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10/04/2024 | FRANCE | N°20/05768

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 10 avril 2024, 20/05768


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR



N° RG 20/05768 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NGJR



[R]

C/

Société AUCHAN HYPERMARCHE



APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 24 Septembre 2020

RG : 18/02784





COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 10 AVRIL 2024







APPELANT :



[T] [S] [R]

né le 06 Octobre 1976 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Localité 2]




représenté par Me Thierry BRAILLARD de la SELARL THIERRY BRAILLARD ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



Société AUCHAN HYPERMARCHE

[Adresse 1]

[Localité 4]



représentée par Me Laurent LIGIER de la SELARL ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 20/05768 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NGJR

[R]

C/

Société AUCHAN HYPERMARCHE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 24 Septembre 2020

RG : 18/02784

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 10 AVRIL 2024

APPELANT :

[T] [S] [R]

né le 06 Octobre 1976 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Localité 2]

représenté par Me Thierry BRAILLARD de la SELARL THIERRY BRAILLARD ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Société AUCHAN HYPERMARCHE

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Christophe BIDAL de la SCP AGUERA AVOCATS, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 30 Janvier 2024

Présidée par Catherine MAILHES, Présidente magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Catherine MAILHES, présidente

- Nathalie ROCCI, conseillère

- Anne BRUNNER, conseillère

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 10 Avril 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine MAILHES, Présidente et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [R] (le salarié) a été engagé par la société Auchan (la société) par contrat à durée indéterminée le 15 mars 2012, à effet du 2 avril 2012, en qualité de chef de rayon 'en formation', statut cadre, niveau VII, de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.

Par courrier reçu en main propre le 18 octobre 2014, le salarié a été informé de son changement d'intitulé de fonction, passant de chef de rayon à celui de manager de commerce, à compter du 1er octobre 2014.

La société employait habituellement au moins 11 salariés au moment du licenciement.

Le 20 juin 2017, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour le 28 juin 2017.

Par courrier du 7 juillet 2017, la société lui a notifié son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Le 14 septembre 2018, contestant son licenciement, M. [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins de voir la société condamnée à lui verser des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (37 342,51 euros), un rappel de salaire au titre de ses heures supplémentaires (99 660,07 euros), des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail (5 000 euros), outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile (2 500 euros), à lui remettre les bulletins de salaire et documents de fin de contrat rectifiés avec astreinte, au paiement des intérêts au taux légal.

La société Auchan a été convoquée devant le bureau de conciliation et d'orientation par courrier recommandé avec accusé de réception signé le 18 septembre 2018.

La société s'est opposée aux demandes du salarié et a sollicité sa condamnation aux dépens.

Par jugement du 24 septembre 2020, le conseil de prud'hommes de Lyon a :

dit que le licenciement de M. [R] pour insuffisance professionnelle est fondé ;

en conséquence,

débouté M. [R] de sa demande de dommages et intérêts à ce titre ;

dit que la convention de forfait n'est pas appliquée, que des heures supplémentaires lui sont dues sur une base de 35 heures par semaine ;

fixé le salaire moyen de M. [R] la somme de 3 118,00 euros ;

en conséquence,

condamné la société Auchan à payer à M. [R] la somme de 20 109,35 euros bruts à ce titre ;

ordonné la remise des documents suivants sans contrainte : bulletins de paie, certificat de travail et attestation Pôle Emploi rectifiés ;

dit que l'exécution déloyale du contrat est avérée ;

en conséquence,

condamné la société Auchan à payer à M. [R] la somme de 4 000 euros bruts de dommages et intérêts à ce titre ;

condamné la société Auchan à payer à M. [R] la somme de 1 700 euros bruts au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

rappelé qu'aux termes des dispositions de l'article R.1454-28 du code du travail, sont exécutoires de droit à titre provisoire, les jugements ordonnant la délivrance de toutes pièces que l'employeur est tenu de remettre (bulletins de paie, certificat de travail... ) ainsi que les jugements ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités visées à l'article R.1454-14 du code du travail dans la limite de neuf mensualités ;

dit qu'il n'y a pas lieu d'étendre l'exécution provisoire au-delà de celle des cas prévus par la loi ;

condamné la société Auchan aux entiers dépens ;

ordonné le paiement des intérêts légaux à compter de la date de la requête pour les salaires et de la date du prononcé du présent jugement pour les dommages et intérêts.

Selon déclaration électronique de son avocat remise au greffe de la cour le 21 octobre 2020, M. [R] a interjeté appel dans les formes et délais prescrits de ce jugement, aux fins de réformation en ce qu'il a : '- DIT ET JUGE que le licenciement de M. [R] pour insuffisance professionnelle est fondé, - DEBOUTE M. [R] de sa demande de dommages et intérêts à ce titre. - ORDONNE la remise des documents suivants sans contrainte : bulletins de paie, certificat de travail et attestation Pôle Emploi rectifiés' et en sollicite la' confirmation en ce qu'il a : - DIT ET JUGE que la convention de forfait n'est pas appliquée, que des heures supplémentaires lui sont dues sur une base de 35 heures par semaine ; FIXE le salaire moyen de M. [R] à la somme de 3 118,00 euros ; Sauf en ce qu'il a limité la condamnation de la société Auchan hypermarché au paiement de la somme de 20 109,35 euros bruts à ce titre. - DIT ET JUGE que l'exécution déloyale est avérée ; Sauf en ce qu'il a limité la condamnation de la société Auchan hypermarché au paiement de la somme de 4 000 euros bruts de dommages et intérêts à ce titre.'

Aux termes des dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 25 juin 2021, M. [R] demande à la cour de :

infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

dit que le licenciement de M. [R] pour insuffisance professionnelle est fondé,

débouté M. [R] de sa demande de dommages et intérêts à ce titre ;

ordonné la remise des documents suivants sans contrainte : bulletins de paie, certificat de travail et attestation Pôle Emploi rectifiés.

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

dit que la convention de forfait n'est pas appliquée, que des heures supplémentaires lui sont dues sur une base de 35 heures par semaine ;

fixé le salaire moyen de M. [R] à la somme de 3 118,00 euros ; Sauf en ce qu'il a limité la condamnation de la société Auchan hypermarché au paiement de la somme de 20 109,35 euros bruts à ce titre ;

dit que l'exécution déloyale est avérée ; Sauf en ce qu'il a limité la condamnation de la société Auchan Hypermarché au paiement de la somme de 4 000 euros bruts de dommages et intérêts à ce titre ;

en tout état de cause,

débouter la société Auchan France de l'ensemble de ces demandes ;

dire que le licenciement de M. [R] est sans cause réelle et sérieuse ;

dire que la convention de forfait appliquée à M. [R] est abusive et frappé de nullité ou à tout le moins inopposable au salarié ;

dire que la société Auchan hypermarché n'a pas exécuté le contrat de travail de bonne foi ;

en conséquence,

condamner la société Auchan hypermarché à verser à M. [R] les sommes de :

37 342,51 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

38 839,88 euros au titre des heures supplémentaires du mois de juillet 2014 à décembre 2015,

20 109,35 euros au titre des heures supplémentaires du mois de janvier 2016 à octobre 2017,

5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

ordonner la remise sous astreinte définitive de 100 euros par jour de retard de bulletins de paie conformes aux condamnations en salaire et accessoires de salaire, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle emploi rectifiés et se réserver le droit de liquider l'astreinte,

assortir ces condamnations des intérêts au taux légal à compter de la date de la requête,

condamner la société Auchan hypermarché à verser à M. [R] la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

condamner la même aux entiers dépens.

Selon les dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 12 avril 2021, la société Auchan hypermarché ayant fait appel incident en ce que le jugement a dit que la convention de forfait n'est pas appliquée et l'a condamnée à payer à M. [R] la somme de 20 109,35 euros au titre des heures supplémentaires, dit que l'exécution déloyale du contrat est avérée et l'a condamnée à payer à M. [R] la somme de 4 000 euros bruts à ce titre et l'a condamnée à payer à M. [R] la somme de 1 700 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civil, demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau de :

confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Lyon du 24 septembre 2020 au surplus ;

débouter M. [R] de l'intégralité de ses demandes ;

le condamner aux entiers dépens de l'instance.

La clôture des débats a été ordonnée le 14 décembre 2023 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 30 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'exécution du contrat de travail

1- Sur la convention de forfait en jours

La société fait valoir que :

- la convention de forfait en jours prévue dans le contrat de travail du salarié, lequel renvoie expressément à l'accord d'entreprise du 10 avril 2013 fixant le principe du forfait jours sur la base de 214 jours dans son article 2.1.2.2 et le suivi de la charge de travail dans son article 2.1.2.3 est licite ;

- elle a concrètement assuré le suivi de la charge du travail du salarié lors des entretiens de développement individuel et d'évaluation, au cours desquels le salarié a systématiquement indiqué être satisfait de sa charge de travail avec un respect de l'équilibre entre sa vie professionnelle et personnelle/familiale ; le dépassement ponctuel du nombre de jours de la convention de forfait n'emporte pas son inopposabilité.

Le salarié soutient que :

- les dispositions de son contrat de travail se limitant à fixer la durée du travail à 214 jours et renvoyant à l'accord en vigueur sur l'organisation et l'aménagement du temps de travail sont inopposables et ne constituent pas une convention de forfait individuelle valable ;

- en ne prévoyant pas les modalités de suivi de son temps de travail au contrat de travail et en n'ayant jamais organisé un quelconque suivi permettant de contrôler le respect de la législation relative à la durée maximale de travail, la société n'a pas respecté les dispositions de l'article L. 3121-46 du code du travail ;

- il a effectué entre 60 heures et 80 heures de travail hebdomadaires, les heures supplémentaires en découlant devant lui être payées ;

- en ne faisant que partiellement droit à sa demande de rappel de salaire au titre de ses heures supplémentaires, à la lumière des pointages fournis par la société pour la période du 1er janvier 2016 au 10 octobre 2017, le conseil de prud'hommes n'a pas respecté la jurisprudence relative au régime probatoire prévoyant la présentation préalable par le salarié d'éléments suffisamment précis quant aux horaires invoqués puis la justification par l'employeur des horaires effectivement réalisés par le salarié ;

- la société ne fournit aucun élément de preuve relatif à son temps de travail pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2015 et doit payer ses heures supplémentaires.

***

Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.

Aux termes de l'article L. 3121-39 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce sur la période antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, la conclusion de conventions individuelles de forfait, en heures ou en jours, sur l'année doit être prévue par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche qui détermine les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, ainsi que la durée annuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi et qui fixe les caractéristiques principales de ces conventions.

Selon l'article L. 3121-43 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce, peuvent notamment conclure une convention de forfait en jours sur l'année, dans la limite de la durée annuelle du travail fixée par l'accord collectif prévu à l'article L. 3121-39 susvisé, les cadres disposant d'une autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduisent pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés.

L'article L. 3121-46 du code du travail applicable jusqu'à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 prévoit l'organisation, par l'employeur, d'un entretien annuel individuel avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l'année, ledit entretien portant sur la charge de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié.

Si le contrat de travail du 15 mars 2012 procède par renvoi à l'accord applicable sur l'aménagement du temps de travail en indiquant que : 'Dans le cadre de l'accord en vigueur sur l'organisation du temps d travail, votre forfait est lié à un nombre de jours travaillé égal à 214 jours pour une année civile', en sorte qu'à ce moment aucune convention de forfait n'avait été formalisée entre l'employeur et le salarié, il n'en demeure pas moins que par avenant du 25 octobre 2013, il a été clairement stipulé que le salarié était soumis à une convention de forfait annuel en jours fixés à 214. Le moyen tiré du défaut de convention individuelle de forfait sera rejeté.

L'accord d'entreprise sur l'organisation et l'aménagement du temps de travail du groupe Auchan du 10 avril 2013, prévoit les collaborateurs concernés, le nombre de jours à travailler (214 sur l'année - journée de solidarité comprise), le suivi de la charge du travail par la vérification de la cohérence des plannings prévisionnels des salariés, un entretien annuel organisé par la hiérarchie avec chaque collaborateur sur la charge de travail et l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle, des entretiens intermédiaires de suivi de la charge de travail et de réalisation des objectifs afin de s'assurer de leur compatibilité avec l'organisation du travail. Ces dispositions qui instaurent un suivi effectif et régulier de nature à permettre à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, sont de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressé. La nullité de la convention de forfait sera donc rejetée.

Au cours des années 2014 à 2016, l'employeur a mis en oeuvre une forme de suivi de la charge de travail dans le cadre des entretiens d'évaluation au titre de la rubrique du suivi des conditions d'exercice et de l'activité professionnelle.

Le dépassement de forfait annuel en jours n'est pas de nature à rendre en lui-même inopposable le forfait au salarié.

Lors de l'entretien 2015 sur l'année 2014, il a été noté un dépassement du nombre de jours du forfait (224) un nombre de jours de repos de 23 congés payés et 10 rtt. Le salarié a indiqué que sa charge de travail était raisonnable tout en notant que les permanences de direction avaient impacté sa charge de travail, que son organisation était en amélioration constante et qu'il parvenait raisonnablement à concilier la vie personnelle et la vie professionnelle. Il a par ailleurs noté qu'il n'avait pas rencontré de difficultés dans le respect des amplitudes de travail, de durée de repos et de plafond du nombre de jours travaillés par semaine. Ce faisant, au regard du nombre de jours de congés payés et jours de réduction du temps de travail pris, outre l'adéquation raisonnable entre sa vie personnelle et professionnelle notée par le salarié, il y a lieu de considérer que le suivi de la charge de travail opéré par l'employeur a été efficient pour cette année.

Au cours de l'entretien 2016, il a indiqué avoir travaillé 234 jours en 2015 et n'avoir bénéficié que de 23 jours de congés payés, qu'il parvenait à concilier vie professionnelle et vie personnelle en 'prenant conscience d'identifier ses priorités afin d'améliorer son organisation pour pouvoir (se) donner le temps de (se) rendre disponible pour sa famille', qu'il lui était difficile de respecter les amplitudes de travail lorsqu'il y avait des implantations de plateau ou des ZEP, telles que la St Honoré, galettes et autres thématiques commerciales.

Néanmoins, en regard de ce dépassement en 2015 outre de l'absence de prise des rtt, des doléances du salarié portant sur le non-respect des amplitudes de travail lors des opérations commerciales au cours de cette année et de ses réserves portant sur l'équilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle, il y a lieu de considérer qu'au cours de l'année 2015, l'employeur n'a pas assuré le suivi effectif et régulier de nature à lui permettre de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable.

Ce faisant, il convient de considérer que la convention de forfait est inopposable au salarié pour l'année 2015.

Au cours de l'entretien 2017 pour l'année 2016, le salarié a indiqué que sa charge de travail était plutôt raisonnable, même si elle variait en fonction du commerce ou des saisonnalités du rayon, que la répartition de la charge de travail était plutôt raisonnable et que la conciliation ente la vie professionnelle et privée était plutôt satisfaisante mais le nombre de jours du forfait n'a pas été noté ni même abordé, pas plus que le nombre de jours de congés payés pris et jours de réduction du temps de travail pris.

En conséquence, et compte tenu des jours de congés payés acquis mentionnés sur le bulletin de salaire de septembre 2017 (30 jours acquis plus 12 jours de congés payés au titre du solde antérieur, pris en octobre 2017) le suivi de la charge de travail par l'employeur au cours de ce seul entretien n'a pas été suffisant pour assurer l'adéquation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et assurer au salarié son droit au repos pendant l'année 2016. La convention de forfait est en conséquence inopposable au salarié pour l'année 2016.

Aucun contrôle de la charge de travail sur les six premiers mois de l'année 2017 n'a été effectué par l'employeur, en sorte que la convention de forfait est également inopposable au salarié sur cette période.

En définitive, la convention de forfait est inopposable au salarié pour les années 2015, 2016 et 2017 mais opposable pour l'année 2014.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a dit que la convention de forfait n'était pas appliquée et que les heures supplémentaires étaient dues sur une base de 35 heures par semaine.

2- Sur la demande au titre des heures supplémentaires

La durée de travail de 35 heures hebdomadaires dans l'entreprise est, en conséquence de l'inopposabilité de la convention de forfait, applicable sur les années 2016, 2016 et 2017.

La durée du travail hebdomadaire s'entend des heures de travail effectif et des temps assimilés, étant précisé que selon les dispositions de l'article L.3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles.

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Le salarié affirme avoir accompli entre 60 et 80 heures de travail hebdomadaires.

Il verse aux débats :

- ses bulletins de salaire des années 2015, 2016 et 2017 ;

- un récapitulatif du nombre des heures de travail accomplies pour chacune des semaines de chacun des mois des années 2015, 2016 et 2017 ;

- le calendrier de chacune des années 2015 à 2016 mentionnant les semaines de congés payés et le nombre d'heures accomplies les semaines travaillées ;

- le récapitulatif des sommes dues par année en fonction du salaire de base applicable et des majorations.

L'employeur n'avance aucun élément pour contredire les éléments apportés par le salarié qui sont suffisamment précis pour lui permettre d'y répondre.

Ainsi, en considération des éléments apportés par le salarié et de ce que le conseil de prud'homme avait constaté au regard des registres de pointage d'entrée et de sortie de M. [R] que ce dernier avait effectué des heures supplémentaires sur la période du 1er janvier 2016 au 10 octobre 2017, la société sera condamnée à lui verser la somme de 39 109,35 euros à titre de rappel de salarie pour les heures supplémentaires accomplies au cours des années 2015, 2016 et 2017 outre 3 910,93 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférente.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a limité le montant du rappel d'heures supplémentaires à la somme de 20 109,35 euros bruts.

3- Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

La société conteste le jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement de dommages et intérêts alors que le salarié n'apporte pas la moindre pièce justificative au soutien de la prétendue exécution déloyale alléguée de son contrat de travail.

Le salarié fait valoir quant à lui que les manquements de la société (dépassement de la durée hebdomadaire de travail imposée par la convention collective nationale applicable, la charge de travail exorbitante impactant son état de santé) sont constitutifs d'une exécution déloyale de son contrat de travail lui ayant occasionné des préjudices distincts de ceux liés à la perte d'emploi, en ce qu'ils ont affecté les conditions d'exercice de son activité professionnelle.

Il résulte des décomptes du salarié que la durée maximale de travail hebdomadaire a pu être dépassée à plusieurs reprises en sorte que le salarié a subi un préjudice moral qui a été exactement apprécié à la somme de 4.000 euros par le conseil de prud'homme.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.

Sur la rupture du contrat de travail

Le salarié conteste le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de ses demandes tendant à dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse en faisant valoir que :

- la société lui a reproché des griefs qui ne correspondaient pas à ses attributions et notamment à celles décrites dans la lettre de licenciement ; il en est ainsi du motif erroné dans le contrat de travail à durée déterminée d'un collaborateur et d'une GDI [gestion de développement individuel] sans remise d'objectifs, correspondant à des missions relevant d'un responsable des ressources humaines qu'il n'était pas et alors même que lors de la remise incriminée, il se trouvait en arrêt maladie ;

- il lui est reproché d'avoir une politique de management créant une ambiance détestable, mais l'enquête déclenchée auprès du CHSCT n'a en aucune manière remis en cause son management ; il ne saurait être tenu responsable du taux d'absentéisme des collaborateurs dû aux arrêts maladies ou accidents du travail ;

- sur le grief de défaut de maîtrise de l'animation commerciale, il n'a eu de cesse de s'investir sur ce plan, et la baisse du chiffre d'affaire par rapport à l'année 2016 n'est pas propre au secteur dont il avait la charge ;

- concernant l'hygiène du secteur sous sa responsabilité, la société s'est basée sur des rapports d'inspection d'une part anciens, datant de plus de deux mois avant son licenciement, mais également comprenant des points de contrôle qui ne dépendaient pas de lui ; les résultats obtenus par son successeur ne sont pas ceux obtenus grâce aux efforts qu'il a fournis constamment pour améliorer le rayon dont il avait la charge ;

- il assurait en sus de ses fonctions de chef de rayon la formation de nouveaux arrivants, la confiance accordée pour cette tâche apparaissant contradictoire avec l'insuffisance qui lui est reprochée ; son travail était fortement apprécié par sa hiérarchie.

La société soutient que :

- il apparaît à la lecture des divers entretiens d'évaluation du salarié, entre 2015 et 2017, que l'exécution contractuelle posait difficulté ;

- il résulte du bilan de l'accompagnement personnalisé mis en oeuvre suite aux difficultés rencontrées par le salarié dans ses fonctions, la persistance de difficultés fonctionnelles et managériales du rayon dont il avait la charge, ce dont il ressort notamment de l'enquête du CHSCT menée sur la situation de l'équipe pâtisserie en janvier 2017 ;

- sur le grief de défaut de maîtrise de l'animation commerciale, l'absence de préparation sur le premier trimestre 2017 lors des événements majeurs est notamment établie par le responsable hiérarchique du salarié alors que cette tâche relève de ses attributions et son responsable hiérarchique l'avait alerté sur ce point ;

- sur le non-respect des processus de fabrication reproché, constaté en 2017, a engendré une baisse de la rentabilité des produits, alors même que le salarié a été alerté sur ce point à de nombreuses reprises, dans le cadre de l'entretien d'évaluation 2016 et lors du plan d'accompagnement comportant une partie dédiée au respect des process ;

- sur le manque de rigueur sur l'étiquetage et les règles d'hygiène, les rapports d'inspection établis par un organisme extérieur mandaté montre la chute régulière en 2016 de la note du rayon dont le salarié avait la charge, alors qu'il avait été rappelé à l'ordre et sanctionné sur ces points, et malgré son plan d'accompagnement ayant développé un axe spécifique lié à l'hygiène et au respect des règles ;

- les missions récapitulées dans la lettre de licenciement sont conformes à la définition de manager commerce signée par le salarié, lesquelles visent notamment l'application de la réglementation sociale pour assurer la régularité de l'organisation des conditions de travail des collaborateurs de son équipe ;

- contrairement aux affirmations du salarié, le rapport d'enquête du CHSCT produit vise expressément l'encadrement, et plus précisément le manager du rayon pâtisserie, qui n'est autre que le demandeur lui-même.

***

Le licenciement du salarié lui a été notifié dans les termes suivants :

' Nous faisons suite à notre entretien préalable du 28 juin 2017, en présence de Madame [O] [H], Responsable des Ressources Humaines et Monsieur [J] [U], Responsable Commerce, auquel vous avez été convoqué par lettre du 20/06/2017 avec accusé de réception n°1 E002 243 6783 5 et pour lequel vous avez été assisté par Monsieur [W] [V], Responsable Logistique, nous vous informons que nous avons décidé de procéder à votre licenciement pour insuffisance professionnelle.

En effet, il apparaît que vous éprouvez des difficultés à maintenir un niveau de tenue de fonction suffisant.

A ce titre, nous vous rappelons que votre mission de Manager commerce est :

- d'optimiser les conditions d'accueil pour fidéliser les clients

- de piloter la bonne tenue des linéaires

- d'animer le commerce de son périmètre

- d'animer et faire grandir son équipe en développant le talent de chacun

- de s'engager pour la réussite des objectifs

- et enfin d'agir pour accroître la performance

Or, un état des lieux en mai 2016 a permis de mettre en lumière vos lacunes dans l'exercice de vos missions. C'est d'ailleurs au regard de ces lacunes importantes concernant votre niveau de tenue de fonction, qu'un plan personnalisé d'accompagnement a été mis en place le 1er juin 2016 et clôturé lors de l'entretien du 4 mai 2017.

Ce plan prévoyait un suivi régulier par votre Responsable Commerce, chargé de vous réexpliquer en détail les procédures à suivre, de vous montrer comment les appliquer et de constater vos difficultés persistantes afin de pouvoir les résoudre au mieux.

Or, malgré cet accompagnement, aucune amélioration dans la qualité de votre travail n'a été constatée.

- Vous ne maîtrisez pas l'animation commerciale : les 3 événements majeurs sur le premier trimestre à savoir la Saint Valentin, la fête des Grands-mères et Pâques en sont une illustration. Vous n'avez pas su théâtraliser ces opérations pour développer votre chiffre d'affaires, vous n'avez pas su mettre en 'uvre toute l'organisation nécessaire ce qui s'est traduit par de fortes régressions en comparable à l'année précédente.

- Vous n'avez pas su respecter les process de fabrication, votre manager de professionnalisation vous ayant à plusieurs reprises alerté à ce sujet : non-respect des recettes et non contrôle des poids.

- Vous manquez d'exigence sur l'étiquetage au kiosque et vous ne respectez pas les dates de retrait. A ce cela, se rajoutent des rapports d'inspection avec des notes d'hygiène bien dessous des attendus métiers. Vous avez d'ailleurs eu un avertissement le 31 décembre dernier pour un problème de remballe sur des bûches de Noël.

Ces insuffisances perturbent le bon fonctionnement du magasin, notamment les collaborateurs que vous encadrez :

- Des plannings horaires non adaptés à la charge de travail avec un nombre d'heures identique tous les jours de la semaine, et ce malgré un chiffre d'affaires variable du lundi au samedi,

- Un taux d'absentéisme en forte augmentation depuis un an,

- Des congés d'été non renseignés dans la matrice prévue à cet effet,

- Un problème de motif pour un CDD qui aurait pu se traduire par une requalification en CDI

- Et tout récemment une GDI sans remise d'objectifs non transmise et non signée par le collaborateur concerné.

Vos difficultés et votre irrégularité dans votre tenue de fonction se sont confirmées et n'ont pu être résolues par les nombreuses mesures mises en 'uvre par votre responsable. Elles préjudicient par ailleurs grandement au fonctionnement et au développement de votre périmètre.

Les problématiques organisationnelles n'ont pas assez été appréhendées et vous n'avez pas correctement priorisé et coordonné vos actions. Une enquête CHSCT a d'ailleurs été déclenchée à la demande des élus en fin d'année et ce, suite à des plaintes de vos collaborateurs qui évoquaient un management ainsi qu'une ambiance de travail détestables. Cette enquête a confirmé vos difficultés à communiquer, à coordonner et à anticiper auprès de vos équipes.

A l'occasion de plusieurs échanges lors des dernières semaines, dans un contexte où les artisans magnifiés requièrent un niveau d'exigence plus élevé, votre tenue de fonction nous pose problème et vous n'avez pas su mettre en 'uvre toutes les actions établies lors votre Plan d'Accompagnement Personnalisé.

Vous comprendrez que dans ces circonstances, eu égard à votre niveau de responsabilité, à votre ancienneté, ce désaccord et ces manquements essentiels pour la réalisation de votre fonction s'avère incompatible avec la poursuite de nos relations contractuelles.

C'est la raison pour laquelle nous sommes contraints de vous notifier par la présente,

votre licenciement pour cause réelle et sérieuse. /.../ '.

Aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail, il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des griefs invoqués et de former sa conviction au vu des éléments fournis pas les parties, le doute profitant au salarié.

La charge de la preuve de la cause réelle et sérieuse n'incombe pas particulièrement à l'une ou l'autre partie.

L'insuffisance professionnelle se définit comme l'incapacité objective d'un salarié à exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification et se caractérise par une mauvaise qualité du travail accompli susceptible de porter atteinte aux intérêts de l'entreprise.

L'appréciation de l'insuffisance professionnelle d'un salarié relève du pouvoir de direction de l'employeur, nécessitant néanmoins l'existence de motifs précis objectifs et matériellement vérifiables dont la preuve aura été rapportée.

En outre, afin que l'insuffisance professionnelle puisse être caractérisée, conformément aux dispositions de l'article L.6321-1 du code du travail, il revient à l'employeur de démontrer que préalablement à sa décision, il avait mis en oeuvre les moyens nécessaires afin d'assurer l'adaptation du salarié à son poste de travail et ainsi veillé au maintien de sa capacité à occuper l'emploi sur le long terme, le cas échéant par la mise en oeuvre de programmes de formations adaptés.

Aux termes de la définition des tâches du métier de 'manager commerce' au sein de l'entreprise, dont le salarié a reçu notification le 18 octobre 2014, le manager commerce a quatre grands types de contribution : la contribution pour l'équipe, la contribution pour le client, la contribution pour le résultat et la contribution pour l'entreprise.

Au sein de la contribution pour l'équipe, il :

fait grandir l'équipe par un management collaboratif : relaie et diffuse la vision de l'entreprise et le projet commercial du magasin ; définit le niveau d'exigence et de qualité du service attendu ; crée et met en oeuvre les conditions propices l'autonomie ; anime l'équipe de façon à créer des conditions favorables (...);

développe les talents de chaque collaborateur : évalue chaque collaborateur et personnalise son accompagnement de telle sorte que chacun soit responsabilisé et considéré ; donne les moyens à chaque collaborateur de développer son professionnalisme ; met chacun en situation d'exprimer ses talents et d'évoluer ;

contribue à l'application des politiques humaines et sociales et agit pour la qualité de vie au travail : est garant de la considération et de l'équité au sein de l'équipe ;

applique les politiques sociales et veille au respect de la législation sociale ; implique son équipe dans une démarche continue d'amélioration des conditions de qualité de vie au travail ; s'engage dans la résolution des irritants du quotidien.

Au titre de la contribution pour le client, il :

anticipe et anime le commerce de son périmètre : (...) Anticipe et anime la mise en oeuvre des évolutions des implantations produits ; suscite au sein de son équipe la prise de paris commerciaux ; développe le partenariat local, les animations commerciales locales ;

fidélise les clients par une relation authentique garantissant leur confort d'achat : organise avec l'équipe l'écoute des besoins des clients et la veille concurrentielle, s'assure de la qualité des conditions d'accueil des clients, de la qualité des réponses aux demandes des clients ; fait émerger de nouvelles actions pour développer le recrutement et la fidélisation clients ;

pilote la bonne tenue des linéaires : garantit la tenue des basiques en permanence, balisage, propreté, disponibilité produits... ; prépare le commerce en collaboration avec l'équipe à la préparation du commerce, mise ne place des promos/tracts, préparation des futurs saisonniers, prise de paris commerciaux.

Au titre de la contribution pour le résultat, il :

garantit la performance de ses marchés : analyse pilote les indicateurs commerciaux ; garantit le niveau de résultat sur l'ensemble des lignes des comptes d'exploitation des marchés confiés ; applique la législation commerciale ;

s'engager pour la réussite des objectifs ; co-définit avec son responsable les objectifs de résultats de son périmètre et s'engage sur les moyens de leur réalisation ; contribue à la rentabilité de son commerce par une politique de prix et des opérations commerciales adaptées ; optimise les moyens qui lui sont confiés pour atteindre les résultats ;

agit pour accroître la performance ; optimise la productivité de l'équipe ;co-construit les engagements avec l'équipe et valide les budgets d'achats importants avec son responsable ; supervise le pilotage des stocks ; démarques, approvisionnements et commandes de ses marchés.

* Sur le grief d'insuffisance dans l'animation commerciale

Il résulte de l'attestation de M. [U], cadre commercial superviseur de M. [R] que chaque semaine, les mêmes problématiques structurelles se retrouvaient : le stand n'était pas prêt à l'ouverture le lundi et le samedi matin le nombre d'heures par jour était assez similaire alors que le CA du WE représentait jusqu'à 60% de la semaine. Sur le commerce, 'nous avons subi le calendrier, toujours en retard sur la décoration, le briefing des équipes, l'organisation, la production vente, ce fut le cas en 2016 et 2017 à la Saint Valentin, la fête des grands-mères (6 mars 2016- 5 mars 2017) et Pâques ;la pâtisserie était en perte de clients, ce qui s'est traduit en 2016 par une régression client de 2,1% pour une société qui progressait à +1,2%.

De même, M. [E], responsable commerce- mission/professionnalisation a attesté que :

- fin 2016-début 2017, M. [R] ne maîtrise plus rien, aucune lucidité ; il subit les événements, plus d'emprise sur son métier et son équipe.

Pa railleurs, les chiffres avancés sont corroborés par les indications résultant de l'entretien annuel 2017 qui précise une baisse des clients de 2,2%. Ainsi, même s'il ressort des tableaux fournis par le salarié que sur l'année 2016, le rayon pâtisserie de l'établissement était au second rang des supermarchés avec une baisse des ventes maîtrisées de - 0,2%, les carences dans l'animation commerciales sont établies.

*Sur le grief d'insuffisance dans le respect des process de fabrication

Il ressort de l'attestation de M. [E], responsable commerce- mission/professionnalisation que le salarié n'assurait plus le respect des recettes corroborée par celle de M. [U], qu'il y avait une mauvaise tenue des calendriers de fabrication, rupture et casses produits, un non-respect des recettes : incohérence totale entre le prix de fabrication et le prix de vente. L'insuffisance dans le process de fabrication est établie.

* Sur le grief d'insuffisance dans l'étiquetage et le respect des dates de retrait

M. [E], responsable commerce- mission/professionnalisation mentionne au sein de son attestation que : 'il finit même par mettre en danger notre clientèle : non-respect des recettes et de l'étiquetage des produits- risques allergies, non-respect des dates limites de consommation ; non-respect de la tenue de travail en acceptant que plusieurs employées en fabrication pâtisserie portent des boucles d'oreilles (risque majeur si perte dans un gâteau)'.

Les rapports d'inspection effectués par la sas Mérieux Nutrisciences au sein du magasin Auchan de Saint-Priest en juillet 2016, en novembre 2016 et en mars 2017 établissent pour les activités de pâtisserie-viennoiserie, une évaluation de faible niveau et en constante chute (67,23%, 65,23% et 51,99%), sans pour autant être les plus basses du magasin.

Toutefois le rapport du même institut effectué les 10, 11 et 12 mai 2017, note une progression fulgurante de l'évaluation de l'atelier boulangerie (97,68 %) et de l'atelier Pâtisserie (90,31%), en sorte que l'insuffisance de respect des normes d'hygiène n'était plus d'actualité lors de l'engagement de la procédure de licenciement, le salarié étant parvenu avec le plan d'accompagnement mis en place, à mettre à niveau son rayon au titre des exigences en matière d'hygiène et à atteindre l'objectif de 85% attendu. Ce grief ne sera donc pas retenu à l'encontre du salarié.

* Sur le grief d'insuffisance dans la gestion du personnel

Contrairement à ce que soutient le salarié, le rapport du CHSCT issu de l'enquête diligentée à la suite de remontées d'informations faisant état de tensions relationnelles récurrentes en pâtisserie, l'attitude du manager est régulièrement mise en cause, alors même qu'il n'existe qu'un seul responsable, M. [R] : manque de soutien de l'encadrement, humeurs du responsable ; manque de communication et de coordination, manque de soutien managérial dans certaines circonstances ; manque de disponibilité ; des réactions parfois disproportionnées qui peuvent heurter sur la forme ; une meilleure communication et plus d'anticipation dans l'organisation des opérations commerciales est attendue ; certaines décisions prises en vue d'améliorer les situations tardent à se mettre en place ; la reconnaissance dans le travail est perçue comme insuffisante ; les tensions avec le manager sont marginales et causées par un manque de dialogue ; ce dernier aurait du mal à affirmer son autorité et réagit parfois maladroitement même si selon certains, cela est parfois justifié sur le fond. Il y est relaté l'existence de tensions ente employés à propos des questions d'organisation et ou de répartition des tâches. Le rapport note au titre des risques psychosociaux, un risque élevé lié au facteur 'violence interne'.

Ainsi il est avéré que l'enquête du CHSCT a confirmé les difficultés du salarié dans la communication, la coordination et l'anticipation au sein de ses équipes, et les risques psychosociaux en découlant.

Il ne rentre pas dans les fonctions du salarié de confectionner et faire signer les contrats à durée déterminée des membres de son équipe. Ce fait ne saurait donc être retenu à son encontre.

Le salarié avait en charge de remettre la GDI à ses collaborateurs comme il ressort des entretiens d'évaluation mais l'attestation de M. [U] qui indique à ce sujet : ' Nous avons une GDI pour un collaborateur qui a été validée sans que l'on ait reçu le collaborateur' n'est pas suffisamment précise sur la date de commission et n'est pas corroborée par les éléments objectifs du dossier. Ce fait ne saurait donc être retenu.

En ce qui concerne les plannings non adaptés à la charge de travail, les éléments apportés par le supérieur hiérarchique du salarié, M. [U], qui indique aux termes de son attestation que : ' des horaires : beaucoup de fausses informations, on pouvait croire que l'effectif sera suffisant mais entre les personnes présentes et la trame, il n'y avait pas le même nombre- oubli de noter un repos ou une récupération, un apprentissage en cours alors qu'ils étaient prévus en entreprise. Des vacances : à chaque vacances, il y avait des anomalies d'effectif ; 1 personne en vacance à Pâques en 2016 (2ème saisonnier de l'année) et 1 seul remplacement - des vacances d'apprentis n'étaient pas signalés.'.

Ces éléments sont corroborés par l'enquête du CHSCT qui a mis en exergue l'existence de tensions entre employés à propos des questions d'organisation et ou de répartition des tâches.

La société avait mis en place un plan personnel d'accompagnement du salarié à compter du mois de janvier 2016, réellement mis en oeuvre à compter du 1er juin 2016, ponctué par 3 entretiens de suivi et l'entretien d'évaluation 2017.

Le salarié avait certes une charge de travail importante et il lui était confié des missions de formation des collaborateurs dont le stage 'coordinateur pâtisserie' pour la formation des jeunes managers pâtisserie du bassin en contradiction. Néanmoins, la mise en oeuvre du plan d'accompagnement avait pour but qu'il se focalise sur ses missions essentielles. Il s'infère donc, de l'ensemble de ces éléments, que le salarié présentait une insuffisance dans la gestion du personnel, dans le processus de fabrication et dans l'animation commerciale ayant des répercussions dans le fonctionnement de l'entreprise, laquelle n'a pas disparu malgré la mise en place du plan personnel d'accompagnement à compter du mois de janvier 2016 avec un premier entretien le 1er juin 2016 puis trois autres entretiens de suivi outre l'entretien d'évaluation 2017 (22 septembre 2016, 11 octobre 2016 et 15 mars 2017) qui lui donnaient les éléments nécessaires pour orienter son action et l'améliorer notamment en matière d'organisation commerciale, de gestion et implication des équipes.

Le licenciement pour insuffisance professionnelle est en conséquence justifié et le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.

Sur les autres demandes

Il convient d'ordonner la remise d'un bulletin de salaire conforme au présent arrêt outre les documents de fin de contrat rectifiés en fonction du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu à astreinte.

Les intérêts au taux légal sur les créances de nature salariale courent à compter de la demande, soit à compter de la notification à la société Auchan hypermarché de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes le 18 septembre 2018.

Les intérêts au taux légal sur les créances de nature indemnitaires courent à compter du jugement s'agissant de chefs confirmés et à compter de ce jour pour le surplus.

La cour rappelle que les sommes qu'elle alloue sont exprimées en brut.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société Auchan hypermarché succombant essentiellement sera condamnée aux entiers dépens de l'appel. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité comme de faire bénéficier le salarié de ces dispositions et de condamner la société à lui verser une indemnité complémentaire de 1 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Dans la limite de la dévolution,

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a en ce qu'il a dit que la convention de forfait n'était pas appliquée et que les heures supplémentaires étaient dues sur une base de 35 heures par semaine, en ce qu'il a condamné la société Auchan hypermarché à verser à M. [R] 20 109,35 euros bruts au titre des heures supplémentaires ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

DÉCLARE inopposable à M. [R] la convention de forfait pour les années 2015, 2016 et 2017 ;

CONDAMNE la société Auchan hypermarché à payer à M. [R] au titre des heures supplémentaires accomplies au cours des années 2015, 2016 et 2017, les sommes de :

39 109,35 euros à titre de rappel de salaire,

3 910,93 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférente ;

RAPPELLE que les sommes allouées par la cour sont exprimées en brut ;

DIT que les intérêts au taux légal sur les créances de nature salariale courent à compter de la demande, soit à compter de la notification à la société Auchan hypermarché de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes le 18 septembre 2018 ;

ORDONNE la remise par la société Auchan hypermarché à M. [R] d'un bulletin de salaire rectifié outre les documents de fin de contrat rectifiés en fonction du présent arrêt dans un délai de deux mois à compter de ce jour, sans qu'il y ait lieu à astreinte ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

CONFIRME le jugement entrepris sur le surplus,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société Auchan hypermarché à verser à M. [R] la somme complémentaire de 1 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Auchan hypermarché aux dépens de l'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 20/05768
Date de la décision : 10/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-10;20.05768 ?
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