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04/04/2024 | FRANCE | N°24/02839

France | France, Cour d'appel de Lyon, Jurid. premier président, 04 avril 2024, 24/02839


COUR D'APPEL DE LYON



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DU 04 AVRIL 2024

statuant en matière de soins psychiatriques





N° RG 24/02839 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PSQN



Appel contre une décision rendue le 21 mars 2024 par le Juge des libertés et de la détention de SAINT ETIENNE.



APPELANT :



M. [S] [X]

né le 25 Mai 1972



Actuellement hospitalisé au Centre Hospitalier de [Localité 1]



Non comparant représenté par Maître Sandra GARCIA, avocat a

u barreau de LYON, commis d'office



INTIME :



CH [Localité 1]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Non comparant, régulièrement avisé, non représenté



AUTRE PARTIE : [C] [X],...

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 04 AVRIL 2024

statuant en matière de soins psychiatriques

N° RG 24/02839 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PSQN

Appel contre une décision rendue le 21 mars 2024 par le Juge des libertés et de la détention de SAINT ETIENNE.

APPELANT :

M. [S] [X]

né le 25 Mai 1972

Actuellement hospitalisé au Centre Hospitalier de [Localité 1]

Non comparant représenté par Maître Sandra GARCIA, avocat au barreau de LYON, commis d'office

INTIME :

CH [Localité 1]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Non comparant, régulièrement avisé, non représenté

AUTRE PARTIE : [C] [X], en qualité de tierce demanderesse à la mesure a été régulièrement avisée. A l'audience, elle est non comparante, non représentée.

Le dossier a été préalablement communiqué au Ministère Public qui a fait valoir ses observations écrites.

*********

Nous, Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d'appel de Lyon, désigné par ordonnance de madame la première présidente de la cour d'appel de Lyon du 4 janvier 2024 pour statuer à l'occasion des procédures ouvertes en application des articles L.3211-12 et suivants du code de la santé publique, statuant contradictoirement et en dernier ressort,

Assisté de Gwendoline DELAFOY, Greffier, pendant les débats tenus en audience publique,

Ordonnance prononcée le 04 Avril 2024 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signée par Pierre BARDOUX, Conseiller, et par Gwendoline DELAFOY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

**********************

FAITS ET PROCÉDURE

Vu les pièces utiles et décisions motivées prévues à l'article R. 3211-12 du Code de la santé publique,

Vu la décision d'admission en soins psychiatriques en hospitalisation complète du 14 mars 2024 concernant M. [S] [X], à la demande d'un tiers prise par le directeur du centre hospitalier universitaire de [Localité 1],

Par requête du 18 mars 2024, le directeur du centre hospitalier universitaire de [Localité 1] a saisi le juge des libertés et de la détention afin qu'il soit statué sur la poursuite de l'hospitalisation complète au-delà de 12 jours.

Par ordonnance rendue le 21 mars 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Saint-Etienne a autorisé le maintien en hospitalisation complète sans son consentement de M. [S] [X] pour lui prodiguer des soins psychiatriques, au-delà d'une durée de 12 jours.

Par courrier du 26 mars 2024, reçu au greffe de la cour d'appel le 2 avril 2024, M. [S] [X] a relevé appel de cette décision en motivant notamment son recours sur le fait qu'il entend faire valoir ses droits.

Par ses conclusions déposées le 4 avril 2024 et régulièrement communiquées aux parties, le ministère public a requis la confirmation de l'ordonnance déférée en soutenant la qualité pour agir de Mme [C] [X], soeur de M. [S] [X], dont les relations compliquées avec ce dernier ne remettent pas en cause sa qualité de tiers, en ce qu'elle conserve des liens avec son frère. Il ajoute que les différents certificats médicaux circonstanciés confirment la nécessité du maintien de la mesure d'hospitalisation sans consentement.

L'affaire a été évoquée lors de l'audience du 4 avril 2024 à 13 heures 30.

À cette audience, M. [S] [X] n'a pas comparu et a été représenté par son conseil. Un certificat médical reçu au greffe le 3 avril 2024 émanant du Dr [Z] et daté du 2 avril 2024 a diagnostiqué une contre-indication totale à son déplacement sur [Localité 3] dans le cadre de sa demande d'appel.

L'avocat de M. [S] [X] a indiqué avoir eu connaissance du certificat médical de situation établi par le Dr [T] le 3 avril 2024 et du certificat médical du Dr [Z] du 2 avril 2024 comme des réquisitions du ministère public.

Lors de l'audience, le conseil de M. [S] [X] a été entendu en ses explications et a soutenu comme devant le juge des libertés et de la détention l'irrégularité de la procédure à défaut de qualité pour agir de Mme [C] [X], soeur du patient, avec lequel elle a des contradictions d'intérêts.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la procédure et la recevabilité de l'appel

Aux termes de l'article R. 3211-18 du Code de la santé publique, l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel devant le premier président dans un délai de 10 jours à compter de sa notification.

En l'absence d'une notification justifiée, le recours formé dans le délai du texte est déclaré recevable.

En l'état du certificat médical dressé le 2 avril 2024 par le Dr [Z], M. [S] [X] n'a pas été considéré comme pouvant comparaître et cette comparution a été dite comme totalement contre-indiquée. Il a été représenté par son conseil.

Sur la recevabilité de la demande d'hospitalisation formulée par Mme [C] [X]

Aux termes des premiers alinéas de l'article L. 3212-1 du Code de la santé publique, «I.-Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L. 3211-2-1.

II.-Le directeur de l'établissement prononce la décision d'admission :

1° Soit lorsqu'il a été saisi d'une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l'existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants exerçant dans l'établissement prenant en charge la personne malade. Lorsqu'elle remplit les conditions prévues au présent alinéa, la personne chargée, à l'égard d'un majeur protégé, d'une mesure de protection juridique à la personne peut faire une demande de soins pour celui-ci.».

Le conseil de M. [S] [X] maintient en appel son moyen tiré d'un défaut de qualité pour agir et de contestation de la qualité de tiers de Mme [C] [X], en relevant l'existence d'une contradiction d'intérêts entre elle et le patient.

Le texte susvisé ne conditionne nullement la faculté d'un des membres de la famille de solliciter une hospitalisation à l'absence d'un conflit familial ou personnel avec l'intéressé et il appartient ainsi au patient de caractériser que cette demande est irrecevable pour défaut de qualité pour agir dans son intérêt propre.

L'absence par nature d'un consentement aux mesures de soins de la personne concernée objective l'existence d'un conflit avec la personne de la famille qui fait état d'une nécessité d'hospitalisation et aucune des pièces du dossier ne révèle que Mme [X] n'ait pas agi dans l'intérêt de son frère, les propres symptômes des troubles du patient suffisant à expliquer une telle perception par l'intéressé.

Le juge des libertés et de la détention a dès lors rejeté à bon droit ce moyen qui tend à ajouter au texte et en ce qu'il n'est pas appuyé par des éléments objectifs démontrant une mauvaise foi du tiers demandeur à l'hospitalisation.

Sur le maintien de l'hospitalisation sans consentement

Aux termes de l'article L. 3211-3 du Code de la santé publique, le juge judiciaire doit s'assurer que les restrictions à l'exercice des libertés individuelles du patient sont adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en oeuvre du traitement requis, cet examen étant à réaliser par l'examen des certificats médicaux produits à l'appui de la requête et ensuite communiqués.

S'il appartient au juge judiciaire de contrôler que les certificats médicaux sont motivés de manière précise s'agissant du patient, il ne doit en aucun cas substituer son avis personnel à l'avis médical versé au dossier. De la même façon, l'appréciation du consentement ou du non-consentement aux soins est une évaluation médicale qui ne peut être faite que par le seul médecin. Le juge n'a en effet ni la qualité, ni les compétences requises pour juger des troubles qui affectent le patient, et juger de son consentement ou non aux soins mis en place.

Dans son recours, M. [S] [X] s'oppose à son maintien en hospitalisation sans consentement en faisant état de différents éléments, pour autant que son écriture puisse être déchiffrée et ces éléments constituent à tout le moins des confirmations de l'intense perturbation de l'intéressé, sous forme d'un délire de persécution, et de son absence de consentement aux soins.

Le certificat médical du Dr [Y] d'avant audience devant le juge des libertés et de la détention du 20 mars 2024 diagnostiquait alors :

«M. [S] [X] a été admis en hospitalisation complète pour prise en charge d'un tableau marqué par des idées délirantes et de l'agitation au domicile. Le patient est connu pour une pathologie psychologique chronique pour laquelle il est [en] rupture de traitement depuis trois mois.

En entretien ce jour, le contact est médiocre avec une tension interne palpable. On note une importante agitation psychomotrice avec une déambulation et une sollicitation permanente des soignants dans l'unité nécessitant une importante contenance psychique. On relève une importante tachypsychie et tachyphémie en entretien. Le discours est logorrhéique avec des éléments délirants et de persécution. En effet, il se persécute rapidement contre ses proches ou contre les soignants. Le mécanisme est principalement intuitif. On ne relève pas d'éléments en faveur d'un processus hallucinatoire. L'humeur est labile, et le patient est facilement irritable. M. [X] ne verbalise pas d'angoisse particulière ce jour. Cette nuit, il a été constaté par I'équipe soignante des troubles du sommeil à type d'insomnies.

M. [X] reste dans un déni massif de ses troubles. L'alliance est fragile, l'observance du traitement également.

Il est nécessaire de poursuivre l'hospitalisation sous contrainte au vu du risque de comportement auto ou hétéro-agressif sur l'extérieur.

Ces troubles mentaux nécessitent actuellement des soins en hospitalisation complète. Le patient a été informé de la forme de sa prise en charge, ainsi que de ses droits, voies de recours et garanties. Le patient n'a pas émis d'observations particulières.

Au vu de l'examen clinique de ce jour, et après avoir consulté les éléments contenus dans le dossier médical, je conclus que I'état de santé de M. [X] nécessite la poursuite ce jour des soins psychiatriques à la demande d'un tiers, sous le mode d'une hospitalisation à temps complet.»

Le certificat de situation du Dr [T] du 3 avril 2024 note :

«Le patient présente un état de désorganisation avec des symptômes délirants. L'humeur est élevée avec hétéroagressivité. Il a par exemple frappé deux IDE aujourd'hui entraînant son placement en chambre d'isoIement. Il est également anosognosique.

Ces troubles mentaux nécessitent actuellement des soins en hospitalisation complète. Le patient a été informé de la forme de sa prise en charge, ainsi que de ses droits, voies de recours et garanties. Le patient n'a pas émis d'observations particulières.

Au vu de l'examen clinique de ce jour, et après avoir consulté les éléments contenus dans le dossier médical, je conclus que l'état de santé de M. [S] [X] nécessite la poursuite ce jour des soins psychiatriques à la demande d'un tiers, sous le mode d'une hospitalisation à temps complet.»

En l'espèce, il ressort des différentes évaluations faites par les médecins ayant examiné M. [S] [X] que ses troubles en lien avec une pathologie psychiatrique sévère, nécessitent manifestement la poursuite d'examens et de soins auxquels il n'est pas en mesure de consentir pleinement dans le cadre d'une alliance thérapeutique. Son actuel maintien à l'isolement en est également un élément de confirmation.

Le maintien de M. [S] [X] dans le dispositif de soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète est justifié, cette mesure s'avérant en outre proportionnée à son état mental au sens de l'article L. 3211-3 du Code de la santé publique.

La décision entreprise doit dès lors être confirmée.

Sur les dépens

Il convient de laisser les dépens à la charge du Trésor public.

PAR CES MOTIFS

Statuant par mise à disposition au greffe,

Déclarons l'appel recevable,

Confirmons l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,

Laissons les dépens à la charge du Trésor public.

Le greffier, Le conseiller délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Jurid. premier président
Numéro d'arrêt : 24/02839
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;24.02839 ?
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