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18/03/2024 | FRANCE | N°24/00039

France | France, Cour d'appel de Lyon, Jurid. premier président, 18 mars 2024, 24/00039


N° R.G. Cour : N° RG 24/00039 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PPOE

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT



ORDONNANCE DE REFERE

DU 18 Mars 2024





























DEMANDERESSES :



Mme [G] [L]

[Adresse 1]

[Localité 8]



avocat postulant : la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON (toque 475)



avocat plaidant : Me Noémie LE BOUARD (SELARL LEBOUARD AVOCATS), avocat

au barreau de VERSAILLES





DPO CONSULTING Société par actions simplifiée, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 3]

[Localité 7]



avocat postulant :...

N° R.G. Cour : N° RG 24/00039 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PPOE

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DE REFERE

DU 18 Mars 2024

DEMANDERESSES :

Mme [G] [L]

[Adresse 1]

[Localité 8]

avocat postulant : la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON (toque 475)

avocat plaidant : Me Noémie LE BOUARD (SELARL LEBOUARD AVOCATS), avocat au barreau de VERSAILLES

DPO CONSULTING Société par actions simplifiée, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 3]

[Localité 7]

avocat postulant : la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON (toque 475)

avocat plaidant : Me Noémie LE BOUARD (SELARL LEBOUARD AVOCATS), avocat au barreau de VERSAILLES

DEFENDEURS :

M. [V] [H]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Samayar MANALAI substituant Me Valérie NICOD de la SELARL YDES, avocat au barreau de LYON (toque 722)

la SAS DPO CONSULTING SUD EST Société par actions simplifiée, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Samayar MANALAI substituant Me Valérie NICOD de la SELARL YDES, avocat au barreau de LYON (toque 722)

Audience de plaidoiries du 04 Mars 2024

DEBATS : audience publique du 04 Mars 2024 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d'appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 31 janvier 2024, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée le 18 Mars 2024 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

''''

EXPOSE DU LITIGE

Le 14 novembre 2019, un contrat de fourniture de services a été conclu entre les S.A.S. DPO Consulting (DPO), dont la dirigeante est Mme [G] [L], et DPO Consulting Sud-Est (DPO Sud-est), cette dernière étant filiale de la première et dont le dirigeant était alors M. [V] [H], ce contrat prévoyant que la société DPO Consulting devait prêter assistance à sa filiale et lui fournir des services notamment en matière commerciale, juridique, et informatique.

Par actes du 17 mai 2023, M. [H] a fait assigner les sociétés DPO et DPO Sud-est, comme Mme [L] devant le tribunal de commerce de Lyon qui par jugement contradictoire du 21 décembre 2023, a notamment :

- annulé l'assemblée générale [de la DPO Sud-est] du 19 avril 2023 et les actes subséquents,

- jugé que M. [H] doit être réintégré à la présidence de la société DPO Sud-est et ordonné la suppression par le greffe de la mention de Mme [L] en qualité de présidente de cette société,

- condamné in solidum la société DPO et Mme [L] à payer à M. [H] la somme de 50 000 € au titre de son préjudice financier,

- condamné la société DPO et Mme [L] à payer à M. [H] la somme de 10 000 € chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Mme [L] et la société DPO ont interjeté appel de cette décision le 18 janvier 2024.

Par assignations en référé délivrées les 8 et 9 février 2024 à M. [H] et à la société DPO Sud-est, elles ont saisi le premier président afin d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire et la condamnation de M. [H] à payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

A l'audience du 4 mars 2024 devant le délégué du premier président, les parties, régulièrement représentées, s'en sont remises à leurs écritures, qu'elles ont soutenues oralement.

Dans leur assignation, Mme [L] et la société DPO soutiennent au visa de l'article 514-3 du Code de procédure civile l'existence de moyens sérieux de réformation tenant d'abord à l'impossibilité d'exécuter la décision déférée en appel, qui ne précise pas les actes subséquents qui sont annulés ensuite de l'annulation de l'assemblée générale du 19 avril 2023, ensuite à l'existence de difficultés d'exécution concernant la suppression du nom de Mme [L] au greffe du tribunal de commerce ce qui conduirait à ce que la société DPO Sud-est se retrouve sans dirigeant.

Ils affirment que le tribunal de commerce a commis des erreurs de fait et de droit dans sa décision en ce que la nullité de la délibération de l'assemblée générale du 19 avril 2023 en application de l'article L. 235-1 du Code de commerce et au regard des termes de l'article 1844 du Code civil comme des statuts de la société DPO Sud-Est.

Ils critiquent le jugement de cette juridiction en ce qu'il n'a pas tiré conséquence de la responsabilité qu'elle retenait en rejetant la demande indemnitaire présentée à titre reconventionnel.

Ils prétendent que Mme [L] ne dispose pas des finances suffisantes pour faire face aux condamnations prononcées et que la société DPO ne dispose pas de la trésorerie suffisante à cette même fin.

Ils considèrent que M. [H] n'a pas les revenus aptes à lui permettre de les rembourser en cas d'infirmation et que le risque d'insolvabilité est avéré.

Ils mettent en avant les risques encourus par la société DPO Sud-Est en cas de maintien de l'exécution provisoire.

Dans leurs conclusions déposées au greffe par RPVA le 1er mars 2024, M. [H] et la société DPO Sud-Est s'opposent aux demandes de Mme [L] et de la société DPO et sollicitent la condamnation de ces derniers à verser chacune à M. [H] la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Ils relèvent que Mme [L] et la société DPO n'ont pas sollicité l'arrêt de l'exécution provisoire en première instance et affirment l'absence de conséquences manifestement excessives révélées depuis que le tribunal de commerce a statué, celles mises en avant étant connues des demanderesses avant son jugement.

Ils font valoir que la situation de Mme [L] n'est pas nouvelle et que sa rémunération se trouve constituée de celle perçue en sa qualité de dirigeante de la société DPO, alors que la situation financière de cette dernière n'a pas plus évolué depuis la décision dont appel, sans que soient produits des éléments concernant son exercice 2023.

M. [H] fait valoir que le risque d'insolvabilité invoqué est en complète contradiction avec les demandes indemnitaires de 1 400 000 € formulées en première instance à son encontre.

La société DPO Sud-Est indique s'étonner que ses adversaires entendent se prévaloir pour son compte de l'existence de conséquences manifestement excessives consécutives à l'exécution du jugement du tribunal de commerce de Lyon et considère que son intérêt tend à ce que M. [H] reprenne ses fonctions de dirigeant.

Les défendeurs affirment l'absence de moyens sérieux de réformation et réfutent l'affirmation adverse concernant l'impossibilité d'exécuter le jugement dont appel.

Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l'exposé des moyens à l'énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.

MOTIFS

Attendu que l'exécution provisoire de droit dont est assorti le jugement rendu le 21 décembre 2023 par le tribunal de commerce de Lyon ne peut être arrêtée, que conformément aux dispositions de l'article 514-3 du Code de procédure civile, et lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; que ces deux conditions sont cumulatives ;

Attendu que s'agissant d'abord de l'existence de conséquences manifestement excessives, il y a lieu de rappeler qu'il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques générés par la mise à exécution de la décision rendue en fonction des facultés de remboursement de l'intimé si la décision était infirmée, mais également de la situation personnelle et financière du débiteur ;

Qu'en outre, le caractère manifestement excessif des conséquences de la décision rendue ne saurait exclusivement résulter de celles inhérentes à la mise à exécution d'une condamnation au paiement d'une somme d'argent ou d'une décision autorisant l'expulsion, mais ces conséquences doivent présenter un caractère disproportionné ou irréversible ;

Attendu que les défendeurs excipent des termes de l'alinéa 2 de l'article 514-3 pour faire valoir l'absence d'observations de Mme [L] et de la société DPO sur l'exécution provisoire devant le tribunal de commerce et l'absence de preuves de conséquences manifestement excessives révélées postérieurement à la décision de cette juridiction, mais n'en tirent pas la seule conséquence susceptible de découler de cette carence ;

Attendu que le texte susvisé ne sanctionne en effet cette carence que par l'irrecevabilité de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire alors que leurs conclusions ne tendent qu'à son rejet sans qu'une fin de non recevoir ne soit opposée aux demandeurs dans leur dispositif et même dans leurs motifs ;

Qu'ainsi il ne convient pas de distinguer suivant le moment où les éléments mis en avant par les demandeurs leur ont été révélés ;

Attendu qu'il appartient en tout état de cause à Mme [L] et à la société DPO de rapporter la preuve de ces risques occasionnés par l'exécution provisoire et des conséquences ci-dessus définies qu'ils sont susceptibles de subir personnellement ;

Attendu que les demandeurs considèrent d'une part et de manière pertinente que l'impossibilité d'exécuter la décision dont appel qu'ils allèguent n'est pas de nature à caractériser des conséquences manifestement excessives ;

Attendu que Mme [L], tenue solidairement avec la société DPO de l'indemnisation d'un préjudice financier, affirme ne pas être en capacité de faire face à sa condamnation à verser aux défendeurs une somme totale de 60 000 € ;

Qu'il est rappelé que l'impossibilité d'exécuter une condamnation ne constitue pas un critère de l'arrêt de l'exécution provisoire et n'est pas susceptible de consacrer à elle seule les conséquences disproportionnées et irréversibles exigées par l'article 514-3 du Code de procédure civile ;

Attendu que le courrier du 1er mars 2024 établi par le directeur administratif et financier de la société DPO, même s'il s'annonce comme externalisé, n'est pas susceptible d'être retenu comme pouvant emporter une conviction, en ce qu'il contient une opinion non étayée par de quelconques éléments comptables et en ce qu'il émane d'une personne dont l'objectivité n'est pas susceptible d'être présumée ;

Attendu que si elle fait état d'une rémunération mensuelle moyenne de 6 638,66 € au cours de l'année 2022, Mme [L] demeure sans justifier comme l'ont souligné ses adversaires, de ses revenus et patrimoine actuels, et notamment de l'absence d'autres revenus, ce qui était aisé à justifier notamment par l'intermédiaire d'un avis d'imposition récent ; qu'en l'absence de fourniture d'un tel élément et même de justification de la consistance réelle de son patrimoine, la production d'un procès-verbal faisant état de la rémunération comme des relevés d'un compte bancaire pour les mois de novembre, décembre 2023 et janvier 2024, de certificats de prêts et d'une fiche de paie faisant état du coût d'une assistante maternelle pour le mois de mars 2024 sont impropres à établir que le maintien de l'exécution provisoire aura pour elle des conséquences disproportionnées et irréversibles ;

Attendu que la société DPO ne met pour sa part en avant que ses comptes annuels de l'année 2022 et affirme qu'elle ne dispose pas de la trésorerie pour faire face aux 60 000 € formant le total des condamnations prononcées avec l'exécution provisoire par le tribunal de commerce de Lyon ;

Que son bilan 2022 fait état de disponibilités pour 38 918 €, d'autres réserves pour 223 091 €, d'un report à nouveau pour 233 091 € et d'un poste Autres créances de 160 203 €, chiffres qui n'objectivent pas une incapacité pour cette société à supporter le paiement de ses condamnations ;

Attendu que les relevés d'un compte de cette société pour les mois de novembre et décembre 2023 sont peu utiles à retracer sa trésorerie réelle, et il est à constater qu'il était pourtant aisé d'obtenir d'un expert comptable des éléments chiffrés susceptibles d'objectiver tant les disponibilités immédiates que les réserves de crédit de la société DPO ;

Attendu qu'il a été relevé avec pertinence par la société DPO Sud-Est qu'il n'appartenait pas à ses adversaires de s'inquiéter des conséquences susceptibles de découler de l'exécution provisoire et qu'il lui revenait seule de se prévaloir de conséquences manifestement excessives, ce qu'elle n'a pas tenté de faire ;

Attendu que les demandeurs font par ailleurs état de leur craintes relatives à l'insolvabilité de M. [H] et d'une difficulté susceptible de résulter d'une absence de capacité de remboursement en cas d'infirmation du jugement ;

Qu'il leur appartient pour appuyer leur demande d'arrêt de l'exécution provisoire fondée sur une telle crainte d'établir que l'existence de difficultés à obtenir un remboursement en cas d'infirmation est susceptible d'avoir pour elles des conséquences manifestement excessives ;

Attendu que les différents éléments financiers susvisés ne sont pas plus démonstratifs de difficultés financières évidentes susceptibles de découler de retards dans les remboursements dans l'hypothèse d'une infirmation ;

Attendu que les pièces produites ne caractérisent pas que le maintien de l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences disproportionnées et irréversibles à l'encontre de Mme [L] et de la société DPO ;

Attendu qu'en conséquence, leur demande d'arrêt de l'exécution provisoire est rejetée sans qu'il soit besoin d'apprécier le sérieux des moyens de réformation qu'elles articulent ;

Attendu que les demanderesses succombent et doivent supporter in solidum les dépens de cette instance en référé, comme indemniser leurs adversaires des frais irrépétibles engagés pour assurer leur défense ;

PAR CES MOTIFS

Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,

Vu la déclaration d'appel du 18 janvier 2024,

Rejetons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire présentée par la S.A.S. DPO Consulting et par Mme [G] [L],

Condamnons la S.A.S. DPO Consulting et Mme [G] [L] in solidum aux dépens de ce référé et à verser à M. [V] [H] et à la S.A.S. DPO Consulting Sud-Est une indemnité unique de 1 600 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Jurid. premier président
Numéro d'arrêt : 24/00039
Date de la décision : 18/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-18;24.00039 ?
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