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10/04/2024 | FRANCE | N°20/05986

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 10 avril 2024, 20/05986


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR



N° RG 20/05986 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NGZW



Société COFELY AIRPORT AND LOGISTICSSERVICES

C/

[Y]



APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 29 Septembre 2020

RG : F16/02471

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 10 AVRIL 2024







APPELANTE :



Société COFELY AIRPORT AND LOGISTICS SERVICES venant aux droits de la Société AXIMA REGIONA

L

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Fanny LEJEUNE de la SCP ZI...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 20/05986 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NGZW

Société COFELY AIRPORT AND LOGISTICSSERVICES

C/

[Y]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LYON

du 29 Septembre 2020

RG : F16/02471

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 10 AVRIL 2024

APPELANTE :

Société COFELY AIRPORT AND LOGISTICS SERVICES venant aux droits de la Société AXIMA REGIONAL

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Fanny LEJEUNE de la SCP ZIELESKIEWICZ ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ :

[W] [Y] décédé, représenté par ses héritiers

né le 07 Septembre 1958 à [Localité 13]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Maria HAROUT, avocat au barreau de LYON

PARTIE INTERVENANTES :

[I] [R] veuve [Y]

née le 03 Janvier 1959 à [Localité 11] (ALGERIE)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Sabine LAMBERT FERRERO, avocat au barreau de LYON substituée par Me Magalie AIDI, avocat au barreau de VIENNE

[P] [Y]

née le 04 Mai 1984 à [Localité 11] (ALGERIE)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Sabine LAMBERT FERRERO, avocat au barreau de LYON substituée par Me Magalie AIDI, avocat au barreau de VIENNE

[Z] [O] [Y]

né le 02 Mars 1988 à [Localité 11] (ALGERIE)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Sabine LAMBERT FERRERO, avocat au barreau de LYON substituée par Me Magalie AIDI, avocat au barreau de VIENNE

[K] [Y]

né le 08 Août 1995 à [Localité 11] (ALGERIE)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Sabine LAMBERT FERRERO, avocat au barreau de LYON substituée par Me Magalie AIDI, avocat au barreau de VIENNE

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 30 Janvier 2024

Présidée par Catherine MAILHES, Présidente magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Catherine MAILHES, présidente

- Nathalie ROCCI, conseillère

- Anne BRUNNER, conseillère

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 10 Avril 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine MAILHES, Présidente et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [Y] (le salarié) a été engagé par la société Axima régional (aux droits de laquelle vient Cofely airport and logistics services [ALS], la société) par contrat à durée indéterminée du 22 décembre 2004, à effet du 1er janvier 2005, en qualité de superviseur d'exploitation 1, niveau IV, échelon 2, coefficient 270 de la convention collective des industries métallurgiques du Rhône.

La société employait habituellement au moins 11 salariés lors de la rupture de la relation de travail.

Le salarié a été élu délégué du personnel titulaire en décembre 2014.

La société Axima assurait le traitement des bagages confié par l'Aéroport de [10], dans le cadre d'un marché perdu au profit de la société Alstef à compter du 3 janvier 2016.

La société a convoqué les délégués du personnel dont M. [Y], à une réunion le 22 décembre 2015 en vue de leur consultation sur un projet de licenciement collectif pour motif économique et mise en oeuvre d'un congé de reclassement, au terme de laquelle les représentants du personnel ont rendu un avis favorable sur le projet de licenciement, et un avis défavorable sur la mise en oeuvre du congé de reclassement.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 décembre 2015, la société Axima régional a proposé au salarié, concerné par le projet de licenciement collectif pour motif économique, un reclassement sur un poste d'opérateur technique au sein de l'aéroport de [4].

Par un autre courrier du même jour, la société l'a interrogé sur son souhait de recevoir des offres de reclassement hors du territoire national.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 24 décembre 2015, la société a convoqué le salarié le 05 janvier 2016 en vue d'un entretien préalable à son licenciement.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 janvier 2016, la société Axima Régional a énoncé au salarié le motif économique de son licenciement et l'a dispensé d'activité pendant la durée de la procédure.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 janvier 2016, prenant note du refus par le salarié de la proposition de poste de reclassement formulée le 23 décembre 2015, la société a modifié l'offre en augmentant le salaire proposé.

Par courrier du 11 février 2016, la société a sollicité l'autorisation de l'inspection du travail pour procéder au licenciement pour motif économique du salarié, refusée par décision du 31 mars 2016.

Par courrier du 9 juin 2016, la société a de nouveau sollicité l'autorisation de l'inspection du travail pour pouvoir procéder au licenciement pour motif économique du salarié.

Le 7 juillet 2016, M. [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins de voir la société condamnée à lui verser des dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat (10 000 euros), un rappel de prime d'ancienneté sur la base du coefficient 285 de juillet 2011 à juin 2016 (472,42 euros), et congés payés afférents (47,24 euros) (subsidiairement, sur la base du coefficient 270 appliqué de juillet 2011 à juin 2016 (111,58 euros, outre congés payés afférents : 11,16 euros), et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile (2 000 euros).

Au dernier état de ses conclusions déposées le 15 octobre 2018, le salarié a modifié ses demandes, sollicitant à titre principal la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société à la date du licenciement, à titre subsidiaire la déclaration de son licenciement pour motif économique sans cause réelle et sérieuse, le versement d'un rappel de salaire au titre du salaire minimum conventionnel coefficient 285 du 01/03/2017 au 03/06/2018 (2 953,25 euros), outre congés payés afférents (295,32 euros) (ou à titre subsidiaire, au titre du salaire minimum conventionnel coefficient 270, à hauteur de 1 317,29 euros, outre 131,72 euros de congés payés), des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail (13 300 euros), un rappel de salaires pour heures supplémentaires de 2012 à 2015 (6 275,37 euros), outre congés payés afférents (626,54 euros), des dommages et intérêts pour travail dissimulé (13 300 euros), ainsi que le versement de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sans application de l'article L. 1235-3 du code du travail (40 000 euros), ou à titre subsidiaire pour licenciement nul (40 000 euros), ou à titre très subsidiaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec application du plafond précité (26 550 euros), et des dommages et intérêts pour remise d'une attestation pôle emploi erronée (1 500 euros).

Le rappel de prime d'ancienneté était ramené à 1 071,17 euros sur la période du 4 juillet 2011 au 3 juin 2018 (à titre principal sur la base du coefficient 285, et à titre subsidiaire sur la base du coefficient 270 : 299 euros outre 29,90 euros de congés payés afférents) et le salarié ne soulevait plus la violation de l'obligation de sécurité.

La société Cofely airport and logistics services a été convoquée devant le bureau de conciliation et d'orientation par courrier recommandé avec accusé de réception signé le 18 juillet 2016.

La société Cofely airport and logistics services s'est opposée aux demandes du salarié et a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de celui-ci au versement de la somme de 2.500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'inspection du travail a rejeté la seconde demande d'autorisation de licenciement, par décision du 5 août 2016.

Par courrier du 4 octobre 2016, la société a formé un recours hiérarchique à l'encontre de la décision de refus de l'inspection du travail devant le ministre du travail, lequel a rendu une décision implicite de rejet le 4 février 2017.

La société Axima a été absorbée par la société Cofely ALS dans le cadre d'une transmission universelle de patrimoine, à compter du 1er mars 2017, et le contrat de travail du salarié a été transféré à la même date.

Par courrier du 10 janvier 2018, le salarié a reçu une proposition de reclassement au poste d'opérateur technique à l'aéroport de [4], refusé par ce dernier par courrier du 20 janvier 2018.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 25 janvier 2018, la société a convoqué le salarié le 7 février 2018 en vue d'un entretien préalable à son licenciement.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 28 février 2018, la société Cofely ALS notifié au salarié son licenciement pour motif économique, dans les termes suivants :

' /.../ En ce qui concerne les motifs de ce licenciement, il s'agit de ceux qui vous ont été exposés lors de l'entretien précité, à savoir la suppression de votre poste de Superviseur au sein de la société, résultant des difficultés économiques auxquelles la société est confrontée depuis plusieurs années.

Depuis 2004, la société AXIMA MAINTENANCE AEROPORTUAIRE REGIONALE effectuait la maintenance de systèmes de tri bagages de l'Aéroport de [10] au travers d'un contrat signé entre COFELY Airport and Logistics Services (maison mère de AXIMA MINTENANCE AEROPORTUAIRE REGIONALE) et Aéroports de [Localité 7].

Initialement dédié à la maintenance du hall 2 le contrat a évolué au fur et à mesure des divers appels d'offres successifs pour englober également la maintenance du terminal 1 et par conséquent l'ensemble des systèmes de tri existant au sein de l'aéroport de [10].

En 2015, Aéroports de [Localité 7] a lancé un appel d'offres pour la fourniture, l'installation et la maintenance du système de tri bagages du nouveau terminal «FT1» en cours de construction.

Pour répondre à l'appel d'offre ci-dessus mentionné, COFELY Airport and Logistics Services a lié une association avec l'entreprise Vanderlande industries, leader mondial incontestable dans ce domaine d'activité afin d'être l'entreprise qui effectuera la maintenance des installations du nouveau terminal FT1.

En cours d'appel d'offres, Aéroports de [Localité 7] a décidé d'inclure la maintenance de tous les systèmes de tri bagages historiques au nouveau marché d'installation et de maintenance afin de baisser les prix récurrents en provoquant des synergies sur les activités de maintenance sur tous les terminaux de l'aéroport.

Trois groupes d'entreprises, dont Vanderlande associé à COFELY Airport and Logistics Services étaient, après de nombreux mois de négociation, short-listés avant de demander une dernière offre pour décision finale et irrévocable.

Finalement, c'était la société Alstef qui était choisie pour ce marché ; Alstef étant l'unique société parmi les trois short-listées qui avait répondu seule à la totalité du marché, c'est-à-dire : la fourniture, l'installation et la maintenance du nouveau système de tri bagages mais aussi des systèmes de tri bagages historiques.

La société COFELY Airport and Logistics Services, via sa filiale AXIMA MAINTENANCE AEROPORTUAIRE REGIONALE a assuré, jusqu'au 2 janvier 2016, la maintenance et l'exploitation des installations de tri bagages des terminaux T1 et T2 de l'aéroport de [Localité 7].

Depuis le 3 janvier 2016, la société AXIMA MAINTENANCE AEROPORTUAIRE REGIONALE n'a donc plus aucune activité sur l'aéroport de [Localité 7].

Cela conduit directement à une perte de près de 80 % de son chiffre d'affaires.

Dans ce contexte, la société AXIMA MAINTENANCE AEROPORTUAIRE REGIONALE a été contrainte de prendre des mesures afin de sauvegarder sa compétitivité et celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient, conduisant ainsi à la suppression de tous les postes de Superviseur au sein de son établissement basé à [Localité 7].

Les Délégués du Personnel ont été informés et consultés. lors des réunions du 18 et du 22 décembre 2015, sur ce projet de licenciement collectif pour motif économique et sur la mise en oeuvre du congé de reclassement.

Afin d'éviter votre licenciement, nous avons mis en oeuvre tous les moyens afin de faciliter votre reclassement et notamment par des recherches approfondies tant au sein de la société que du groupe auquel elle appartient.

C'est ainsi qu'une proposition de reclassement sur un poste d'opérateur technique au sein de COFELY Airport and Logistics Services, sur le site C&M de l'aéroport [4] à [Localité 9] vous a été formulée le 23 décembre 2015.

Cette proposition a évolué afin de vous proposer ce même poste. assorti d'une rémunération identique à celle que vous aviez au sein de AXIMA MAINTENANCE AEROPORTUAIRE REGIONALE.

Vous n'avez pas accepté cette proposition et n'avez pas plus accepté de recevoir des propositions en dehors du territoire national.

En date du 1er mars 2017, AXIMA MAINTENANCE AEROPORTUAIRE REGIONALE a été absorbée par COFELY Airport and Logistics Services, votre contrat de travail ayant été transféré à cette occasion.

Naturellement, cette fusion-absorption n'a pas amélioré la situation économique déjà précaire de COFELY Airport and Logistics Services et a eu des répercussions importantes sur les résultats économiques et financiers de COFELY Airport and Logistics Services qui subit déjà d'importantes difficultés économiques depuis plusieurs années.

Ainsi, son chiffre d'affaires est passé de 9 476 K euros en 2015 à 8 973 K euros en 2017 et son résultat d'exploitation prévisionnel était au 31/12/2017 tout juste à l'équilibre.

L'évolution du chiffre d'affaires et du résultat de la société COFELY Airport and Logistics Services est la suivante :

La situation économique de COFELY Airport and Logistics Services reste à la fois préoccupante et fragile dans la mesure où l'équilibre financier, s'il se confirme pour 2017, n'est pas encore acquis pour les prochaines années.

ll faut égaiement noter qu'après avoir été recapitalisée à hauteur de 3 000 000 euros courant 2015, la société COFELY Airport and Logistics Services produisait un total des capitaux propres de - 1 048 145 euros à la fin de l'année 2016.

Les éléments provisoires n'indiquent pas, pour l'année 2017, une amélioration significative du montant des capitaux propres de la société.

Par ailleurs, le plus gros contrat de l'entreprise. qui représente un tiers de son chiffre d'affaires, est mis en concurrence en 2018 et le choix de reconduire COFELY Airport and Logistics Services ou de prendre un nouveau prestataire devrait être effectué par notre client au cours du troisième trimestre 2018.

Le développement escompté sur la région Rhône-Alpes n'a pas abouti et aucun nouveau marché significatif sur le secteur n'est envisagé prochainement.

Tout au plus, nous avons au cours des deux dernières années, gagné un seul contrat de maintenance de TRS à l'Aéroport de [Localité 7]. Ce contrat concerne uniquement des prestations ponctuelles effectuées par des techniciens itinérants et autonomes et dont le volume total heures vendues est, de très loin, inférieur à un équivalent temps plein. Par ailleurs, le contrat de maintenance avec l'aéroport de [Localité 5] a été reconduit à COFELY Airport and Logistics Services en janvier dernier mais avec un chiffre d'affaires négocié et revu à la baisse.

Les perspectives à court terme ne sont pas satisfaisantes et aucun élément ne permet d'anticiper une amélioration de la conjoncture économique.

Dans ces conditions, au regard de l'ampleur des difficultés économiques d'ores et déjà constatées et afin d'assurer la pérennité de l'entreprise, nous sommes contraints de supprimer votre poste de Superviseur.

C'est dans ces conditions que, afin d'éviter votre licenciement, nous avons tout d'abord, le 08 décembre 2017, sollicité les sociétés du groupe ENGIE présentes sur le territoire national afin de connaître les postes disponibles et susceptibles de vous être proposés.

Or, la société COFELY Airport and Logistics Services est la seule, au sein du groupe ENGIE, à exercer une activité de maintenance d'installations de tri bagages sur le territoire national.

Nous vous avons, dans ce cadre, proposé, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 10 janvier 2018, un poste de reclassement, à savoir Opérateur Technique au sein de l'Aéroport [4] à [Localité 9].

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 13 janvier 2018, vous avez refusé cette proposition.

En l'absence d'autres postes de reclassement disponibles, nous sommes donc contraints de prononcer votre licenciement pour motif économique. /.../ '.

Le conseil de prud'hommes s'est déclaré en partage des voix par ordonnance du 27 août 2019.

Par jugement du 29 septembre 2020, le juge départiteur du conseil de prud'hommes de Lyon a :

condamné la société Cofely airport and logistics services à verser à M. [Y] les sommes de :

2 953,25 euros de rappel de salaire au titre du salaire minimum conventionnel coefficient 285 pour la période de mars 2017 à mai 2018, outre les congés payés afférents à hauteur de 295,32 euros,

401,47 euros de rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté pour la période comprise entre juillet 2013 à mai 2018, outre 40,15 euros au titre des congés payés afférents,

2 072,78 euros de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires pour la période comprise entre janvier 2012 et décembre 2015, outre 207,28 euros au titre des congés payés afférents ;

prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [Y] aux torts de l'employeur ;

dit que cette résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement nul au jour de l'envoi de la lettre de licenciement, soit le 28 février 2018 ;

condamné en conséquence la société Cofely airport and logistics services à verser à M. [Y] la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par le salarié du fait des circonstances de la rupture ;

dit que les sommes allouées porteront intérêt au taux légal à compter de leur demande pour les créances salariales et à compter du présent jugement pour les créances indemnitaires ;

ordonné à la société Cofely airport and logistics services de transmettre à M. [Y] dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision une attestation Pôle emploi conformes ainsi qu'un bulletin de salaire récapitulatif sans que l'astreinte soit nécessaire ;

débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

condamné la société Cofely airport and logistics services à verser à M. [Y] la somme de 1 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;

condamné la société Cofely airport and logistics services aux dépens.

Selon déclaration électronique de son avocat remise au greffe de la cour le 29 octobre 2020, la société Cofely airport and logistics services a interjeté appel dans les formes et délais prescrits de ce jugement, aux fins d'infirmation en ce qu'il - l'a condamnée à verser à M. [Y] les sommes de : * 2 953,25 euros de rappel de salaire au titre du salaire minimum conventionnel coefficient 285 pour la période de mars 2017 à mai 2018, outre les congés payés afférents à hauteur de 295,32 euros, * 401,47 euros de rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté pour la période comprise entre juillet 2013 à mai 2018, outre 40,15 euros au titre des congés payés afférents *2 072,78 euros de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires pour la période comprise entre janvier 2012 et décembre 2015 outre 207,28 euros au titre des congés payés afférents, - a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [Y] aux torts de l'employeur, - dit que cette résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement nul au jour de l'envoi de la lettre de licenciement, soit le 28 février 2018, - l'a condamnée en conséquence à verser à M. [Y] la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par le salarié du fait des circonstances de la rupture, - dit que les sommes allouées porteront intérêt au taux légal à compter de leur demande pour les créances salariales et à compter du présent jugement pour les créances indemnitaires, - lui a ordonné de transmettre à M. [Y] dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision une attestation Pôle Emploi conforme ainsi qu'un bulletin de salaire récapitulatif sans que l'astreinte soit nécessaire, - l'a condamnée à verser à M. [Y] la somme de 1 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné l'exécution provisoire de la présente décision, l'a condamnée aux dépens.

M. [Y] est décédé le 25 septembre 2020.

L'instance a été reprise par ses ayants-droit, Mme [I] [Y], née [R], Mme [P] [Y], M. [Z] [O] [Y] et M. [K] [Y].

Par conclusions d'incident notifiées le 13 décembre 2023, les ayants droit de M. [Y] ont conclu à l'irrecevabilité des conclusions n°3 notifiées le 13 décembre 2023, et des pièces n°56 à 58 communiquées par la société Cofely airport and logistics services dans les dites conclusions, pour avoir attendu la veille de la clôture prévue le 14 décembre 2023 pour communiquer un ancien arrêt et la pièce n°58 qui est constituée par la procédure pénale en cours de 707 pages, caractérisant une volonté délibérée d'enfreindre le respect du contradictoire.

Par ordonnance en date du 20 décembre 2023, le conseiller de la mise en état a déclaré recevables les conclusions de la société Cofely airport and logistics services remises au greffe le 13 décembre 2023 ainsi que les pièces 56 à 58, compte tenu du report de la clôture des débats au 11 janvier 2024 permettant l'exercice utile des droits de la défense et de la contradiction.

Aux termes des dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 13 décembre 2023, la société Cofely airport and logistics services demande à la cour de :

sur son appel principal :

infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Lyon en date du 29 septembre 2020, en ce qu'il a :

sur le rappel de salaire au titre des minima conventionnels :

condamné la société Cofely ALS à verser à M. [Y] la somme de 2 953,25euros outre 295,32 euros de congés payés afférents, au titre du coefficient 285 et des dispositions de la convention collective départementale de la région parisienne,

sur le rappel de prime d'ancienneté :

condamné la société Cofely à verser à M. [Y] la somme de 401,47 euros outre 40,14 euros de congés payés afférents au titre de la prime d'ancienneté en application des dispositions de la convention collective départementale de la région parisienne,

sur les heures supplémentaires :

condamné la société Cofely ALS à verser à M. [Y] la somme de 2 072,78 euros outre 207,28 euros de congés payés afférents à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires ;

sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :

condamné la société COFELY ALS à verser M. [Y] la somme de 30 000 euros au titre du licenciement nul résultant après avoir constaté l'existence de manquements suffisamment graves empêchant la poursuite du contrat de travail et justifiant la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [Y] ;

débouter les ayants droits de M. [Y] de l'intégralité de leurs demandes ;

sur l'appel incident des ayants droits de M. [Y] :

confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Lyon en date du 29 septembre 2020, en ce qu'il a :

sur le rappel de salaire au titre des minima conventionnels :

déclaré irrecevables les demandes antérieures au 7 juillet 2013 en application des règles de prescription et limiter la condamnation à hauteur de 2 953,25 euros outre 295,32 euros de congés payés afférents,

sur le rappel de prime d'ancienneté :

déclaré irrecevables les demandes antérieures au 7 juillet 2013 en application des règles de prescription et limiter la condamnation à hauteur de 401,47 euros outre 40,14 euros de congés payés ;

sur les dommages et intérêts pour travail dissimulé :

débouté M. [Y] de sa demande,

sur les dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :

débouté M. [Y] de sa demande,

sur les dommages et intérêts pour la remise de l'attestation Pôle emploi rectifiée :

débouté M. [Y] de sa demande,

statuant à nouveau, il est demandé à la cour d'appel de :

sur le rappel de salaire au titre des minima conventionnels :

à titre principal : débouter M. [Y] de sa demande,

à titre subsidiaire : limiter la condamnation à hauteur de 2 953,25 euros outre 295,32 euros de congés payés afférents,

sur le rappel de prime d'ancienneté :

à titre principal : débouter M. [Y] de sa demande,

à titre subsidiaire : limiter la condamnation à hauteur de 401,47 euros outre 40,14 euros de congés payés ;

sur le rappel d'heures supplémentaires :

à titre principal : débouter M. [Y] de sa demande,

à titre subsidiaire : déclarer irrecevables les demandes antérieures au 6 février 2015 en application des règles de prescription ;

sur les dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :

débouter M. [Y] de sa demande,

sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :

à titre principal : débouter M. [Y] de sa demande,

à titre subsidiaire : faire produire à la résiliation judiciaire du contrat de travail les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et limiter la condamnation au plancher légal, à savoir 6 637,50 euros ;

sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse :

à titre principal : débouter M. [Y] de sa demande,

à titre subsidiaire : faire produire à la résiliation judiciaire du contrat de travail les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et limiter la condamnation au plancher légal, à savoir 6 637,50 euros,

sur les dommages et intérêts pour la remise de l'attestation Pôle emploi rectifiée,

débouter M. [Y] de sa demande,

sur l'article 700 du code de procédure civile :

condamner Mme [I] [R], Mme [P] [Y], M. [Z] [O] [Y] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon les dernières conclusions de leur avocat remises au greffe de la cour le 1er décembre 2023, les ayants droit de [W] [Y], Mme [I] [Y], née [R], Mme [P] [Y], M. [Z] [O] [Y] et M. [K] [Y], ayant fait appel incident en ce que le jugement a dit prescrite la période du 4 juillet 2011 au 7 juillet 2016, en ce qu'il a débouté M. [Y] d'indemnité pour travail dissimulé, de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, de dommages et intérêts pour remise d'une attestation Pôle emploi erronée, demandent à la cour d'infirmer partiellement le jugement entrepris et de :

juger qu'en application des dispositions transitoires de la loi du 14 juin 2013, les demandes de rappels de salaires relatives à la période du 4 juillet 2011 au 7 juillet 2016 ne sont pas prescrites et sont recevables ;

condamner la société Cofely airport and logistics services à leur payer les sommes suivantes :

à titre principal, rappel de salaire au titre du minimum conventionnel coefficient 285 du 01/03/2017 au 03/06/2018 : 2 953,25 euros,

congés payés afférents : 295,32 euros,

à titre subsidiaire, rappel de salaire au titre du salaire minimum conventionnel coefficient 270 du 01/03/2017 au 03/06/2018 : 1 317,29 euros,

congés payés afférents : 131,73 euros,

à titre principal, rappel de prime d'ancienneté du 04/07/2011 au 03/06/2018, coefficient 285 : 1 071,17 euros,

congés payés afférents : 107,11 euros,

à titre subsidiaire, rappel de prime d'ancienneté du 04/07/2011 au 03/06/2018, coefficient 270 : 299 euros,

congés payés afférents : 29,90 euros,

dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail (6 mois de salaire - somme nette) : 13 300 euros,

heures supplémentaires de 2012 à 2015 : 6 265,37 euros,

congés payés afférents : 626,54 euros,

indemnité pour travail dissimulé (6 mois de salaires - net) : 13 300 euros,

à titre principal, dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse sans application du plafond de L. 1235-3 du code du travail (24 mois de salaires - somme nette) : 53 000 euros,

à titre subsidiaire, dommages et intérêts pour licenciement nul (24 mois de salaires - somme nette) : 53 000 euros,

à titre très subsidiaire, dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sans application du plafond de L. 1235-3 du code du travail (12 mois de salaires - somme nette) : 26 550 euros ;

dommages et intérêts pour remise d'une attestation Pôle emploi erronée : 1 500 euros,

à titre reconventionnel,

article 700 du code de procédure civile : 3 000 euros ;

condamner la société Cofely airport logistics and services aux entiers dépens ;

dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la saisine du conseil de prud'hommes pour les demandes de rappels de salaires et à compter de la décision à intervenir pour les dommages et intérêts ;

ordonner la délivrance d'un bulletin de salaire et d'une attestation Pôle emploi rectifiés ;

rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires.

La clôture des débats a été ordonnée le 11 janvier 2024, et l'affaire a été évoquée à l'audience du 30 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'exécution du contrat de travail

Les ayants-droit du salarié font valoir, in limine litis, que les créances de salaire nées à compter du 4 juillet 2011 étaient concernées par le délai de prescription de 5 ans, lequel continuait à courir au 17 juin 2013, date de promulgation de la loi ayant modifié l'article L. 3245-1 du code du travail et, qu'à compter du 17 juin 2013 un nouveau délai de 3 ans a commencé à courir, sans que la durée totale ne puisse excéder la durée initiale des 5 ans ; le fait d'avoir saisi le conseil de prud'hommes postérieurement à l'expiration du délai de 3 ans ayant commencé à courir au 17 juin 2013 ne le prive pas pour autant des dispositions transitoires prévues par la loi.

La société soutient quant à elle qu'en raison des nouveaux délais de prescription de l'article L. 3245-1 du code du travail, et du régime transitoire prévu à l'article 21 de la loi du 14 juin 2013, seuls les salariés ayant engagé une action en rappel de salaires au plus tard le 16 juin 2016 peuvent solliciter des rappels de salaire sur une prescription de cinq ans, ceux ayant engagé une action postérieurement à cette date étant exclusivement soumis au nouveau délai de prescription de 3 ans, auxquelles sont soumises toutes les demandes de nature salariale formulées par le salarié.

L'article L. 3245-1 du code du travail dans sa version issue de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 prévoit que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois dernières années précédant la rupture.

Les dispositions issues de la loi sus-visée s'appliquent aux prescriptions en cours à compter du 16 juin 2013, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, selon les dispositions transitoires de la dite loi. Lorsqu'une instance a été introduite avant le 16 juin 2013, date de promulgation de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation.

Les salaires sont exigibles à l'échéance.

Le salarié a saisi le conseil de prud'homme le 7 juillet 2016, postérieurement aux trois années suivant l'entrée en vigueur de la loi, en sorte que seules les demandes de rappel de salaire dont l'exigibilité est postérieure au 7 juillet 2013 sont recevables, la position du salarié conduisant à faire une application de la prescription quinquennale ancienne au détriment de l'application immédiate de la nouvelle prescription aux prescriptions en cours.

Les demandes de rappel de salaire sur la période du 4 juillet 2011 au 6 juillet 2013 sont en conséquence irrecevables. Sont recevables les rappels de salaire exigibles à compter du 7 juillet 2013.

1- Sur le rappel de salaire au titre des minima conventionnels

A titre principal, la société fait grief au jugement de la condamner au paiement d'un rappel de salaire au titre des minima conventionnels au titre du coefficient 285, en faisant valoir que :

- sur la prétendue inégalité de traitement fondée sur l'article L. 3221-2 du code du travail dont fait état le salarié, ce dernier ne peut comparer sa situation à celle de M. [A] comme il le fait en ce que, contrairement à celui-ci, il n'était titulaire d'aucun diplôme, condition prévue par la convention collective pour pouvoir se prévaloir du coefficient 285 ;

- concernant le bénéfice des dispositions conventionnelles de la métallurgie de la région parisienne, non seulement il n'en avait jamais réclamé l'application suite au transfert de son contrat de travail contrairement à son collègue M. [A], mais suite à la transmission universelle du patrimoine de la société Axima régional à son profit, et respectant la jurisprudence applicable, elle n'a pas appliqué dès l'arrivée du salarié dans ses effectifs la grille conventionnelle de la région parisienne, celui-ci n'ayant jamais exercé la moindre activité en région parisienne et étant en dispense d'activité depuis le mois de février 2016.

Les ayants droit du salarié soutiennent que :

- à titre principal, M. [A] et le salarié occupaient le même poste de travail, effectuaient les mêmes tâches nécessitant des compétences identiques, mais ce dernier s'est vu appliquer un coefficient inférieur nonobstant son ancienneté supérieure, aucun élément objectif ne justifiant pourtant cette différence de traitement salarial contraire à l'article L. 3221-2 du code du travail ;

- non seulement la jurisprudence interdit de pratiquer des différences de traitement salarial sur la base d'une différence de diplôme, mais il remplissait parfaitement les conditions conventionnelles permettant de bénéficier du coefficient 285 et percevait, jusqu'en mars 2017, un salaire mensuel brut supérieur au minimum conventionnel prévu pour ce coefficient ; la société appliquait des coefficients supérieurs à des collègues n'ayant pas de BTS ;

- après le transfert du contrat de travail du salarié au sein de la société Cofely ALS, son nouvel employeur n'a pas appliqué le minimum conventionnel prévu par la convention collective de la métallurgie de la région parisienne pour le coefficient 285 alors que seul cet accord s'appliquait à la relation de travail, peu important que son domicile soit situé dans le Rhône ou qu'il ne soit attaché à aucun 'centre' ou établissement ; la société a appliqué la convention collective litigieuse pour le calcul de la prime d'ancienneté ;

- à titre subsidiaire, la société n'a pas respecté le salaire minimum conventionnel prévu pour le coefficient 270 depuis mars 2017 et n'a opéré qu'une régularisation partielle lors de l'établissement de son solde de tout compte.

***

1-1- Sur l'inégalité de traitement

Le principe 'à travail égal, salaire égal' dont s'inspirent les articles L. 1242-14, L. 1242-15, L. 2261-22.9, L. 2271-1.8° et L. 3221-2 du code du travail impose à l'employeur d'assurer une égalité de rémunération entre tous les salariés pour autant qu'ils soient placés dans une situation identique.

Le principe d'égalité de traitement s'étend à l'ensemble des droits individuels et collectifs et notamment en matière d'évolution et progression de carrière.

Pour autant l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction détermine les rémunérations et peut fixer des salaires différents pour tenir compte des compétences et capacités de chaque salarié, de la nature des fonctions ou des conditions de leur exercice. Il peut ainsi accorder des avantages particuliers à certains salariés, mais c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique puissent bénéficier de l'avantage ainsi accordé et que les règles déterminant l'octroi de cet avantage soient préalablement définis et contrôlables et pertinents au regard de l'avantage considéré.

En application de l'article1315 devenu 1353 du code civil, il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe sus-visé de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération et il incombe ensuite à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence.

Une différence de traitement peut se justifier par l'application d'une disposition légale ou d'une décision de justice, voire d'une disposition conventionnelle. Dans certains cas, l'inégalité de traitement est présumée justifier, lorsqu'elle résulte d'un accord collectif ou d'un protocole de fin de conflit ayant valeur d'accord collectif. Il en est ainsi des différences de traitement entre salariés exerçant au sein d'une même catégorie professionnelle des fonctions distinctes, opérée par voie de convention ou d'accord collectif, des différences de traitement entre salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts, définies par voie d'accords d'entreprise (soc 4 octobre 2017 n°1617517) ou par voie d'accords d'établissements négociés et signés par les organisations syndicales représentatives au sein de ces établissements (soc 3 nov 2016 n°15 18444), des différences entre salariés appartenant à la même entreprise de nettoyage mais affectés à des sites ou établissements distincts par voie d'accord collectif.

En l'occurrence, le salarié a été embauché en qualité de superviseur en janvier 2005 au coefficient 270 du niveau IV échelon II de la convention collective nationale de la métallurgie et a toujours bénéficié de ce coefficient 270, sans avancement à un autre coefficient.

Il se compare avec M. [A] qui occupait un poste de superviseur depuis le 1er septembre 2008 et qui bénéficiait du coefficient 285 depuis février 2012.

Il est constant que les deux salariés occupaient un poste de travail identique nécessitant des compétences identiques, laissant ainsi présumer d'une différence de traitement.

La société explique la différence de traitement entre le salarié et son collègue M. [A] par l'application de la convention collective, qui bénéficiant de l'article 36 était assimilé cadre.

L'accord national du 21 juillet 1975 sur la classification, modifié par les avenants du 30 janvier 1980, 21 avril 1981, 4 février 1983, 25 janvier 1990 et 10 juillet 1992, prévoit les classification et le seuil d'accueil des titulaires de diplômes professionnels.

Le seuil d'accueil du CAP est le coefficient 170.

Il y est prévu que dans le cas d'un BTS, le classement d'accueil n'est pas inférieur au coefficient 255, qu'après six mois de travail effectif dans l'entreprise, le classement de l'intéressé ne devra pas être inférieur que coefficient 270 et après dix-huit mois de travail effectif dans l'entreprise, le classement ne devra pas être inférieur au coefficient 285.

Il a effectivement été fait application de ces dispositions à M. [A] qui était titulaire d'un BTS alors que le salarié n'était titulaire que d'un CAP comme il ressort de son curriculum vitae.

Pour autant, la classification de niveau IV appliquées aux deux salariés renvoie à un niveau de connaissances correspondant au niveau IV de l'éducation nationale et précise que ce niveau de connaissances peut être acquis soit par voie scolaire, soit par une formation équivalente, soit par l'expérience professionnelle.

La société avait, en donnant au salarié le niveau IV de la convention collective, convenu que dès son embauche il avait acquis l'expérience professionnelle correspondant au niveau IV de l'éducation nationale.

Aussi, comme l'a exactement considéré le juge départiteur par des motifs pertinents que la cour adopte, les textes conventionnels ne justifient pas une atteinte au principe d'égalité de traitement ; et la société ne justifie pas qu'un superviseur doit nécessairement être titulaire d'un diplôme professionnel pour bénéficier du coefficient 285 alors même que [W] [Y] avait près de 5 ans d'ancienneté de plus que M. [A] et qu'il ne fait pas débats qu'ils exerçaient le même travail.

Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de reclassification au coefficient 285 à compter de mars 2017.

1-2- Sur le minimum conventionnel applicable

Selon les dispositions de l'article L. 2222-1 du code du travail, les conventions et accords collectifs du travail déterminent leurs champs d'application territorial et professionnel. Lorsque la convention collective a un champ territorial limité, elle s'applique aux entreprises situées dans ce champ géographique.

La convention collective qui règle les rapports entre les employeurs et les salariés des entreprises situées dans un champ territorial déterminé n'est pas applicable aux établissements autonomes situés en dehors de ce champ territorial. A défaut d'établissements autonomes, la convention collective applicable est celle du siège social de l'entreprise.

La société Axima avait perdu le marché de l'aéroport de [Localité 7] à compter du 3 janvier 2016. Le salarié a été dispensé d'activité le 11 janvier 2016 et la société Axima a été absorbée par la société Coffely Airport and logistics services dans le cadre d'une transmission universelle du patrimoine à compter du 1er mars 2017.

Il en découle que le site de [Localité 7] avait été fermé et qu'à la suite du transfert du contrat de travail du salarié auprès de la société Coffely Airport and logistics services, il n'était plus rattaché à aucun établissement.

La convention collective de la métallurgie de la région parisienne s'étend notamment aux départements de [Localité 8], de [Localité 6], et du [Localité 12], en sorte que cette convention s'applique à la société Coffely Airport and logistics services qui a son siège social à [Localité 9].

En raison de la transmission universelle du patrimoine, la convention collective du Rhône était mise en cause.

Par application des articles L. 2254-1 et L. 2261-14 du code du travail, en cas de transfert du contrat de travail par application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, la convention collective dont relève la société cessionnaire s'applique immédiatement au salarié, les dispositions plus favorables de l'accord mis en cause continuant cependant à lui bénéficier dans les conditions prévues par l'article L. 2261-14 du code du travail (soc. 10 février 2010 n°08-44.454).

Aussi, alors qu'il est constant que les dispositions de la convention de la métallurgie du Rhône n'étaient pas plus favorables que celles de la convention de la métallurgie de la région parisienne en ce qui concerne le minimum conventionnel applicable.

Le moyen selon lequel le salarié n'a jamais sollicité l'application de la convention collective de la région parisienne sera rejeté, le salarié, pouvant, dans les relations individuelles, se prévaloir de la convention applicable aux relations collectives dès lors qu'elle est plus favorable.

C'est donc à bon droit que le juge départiteur a, en l'absence de maintien d'un centre d'activité autonome, a fait application de la convention collective de la métallurgie de la région parisienne à compter de mars 2017 et a fait droit à la demande de rappel de salaire au titre du coefficient 285 à hauteur de la somme de 2 953,25 euros, compte tenu de la régularisation partielle effectuée d'un montant de 1 461,35 euros.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce chef.

2- Sur la prime d'ancienneté

La société fait grief au jugement de la condamner au paiement de la prime d'ancienneté, en application de la convention collective départementale de la métallurgie de la région parisienne en faisant valoir à titre principal que bien qu'elle conteste l'application des dispositions de la convention collective précitée, elle a procédé au paiement d'une partie de la prime sollicitée sur la base du coefficient 270.

A titre subsidiaire, la société conclut à la confirmation du jugement qui a déclaré irrecevables les demandes antérieures au 7 juillet 2013, en ce que :

- en raison de la prescription triennale applicable en l'espèce, les demandes formulées à titre de rappel de salaire ne peuvent concerner que la période comprise entre le 7 juillet 2013 et le 3 juin 2018 ; seuls les salariés ayant engagé une action en rappel de salaires au plus tard le 16 juin 2016 (soit trois ans après la promulgation de la loi du 14 juin 2013) peuvent solliciter des rappels de salaire sur une prescription de 5 ans.

Les ayants-droit du salarié soutiennent que :

- le taux et la rémunération de base sur lesquels se sont fondées la société Axima suez régional et Cofely ALS pour calculer sa prime d'ancienneté sont erronés ;

- la période du 4 juillet 2011 au 7 juillet 2013 n'est pas prescrite, de sorte qu'ils sont fondés à solliciter un rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté correspondant au calcul réalisé sur la base du coefficient et de la rémunération minimale hiérarchique prévue par les avenants de la convention collective de la métallurgie du Rhône pour les années 2012 à 2014 et 2016, puis en application de l'avenant du 6 février 2017 à la convention collective de la métallurgie de la région parisienne pour la période du 1er mars 2017 chez son nouvel employeur, jusqu'au licenciement.

En considération des développements précédents concernant la prescription, la créance de rappel de salaire sur la période du 4 juillet 2011 au 30 juin 2013 est prescrite, et ne sont recevables que les demandes de rappels de salaire à compter du mois de juillet 2013.

Par ailleurs, toujours en considération des développements précédents, sont applicables pour la période de juillet 2013 à février 2017, les dispositions de la convention collective de la métallurgie du Rhône et pour la période de mars 2017 à juin 2018, la convention collective de la métallurgie de la région parisienne.

Le jugement entrepris qui a exactement fait application de ces conventions collectives en fonction des périodes sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Coffely Airport and logistics services au paiement d'un rappel de prime d'ancienneté de 401,47 euros pour la période de juillet 2013 à mai 2018, outre l'indemnité de congés payés afférente de 40,15 euros.

3- Sur les heures supplémentaires

La société conteste le jugement qui l'a condamnée à payer des supplémentaires en faisant valoir que :

- à titre principal, la durée du travail du salarié était annualisée, organisée sur une moyenne de 35 heures hebdomadaires, la référence à 38,50 heures n'ayant vocation qu'à planifier le temps de travail des salariés et à calculer le nombre de JRTT théorique par an, et ne servait pas de seuil de déclenchement des heures supplémentaires ; le salarié ne s'explique pas sur le périmètre de décompte de son temps de travail ;

- de nombreuses semaines sont manquantes dans les EHA produits par le salarié, de 2012 à 2015, et le salarié a reconstitué a posteriori son temps de travail, sans fournir par ailleurs d'exemple précis de l'examen des documents produits ;

- les bulletins de salaire du demandeur, qui mentionnent une durée du travail de 151,67 heures, ne font état d'aucune heure supplémentaire au cours de l'année ; les EHA lui étaient communiqués et les plannings adaptés afin de respecter le seuil de 1607 heures annuelles au regard du suivi du temps de travail effectué par le responsable de site ;

- elle produit quant à elle l'intégralité du dossier pénal issu de la plainte de la plainte du salarié au titre d'une prétendue situation de travail dissimulé, laquelle contient tous les éléments venant corroborer sa démonstration de l'absence d'heures supplémentaires ;

- à titre subsidiaire, en application de l'article L. 3245-1 du code du travail relatif à la prescription, le salarié ayant formulé pour la première fois une demande au titre des prétendues heures supplémentaires par voie de conclusions notifiées le 6 février 2018, sa demande ne pouvait concerner que la période comprise entre le 6 février 2015 et le 6 février 2018 ; compte tenu du fait que le salarié ne sollicite le paiement d'heures supplémentaires que jusqu'au 31 décembre 2015, les demandes de juillet 2013 à février 2015 sont également prescrites.

Les ayants-droit du salarié soutiennent quant à eux que :

- alors que le salarié travaillait exclusivement à l'aéroport, et n'effectuait à ce titre aucun déplacement, la société lui versait chaque mois une indemnité de déplacement destinée à rémunérer les heures supplémentaires, non déclarées, qu'il accomplissait la nuit en dehors des horaires contractuels ;

- les états hebdomadaires d'activité [EHA] font mention des jours travaillés et des horaires précis de travail, la tranche horaire différente des horaires contractuellement fixés étant mentionnée dans une rubrique séparément avec les indemnités de déplacement, payées par virement distinct du salaire avec la prime de blanchissage et le panier repas, intitulé note de frais ;

- l'attestation de M. [F], son ancien supérieur hiérarchique, n'est pas recevable dès lors qu'elle n'est pas conforme aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile et qu'elle est mensongère, puisqu'elle indique qu'aucun salarié n'effectuait d'heures supplémentaires, en contradiction avec les bulletins de salaire ;

- les indemnités de déplacement perçues n'ont pas à être déduites du rappel de salaire dû pour les heures supplémentaires effectuées ;

- le décompte versé aux débats par le salarié se base sur les EHA pour la période de 2012 à 2015 réalisés par l'employeur lui-même, dont la comparaison avec ses bulletins de salaire laisse apparaître des heures non payées, et la société ne produit aucun décompte pour le contester.

***

La durée du travail hebdomadaire s'entend des heures de travail effectif et des temps assimilés, étant précisé que selon les dispositions de l'article L. 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles.

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Le salarié affirme qu'il a accompli en plus des 38,5 heures de travail effectif payées et récupérées :

- en 2012, 85,5 heures supplémentaires non déclarées,

- en 2013, 165,75 heures supplémentaires non déclarées,

- en 2014 : 58,25 heures supplémentaires non déclarées,

- en 2015 : 126,25 heures supplémentaires non déclarées.

Il verse aux débats :

- ses bulletins de salaire de 2005 à décembre 2017, mentionnant le salaire de base, le complément rtt, le paiement des rtt, les primes d'astreinte, les absences pour congés payés, le paiement d'heures supplémentaires en 2005 et 2009 mais pas dans la période de 2013 à 2017, les primes d'ancienneté ;

- ses relevés de compte du 29 janvier 2015 au 30 novembre 2015, laissant apparaître deux virements mensuels en crédit émanant de la société Axima maintenance aéroport dont un correspondant au 'net à payer' figurant sur le bulletin de salaire du mois et un autre virement de l'ordre de 500 à 700 euros ;

- les états hebdomadaires d'activités (EHA) émis par l'employeur du 2 janvier 2012 au 3 novembre 2013, du 31 mars 2014 au 29 juin 2014, du 7 juillet 2014 au 5 octobre 2014, du 3 novembre 2014 au 4 janvier 2015, du 2 février 2015 au 1er mars 2015, du 4 mai 2015 au 4 octobre 2015, du 2 novembre 2015 au 31 janvier 2016, indiquant le nom de l'agent, pour chacun des jours de la semaine travaillés le nombre d'heures de travail accompli de 6h à 22h et de 22h à 6h, le total hebdomadaire des heures effectuées pour chacune de ces périodes, une rubrique frais mentionnant un nombre de km par jour (100 ou 20) et les frais de repas par jour, le nombre de jours d'astreinte dans la semaine ;

- un tableau annuel récapitulant pour chacune des semaines le nombre d'heures sur les bulletins de salaire, les heures sur EHA, les heures au-delà de 38H50, le taux horaire, les heures à 25%, heures à 50%, le rappel de salaire dû et les congés payés dus par semaine et un total annuel pour les années 2012 à 2015.

Il s'agit d'éléments suffisamment précis quant aux horaires qu'il a effectivement réalisés permettant à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

A ces éléments, la société oppose :

- le dispositif conventionnel de l'accord de la métallurgie du 7 mai 1997 qui prévoit l'annualisation du temps de travail et au terme duquel seules les heures excédant l'horaire annuel de 1607 heures ont la nature d'heures supplémentaires ; la durée du travail qui était de 35 heures hebdomadaires en moyenne sur l'année, soit 151,67 heures par mois, soit 1607 heures par an était annualisée et seules les heures supplémentaires au-delà des 1607 heures peuvent être rémunérées comme des heures supplémentaires ; elle n'était pas de 38,5 heures par semaine ;

- les heures supplémentaires ne peuvent être que des heures de travail effectif, au cours desquelles le salarié ne peut pas vaquer librement à ses occupations et un travail commandé par l'employeur ;

- le fait que de nombreuses semaines soient manquantes dans les EHA produits et que sur certaines semaines le tableau de décompte du salarié mentionne 38,5 heures alors que les EHA mentionnent des horaires moindres ;

- les bulletins de salaire ne font état d'aucune heure supplémentaire au cours de l'année.

Elle verse aux débats :

- le dossier d'enquête pénale au sein duquel figurent les pièces produites par le salarié mais également les tableaux des horaires effectués par le salarié (horaire d'embauche et de débauche) pour chacun des jours de la semaine travaillée du 30 décembre 2013 au 3 janvier 2016, mentionnant ses jours de congés, non signés par ce dernier ;

- les tableaux des horaires effectués par le salarié, non signés par ce dernier ;

- l'attestation de M. [F], responsable du site de [10] qui indique que : 'les superviseurs et assimilés se plaignaient des contraintes horaires variables générées par les vols anormaux et retards. Leur temps de travail incluait ces heures de travail mais l'inconfort lié à la modification d'horaire avec délai de prévenance court faisait qu'ils rechignaient à venir. En effet la planification du temps de travail était faite par les vacations suivantes : soit 3h15 à 12h30, soit 12h30 à 21h30. Ce qui impliquait des déplacements de nuit, sans possibilité de recourir aux transports en commun' Cette contrainte était accentuée pour gérer les vols anormaux imposants une arrivée avant 3h15 ou un départ après 21h30. La situation n'était pas tenable et j'ai décidé de mettre en place une prime d' 'incommodité' : c'est à dire que je leur versais une prime afin de compenser d'avoir à modifier leurs horaires pour m'assurer qu'ils allaient bien être présents...On pourrait appeler cela vulgairement une 'carotte'... comme il s'agissait d'indemniser les contraintes de déplacement, j'inscrivais cette prime dans la case 'km' des EHA (états hebdomadaires d'activité) selon un barème tenant compte de l'horaire d'arrivée ou de départ en convertissant le montant de la prime en kilomètres, dans un souci de lisibilité. Par exemple 50euros équivalaient à 100 km, 20 euros équivalaient à 40km etc. Lors de mon audition par les services de police, j'ai expliqué ce fonctionnement de cette indemnité d'incommodité qui était connue des salariés, notamment MM [A] et [Y]. Aussi je tiens à préciser qu'aucun superviseur chez Axima régional, depuis mon arrivée en 2003 jusqu'à mon départ en 2015 n'a effectué la moindre heure supplémentaire. J'ai toujours été extrêmement vigilant sur ce point et je précise que [C] [L], à l'époque Président, me rappelait chaque année que ce point était substantiel. Très sincèrement, je ne comprends pas ces accusations de travail dissimulé, cette situation n'a jamais existé (...)'.

En l'espèce, le contrat de travail stipule que :

La rémunération forfaitaire brute mensuelle de [W] [Y] est fixée à 1600,00 euros soit 19200,00 euros par an pour un horaire mensuel de 151,67h.

Cette rémunération est établie sur la base d'une moyenne hebdomadaire de travail effectif de 38h50, dans le cadre de la réduction du temps de travail vous bénéficiez de 11 jours de réduction du temps de travail par an.

Cette rémunération correspond aux jours de travail (dimanches et jours fériés inclus) et englobe les majorations liées aux horaires spécifiques. Ceux-ci étant adaptables selon les besoins et organisés selon un tableau de service qui est aménagé par votre supérieur hiérarchique.

Cette stipulation fait référence à une moyenne hebdomadaire sans indication claire de la période sur laquelle elle est calculée. Néanmoins, il n'est aucunement prétendu que la durée du travail serait décomptée au mois, alors même que les bulletins de salaire mentionnent invariablement , sauf absence maladie, sur la période litigieuse, une durée mensuelle de travail de 151,67 heures. Selon les assertions de l'inspecteur du travail dans un des courriers versés au dossier d'enquête pénale, l'entreprise effectuait un décompte hebdomadaire et un décompte annuel du temps de travail. En conséquence, le système de décompte devant nécessairement être défini sur une période de référence clairement définie, en l'absence d'élément d'information donné au salarié sur la période de référence, la cour ne peut que considérer que le salarié était soumis à une durée de travail effectif hebdomadaire de 38h50, lui donnant droit à 11 jours de réduction du temps de travail par an.

En conséquence, les semaines au cours desquelles les fiches EHA mentionnent un nombre d'heures inférieur à 38,50 ont été exactement prises en considération par le salarié dans des décomptes en indiquant 38,50 heures pour celles-ci.

Il n'est pas contesté que la planification horaire était faite sur les vacations suivantes :

- soit de 3h15 à 12h30,

- soit de 12h30 à 21h30, et qu'il était nécessaire de gérer les vols dits anormaux imposant une arrivée avant 3h15 ou un départ après 21h30.

Les ayants-droit du salarié ne sollicitent pas dans le dispositif de leurs conclusions l'irrecevabilité de l'attestation de M. [F]. La cour examinera donc celle-ci comme l'ensemble des pièces versées aux débats pour en apprécier la force probante. Cette attestation est dactylographiée dans sa partie portant sur l'exposé des constatations du témoin est manuscrite pour le surplus. Elle comporte les mentions exigées par les article 202 et suivants du code de procédure civile outre la pièce d'identité de son auteur. Sa force probante se heurte toutefois aux bulletins de salaire qui pour deux d'entre eux mentionnent des heures supplémentaires en 2005 et 2009.

Les décomptes du salarié sont effectués au moyen des EHA émis par l'employeur, en sorte que ce dernier ne saurait considérer que les heures supplémentaires accomplies n'étaient pas commandées ou que celles-ci ne relevaient pas du temps de travail effectif, sans autre développement. Les tableaux qu'il a produit devant les services de police ne sont pas signés des salariés et ne sauraient être considérés comme des décomptes fiables des horaires de travail.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'entre 2012 et 2015, le salarié effectuait des heures de travail au- delà des 38,5 heures prévues au contrat.

Certes, ce n'est que par conclusions du 6 février 2018 que le salarié a sollicité le rappel de salaire au titre des heures supplémentaires pour la période de 2012 à 2015. Néanmoins en considération de l'application du principe de l'unicité de l'instance à cette procédure introduite devant la juridiction de première instance avant le 1er août 2016, la prescription a été interrompue dès le 7 juillet 2016, en sorte que les demandes de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires sont recevables pour les salaires exigibles à compter du 7 juillet 2013.

En considération de l'ensemble de ces éléments, c'est à bon droit que le juge départiteur a condamné la société à payer au salarié les somme de 2 072,78 euros de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires pour la période entre juillet 2013 et décembre 2015, outre 207,28 euros au titre des congés payés afférents. Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce chef.

4- Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

Les ayants-droits du salarié font valoir que la société a adopté des comportement caractérisant une violation manifeste de son devoir de loyauté en ce que : elle a opéré une différence de traitement salariale avec ses autres collègues de travail de manière injustifiée, a appliqué un salaire inférieur au minimum conventionnel depuis le 1er mars 2017, a refusé de régulariser la situation malgré une mise en demeure, a mal calculé sa prime d'ancienneté prévue par la convention collective de la métallurgie, a dédommagé ses heures supplémentaires par l'octroi d'une prime de déplacement, et en ce qu'il s'est vu refuser une formation en informatique en 2010 alors que son poste nécessitait une telle formation.

La société, qui conteste toute exécution déloyale du contrat de travail, soutient concernant le non-respect d'un minimum conventionnel et le mauvais calcul de la prime d'ancienneté reprochés, qu'elle a d'ores et déjà opéré les régularisations afférentes ; concernant les heures supplémentaires qui n'auraient pas été rémunérées en intégralité, que le salarié n'a jamais demandé la moindre régularisation ; concernant le prétendu refus de formation suite à une demande en 2010, qu'il ne s'agit pas d'un manquement de son ancien employeur, mais de la mise en oeuvre de son pouvoir d'organisation.

C'est par des motifs pertinents qui ne sont pas utilement remis en cause par les débats en appel et que la cour adopte, que le juge départiteur a débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

5- Sur le travail dissimulé

Les ayants-droit du salarié soutiennent que :

- la société avait parfaitement connaissance des heures supplémentaires réalisées par les salariés puisqu'elle établissait chaque semaine des états hebdomadaires d'activité sur lesquelles apparaissaient les heures accomplies en dehors des horaires contractuels et avait la volonté de les dissimuler en les payant sous forme d'indemnités de déplacement par virement distinct, alors que le salarié travaillait exclusivement à l'aéroport et n'effectuait aucun déplacement ;

- la société n'ayant pas fourni à l'URSSAF les EHA des salariés, ce dernier ne pouvait constater que les heures de travail de nuit effectuées avant l'horaire contractuel étaient payées sous forme d'indemnité de déplacement ;

- la cour d'appel n'est pas liée par la décision de classement sans suite du vice-procureur en date du 27 septembre 2021 produit par la société faisant suite à sa saisine en raison des heures supplémentaires converties en indemnités de déplacement fictives.

La société fait valoir que :

- le versement d'une indemnité forfaitaire de travail dissimulé est conditionné d'une part à la constatation de la réalisation d'heures de travail effectif non mentionnées sur les bulletins de paie, ce qui n'est pas le cas en l'espèce les bulletins ne mentionnant pas un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli ; d'autre part, à la volonté de l'employeur de se soustraire à la déclaration des dites heures, mais toutes les heures effectuées par le salarié ont été décomptées, et apparaissent sur ses EHA, de sorte qu'il n'y a aucune intention de dissimuler la moindre heure travaillée ;

- les heures effectuées en dehors des heures planifiées, générées en raison de la gestion de vols anormaux, apparaissent dans les EHA, et les indemnités de déplacement déclarées en plus de ces heures visaient à participer à la prise en charge des contraintes résultant des horaires atypiques de travail des superviseurs dans ce cadre, et non pas à rémunérer les heures réalisées.

Il résulte de l'article L. 8221-5 du code du travail que la dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisée que si l'employeur, de manière intentionnelle, soit s'est soustrait à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10 relatif à la déclaration préalable à l'embauche, soit s'est soustrait à la formalité prévue à l'article L. 3243-2 relatif à la délivrance d'un bulletin de paie ou a mentionné sur le bulletin de paye un nombre d'heure de travail inférieur à celui réellement effectué.

En l'occurrence, l'employeur n'a pas mentionné dans les bulletins de salaire l'intégralité des heures supplémentaires de travail accomplies, même si les heures de travail générées par les vols anormaux sont effectivement mentionnés dans les EHA. La cour note d'ailleurs que les heures en plus donnaient lieu dans ces états à une mention de kilométrage au titre des 'frais km' alors même que les fonctions inhérentes au salarié ne généraient pas de déplacements.

La cour note par ailleurs, que les bulletins de salaire ne mentionnent pas de 'prime d'incommodité', de prime de sujétion liées aux déplacements de nuit ou d'indemnité de déplacement.

Or, il ressort des relevés bancaires du salarié du 29 janvier 2015 au 30 novembre 2015, que deux virements mensuels en crédit émanant de la société Axima maintenance aéroport étaient effectués par mois, dont un correspondant au 'net à payer' figurant sur le bulletin de salaire du mois et un autre virement de l'ordre de 500 à 700 euros intitulé note de frais, ne figurant pas sur les bulletins de salaire. La prime de repas indiquée dans les EHA et la prime de blanchissage ne figurent pas non plus dans les bulletins de salaire, étant précisé qu'il n'est pas discuté que ces trois primes donnaient lieu à un règlement séparé par virement 'note de frais'.

Certes la société n'a pas fait l'objet d'un redressement Urssaf lors du contrôle opéré en septembre 2013 sur la période de janvier 2010 à décembre 2012 sur l'établissement de [10] mais il s'agit d'une période antérieure à celle considérée. Aussi les modalités de paiement de ces frais de déplacement qui variaient selon les jours alors même que les fonctions du salarié ne nécessitait pas de déplacement ou de primes de sujétion non mentionnées au bulletin de salaire conduit à considérer qu'elles étaient fictives et que l'employeur payait les heures supplémentaires accomplies au moyen des versements dédiés à ces frais de déplacement, caractérisant ainsi l'intention de dissimulation, étant précisé que le classement sans suite de la plainte pénale ne présente aucune effet sur l'instance civile.

En considération de la réalité d'un travail dissimulé outre de la rupture effective du contrat de travail, le salarié est en droit en application des dispositions de l'article L. 8223-1 du code du travail d'obtenir le paiement d'une indemnité correspondant à six mois de salaire, soit à la somme de 12 891,84 euros.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé.

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail

Au soutien de son appel, la société fait valoir que :

- à titre principal, le salarié fait état de nombreux griefs qui ne sont pas suffisamment graves pour justifier la résiliation judiciaire de son contrat de travail ;

- le salarié ne fait pas la démonstration des heures supplémentaires prétendument effectuées et compensées par l'octroi d'indemnités de déplacement, dont il ne lui a pas demandé le paiement avant sa demande de résiliation judiciaire, et qui sont prescrites ;

- le salarié, qui se prévaut du non-respect du principe 'à travail égal, salaire égal', ne peut prétendre au coefficient 285, ne bénéficiant pas des diplômes requis par la convention collective à ce titre ;

- non seulement le salarié ne peut en rien bénéficier des minima conventionnels résultant de la convention collective départementale de la métallurgie de la région parisienne, mais il n'a effectué aucune prestation de travail pour le compte de son ancien employeur, notamment en région parisienne, sur la période litigieuse postérieure au 1er mars 2017 ;

- le prétendu manquement relatif au paiement partiel de la prime d'ancienneté est d'une part postérieur à la demande de résiliation judiciaire, et s'élève d'autre part à 300 euros, ce qui ne constitue pas un manquement suffisamment grave empêchant la poursuite du contrat de travail ;

- sur l'absence d'organisation des réunions de délégués du personnel, il s'agit au mieux d'un délit d'entrave, et les délégués du personnel n'ont jamais émis la moindre réclamation ou demande sur leurs conditions de travail, le seul courriel de demande d'organisation des réunions datant d'un an après sa mise en dispense d'activité ;

- l'absence de fourniture de travail du 4 février 2016 au 28 février 2018 résulte du seul refus de l'inspection du travail à deux reprises de procéder au licenciement du salarié et elle a formulé à de nombreuses reprises des propositions de poste de reclassement, que le salarié a refusé ;

- à titre subsidiaire, conformément à la jurisprudence le conseil de prud'hommes a fait produire les effets de la résiliation judiciaire à la date du licenciement intervenu après la demande de salarié, et au 28 février 2018 le salarié n'était plus délégué du personnel depuis un an, plus protégé depuis 6 mois, était salarié de la société Cofely depuis le 1er mars 2017, et le barème d'indemnisation du licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse était applicable puis le 24 septembre 2017 ; la résiliation judiciaire ne saurait produire les effets d'un licenciement nul, le salarié n'ayant jamais fait état d'un détournement de sa protection pour en solliciter la nullité, et en ce qu'une année s'est écoulée entre la fin du mandat et son licenciement, première procédure initiée par la société Cofely.

Les ayants-droit du salarié soutiennent quant à eux que la société Axima suez régional, puis la société Cofely ALS ont multiplié les manquements graves justifiant que soit prononcée la résiliation judiciaire de son contrat de travail, en faisant valoir :

- sur l'absence de paiement et de déclaration des heures supplémentaires, que la société Axima ne lui a pas payé un certain nombre d'heures supplémentaires, qu'elle a compensé par l'octroi d'indemnités de déplacement, le délit de travail dissimulé étant parfaitement caractérisé ;

- sur le non-respect du principe 'à travail égal salaire égal', le salarié avait un coefficient inférieur à M. [A] nonobstant une plus grande ancienneté sur le même poste ;

- sur le salaire minimum conventionnel, il n'était pas respecté depuis le 1er mars 2017, malgré sa demande de régularisation ;

- sur la prime d'ancienneté, que ni la société Axima, ni la société Cofely ne l'ont calculé correctement ;

- sur l'absence d'organisation d'une réunion de délégué du personnel, que le salarié n'a plus été convoqué à aucune réunion après le 22 décembre 2015, date de consultation sur le projet de licenciement collectif pour motif économique, et la société n'a pas répondu à la demande d'organisation d'une réunion par courriel de M. [A] du 9 décembre 2016 ;

- sur l'absence de fourniture de travail, que la société Axima ne lui a fourni aucun travail de sa mise en dispense d'activité le 3 janvier 2016, jusqu'au transfert de son contrat de travail le 1er mars 2017, et elle ne lui a proposé aucun autre poste ; son nouvel employeur ne lui a par la suite fourni aucun travail non plus, ne l'a pas rémunéré conformément au salaire minimum conventionnel et n'a plus répondu à aucun de ses courriers, le laissant totalement à l'écart ;

- le salarié a été victime de discrimination syndicale ; du fait de son mandat de délégué du personnel titulaire, il a fait l'objet de trois tentatives de licenciement entre janvier 2016 et février 2018, il a été privé de travail pendant plus de deux ans, il a été privé de réunions de délégués du personnel et de formations, il a perçu un salaire inférieur au salaire minimum conventionnel, il a été évincé de son poste, la société Coffely Airport and logistics services préférant attendre qu'il perde son mandat pour le licencier

***

Sur le fondement de l'article 1184 devenu 1217 du code civil et de l'article L. 1231-1 du code du travail, le salarié peut saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire du contrat à raison des manquements de l'employeur aux obligations découlant du contrat de travail.

Les manquements doivent être suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Il appartient aux juges du fond d'apprécier les manquements imputés à l'employeur au jour de leur décision. Dans le cas où le salarié est licencié postérieurement à sa demande de résiliation, pour apprécier si les manquements de l'employeur sont de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail, il peut tenir compte de la régularisation survenue jusqu'à la date du licenciement.

Si la résiliation judiciaire est prononcée, elle prend effet à la date de la décision judiciaire la prononçant, sauf si la rupture du contrat de travail est intervenue entre temps pour autre cause, auquel cas elle prend effet à la date de la rupture effective.

En l'occurrence, il a été établi ci-dessus que l'employeur a manqué à son obligation portant sur l'égalité de traitement, qu'il n'a pas respecté le minimum conventionnel applicable au coefficient 285 de la convention collective applicable depuis le mois de mars 2017, qu'il n'a pas payé l'intégralité de la prime d'ancienneté due et n'a pas réglé l'intégralité des heures supplémentaires accomplies.

A ces multiples manquements portant sur l'obligation fondamentale de paiement de la prestation de travail accomplie, se sont ajoutés :

- l'absence de convocation des délégués du personnel, dispensé d'activités à compter du 3 janvier 2016 jusqu'au 1er mars 2017, malgré une demande du salarié laissée sans réponse ;

- l'absence de fourniture de travail par l'ancien employeur la société Axima depuis le 3 janvier 2016 puis par le nouvel employeur la société Coffely Airport and logistics services depuis le 1er mars 2017 ; à cet égard, il ne saurait être prétendu que cette absence de fourniture n'est pas imputable à l'employeur dès lors que les deux demandes d'autorisation de licenciement de février 2016 et de juin 2016 ont été refusées par l'inspection du travail, en raison du non-respect par celui-là de ses obligations (pour la première de non-respect de l'obligation de reclassement et pour la seconde sur les trois motifs liés à l'absence de justification des motifs économiques, à l'absence de démonstration de l'effort de reclassement sur la totalité des offres d'emploi du groupe Gdf Suez et au défaut de saisine de la commission paritaire pour l'emploi de la métallurgie) ; la cause de l'absence de fourniture de travail procède des manquements de l'employeur à ses propres obligations ;

- la discrimination syndicale en ce que le salarié a fait l'objet de deux tentatives de licenciement en février et juin 2016, outre un licenciement le 28 février 2018, en ce qu'il a été privé de travail du 3 janvier 2016 au 28 février 2018, en ce qu'il a été privé de toute réunion des délégués du personnel jusqu'à ce qu'il perde son mandat de représentant du personnel lors du transfert du contrat de travail le 1er mars 2017, en ce qu'il a perçu un salaire inférieur au minimum conventionnel à compter de mars 2017, laissant présumer de discrimination syndicale qui ne sont pas expliqués par des éléments objectifs exempts de toute discrimination.

En conséquence, l'ensemble des manquements de l'employeur à ses obligations qui se sont étalées pendant plusieurs années et la discrimination syndicale opérée sont d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail et justifier la résiliation de celui-ci à la date du licenciement opéré le 28 février 2018.

En considération de la discrimination syndicale subie, la résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d'un licenciement nul par application des dispositions de l'article L. 1235-3-1 du code du travail.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.

Sur les conséquences de la rupture

La société soutient que :

- le licenciement étant justifié, le salarié doit être débouté des demandes indemnitaires afférentes ;

- à titre principal, le barème prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail est valable et applicable ;

- à titre subsidiaire, l'absence de prestation de travail n'est pas de son fait mais est due au seul refus de l'inspection du travail de procéder à son licenciement, ce dernier bénéficiant pendant cette période d'une dispense d'activité qui lui était rémunérée et ne l'empêchant pas de travailler auprès d'un autre employeur ; cette situation n'affecte pas le licenciement intervenu postérieurement ;

- à titre infiniment subsidiaire, le salarié doit prouver cumulativement l'existence d'une faute, d'un lien de causalité et d'un préjudice, alors que ce dernier ne justifie pas du quantum de ses demandes.

Les ayants droit du salarié font valoir que :

- à titre principal, la résiliation judiciaire de son contrat de travail justifiée par les manquements de son employeur, produit les effets d'un licenciement nul, compte tenu de la discrimination syndicale et n'entre pas à ce titre dans le champ d'application de l'article L. 1235-3 du code du travail ;

- à titre subsidiaire, le barème de l'article L. 1235-3 du code du travail est inopposable en raison du non-respect de la décision n°513 du conseil d'administration de l'OIT prise en sa 344ème session plénière et de la discrimination indirecte induite par la mise en oeuvre du barème prohibée par le droit de l'Union européenne ; son application doit dès lors être écartée concernant l'évaluation des dommages et intérêts auxquels il peut prétendre dans le cadre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- à titre infiniment subsidiaire, en cas d'application du barème de l'article L. 1235-3 du code du travail, il peut prétendre à l'indemnité maximale.

***

Par application des dispositions de l'article L. 1235-3-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, la résiliation judiciaire du contrat de travail justifiée notamment par la discrimination syndicale produit les effets d'un licenciement nul.

En conséquence, le salarié est en droit de percevoir une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

En considération des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié (un salaire mensuel brut de 2 148,64 euros), de son âge au jour de son licenciement (60 ans), de son ancienneté à cette même date (plus de 14 ans), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels que ces éléments résultent des pièces et des explications fournies (attestation Pôle emploi justifiant la perception d'allocation de retour à l'emploi pour la période du 29 novembre 2018 au 31 mai 2020), c'est par une exacte appréciation des données du litige que le juge départiteur a indemnisé le salarié en lui allouant la somme de 30 000 euros au titre de la perte injustifiée de son emploi.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce chef.

Sur la remise des documents de fin de contrat et la demande de dommages et intérêts

La société conteste la remise tardive de l'attestation Pôle emploi, l'ensemble des documents de fin de contrat ayant été spontanément envoyé au salarié après la fin du préavis, dès le 11 juin 2018.

Les ayants-droit du salarié font valoir quant à eux que l'attestation Pôle emploi transmise par le nouvel employeur du salarié ne faisait pas mention de sa période d'emploi chez Axima de 2003 à 2017, l'empêchant de faire valoir ses droits à ce titre, et il a dû attendre six mois pour recevoir une attestation corrigée et a subi un stress important pendant cette attente.

***

Vu les articles D. 1234-6 à 1234-8 du code du travail, R. 1234-9 du code du travail :

La société Coffely Airport and logistics services a remis au salarié une attestation destinée à Pôle Emploi mentionnant une durée d'emploi du 1er mars 2017 au 3 juin 2018 alors que par l'effet du transfert légal de contrat de travail, la période d'emploi au sein de la société Axima devait figurer. Ce n'est que plusieurs mois plus tard que la société a procédé à la rectification par mention manuscrite, caractérisant ainsi le manquement à ses obligations légales. Ce manquement a généré pour le salarié un préjudice moral qui craignait ne pouvoir bénéficier des allocations de retour à l'emploi que pendant une période d'un an alors même qu'il avait travaillé pendant plus de 14 ans, sera entièrement réparé par la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il l'a débouté de toute demande à ce titre.

Sur les autres demandes

Il convient d'ordonner la remise des documents de fin de contrat et un bulletin de salaire rectifiés conformément au présent arrêt dans un délai de deux mois à compter de ce jour.

Il convient de rappeler que les sommes allouées par la cour sont exprimées en brut.

Les intérêts au taux légal portant sur les créances indemnitaires courent à compter du présent arrêt s'agissant de dispositions infirmatives du jugement entrepris et à compter du jugement pour les dispositions confirmées.

Les intérêts au taux légal portant sur les créances de nature salariale courent à compter de la notification à l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société Coffely Airport and logistics services succombant sera condamnée aux entiers dépens de l'appel. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de faire bénéficier les consorts [Y] en leur qualité d'ayants-droit de [W] [Y] de ces mêmes dispositions et de condamner la société Coffely Airport and logistics services à leur verser une indemnité complémentaire de 1 800 euros à ce titre. Il sera ajouté au jugement sur ce chef.

Sur le remboursement des indemnités chômages

Il convient en application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, d'ordonner d'office le remboursement par la société Coffely Airport and logistics services à Pôle Emploi des indemnités de chômages versées à [W] [Y] du jour de son licenciement dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Dans la limite de la dévolution,

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [W] [Y] de ses demandes d'indemnité pour travail dissimulé et de dommages et intérêts pour remise d'une attestation pôle emploi erronée ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

CONDAMNE la société Coffely Airport and logistics services à verser à Mme [I] [Y], née [R], Mme [P] [Y], M. [Z] [O] [Y] et M. [K] [Y] en leur qualité d'ayant droits de [W] [Y] les sommes suivantes :

12 891,84 euros à titre d'indemnité de travail dissimulé,

1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour remise d'une attestation Pôle emploi erronée ;

RAPPELLE que les sommes allouées par la cour sont exprimées en brut ;

DIT que les intérêts au taux légal sur les créances de nature salariale courent à compter de la demande, soit à compter de la notification à la société Coffely Airport and logistics services de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes ;

DIT que les intérêts au taux légal sur les créances de nature indemnitaires courent à compter du présent arrêt s'agissant de dispositions infirmatives du jugement entrepris et à compter du jugement pour les dispositions confirmées ;

ORDONNE la remise par la société Coffely Airport and logistics services à Mme [I] [Y], née [R], Mme [P] [Y], M. [Z] [O] [Y] et M. [K] [Y] en leur qualité d'ayant droits de [W] [Y] des documents de fin de contrat et d'un bulletin de salaire rectifié dans un délai de deux mois à compter de ce jour ;

CONFIRME le jugement entrepris sur le surplus,

Y ajoutant,

DÉCLARE irrecevables les demandes de rappel de salaire sur la période du 4 juillet 2011 au 6 juillet 2013 ;

DÉCLARE recevables les rappels de salaire exigibles à compter du 7 juillet 2013 ;

ORDONNE le remboursement par la société Coffely Airport and logistics services à Pôle Emploi des indemnités de chômages versées à [W] [Y] du jour de son licenciement dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage ;

DIT qu'en application des dispositions de l'article R. 1235-2 du code du travail, lorsque le remboursement des allocations chômages est ordonné d'office par la cour d'appel, le greffier de cette juridiction adresse une copie certifiée conforme de l'arrêt à Pôle Emploi ;

CONDAMNE la société Coffely Airport and logistics services à verser à Mme [I] [Y], née [R], Mme [P] [Y], M. [Z] [O] [Y] et M. [K] [Y] en leur qualité d'ayant droits de [W] [Y] la somme complémentaire de 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Coffely Airport and logistics services aux dépens de l'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 20/05986
Date de la décision : 10/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-10;20.05986 ?
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