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14/03/2024 | FRANCE | N°22/06001

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 14 mars 2024, 22/06001


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





N° RG 22/06001 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OPSP





S.A.R.L. FORMAT XXL COMMUNICATION



C/



[N]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROANNE

du 24 Février 2022

RG : F 20/00048



COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 14 MARS 2024







APPELANTE :



S.A.R.L. FORMAT XXL COMMUNICATION

[Adresse 1]>
[Adresse 1]



représentée par Me Sandra GARCIA, avocat postulant au barreau de LYON et Me Emmanuelle MARTIN, avocat plaidant au barreau de PARIS







INTIMÉ :



[V] [N]

né le 27 Décembre 1960 à [Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 3]



repr...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 22/06001 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OPSP

S.A.R.L. FORMAT XXL COMMUNICATION

C/

[N]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROANNE

du 24 Février 2022

RG : F 20/00048

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 14 MARS 2024

APPELANTE :

S.A.R.L. FORMAT XXL COMMUNICATION

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Sandra GARCIA, avocat postulant au barreau de LYON et Me Emmanuelle MARTIN, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIMÉ :

[V] [N]

né le 27 Décembre 1960 à [Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représenté par Me Dominique AROSIO, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 11 Janvier 2024

Présidée par Nabila BOUCHENTOUF, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Fernand CHAPPRON, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Etienne RIGAL, président

- Françoise CARRIER, conseiller honoraire exerçant des fonctions juridi ctionnelles

- Nabila BOUCHENTOUF, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 14 Mars 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Etienne RIGAL, Président et par Fernand CHAPPRON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Après avoir exécuté un premier contrat à durée déterminée du 20 janvier au 19 mars 2014, en qualité d'agent commercial, Monsieur [V] [N] (le salarié) a été engagé par contrat à durée indéterminée en date du 20 mars 2014, par la société Format XXL Communication (l'employeur, la société), spécialisée dans la signalisation et la communication extérieure, en qualité de directeur de clientèle, statut Cadre, niveau 3.3.

Le 23 février 2020, Monsieur [N] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement pour motif économique.

Le 6 avril 2020, il a accepté de quitter l'entreprise en signant le contrat de sécurisation professionnelle proposé.

Par requête reçue en date du 7 octobre 2020 le salarié a saisi le Conseil de Prud'hommes de Roanne pour contester le solde de tout compte.

Par jugement rendu le 24 février 2022, le conseil a :

- condamné la Société Format XXL Communication à verser à Monsieur [N] les sommes de :

- 22.350,56 euros au titre de la rémunération variable, outre 2.235,00 euros au titre des congés payés sur la rémunération variable,

- 1.125,00 €au titre de solde de 13e mois,

- 7.375,68 € à titre d'indemnité légale de licenciement sur la rémunération variable,

- débouté Monsieur [N] de sa demande au titre de l'indemnité d'occupation du domicile pour l'activité professionnelle,

- condamné la société Format XXL Communication à verser à Monsieur [N], la somme de 2.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires,

- condamné la Société Format XXL Communication aux entiers dépens de l 'instance.

Par déclaration d'appel en date du 10 mars 2022, la Société Format XXL Communication a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions notifiées le 29 mai 2022, la société Format XXL Communication demande à la cour de :

- Infirmer le jugement rendu en ce qu'il a :

* l'a condamnée à verser à Monsieur [N] les sommes de :

- 22.350,56 euros au titre de la rémunération variable, outre 2.235 euros au titre des congés payés sur la rémunération variable

- 1.125 euros à titre de solde de 13è mois

- 7.375,68 euros à titre d'indemnité légale de licenciement sur la rémunération variable

* l'a condamnée à verser à Monsieur [N] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires

* l'a condamnée aux entiers dépens de l'instance,

- Confirmer le jugement en ce qu'il a :

* débouté Monsieur [N] de sa demande au titre de l'indemnité d'occupation du domicile pour l'activité professionnelle

Et statuant à nouveau :

- DÉBOUTER partiellement Monsieur [N] de sa demande au titre de la rémunération variable et juger que le montant dû par la Société au titre de la rémunération variable s'élève à la somme de 5.267,90 euros,

- DÉBOUTER Monsieur [N] de sa demande au titre des congés payés sur la rémunération variable,

- DÉBOUTER Monsieur [N] de sa demande de prime de 13ème mois,

- DÉBOUTER totalement Monsieur [N] de sa demande au titre de l'indemnité légale, ou à titre subsidiaire, le débouter partiellement de sa demande au titre de l'indemnité légale et juger que le montant dû au titre de l'indemnité légale de licenciement s'élève à la somme de 294,92 euros,

- DÉBOUTER Monsieur [N] de sa demande au titre de l'indemnité d'occupation du domicile,

DÉBOUTER Monsieur [N] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

A titre reconventionnel,

A titre principal :

- ORDONNER à Monsieur [N] de lui restituer la caisse de champagne de marque Ruinart conservée par devers lui d'un montant de 234,36 euros,

A titre subsidiaire :

- DÉCIDER de soustraire la somme de 234,36 euros du montant dû à Monsieur [N] au titre de sa rémunération variable,

En tout état de cause :

- CONDAMNER Monsieur [N] à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 Code de Procédure Civile,

- CONDAMNER Monsieur [N] aux entiers dépens de la procédure.

Par conclusions récapitulatives notifiées le 2 mai 2022, M. [N] demande à la cour de :

- DÉBOUTER la société Format XXL Communication de ses prétentions,

- CONFIRMER le jugement querellé, sauf en ce qui concerne l'indemnité d'occupation du domicile à titre professionnel,

- RÉFORMER le jugement querellé pour le surplus,

En conséquence :

- CONDAMNER la société Format XXL Communication à lui payer les sommes suivantes :

- 11.250,00 € au titre de l'indemnité d'occupation du domicile pour l'activité professionnelle,

- 2.000,00 € au titre de l'article 700 code de procédure civile,

- LUI DONNER ACTE de ce qu'il accepte de restituer la caisse de champagne au jour et à l'heure que la société Format XXL Communication, fixera, à charge de venir prendre le colis à son domicile,

- CONDAMNER la société Format XXL Communication aux entiers dépens de l'instance.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LA DEMANDE AU TITRE DE LA RÉMUNÉRATION VARIABLE

Le contrat de travail liant les parties prévoit une rémunération fixe ainsi qu'une rémunération variable ainsi définie :

« En sus de la rémunération fixe, M. [N] percevra un intéressement complémentaire sur le développement de nouveau business, entendu comme :

- La vente de nouveaux services aux clients existants de la Société ;

- L'acquisition de nouveaux clients pour des prestations de conseil et d'achat d'espaces LC, temporaires et plurimédias ;

- La commercialisation de mobiliers urbains et dispositifs d'affichage ;

- La vente de prestations techniques aux clients existants de la Société.

Cet intéressement prendra effet dès le 20 mars et sera calculé sur les honoraires encaissés par la Société dans les cas énoncés ci-avant. Il sera égal à :

- 10% des honoraires encaissés par la Société jusqu'à 10.000 euros de primes, soit 100.000 euros d'honoraires encaissés ;

- 5% des honoraires encaissés par la Société de 10.001 à 20.000 euros de primes, soit 100.001 à 200.000 euros d'honoraires encaissés ;

- 2,5% des honoraires encaissés par la Société au-delà de 20.001 euros de primes, soit 200.001 euros d'honoraires encaissés.

Cet intéressement est versé en fin d'année ».

Les premiers juges ont fait droit à la demande formée à ce titre par M. [N], pour la période du 1er janvier 2017 à la date de la rupture du contrat de travail, à hauteur de 22.350,58 euros outre 2 235 euros au titre des congés payés.

Comme devant les premiers juges, l'employeur ne conteste pas le principe du versement de la rémunération variable, mais oppose la prescription triennale pour les demandes antérieures au 25 mai 2017, ainsi qu'une autre base de calcul pour son évaluation.

1- Sur le moyen tiré de la prescription

L'employeur considère que c'est seulement par courrier du 25 mai 2020 que le salarié a émis des prétentions financières relatives à la rémunération variable de sorte que c'est à compter de cette date que doit être calculé le début de la prescription. De son côté, M. [N] rappelle qu'il l'avait déjà interpellé sur ce point par courriel du 6 février 2017 puis de nouveau, par mail du 31 mars 2020.

Suivant l'article L. 3245-1 du code du travail, l'action en paiement ou en répétition de salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait du connaître les faits lui permettant d'exercer son droit, la demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

Il résulte de la combinaison des articles L. 3245-1 et L. 3242-1 du code du travail que le délai de prescription des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible.

Contrairement à ce que retiennent les parties, et ce qu'a retenu le conseil, les courriers antérieurs à la saisine du Conseil des prud'hommes ne sont pas interruptifs de prescription, les articles 2240 et suivants du code civil énonçant de manière limitative les causes d'interruption.

En l'espèce, le contrat a été rompu le 6 avril 2020 et le salarié a saisi le Conseil des prud'hommes le 7 octobre 2020.

Ainsi que le prévoit la clause contractuelle, la rémunération variable devait être versée en fin d'année civile, de sorte qu'au regard de la date de la saisine du conseil, son action en paiement est prescrite pour les rappels de rémunération variable antérieure au 7 octobre 2017, soit celles payables jusqu'à fin 2016.

En tout état de cause, la cour observe que la réclamation de M. [N] au titre de la rémunération variable porte exclusivement sue les années 2017 à 2019.

2- Sur le fond

Concernant le calcul de la rémunération variable, M. [N] procède à un calcul differencié entre la rémunération variable liée aux prestations techniques et celle liée aux autres honoraires, considérant que les premières sont calculées sur le chiffre d'affaires soumis à TVA et que la base de calcul doit se voir appliquer une marge moyenne de 45% laquelle est favorable à l'employeur.

Cependant, le contrat ne comporte aucune distinction selon la nature des prestations réalisées, évoquant simplement un intéressement de '10% des honoraires encaissés par la société', sans autre précision relativement à leur détermination.

Ni le contrat ni les parties ne définissent le terme 'honoraires'.

L'employeur qui se réfère pourtant aux termes de la clause contractuelle, considère s'agissant des prestations techniques, que la rémunération variable doit être calculée sur les marges, et partant sur le chiffre d'affaires, mais appliquant des marges distinctes de celle appliquée par le salarié.

En outre, l'une et l'autre des parties produit ses propres tableaux réalisés par ses soins, détaillant le numéro et la date des factures et leur montant, les tableaux de la société comportant en outre la distinction HT et TTC, les tableaux de M. [N] précisant le seul montant de la rémunération lui revenant (10% de la facture).

Toutefois, sur la seule détermination des honoraires, les parties ne parviennent pas à retenir les mêmes données : ainsi, par exemple, la facture FA16100072 est datée pour le salarié au 16 février 2017, tandis que l'employeur la date du 31 octobre 2016, étant observé qu'aucune d'entre elle ne la produit, ni d'ailleurs n'en retient le même montant, mettant ainsi la cour, face à des tableaux comportant une force probante comparable, dans l'impossibilité d'apprécier le bien-fondé des chiffres ainsi présentés de part et d'autre.

S'agissant des prestations techniques, l'employeur détaille pour l'ensemble des facturations, leur montant ainsi que le montant de la facture client, dégageant ainsi la marge HT encaissée par la société, qu'elle considère ainsi, comme étant le montant des honoraires sur lesquels la rémunération variable doit être calculée, tandis que M. [N] se contente d'appliquer une marge arbitraire de 60% sans aucune explication.

Dans ces conditions, dès lors que la demande pecuniaire de M. [N] procède d'une distinction dont il ne détermine pas l'origine, il ne peut être fait droit à sa demande que dans la limite de la créance reconnue par l'employeur, soit 5 267,90 euros.

Le jugement sera par conséquent, infirmé de ce chef.

L'article L. 3141-22 I. du code du travail édicte le principe selon lequel le congé annuel prévu par l'article L. 3141-3 ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence.

Si l'employeur reproduit la position de principe de la cour de cassation quant à la détermination de l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés, il n'en fait toutefois, pas une correcte application aux faits de l'espèce, dès lors qu'en l'espèce, la rémunération variable, est assise sur les résultats produits par le travail personnel de l'intéressé, lesquels étaient nécessairement affectés pendant la période de congés, ce qui conduit à inclure cet élément de rémunération dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés.

Il s'ensuit que la société doit être condamnée à payer à M. [N] la somme de 5 267,90 euros au titre de la rémunération variable lui revenant, outre 526,79 euros au titre des congés payés afférents.

SUR LA DEMANDE AU TITRE D'UN PRÉTENDU 13EME MOIS

Il est constant que la prime de 13e mois revendiquée par M. [N] et allouée par le conseil des prud'hommes, n'est pas prévu par le contrat de travail ni par la convention collective de la publicité, ni par aucun autre accord collectif.

Le conseil des prud'hommes a retenu que l'employeur avait indiqué par mail du 2 février 2017 au salarié que 'nous versons depuis la création de Format XXL (la société étant depuis 18 ans en progression) une prime de performance représentant à peu près un 13e mois. Cette prime est versée à 50 % à la fin du mois de juin, l'autre partie étant versée au 31 décembre de chaque année. Je précise à peu près parce que depuis 2 ans on est au-delà d'un 13e mois', et considéré qu'en l'absence de dénonciation de cet usage, il convenait d'accorder au salarié une prime à hauteur de 1 125 euros, conformément à sa demande.

Il ne saurait donc se déduire de ce mail, la reconnaissance par l'employeur du versement d'un 13e mois, puisqu'il est fait référence à une prime de performance dont seulement le montant est equivalent à un 13e mois.

Pour ce seul motif, la demande au titre de la prime du 13e mois n'est donc pas fondée.

En outre, l'employeur objecte devant la cour que les modalités d'attribution et de calcul de la prime variable évoquée dans ce mail du 2 février 2017, ne sont pas déterminées, et M. [N] ne justifiant pas de l'attribution systématique de cette prime, elle ne saurait lui être versée.

Si l'employeur a bien reconnu au terme du mail précité, le versement d'une prime de performance, instauré à titre d'usage au sein de l'entreprise, puisqu'il en rappelle lui-même la généralité, la fixité dans son principe et sa constance de sorte que cette prime est devenue un élément obligatoire du salaire en l'absence de dénonciation (Cass. soc., 12 janv. 2022, nº 20-14.977), M. [N] sur lequel repose la charge de la preuve, n'apporte aucun élément de nature à permettre à la cour de liquider la créance de ce chef.

Par infirmation du jugement, il sera débouté de ce chef de demande.

SUR LA DEMANDE AU TITRE DU SOLDE DE L'INDEMNITÉ DE LICENCIEMENT SUR LA RÉMUNÉRATION VARIABLE

L'employeur prétend que la rémunération variable précédemment retenue constitue un intéressement qui n'a pas le caractère de salaire et ne peut être prise en compte dans le calcul de l'indemnité de licenciement. Pour autant, et conformément à l'article L. 3312-1 du code du travail, l'intéressement est lié aux résultats et performances de l'entreprise, ce qui ne correspond en aucun cas à la définition de la rémunération variable prévue au contrat liant les parties, laquelle concerne la performance individuelle du salarié.

Néanmoins, la cour observe, même si les deux parties évoquent 'l'indemnité légale de licenciement' que l'indemnité a été calculée par référence à la convention collective nationale des entreprises de la publicité dont l'article 69 prévoit : 'Il est alloué aux collaborateurs cadres licenciés, ayant au minimum 2 ans d'ancienneté dans l'entreprise, une indemnité distincte du préavis, et s'établissant comme suit :

- pour une période d'ancienneté jusqu'à 15 ans : 33 % de mois des derniers appointements perçus par l'intéressé par année complète de présence ;

- pour la période d'ancienneté au-delà de 15 ans : 40 % de mois des derniers appointements perçus par l'intéressé par année complète de présence ;

- pour toute fraction d'année supplémentaire, l'indemnité sera calculée au prorata des mois de présence compris dans cette fraction.'

Pour interpreter cette notion d'appointement, il convient de se référer à l'article 1er de la convention, qui pour déterminer les niveaux de categories et le salaire de base correspondant, utilise le terme 'appointements mensuels bruts', qui correspond à l'évidence, au salaire de base brut.

Il s'en déduit que la convention collective se réfère pour la détermination de l'indemnité conventionnelle de licenciement à la seule rétribution fixe brut versée au salarié, ce qui exclut par définition l'intégration de la rémunération variable.

Par infirmation du jugement, la cour juge que la rémunération variable étant exclue du calcul de l'indemnité conventionnelle, M. [N] doit être débouté de sa demande de rappel d'indemnité.

SUR LA DEMANDE D'INDEMNITÉ D'OCCUPATION DU DOMICILE

Poursuivant l'infirmation du jugement à ce titre, M. [N] réclame une indemnisation à hauteur de 11 250 euros correspondant à une somme de 150 euros par mois sur 75 mois, à titre d'indemnité d'occupation de son domicile.

Il explique qu'il ne lui a jamais été alloué la moindre indemnité alors que son lieu de travail a été fixé contractuellement à son domicile et que l'employeur ne disposait d'aucun bureau dans la région. Il ajoute avoir été contraint d'aménager son domicile pour y effectuer les tâches administratives et disposer de son propre matériel informatique.

L'employeur demande la confirmation du jugement de ce chef, rappelant que l'activité du salarié nécessitait d'être quasiment exclusivement en extérieur, et qu'il avait été contractuellement prévu de ne pas le rattacher au siège situé à [Localité 2], bien qu'il y disposait d'un bureau, par commodité du salarié, à sa demande. Il considère en conséquence, qu'en l'absence de contrainte de sa part, aucune indemnité ne saurait être due, et ce d'autant moins, que l'encombrement consistant en l'utilisation d'un ordinateur portable, est minime.

Aux termes de l'article 9 du code civil, chacun a droit au respect de sa vie privée.

L'article L. 1121-1 du code du travail dispose que nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.

L'occupation, à la demande de l'employeur, du domicile du salarié à des fins professionnelles constitue une immixtion dans la vie privée de celui-ci et n'entre pas dans l'économie générale du contrat de travail.

Si le salarié, qui n'est tenu ni d'accepter de travailler à son domicile, ni d'y installer ses dossiers et ses instruments de travail, accède à la demande de l'employeur, ce dernier doit l'indemniser de cette sujétion particulière et des frais engendrés par l'occupation à titre professionnel du domicile.

Le salarié ne peut prétendre à une indemnité au titre de l'occupation de son domicile à des fins professionnelles dès lors qu'un local professionnel est mis effectivement à sa disposition. (Soc., 11 juillet 2012, pourvoi n°10-28.847- 17-21.028 - 17-21.014).

En l'espèce, le contrat prévoit en son article 6, que le lieu de travail est situé à [Localité 5], correspondant au domicile du salarié, 'étant précisé que celui-ci pourra être amené à se déplacer partout où les nécessités de son travail l'exigeront', mais ce contrat ne fait référence à une quelconque indemnisation de l'occupation du logement personnel.

Il ne résulte ni des termes du contrat ni d'aucune pièce produite, que M. [N] disposait d'un local mis à sa disposition, et l'employeur ne démontre pas davantage que la fixation du lieu de travail au domicile du salarié répondait à une demande de ce dernier.

Si les fonctions telles que définies par le contrat de travail conduisaient à des déplacements, M. [N] devait néanmoins disposer d'un local pour accomplir les taches administratives, et effectuer certaines de ses attributions consistant par exemple à 'mettre en place des stratégies de communication, élaborer et définir des orientations et actions publicitaires..'

Il n'est d'ailleurs pas discuté que l'employeur a remboursé au salarié des frais d'abonnement internet, et le salarié reconnaît avoir disposé d'un ordinateur, d'une tablette et d'un téléphone portable (mail du 23 mars 2020).

L'occupation du domicile du salarié à des fins professionnelles, faute d'avoir un espace professionnel adapté est établi et constitue donc une immixtion dans la vie privée de celui-ci.

Cette situation justifie sur le principe, l'octroi d'une indemnité qui est versée indépendamment du temps de travail effectif du salarié.

Pour sa fixation, il convient de déterminer la proportion d'utilisation effective du domicile personnel à titre professionnel pour les tâches qui ne pouvaient pas être effectuées ailleurs et de définir l'importance de la sujétion imposée au salarié.

A cet égard, M. [N] verse aux débats un cliché photographique supposé démontrer l'occupation d'un bureau de 13 m2, ainsi que le plan à l'échelle de son habitation de 200 m2. Il produit également, un décompte établi mensuellement, par ses soins, depuis février 2014, censé établir sa consommation d'énergies électrique et de gaz, proratisé à la superficie du bureau.

Au vu de ces éléments, et à défaut de plus amples explications sur la façon dont il a calculé l'indemnité qu'il revendique, l'indemnité d'occupation à laquelle M. [N] peut prétendre sera fixée à 2 000 euros.

Le jugement sera donc infirmé et, statuant à nouveau, la société Format XXL sera condamnée à payer à M. [N] une indemnité de 2 000 euros du chef de l'occupation, par le salarié de son domicile à des fins professionnelles.

SUR LA DEMANDE DE RESTITUTION D'UNE CAISSE DE CHAMPAGNE

Sur cette demande, les premiers juges ont retenu qu'à l'audience, 'les parties ont convenu que ce point avait fait l'objet d'un règlement amiable'.

Poursuivant l'infirmation du jugement de ce chef, la société indique qu'il n'a jamais été prévu d'accord.

Les notes d'audience figurant au dossier n'actent en effet aucun règlement amiable entre les parties quant à la restitution revendiquée par la société, d'une caisse de champagne conservée par le salarié, mentionnant seulement que M. [N] est 'toujours prêt à restituer' cette caisse, comme il le fait aujourd'hui devant la cour.

En tout état de cause, M. [N] ne justifie pas avoir procédé à cette restitution.

Il convient par conséquent de condamner le salarié à restituer à ses frais, cette caisse de champagne dans un délai de 30 jours suivant la signification par l'appelante du présent arrêt.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

Il y a lieu de faire masse des dépens de première instance et d'appel et de dire qu'ils seront supportés par le salarié et par le liquidateur judiciaire à concurrence de la moitié chacun.

L'équité et les situations économiques respectives des parties justifient qu'il ne soit pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés, et y ajoutant,

Dit prescrites les demandes en paiement de rémunération variable antérieures au titre des années 2015 et 2016,

Condamne la société Format XXL Communication à verser à M. [N] la somme de 5 267,90 euros au titre de la rémunération variable lui revenant pour les années 2017 à 2020, outre 526,79 euros au titre des congés payés afférents,

Déboute M. [N] de sa demande en paiement du solde de la prime du 13e mois et de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

Condamne la société Format XXL Communication à verser à M. [N] la somme de 2 000 euros à titre d'indemnité d'occupation de son logement,

Condamne M. [N] à restituer à la société Format XXL Communication la caisse de champagne revendiquée, dans un délai de 30 jours suivant la signification du présent arrêt,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance et d'appel,

Fait masse des dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils seront supportés par M. [N] et par la société Format XXL Communication à concurrence de la moitié chacun.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 22/06001
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;22.06001 ?
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