La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2024 | FRANCE | N°20/02820

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 14 mars 2024, 20/02820


N° RG 20/02820 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M7DJ









Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 12 mars 2020



RG : 2019j1979







[K]



C/



Ste Coopérative banque Pop. CREDIT COOPERATIF





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 14 Mars 2024







APPELANT :



M. [C] [K]

né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité

6]

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représenté par Me Charline VUILLERMOZ, avocat au barreau de LYON, toque : 2958



INTIMEE :



CREDIT COOPERATIF société coopérative anonyme de Banque Populaire à capital variable, inscrite au RCS de Nanterre sous le n° 34...

N° RG 20/02820 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M7DJ

Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 12 mars 2020

RG : 2019j1979

[K]

C/

Ste Coopérative banque Pop. CREDIT COOPERATIF

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 14 Mars 2024

APPELANT :

M. [C] [K]

né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Charline VUILLERMOZ, avocat au barreau de LYON, toque : 2958

INTIMEE :

CREDIT COOPERATIF société coopérative anonyme de Banque Populaire à capital variable, inscrite au RCS de Nanterre sous le n° 349 974 931, représenté par ses dirigeants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Guillaume BAULIEUX de la SCP BAULIEUX-BOHE-MUGNIER-RINCK, avocat au barreau de LYON, toque : 719 substitué et plaidant par Me EZNACK, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 04 Mai 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 17 Janvier 2024

Date de mise à disposition : 14 Mars 2024

Audience tenue par Patricia GONZALEZ, présidente, et Vivianne LE GALL, conseillère, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 24 janvier 2013, la société Nouvelle Dalaudière Franken (la société) a ouvert un compte courant dans les livres de la société Crédit coopératif (la banque). Par acte du même jour, M. [K], dirigeant de la société, s'est porté caution solidaire dans la limite de 30.000 euros.

Par acte du 21 mars 2014, la banque a consenti à la société un prêt de 50.000 euros dont M. [K] s'est porté caution par acte antérieur du 11 mars 2014, dans la limite de 6.000 euros.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 3 août 2016, la banque a procédé à clôture du compte de la société Nouvelle Dalaudière Franken au motif qu'il a présenté un solde débiteur non régularisé.

Puis, par lettre recommandée avec avis de réception du 20 décembre 2016, la banque a mis en demeure la société Nouvelle Dalaudière Franken de lui payer la somme de 41.174,50 euros au titre du solde débiteur du compte courant après clôture et la somme de 35.008,90 euros au titre du prêt dont elle a prononcé la déchéance.

Par lettre recommandée du même jour, elle a mis en demeure M. [K] de lui payer la somme de 30.000 euros au titre de son engagement de caution du solde débiteur du compte courant, ainsi que la somme de 4.201,06 euros au titre de l'engagement de caution du contrat de prêt.

Par acte du 25 août 2017, la banque a assigné la société Nouvelle Dalaudière Franken et M. [K] en paiement, devant le tribunal de commerce de Lyon.

Par jugement du 1er avril 2019, le tribunal de commerce de Gueret a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société Nouvelle Dalaudière Franken et la SAS Saulnier-Ponroy a été désignée en qualité de mandataire judiciaire. Par courrier recommandé avec accusé de réception du 15 mai 2019, le Crédit coopératif a déclaré sa créance au passif de la procédure collective de la société Nouvelle Dalaudière Franken. Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du 25 juillet 2019.

Par jugement contradictoire du 28 novembre 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

- fixé au passif de la société Nouvelle Dalaudière Franken au profit du Crédit coopératif la somme de 81.279,48 euros, en principal, avec intérêts au taux contractuel de 6,10% à compter du 1er avril 2019 jusqu'à parfait paiement,

- condamné la société Nouvelle Dalaudière Franken et M. [K] au profit du Crédit coopératif à payer solidairement, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 500 euros,

- rejeté la demande d'exécution provisoire,

- condamné solidairement la société Nouvelle Dalaudière Franken et M. [K] aux dépens prévus à l'article 695 du code de procédure civile et les a liquidés conformément à l'article 701 du code de procédure civile.

Par requête du 6 décembre 2019, le Crédit Coopératif a demandé au tribunal de commerce de Lyon de rectifier une omission commise dans le jugement du 28 novembre 2019.

                                              

Par jugement réputé contradictoire du 12 mars 2020, le tribunal de commerce de Lyon a :

- dit qu'il y a lieu de compléter comme suit le jugement rendu le 28 novembre 2019 et de lire dans ses motifs : « attendu que les demandes en paiement à l'encontre de M. [K] des sommes de 30.000 euros et 4.201,06 euros, et des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2016, apparaissent régulières, recevables et fondées ; qu'elles sont en effet conformes aux obligations souscrites par M. [K] au titre de son engagement de caution »,

- dit qu'il convient encore et en conséquence de lire au troisième alinéa du dispositif de ce jugement soit entre « fixe au passif (') jusqu'à parfait paiement » et « condamné la société Dalaudière et M. [K] (') la somme de 500 euros » : « condamne M. [K] au profit du Crédit coopératif :

à payer la somme de 30.000 euros au titre du solde débiteur du compte courant, outre intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2016,

à payer la somme de 4.201,06 euros au titre du prêt de 50.000 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2016 »

- dit que le reste du jugement demeure sans changement,

- dit que la présente rectification sera mentionnée en marge de la minute n°1933200048 du jugement rendu le 28 novembre 2019 et des expéditions délivrées,

- dit qu'il n'y a pas lieu à dépens.

                       

M. [K] a interjeté appel du jugement du 12 mars 2020 par acte du 3 juin 2020.

***

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 23 février 2021 fondées sur les articles L. 341-4 et L. 341-6 du code de la consommation et l'article 1244-1 du code civil, M. [K] demande à la cour de :

- le dire recevable et bien fondé en ses demandes, fins et conclusions,

- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 12 mars 2020 ayant rectifié une omission commise dans le jugement rendu le 28 novembre 2019,

et, statuant à nouveau,

 

à titre principal, sur la disproportion de l'engagement de caution,

- juger qu'aucune fiche de renseignement remplie par lui au moment de la souscription de l'engagement de caution en garantie des engagements de la société Nouvelle Dalaudiere Franken n'est produite,

- juger manifestement disproportionné le cautionnement qu'il a souscrit à l'égard du Crédit Coopératif au jour de sa souscription,

- prononcer en conséquence la déchéance de son engagement de caution,

- débouter le Crédit Coopératif de ses plus amples demandes,

à titre subsidiaire, sur l'obligation annuelle d'information de la caution,

- juger que le Crédit Coopératif ne justifie pas l'avoir informé annuellement,

- juger en conséquence que le Crédit Coopératif doit être déchu de son droit à intérêts,

- juger en conséquence incertaines les créances du Crédit Coopératif,

- rejeter l'intégralité des demandes du Crédit Coopératif à son encontre,

à titre plus subsidiaire encore, sur l'octroi de délais de paiement,

- lui octroyer les plus larges délais de paiement en application des dispositions de l'article 1244-1 du code civil et de la manière suivante :

règlement de la somme de 200 euros par mois, pendant 23 mois,

règlement du solde de la dette à la 24ème échéance,

en toutes hypothèses,

- débouter le Crédit Coopératif de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner le Crédit Coopératif aux entiers dépens ainsi qu'à lui payer la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

***

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 8 mars 2021, le Crédit coopératif demande à la cour de :

- déclarer mal fondé l'appel interjeté par M. [K] à l'encontre du jugement rectificatif rendu le 12 mars 2020 seulement, puisqu'il n'a pas interjeté appel du jugement initial rendu le 28 novembre 2019 qui l'a condamné au paiement d'une indemnité de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens de l'instance,

- confirmer le jugement rectificatif rendu par le tribunal de commerce de Lyon le 12 mars 2020,

- juger, non seulement que M. [K] est défaillant dans l'administration de la charge de la preuve qui lui incombe du caractère manifestement disproportionné à ses engagements de caution, mais surtout que lui-même rapporte la preuve du contraire eu égard à la teneur de la fiche de renseignements patrimoniaux déclarée « sincère et véritable » par M. [K] avant de la signer le 5 février 2014,

- juger qu'il a respecté sa double obligation d'information et que les sanctions prévues aux articles L. 341-1 et L. 341-6 du code de la consommation n'ont pas vocation à s'appliquer dans la mesure où il se borne à solliciter le paiement d'intérêts moratoires échus postérieurement à sa mise en demeure du 30 décembre 2016,

- constater que par lettres recommandées avec avis de réception en date du 20 décembre 2016, il a vainement mis en demeure M. [K] d'avoir à lui payer la somme de 30.000 euros au titre du solde débiteur du compte courant et la somme de 4.201,06 euros au titre du prêt de 50.000 euros,

en tant que de besoin,

- condamner M. [K] à lui payer :

au titre du solde débiteur du compte courant, la somme de 30.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2016,

au titre du prêt de 50.000 euros, la somme de 4.201,06 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2016,

ajoutant au jugement déféré,

- condamner M. [K] à lui payer une somme complémentaire de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [K] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 4 mai 2021, les débats étant fixés au 17 janvier 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la disproportion des engagements de caution

M. [K] fait valoir que :

- au moment de sa souscription, son engagement de caution représentait six fois ses revenus annuels, de sorte qu'il était manifestement disproportionné ; la fiche de renseignement est datée d'un an après la souscription de l'engagement de caution, de sorte qu'elle n'établit pas que la banque s'est assurée de la proportionnalité de l'engagement au moment de sa souscription,

- la banque ne démontre pas non plus que sa situation actuelle serait suffisante pour lui permettre de faire face à ses engagements de caution.

Le Crédit coopératif réplique que :

- la charge de la preuve de la disproportion au moment de la souscription incombe à l'appelant, or il ne verse aucune pièce la démontrant ; concernant les revenus de l'appelant en 2013 prétendument limités à 4.902 euros, elle rappelle que l'avis d'imposition 2013 est relatif aux revenus 2012,

- elle produit la fiche de renseignement remplie par l'appelant le 5 février 2014 selon laquelle il déclarait être propriétaire d'une maison d'une valeur de 1.200.000 d'euros, d'une usine d'une valeur de 200.000 euros, et d'une maison d'une valeur de 200.000 euros ; ces biens ont été acquis en 1985, 2009 et 2010 ; en outre, il a déclaré disposer d'un revenu annuel de 48.000 euros, et son conjoint d'un revenu annuel de 64.000 euros, sans emprunt ni autre charge annuel de remboursement ; l'engagement n'était donc pas disproportionné,

- M. [K] doit être considéré comme toujours propriétaire des trois biens immobiliers puisqu'il ne justifie pas de leur vente ; l'engagement n'était donc pas non plus disproportionné lors de l'assignation.

Sur ce,

Selon l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-310 du 14 mars 2016, 'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.'

La proportionnalité de l'engagement d'une caution s'apprécie soit au moment de sa conclusion, soit, en cas de disproportion initiale, lorsque la caution est appelée. La disproportion suppose que la caution soit, à la date où elle souscrit, dans l'impossibilité manifeste de faire face à un tel engagement avec ses biens et revenus. La capacité de la caution à faire face à son obligation au moment où elle est appelée s'apprécie en considération de son endettement global, y compris celui résultant d'autres engagements de caution et quand bien même le juge a déclaré ces cautionnements antérieurs disproportionnés.

Il appartient à la caution qui l'invoque, de démontrer l'existence de la disproportion manifeste de son engagement au moment de la conclusion de celui-ci et réciproquement, il appartient au créancier d'établir qu'au moment où il appelle la caution, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son engagement.

Enfin, la caution qui a rempli, à la demande de la banque, une fiche de renseignements relative à ses revenus et charges annuels et à son patrimoine, dépourvue d'anomalies apparentes sur les informations déclarées, ne peut, ensuite, soutenir que sa situation financière était en réalité moins favorable que celle qu'elle a déclarée au créancier.

En l'espèce, M. [K] a souscrit un cautionnement de 30.000 euros le 24 janvier 2013 et de 6.000 euros le 11 mars 2014.

Or, le seul élément que produit M. [K] pour justifier de ses biens et revenus lors de la souscription de ces engagements consiste en son avis d'imposition 2013 sur les revenus de l'année 2012, lequel mentionne un revenu annuel de 4.902 euros.

Toutefois, ce document fait apparaître que le conjoint de M. [K] bénéficiait d'un revenu annuel de 32.856 euros et que sont également mentionnés des revenus fonciers, ce dont il se déduit que M. [K] disposait, à la date de la souscription de son premier engagement de caution, d'un patrimoine immobilier dont il n'établit ni la consistance ni la valeur.

M. [K] ne démontre donc pas qu'au jour de la souscription du premier cautionnement, celui-ci était manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

Or, la banque produit une fiche de renseignement établie le 5 février 2014 dans laquelle M. [K] a indiqué un revenu annuel de 48.000 euros pour lui-même et de 64.000 euros au titre de salaires et revenus immobiliers pour son conjoint, et déclaré un patrimoine immobilier, non hypothéqué, composé d'une maison acquise en 1985 évaluée à 1,2 millions d'euros, une usine acquise en 2009 évaluée à 200.000 euros et une autre maison acquise en 2010 estimée à 2.000 euros après déduction du capital restant dû.

Ces éléments établissent qu'à la date du second cautionnement le 11 mars 2014, cet engagement n'était aucunement disproportionné aux biens et revenus de M. [K], mais également, au regard des dates d'acquisition des biens mentionnées, que le premier cautionnement n'était pas davantage disproportionné lors de sa souscription le 24 mars 2013.

En outre, si M. [K] produit ses bulletins de paie de décembre 2019 et mars 2020 faisant apparaître un revenu mensuel net de près de 1.300 euros (sauf en mars 2020 où il a été placé en activité partielle à 50 %), il ne démontre pas, et ne prétend d'ailleurs pas, que ce patrimoine aurait été vendu et qu'il ne disposerait plus du capital correspondant, de sorte que la banque établit de surcroît qu'au jour où la caution est appelée, ses biens lui permettent de faire face à ses obligations.

En conséquence, la banque est fondée à se prévaloir des deux engagements de caution souscrits par M. [K].

Sur l'obligation d'information annuelle de la caution

M. [K] fait valoir que :

- l'intimée ne justifie pas l'avoir informé annuellement et valablement,

- bien qu'une clause de l'engagement de caution du 24 janvier 2013 prévoit l'envoi de lettres simples d'information et oblige la caution à faire connaître à la banque l'absence de réception de l'information, cette clause prive de toute portée les dispositions légales relatives à l'obligation d'information,

- les lettres simples produites sont insuffisantes pour démontrer l'envoi effectif des courriers, de sorte que la banque est déchue de son droit à intérêts et les paiements effectués par le débiteur principal doivent être imputés sur le paiement du concours dans les rapports entre la caution et la banque,

- la créance de la banque est, en outre, incertaine et indéterminée de sorte que la banque doit être déboutée de toutes ses demandes.

Le Crédit coopératif réplique que :

- l'article 3 de l'engagement de caution du 24 janvier 2013 précise que l'information annuelle sera fournie par lettre simple, et que la caution s'engage à faire connaître au créancier l'absence de réception de l'information ; l'appelant ne saurait prétendre ne pas avoir reçu les lettres simples,

- de même, M. [K] a été informé des incidents de paiement du débiteur principal par lettres recommandées avec accusé de réception,

- l'information de l'évolution de l'engagement de caution a aussi été apportée par l'assignation du 25 août 2017,

- l'éventuelle déchéance des intérêts ne s'applique pas aux intérêts moratoires dus en application de l'article 1353 du code civil devenu 1231-6 ; elle se borne à solliciter des intérêt moratoires échus depuis le 20 décembre 2016 de sorte que la sanction n'a pas vocation à s'appliquer.

Sur ce,

Selon l'article L. 313-22 du code monétaire et financier, applicable au litige :

'Les établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.

La réalisation de cette obligation légale ne peut en aucun cas être facturée à la personne qui bénéficie de l'information.

Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.'

Il résulte de ce texte qu'il appartient aux établissements de crédit et aux sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, de justifier de l'accomplissement des formalités légalement prévues et que la seule production de la copie de lettres d'information ne suffit pas à justifier de leur envoi.

En l'espèce, la banque produit deux lettres simples, l'une datée du 24 février 2015 informant la caution de la situation du débiteur principal au 31 décembre 2014, l'autre datée du 16 février 2016 l'informant de la situation du débiteur principal au 31 décembre 2015.

Toutefois, la banque ne démontre pas leur envoi à la caution.

Elle se prévaut de l'engagement de caution du 24 janvier 2013, lequel prévoit en son article 3 que l'information quant à l'obligation du créancier garanti et de ses accessoires au 31 décembre de l'année précédente, sera fournie à la caution par lettre simple chaque année avant le 31 mars et que la caution s'engage à faire connaître au créancier garanti, avant le 20 mars de chaque année, l'absence de réception de l'information prévue par la loi.

Une telle disposition contractuelle a pour effet de créer à la charge de la caution une obligation de veiller à l'accomplissement, par l'établissement de crédit, de son obligation légale d'information. Or, elle ne saurait aucunement décharger l'établissement de crédit de son obligation de prouver l'envoi des lettres d'information, dès lors que c'est bien sur l'établissement de crédit, débiteur de l'obligation d'information, de rapporter la preuve qu'il a rempli cette obligation. En effet, il est jugé avec constance qu'il appartient à la banque de rapporter la preuve de l'envoi des lettres d'information annuelle à la caution.

En conséquence, la banque ne peut solliciter les intérêts échus de ses créances.

Toutefois, s'agissant du cautionnement du compte courant de la société, il résulte du décompte des créances réclamées par le Crédit coopératif que le compte courant présentait un solde débiteur de 41.038,57 euros hors intérêts, au 12 août 2016 date de la clôture du compte. En conséquence, il est exact comme le soutient la banque, que sa demande en paiement formée contre la caution à hauteur de 30.000 euros n'inclut pas d'intérêts contractuels et que, contrairement à ce que soutient M. [K], la créance n'est aucunement incertaine.

Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il condamne M. [K] à payer à la société Crédit coopératif la somme de 30.000 euros au titre de son engagement de caution du compte courant de la société, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 décembre 2016.

S'agissant du cautionnement du prêt souscrit par la société, il résulte du décompte de créance adressé à M. [K] le 20 décembre 2016 qu'à la date de la déchéance du terme en avril 2016, sept échéances étaient impayées représentant la somme de 7.853,93 euros et que le capital restant dû s'élevait à la somme de 23.958,25 euros, étant rappelé que le cautionnement consenti par M. [K] au titre de ce prêt l'était dans la limite de 6.000 euros. La demande en paiement à hauteur de 4.201,06 euros de la banque est donc fondée en ce qu'elle n'inclut pas d'intérêts contractuels et n'est aucunement incertaine, de sorte que le jugement sera également confirmé en ce qu'il condamne M. [K] au paiement de cette somme avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 décembre 2016.

Sur les délais de paiement

M. [K] fait valoir qu'eu égard à la liquidation judiciaire de sa société, à son salaire mensuel brut de 1.600 euros et à l'absence de bien immobilier, à son placement en activité partielle en raison de la période sanitaire, aux perspectives peu encourageantes du secteur automobile dans lequel il travaille, il ne peut payer comptant une éventuelle condamnation, de sorte qu'il convient de lui octroyer un délai de paiement par un règlement mensuel de 200 euros pendant 23 mois, et règlement du solde de la dette à la 24ème échéance.

Le Crédit coopératif réplique que :

- l'appelant prétend qu'il ne disposerait d'aucun bien immobilier alors qu'il a un patrimoine immobilier considérable ; le défaut de bonne foi fait obstacle aux délais de paiement,

- eu égard à ses revenus passés, l'appelant doit avoir des économies,

- les bulletins de paie produits sont insuffisants ; ainsi, les derniers avis d'imposition ne sont pas produits,

- selon les délais demandés par l'appelant, il n'aurait réglé la somme que de 4.600 euros en deux ans, de sorte que la créance ne serait pas apurée ; la demande doit être rejetée.

Sur ce,

Compte tenu des éléments patrimoniaux relevés supra et de la durée de la procédure en appel, il n'y a pas lieu d'accorder de plus amples délais de paiement à M. [K].

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

M. [K] succombant à l'instance, il sera condamné aux dépens.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, sa demande formée à ce titre sera rejetée et il sera condamné à payer à la société Crédit coopératif la somme de 1.000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement,

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Rejette la demande de délais de paiement formée par M. [K] ;

Condamne M. [K] aux dépens d'appel ;

Condamne M. [K] à payer à la société Crédit coopératif la somme de mille euros (1.000 euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 20/02820
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;20.02820 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award