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21/03/2024 | FRANCE | N°20/03549

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 21 mars 2024, 20/03549


N° RG 20/03549 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NA57









Décision du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE du 05 juin 2020



RG : 2018j00979





S.A.R.L. IMOKA



C/



S.A.S. LOCAM





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 21 Mars 2024







APPELANTE :



S.A.R.L. IMOKA au capital de 1€, immatriculée au RCS de Villefranche sur Saône

'Tarare sous le numéro 508 131 455, agissant par son représentant légal en exercice

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée et plaidant par Me Caroline SAUVAGET, avocat au barreau de LYON, toque : 1876



INTIMEE :



SAS LOCAM - LOCATION AUT...

N° RG 20/03549 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NA57

Décision du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE du 05 juin 2020

RG : 2018j00979

S.A.R.L. IMOKA

C/

S.A.S. LOCAM

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 21 Mars 2024

APPELANTE :

S.A.R.L. IMOKA au capital de 1€, immatriculée au RCS de Villefranche sur Saône'Tarare sous le numéro 508 131 455, agissant par son représentant légal en exercice

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée et plaidant par Me Caroline SAUVAGET, avocat au barreau de LYON, toque : 1876

INTIMEE :

SAS LOCAM - LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS, au capital de 11 520 000 €, immatriculée au RCS de SAINT ETIENNE sous le numéro B 310 880 315, agissant poursuites et diligences par son dirigeantdomicilié és qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 19 Mai 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 24 Janvier 2024

Date de mise à disposition : 21 Mars 2024

Audience tenue par Aurore JULLIEN, présidente, et Viviane LE GALL, conseillère, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Aurore JULLIEN, conseillère

- Viviane LE GALL, conseillère

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 30 juin 2016, la SARL Imoka a conclu avec la SAS Location Automobiles Matériels (Locam) un contrat de location portant sur un photocopieur fourni par la société INPS Groupe, moyennant le règlement de 21 loyers trimestriels de 746,97 euros TTC (600 euros HT). Un procès-verbal de livraison et de conformité a été signé le 27 juillet 2016.

Par lettre recommandée délivrée le 22 mai 2018, la société Locam a mis en demeure la société Imoka de régler les échéances impayées sous peine de déchéance et de l'exigibilité de toutes sommes dues au titre du contrat.

Par acte du 2 juillet 2018, la société Locam a assigné la société Imoka devant le tribunal de commerce de Saint-Etienne, en paiement de la somme principale de 13.147 euros.

Par jugement contradictoire du 5 juin 2020, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a :

- débouté la société Imoka de sa demande tendant à voir prononcer la nullité du contrat pour absence d'informations relatives au droit de rétractation fondée sur le code de la consommation,

- constaté l'interdépendance et l'indivisibilité des contrats liant d'une part la société Imoka et la société Inps Groupe et d'autre part la société Imoka et la société Locam,

- dit que la société Locam a parfaitement exécuté ses obligations contractuelles,

- dit que l'action de la société Locam est recevable et fondée,

- débouté la société Imoka de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Locam,

- condamné la société Imoka à verser à la société Locam la somme de 13.147 euros correspondant aux loyers échus et impayés et à échoir majorés de la clause pénale de 10%, outre intérêts au taux légal à compter de la date de la mise en demeure du 17 mai 2018,

- autorisé la société Imoka à se libérer de sa dette par le versement de 24 mensualités égales successives à compter de la signification du présent jugement,

- dit qu'en cas de non-paiement d'une échéance la totalité de la dette deviendra immédiatement exigible,

- condamné la société Imoka à restituer à la société Locam le matériel objet du contrat de location financière à ses frais,

- condamné la société Imoka à verser la somme de 250 euros à la société Locam au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens sont à la charge de la société Imoka,

- dit qu'il n'y a pas lieu à ordonner l'exécution provisoire du jugement,

- débouté la société Locam du surplus de ses demandes.

La société Imoka a interjeté appel par acte du 7 juillet 2020.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 12 février 2021 fondées sur les articles L. 221-1, L. 221-3 et L. 221-5 du code de la consommation, l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution et les articles 1134, 1149 et 1244-1 ancien du code civil, la société Imoka demande à la cour de :

à titre principal,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a débouté de sa demande tendant à voir prononcer la nullité du contrat pour absence d'informations relatives au droit de rétractation fondée sur le code de la consommation,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé l'action de la société Locam recevable et fondée, en ce qu'il l'a condamné à payer la somme de 13.147 euros correspondant aux loyers, échus et impayés et à échoir majorés de la clause pénale de 10% outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 17 mai 2018, en ce qu'il l'a condamnée à restituer le matériel objet du contrat de location à la société Locam à ses frais et en ce qu'il l'a condamné au paiement d'un article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

statuant à nouveau,

- juger que le contrat qu'elle a conclu avec la société Locam le 30 juin 2016 est nul,

en conséquence,

- condamner la société Locam à lui restituer la somme de 4.430,85 euros,

- condamner la société Locam à venir récupérer dans le mois de la décision à intervenir le photocopieur de marque TA 260 CI SNR sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

à titre subsidiaire,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé que les contrats conclus le 30 juin 2016 entre elle, la société Locam et la société Inps Groupe sont indivisibles,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé l'action de la société Locam recevable et fondée, en ce qu'il l'a condamné à payer la somme de 13.147 euros correspondant aux loyers, échus et impayés et à échoir majorés de la clause pénale de 10% outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 17 mai 2018 en ce qu'il l'a condamnée à restituer le matériel objet du contrat de location à la société Locam à ses frais et en ce qu'il l'a condamné au paiement d'un article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

statuant à nouveau

- la juger bien fondée à se prévaloir de la résiliation du contrat de la société Inps Groupe,

- juger le contrat qu'elle a conclu avec la société Locam caduc,

- débouter la société Locam de toutes demandes de condamnation formée à son encontre,

à titre très subsidiaire,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il lui a accordé deux années pour remplir son obligation de paiement,

dans tous les cas,

- condamner la société Locam à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Locam aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 11 janvier 2021 fondées sur les articles 1134 et suivants, 1149 et 1184 anciens du code civil, les articles L. 121-16-1 4° devenu L. 221-2 4° du code de la consommation, les articles 311-2 et 511-21 du code monétaire et financier et l'article 14 du code de procédure civile, la société Locam demande à la cour de :

- dire non fondé l'appel de la société Imoka,

- la débouter de toutes ses demandes,

- confirmer le jugement entrepris,

- condamner la société Imoka à lui régler une nouvelle indemnité de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner en tous les dépens d'instance et d'appel.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 19 mai 2021, les débats étant fixés à l'audience du 24 janvier 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de nullité du contrat

La société Imoka fait valoir que :

- les articles L. 221-1 et suivants du code de la consommation lui sont applicables, le contrat conclu avec la société Locam n'est pas assimilable à un service financier, il a été conclu sur son lieu d'activité professionnelle et non dans les locaux de la société Locam, de sorte que les dispositions des articles L. 221-3 et L. 221-5 du même code s'appliquent ;

- elle a une activité d'assistance à maîtrise d'ouvrage, de sorte que la location d'un photocopieur n'entre pas dans le champ de son activité principale ;

- aucune information ne lui a été fournie sur son droit de rétractation, quant aux conditions, délai, modalités et formulaire ; le contrat est donc nul et la société Locam doit ainsi lui restituer les sommes versées, d'un montant de 4.430,85 euros, et reprendre le photocopieur sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

La société Locam réplique que les dispositions du code de la consommation ne sont pas applicables car les services financiers en sont expressément exclus ; que le contrat de location conclu avec la société Imoka entre dans ces exclusions, de sorte que les dispositions relatives aux contrats conclus hors établissement, dont se prévaut la société Imoka, ne sont pas applicables.

Sur ce,

Selon l'article L. 221-2, 4°, du code de la consommation, sont exclus du champ d'application du présent chapitre les contrats portant sur les services financiers.

C'est par de justes motifs que la cour adopte, que le tribunal a écarté le moyen de la société Locam tiré de l'exclusion des services financiers du champ d'application des dispositions du code de la consommation invoquées par la société Imoka.

Y ajoutant, il convient d'observer que, si le code de la consommation n'apporte pas de définition précise de ce qui doit être considéré comme étant un contrat portant sur un service financier, la directive 2011/83/UE du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, transposée en droit interne par la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, indique toutefois, à l'article 2, 12), qu'il faut entendre par «service financier», tout service ayant trait à la banque, au crédit, à l'assurance, aux pensions individuelles, aux investissements ou aux paiements.

Or, aux termes du contrat de location en cause, la société Locam acquiert le bien auprès du fournisseur et se trouve donc en être propriétaire ; à l'issue du contrat, le locataire dispose pour seule option de restituer le bien au bailleur ou de renouveler la location. Aucune option ne lui permet d'acquérir le bien ou de s'en voir transférer la propriété à l'issue du contrat.

Il en résulte que le contrat de location ne constitue aucunement une opération de crédit au sens du code monétaire et financier, ni un service financier au sens du code de la consommation, mais une simple location de matériel.

Le fait que l'article L. 311-2, 6°, du code monétaire et financier permette à des établissements de crédit d'effectuer des opérations connexes à leur activité, parmi lesquelles la location simple de biens mobiliers pour les établissements habilités à effectuer des opérations de crédit-bail, ne signifie pas pour autant que les dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement ne s'appliquent pas lorsqu'un tel contrat est conclu dans ces conditions.

En effet, l'article L. 311-2 se borne à définir, de façon exhaustive, les 'opérations connexes' que les établissements de crédit sont autorisés à réaliser sans bénéficier du monopole bancaire. Il ne s'en déduit pas que l'établissement de crédit peut s'affranchir des règles qui peuvent par ailleurs s'appliquer au titre du code de la consommation.

De même, les dispositions du code monétaire et financier relatives au démarchage bancaire ou financier ne permettent pas de soustraire le contrat de location aux dispositions du code de la consommation, dès lors que l'article L. 341-2, 7°, du code monétaire et financier exclut expressément des règles du démarchage bancaire et financier, les contrats de financement de location aux personnes physiques ou morales.

Les dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement peuvent donc être invoquées par la société Imoka.

L'article L. 221-3 dispose que 'les dispositions des sections 2, 3 et 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq'.

En l'espèce, le contrat de location en date du 30 juin 2016 conclu avec la société Locam ne mentionne pas le lieu de signature. La société Locam ne conteste pas qu'il s'agit d'un contrat conclu hors établissement, comme l'a retenu le tribunal, dès lors que ce contrat n'a pas été conclu dans les locaux de la société Locam.

De plus, la société Imoka justifie avoir une activité d'assistance à la maîtrise d'ouvrage et son Extrait Kbis mentionne une activité d'audit, conseil, formation, prise de participation dans tout type de société. La location d'un photocopieur n'entre donc pas dans le champ de son activité principale.

Enfin, elle justifie qu'elle employait, lors de la signature du contrat en 2016, trois salariés.

Dès lors, les conditions de l'article L. 221-3 précité étant réunies, les articles L. 221-5 et suivants sont applicables à la société Imoka, en particulier s'agissant de l'information précontractuelle et du droit de rétractation avec remise d'un formulaire à cette fin.

Or, le contrat de location ne mentionne pas ces éléments, de sorte que la nullité du contrat doit être prononcée. Il s'ensuit que les parties doivent procéder aux restitutions réciproques.

La société Imoka sollicite la somme de 4.430,85 euros dont elle ne précise pas le détail et ne justifie aucunement avoir réglé ce montant à la société Locam. En revanche, il résulte de la mise en demeure que lui a adressée cette dernière le 17 mai 2018, que les loyers n'ont plus été payés à compter de l'échéance du 30 octobre 2017. En conséquence, il s'en déduit que seules les quatre premières échéances du contrat ont été réglées. Selon la facture unique de loyers émise par la société Locam le 10 août 2016, ces quatre échéances représentent la somme totale de 2.987,88 euros. La société Imoka justifie avoir adressé, le 13 février 2018, un chèque de 746,97 euros à la société Locam, à la suite de ses 'nombreuses relances', de sorte que ce montant doit être ajouté aux quatre loyers payés.

Dès lors, la société Locam sera condamnée à payer à la société Imoka la somme de 3.734,85 euros.

Quant à la restitution du photocopieur, compte tenu du démarchage opéré dans les locaux de la société Imoka, il convient de laisser cette obligation à la charge de la société Locam, propriétaire du matériel. En revanche, l'astreinte sollicitée par la société Imoka n'apparaît pas nécessaire.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La société Locam succombant à l'instance, elle sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, sa demande sera rejetée et elle sera condamnée à payer à la société Imoka la somme de 1.800 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, dans les limites de l'appel,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions critiquées ;

Statuant à nouveau,

Prononce la nullité du contrat de location conclu le 30 juin 2016 entre la société Imoka et la société LOCAM - Location Automobiles Matériels ;

Condamne la société LOCAM - Location Automobiles Matériels à payer à la société Imoka la somme de trois mille sept-cent trente-quatre euros et quatre-vingt-cinq centimes (3.734,85 euros) en restitution des loyers versés ;

Ordonne à la société LOCAM - Location Automobiles Matériels de reprendre le matériel objet du contrat de location ;

Dit n'y avoir lieu à astreinte ;

Condamne la société LOCAM - Location Automobiles Matériels aux dépens de première instance et d'appel ;

Condamne la société LOCAM - Location Automobiles Matériels à payer à la société Imoka la somme de mille huit-cents euros (1.800 euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 20/03549
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;20.03549 ?
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