 des intérêts annuels calculés par l'application du taux d'intérêt annuel sur le capital restant dû après paiement de l'échéance précédente. Les appelants ne démontrent ni ne soutiennent qu'ils n'étaient pas en mesure d'effectuer cette règle simple de calcul.

Dans le même sens, il ressort de l'offre de prêt que le montant de la prime de l'assurance externe souscrite par l'appelante était nul, ce qui traduisait l'absence de prise en compte de cette prime par la banque.

Par ailleurs, les appelants ne peuvent pas utilement soutenir qu'ils ne sont rendus compte qu'à la suite de la réception du rapport de l'expert, en 2018, de ce que la banque n'aurait pas respecté le délai de réflexion qui leur était imparti pour signer l'offre de prêt, ce qui est intervenu le 5 mai 2009.

Dès lors, le jugement doit être approuvé en ce qu'il a retenu que la simple lecture de l'offre de prêt mettait les appelants en mesure d'appréhender la réalité des irrégularités dont ils soutiennent l'existence dans le cadre de leur recours, ou en tant que de besoin, alertés par de possibles irrégularités, de diligenter une expertise financière et d'agir dans le délai de prescription qui leur était imparti.

En conséquence, le point de départ de la prescription doit être retenu au 24 avril 2009, date d'émission de l'offre et les appelants devaient agir au plus tard le 24 avril 2014.

L'action engagée par les appelants, le 26 juin 2018, est tardive et leurs demandes sont atteintes de prescription.

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les autres demandes

Les appelants, qui perdent leur recours, en supporteront les dépens, avec distraction au profit du conseil de la banque, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par ailleurs, l'équité commande de les condamner à payer à la banque la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de rejeter leurs demandes au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y AJOUTANT,

Condamne in solidum M. [J] [U] [W] et Mme [S] [H], épouse [U] [W] à supporter les dépens d'appel, avec distraction au profit de la SCP Grafmeyer Baudrier Alléaume Joussemet, en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [J] [U] [W] et Mme [S] [H], épouse [U] [W] à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance de Rhône-Alpes la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et rejette leur demande au titre des frais irrépétibles.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 20/07393
Date de la décision : 11/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-11;20.07393 ?
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