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07/03/2024 | FRANCE | N°21/06463

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 07 mars 2024, 21/06463


N° RG 21/06463 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NZNF









Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 06 juillet 2021



RG : 2020j00210







[U]

[U]

[L] NÉE [U]



C/



S.A.S. FIDEV

S.A.S. AVMH

S.A.R.L. ASTOR DECOR





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 07 Mars 2024







APPELANTS :



M. [J] [U]>
né le 22 Avril 1955 à [Localité 14] (RHÔNE)

[Adresse 4]

[Localité 10]



M. [Y] [U]

né le 06 Mai 1979 à [Localité 13] (YONNE)

[Adresse 9]

[Localité 3]



Mme [P] [L] née [U]

née le 01 Octobre 1977 à [Localité 15] (SAÔNE ET LOIRE)

[Adresse 7]

[Localité 6]



Représ...

N° RG 21/06463 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NZNF

Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 06 juillet 2021

RG : 2020j00210

[U]

[U]

[L] NÉE [U]

C/

S.A.S. FIDEV

S.A.S. AVMH

S.A.R.L. ASTOR DECOR

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 07 Mars 2024

APPELANTS :

M. [J] [U]

né le 22 Avril 1955 à [Localité 14] (RHÔNE)

[Adresse 4]

[Localité 10]

M. [Y] [U]

né le 06 Mai 1979 à [Localité 13] (YONNE)

[Adresse 9]

[Localité 3]

Mme [P] [L] née [U]

née le 01 Octobre 1977 à [Localité 15] (SAÔNE ET LOIRE)

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représentés par Me Anne TESTON de la SELARL REQUET CHABANEL, avocat au barreau de LYON, toque : 865

INTIMEES :

S.A.S. FIDEV au capital de 37 000 euros, inscrite au RCS de BOURG EN BRESSE sous le numéro 508 707 585, représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 2]

S.A.S. AVMH au capital de 40 080 euros, inscrite au RCS de BOURG EN BRESSE sous le numéro 819 063 561, représentée par son représentant légal domicilé en cette qualité audit siège

[Adresse 12]

[Localité 1]

Société ASTOR DECOR au capital de 28 000 euros, inscrite au RCS de LYON sous le numéro 447 573 502, représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 11]

Représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475, postulant et par Me Yann GALLONE de la SELARL BERTHELON GALLONE & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 27 Septembre 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 11 Janvier 2024

Date de mise à disposition : 07 Mars 2024

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Aurore JULLIEN, conseillère

- Viviane LE GALL, conseillère

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière et en présence de Maylis MENEC, greffière stagiaire,

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La SARL Astor Décor a pour activité la pose de tous revêtements de sols et muraux ainsi que la réalisation de tous travaux d'aménagement et de rénovation intérieure.

Par acte sous seing privé du 31 mars 2016, M. [J] [U] et ses enfants, M. [Y] [U] et Mme [P] [U] épouse [L] (les consorts [U]) ont cédé à la SAS Fidev et à la SAS Avmh l'intégralité des parts composant le capital social de la société Astor Décor. Cet acte de cession fait suite à un protocole d'accord de cession de parts conclu le 7 avril 2015.

Le prix de cession a été fixé à 5.000 euros, révisable en fonction de la situation nette comptable et du résulte net retraité de la société Astor Décor au 31 mars 2016.

Une convention de garantie d'actif et de passif a été simultanément régularisée entre, d'une part, les sociétés Fidev et Avmh et d'autre part, M. [J] [U].

Le cabinet Veama, expert-comptable habituel de la société Astor Décor, a arrêté le bilan de la société Astor Décor au 31 mars 2016. Il a fixé le prix définitif des parts de la société Astor Décor à la somme de 220.512 euros.

Par courrier recommandé du 30 juin 2016, les sociétés Fidev et Avmh ont informé les consorts [U] de l'existence de plusieurs points de désaccord sur le calcul définitif du prix. Une phase de conciliation a été engagée entre les parties mais aucun accord n'a été trouvé.

Par ordonnance du 24 février 2017, sur assignation des consorts [U], la juridiction des référés du tribunal de commerce de Lyon a désigné un expert ayant pour mission d'arrêter le bilan de la société Astor Décor au 31 mars 2016, de donner son avis sur les points de désaccord existant entre les parties et de proposer un prix de cession des titres. M. [D] [T] a déposé son rapport le 11 avril 2019. Il estime que le prix de la totalité des parts de la société Astor Décor est fixé à 400 euros hors remboursement complémentaire du compte courant de M. [J] [U] pour 33.000 euros.

En parallèle, par plusieurs courriers du 9 novembre 2016, 8 février 2017, 5 mai 2017, 28 mai 2018, 6 juin 2018 et 25 juillet 2018, les sociétés Fidev et Avmh ont mis en 'uvre la garantie d'actif et de passif due par M. [J] [U].

Par acte du 11 février 2020, les consorts [U] ont assigné les sociétés Fidev et Avmh devant le tribunal de commerce de Lyon aux fins notamment de fixer le prix de cession des titres de la société Astor Décor à la somme de 72.572 euros. La société Astor Décor est intervenue volontairement à l'instance.

Par jugement contradictoire du 6 juillet 2021, le tribunal de commerce de Lyon a :

donné acte à la société Astor Décor de son intervention volontaire,

dit que sociétés Fidev et Avmh ont régulièrement mis en jeu la garantie d'actif et de passif régularisée entre les parties aux termes de la convention du 31 mars 2016,

rejeté en conséquence la demande des consorts [U] de considérer ces mises en jeu comme irrecevables,

dit que le présent rapport a été nourri par les échanges des deux parties et, qu'il a permis à l'xpert de rendre une analyse détaillée de chacun des griefs et, qu'il ne lui appartient pas de remettre en cause la validité et la pertinence de son travail, il fera ainsi sienne ces conclusions,

fixé en conséquence le prix de la totalité des 2.800 parts de la société Astor Décor à 400 euros hors remboursement du compte courant de M. [J] [U] pour 33.000 euros, conformément aux conclusions du rapport de l'expert,

condamné les consorts [U] à rembourser aux sociétés Fidev et Avmh le trop-perçu (5.000 euros - 400 euros) soit 4.600 euros,

condamné les sociétés Fidev et Avmh à payer à M. [J] [U] le remboursement de son compte courant d'un montant de 33.000 euros,

dit qu'en application de la convention de garantie d'actif et de passif, les sociétés Fidev et Avmh sont bien fondées à réclamer la condamnation des consorts [U] au paiement de la somme de 59.368,48 euros au titre de la mise en jeu de cette garantie,

condamné en conséquence M. [J] [U] à payer à la société Astor Décor la somme de 59.368,48 euros,

dès lors, autorisé le séquestre amiable à libérer la somme de 50.000 euros entre les mains de la société Astor Décor,

dit que le recours exercé par les consorts [U] s'inscrit dans une relation classique entre un vendeur et un acquéreur de société, les difficultés rencontrées pour la détermination du prix de cession sont habituelles tout comme l'est la mise en jeu de la garantie d'actif et de passif,

rejeté en conséquence la demande de condamnation des consorts [U] à payer aux sociétés Fidev et Avmh la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts, en réparation de leur préjudice moral,

dit que les travaux d'expertise réalisés ont été une vraie valeur ajoutée pour déterminer le prix de cession des parts, que les conclusions de ce rapport ont été largement commentées par chacune des parties,

condamné in solidum les consorts [U] à payer aux sociétés Fidev et Avmh la somme de 8.250 euros HT au titre du remboursement des frais d'expertise judiciaire,

condamné les consorts [U] à payer aux sociétés Fidev et Avmh la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens de l'instance, y compris ceux de l'instance en référé,

rejeté comme non fondés tous autres moyens fins et conclusions contraires des parties,

dit que le présent jugement est exécutoire à titre provisoire.

Les consorts [U] ont interjeté appel par acte du 4 août 2021.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 24 mai 2022 fondées sur les articles 1134 ancien, 1984 et 1989 du code civil, les consorts [U] ont demandé à la cour de :

infirmer purement et simplement le jugement déféré en ce qu'il a :

dit que les sociétés Fidev et Avmh ont régulièrement mis en jeu la garantie d'actif et de passif régularisée entre les parties aux termes de la convention du 31 mars 2016,

rejeté en conséquence leur demande de considérer ces mises en jeu comme irrecevables,

dit qu'en application de la convention de garantie d'actif et de passif, les sociétés Fidev et Avmh sont bien fondées à réclamer leur condamnation au paiement de la somme de 59.368,48 euros au titre de la mise en jeu de cette garantie,

condamné en conséquence M. [J] [U] à payer à la société Astor Décor la somme de 59.368,48 euros,

autorisé le séquestre amiable à libérer la somme de 50.000 euros entre les mains de la société Astor Décor,

les a condamnés in solidum à payer aux sociétés Fidev et Avmh la somme de 8.250 euros HT au titre du remboursement des frais d'expertise judiciaire,

les a condamnés à payer aux sociétés Fidev et Avmh la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens de l'instance, y compris ceux de l'instance en référé,

rejeté comme non fondés tous autres moyens fins et conclusions contraires des parties,

dit que le présent jugement est exécutoire à titre provisoire,

- le confirmer pour le surplus,

statuant à nouveau,

rejeter comme irrecevables les mises en 'uvre de la garantie d'actif et de passif des sociétés Fidev et Avmh,

en conséquence,

débouter les sociétés Fidev et Avmh de toutes demandes formulées au titre de la garantie d'actif et de passif,

condamner in solidum les sociétés Fidev, Avmh et Astor Décor à supporter l'intégralité des frais d'expertise exposés pour la détermination du prix des parts,

condamner in solidum les sociétés Fidev, Avmh et Astor Décor aux entiers dépens de première instance, en ce compris l'instance de référé,

en toute hypothèse,

rejeter les demandes des sociétés Fidev, Avmh et Astor Décor,

condamner in solidum les sociétés Fidev, Avmh et Astor Décor à leur payer la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner in solidum les sociétés Fidev, Avmh et Astor Décor aux entiers dépens de l'instance d'appel.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 24 janvier 2022 fondées sur les articles 1334 ancien et 1240 du code civil, les sociétés Fidev, Avmh et Astor Décor ont demandé à la cour de :

infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

fixé le prix de la totalité des 2.800 parts de la société Astor Décor à 400 euros « hors remboursement du compte courant de M. [J] [U] pour 33.000 euros, conformément aux conclusions du rapport de l'expert »,

condamné les sociétés Fidev et Avmh à payer à M. [J] [U] le remboursement de son compte courant d'un montant de 33.000 euros,

dit qu'en application de la convention de garantie d'actif et de passif les sociétés Fidev et Avmh sont bien fondées à réclamer la condamnation des consorts [U] au paiement de la somme de 59.368,48 euros au titre de la mise en jeu de cette garantie,

condamné en conséquence M. [J] [U] à payer à la société Astor Décor la somme de 59.368,48 euros,

dit que le recours exercé par les consorts [U] s'inscrit dans une relation classique entre un vendeur et un acquéreur de société, les difficultés rencontrées pour la détermination du prix de cession sont habituelles toute comme l'est la mise en jeu de la garantie d'actif et de passif,

rejeté en conséquence la demande de condamnation des consorts [U] à payer aux sociétés Fidev et Avmh la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts, en réparation de leur préjudice moral,

confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions,

statuant à nouveau,

fixer le prix de cession des 2.800 parts sociales de la société Astor Décor à la somme de 400 euros,

juger que M. [J] [U] n'a aucun droit à un remboursement complémentaire d'un quelconque compte courant d'associé,

condamner M. [J] [U] à verser à la société Astor Décor la somme de 66.156,78 euros au titre de la garantie d'actif et de passif en date du 31 mars 2016,

condamner in solidum les consorts [U] à payer aux sociétés Fidev et Avmh la somme de 10.000 euros en réparation de leur préjudice moral,

débouter les consorts [U] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

condamner in solidum les mêmes à payer aux sociétés Fidev et Avmh la somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner les mêmes aux entiers dépens d'instance avec droit de recouvrement.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 27 septembre 2022, les débats étant fixés au 11 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le prix de cession et la créance de compte-courant d'associé

Les consorts [U] ont fait valoir que :

la valeur du prix des parts a été justement fixé à 400 euros,

le protocole de cession du 7 avril 2015 a prévu la déduction du prix des parts le remboursement du compte-courant de M. [U] pour 33.000 euros, ce qui justifie la créance de ce dernier.

La société Fidev et la société AVMH et la société Astor Decor ont fait valoir que :

l'expertise judiciaire à laquelle toutes les parties ont participé, a permis d'établir le prix exact des parts sociales et des sommes qui leur sont dues à ce titre en raison de la sur-évaluation lors de l'acquisition,

lors de la cession, les parties avaient convenu de ce que le prix de cession serait révisé en fonction de la situation nette comptable au 31 mars 2014, 31 mars 2015 et 31 mars 2016, du montant de la trésorerie au 31 mars 2016 si celle-ci était inférieure à 40.000 euros et du montant des stocks sir leur valeur nette était inférieure à 50.000 euros, et des remboursements intervenus au niveau des comptes-courants d'associés avant le 31 mars 2016,

l'expert judiciaire a fixé un prix de cession des parts à 400 euros hors remboursement comptable du compte-courant d'associé de M. [U] pour 33.000 euros en raison d'une valeur nette du stock à 47.702 euros, soit un trop-perçu de 4.600 euros au titre des parts, ce qui a été retenu par les premiers juges, puisque le prix de cession initial était de 5.000 euros,

le remboursement complémentaire de compte-courant n'a pas lieu d'être puisque M. [U] y avait renoncé lors de la cession et qu'aucune clause de retour à meilleure fortune n'était prévue,

lors de l'exercice 2014/2015, M. [U] avait renoncé à son compte-courant mais ne l'avait pas indiqué et n'avait pas été autorisé à le faire lors du protocole de cession,

le retraitement comptable de cette somme avec sa neutralisation doit être mis en 'uvre, et que M. [U] ne peut prétendre à obtenir cette somme qu'il a abandonnée,

l'avenant au protocole de cession du 8 mai 2016, signé après obtention de l'information relative à l'abandon de compte-courant, démontre que les parties n'ont jamais eu l'intention de recréditer le compte-courant de M. [U] de la somme de 33.000 euros,

l'octroi de cette somme reviendrait à maintenir M. [U] comme associé dans la société, ce qui nécessite une infirmation de la décision déférée sur ce seul point.

Sur ce,

L'article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Il ressort de l'avenant au protocole d'accord, daté du 8 mars 2016, signé par M. [U], que ce dernier confirme que l'abandon de créance de mars 2015, soit l'abandon du compte-courant à hauteur de 33.000 euros, est définitif, et a été consenti sans clause de retour à meilleur fortune.

Dès lors, les premiers juges ne pouvaient condamner la société Fidev et la société AVMH à payer à M. [U] la somme de 33.000 euros à titre de solde de son compte-courant puisqu'il y avait renoncé de manière définitive.

Il convient sur ce point d'infirmer la décision déférée.

Pour le surplus, à savoir le prix des parts, il a été évalué justement à la somme de 400 euros, ce qui n'est contesté par aucune des parties. Il n'y a donc pas lieu de statuer à nouveau sur ce point.

Sur la régularité de la mise en 'uvre de la garantie d'actif et de passif et les sommes dues à ce titre

Les consorts [U] ont fait valoir que :

la demande de mise en 'uvre est intervenue tardivement et que la condamnation de M. [U] n'a été demandée pour la première fois que par conclusions du 18 mai 2020, soit en dehors des délais prévu au protocole,

l'article 3 de la convention de garantie d'actif et de passif prévoit que le garant doit avoir été avisé par le bénéficiaire de la mise en 'uvre de la garantie par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de 15 jours après tout événement justifiant celle-ci et que le non-respect de ce délai entraîné une déchéance du droit de mise en 'uvre,

une interprétation restrictive de ces stipulations est de rigueur comme le prévoit la jurisprudence en la matière, qui l'interprète toujours en faveur du débiteur de la garantie,

l'envoi au conseil des consorts [U] des demandes de mise en 'uvre des garanties n'est pas recevable puisque celui-ci ne disposait d'aucun mandat, et que seul un envoi des demandes par lettre recommandée avec accusé de réception au domicile de M. [U] pouvait entraîner la mise en 'uvre de la garantie,

les demandes de mise en 'uvre par lettre recommandée avec accusé de réception des 9 novembre 2016, 8 février, 5 mai 2017 et 28 mai 2018 ont été adressées au conseil des consorts [U], le cabinet Lexxon ,

seule la lettre recommandée avec accusé de réception du 25 juillet 2018 a été adressé à M. [U] à son domicile, seule demande régulière en application de la convention liant les parties,

seule la société Astor Decor s'est adressée à M. [U], dans le cadre du contrôle URSSAF par courrier du 29 août 2017 alors que la garantie n'est stipulée qu'au profit de la société Fidev et la société AVMH, c'est-à-dire les acquéreurs, soit une mise en 'uvre irrégulière même en l'absence de redressement,

il ne peut être fait usage du courrier « récapitulatif » du 25 juillet 2018 pour justifier de la régularité de la mise en 'uvre de la garantie d'actif et de passif pour l'intégralité des demandes,

le garant a été informé de manière tardive par rapport à chacun des événements, et que le seul appel en garantie valable ne permet pas de demander à M. [U] d'intervenir,

les premiers juges ont fait une interprétation erronée de la convention en retenant que la convention faisait état « d'actes de procédures ou réclamation émanant d'un tiers » comme point de départ ce qui excluait la date de réalisation des événements, a contrario de la volonté commune des parties, alors que par exemple, un avis d'inaptitude ou bien un licenciement sont des actes de procédure et devaient être notifiés à M. [U] pour garantir ses droits,

la société Astor Decor fait preuve de mauvaise foi quant à l'absence de reclassement post inaptitude alors qu'elle appartient à un groupe de trois sociétés.

La société Fidev et la société AVMH et la société Astor Decor ont fait valoir que :

la mise en 'uvre de la garantie d'actif et de passif est justifiée par des situations connues des consorts [U] et de M. [U], puisque s'agissant d'un salarié licencié pour inaptitude sans possibilité de reclassement, l'avis d'inaptitude est antérieur à la cession des parts, que concernant le salarié victime d'une rechute d'un accident de travail, l'avis d'inaptitude sans possibilité de reclassement était antérieur à la cession des parts et que concernant la dévalorisation des stocks, l'expertise a démontré qu'il convenait de la prendre en compte dans le calcul du prix de cession en raison de son antériorité à celle-ci,

les intimées sont fondées à demander que les sommes dues au titre de la garantie d'actif et de passif soient versées à la société Astor Decor puisque c'est le patrimoine de cette dernière société qui a été lésée du fait de l'attitude des consorts [U],

la garantie d'actif et de passif a été mise en 'uvre régulièrement par l'envoi de lettres recommandées avec accusé de réception au conseil des appelants, et l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception récapitulative à M. [U],

le conseil des consorts [U], Me [B], n'a jamais contesté la réception des lettres recommandées, ce qui constitue un mandat apparent, et en outre n'a jamais dit ne pas avoir reçu de mandat,

la seule contestation est intervenue un an et demi plus tard, lors de la procédure en référé concernant l'instance sur la valeur des parts sociales,

la convention de garantie d'actif et de passif n'a jamais prévu de délai de notification concernant les événements menant à sa mise en 'uvre, la clause concernant la mise en 'uvre, seul un acte de procédure, au sens juridictionnel étant soumis à notification dans un délai de 15 jours, ou de réclamation émanant d'un tiers,

la convention n'a pas prévu de délai concernant le cas d'augmentation de passif ou de diminution d'actif,

à chaque événement, une interrogation de M. [U] a eu lieu par le biais de son conseil,

M. [U] ne démontre pas que la société Fidev et la société AVMH ont fait en sorte de l'empêcher de minimiser le dommage, étant rappelé, concernant des avis d'inaptitude sans possibilité de reclassement, que tout reclassement était impossible, ce dont il était informé et ce sur quoi il ne pouvait intervenir.

Sur ce,

S'agissant de la régularité de la mise en 'uvre de la garantie d'actif et de passif, les appelants font valoir que les courriers ont été adressés à Me [B] et non à M. [U] seul, ce qui est contraire à leur sens au protocole d'accord.

Or, sur ce point, il convient de rappeler dans un premier temps que Me [B] était le conseil des consorts [U] dans le cadre du processus de cession et n'a jamais refusé de recevoir les courriers, ou pour le moins, n'a jamais informé son correspondant de ce qu'il n'intervenait plus.

Par ailleurs, il n'est pas contesté qu'un courrier récapitulatif a bien été adressé à M. [U] par lettre recommandée avec accusé de réception dans le délai prévu au protocole d'accord, et avant le terme de la garantie d'actif et de passif, afin de reprendre chacun des éléments que les intimées entendaient faire indemniser au titre de la garantie d'actif et de passif, l'appelant ne contestant pas avoir reçu ce courrier, mais contestant le fait de ne pas avoir été informé à chaque fois.

Or, le protocole ne prévoit pas une information dans un délai particulier à chaque événement mais uniquement une information dans un délai de 15 jours lorsque la société Astor Decor est visée par un acte juridictionnel, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.

Les avis et informations données concernant la mise en 'uvre de la garantie d'actif et de passif ont donc été régulièrement transmis.

De plus, plusieurs éléments étaient connus des appelants et de M. [U] en particulier avant même la cession de la société Astor Decor.

S'agissant du licenciement de M. [I], les premiers juges ont relevé à juste titre que l'appelant était informé de l'avis d'inaptitude du 7 mars 2016 et de ce que le salarié est inapte à tout poste suivant avis du 9 janvier 2017, l'impossibilité de reclassement étant avérée à compter du 7 mars 2017, soit avant même la cession de l'entreprise.

De fait, M. [U] était informé de la situation et aurait dû tenir compte dans la comptabilité ou veiller à ce que cela soit fait, des indemnités de licenciement à verser au salarié.

S'agissant de la situation de M. [H], il est relevé que celui-ci était placé en maladie professionnelle depuis décembre 2014, soit une situation connue des appelants, le protocole du 7 mars 2015 indiquant qu'une embauche était prévue pour le remplacer, ce qui impliquait un licenciement pour inaptitude.

De fait, des provisions auraient dû être faites concernant les dépenses inhérentes au licenciement pour inaptitude, sachant que l'avis sur ce point est intervenu le 2 mai 2018.

L'expertise indique sur ce point qu'une provision aurait dû être comptabilisée à la date du 31 mars 2016 puisque la situation était connue.

De fait, pour ces deux salariés, la garantie d'actif et de passif est légitimement mise en 'uvre.

S'agissant de la valorisation des stocks, la mesure d'expertise a permis de déterminer une dépréciation du stock au titre de l'obsolescence pour la somme de 6.788,30 euros. Là encore, c'est à juste titre que la garantie d'actif et de passif a été mise en 'uvre.

Les premiers juges ont fait une juste appréciation des sommes devant entrer dans le calcul de la somme due au titre de la garantie d'actif et de passif due par M. [U] soit :

46.342,01 euros au titre du licenciement de M. [I]

10.238,17 euros au titre du licenciement de M. [H]

6.788,30 euros au titre des stocks obsolètes,

soit un total de 63.368,48 euros dont il est nécessaire de déduire la franchise de 4.000 euros prévue au protocole.

Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont condamné M. [U] à payer à la société Astor Decor, la somme de 59.368,48 euros au titre de la garantie d'actif et de passif avec libération du séquestre de 50.000 euros constitué au profit de la société.

Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice moral présentée par la société Fidev et la société AVMH

La société Fidev et la société AVMH ont fait valoir que :

au terme de l'expertise, la valeur des parts sociales a été fixée par l'expert à la somme de 400 euros alors que la somme payée initialement était 220.512 euros,

à hauteur d'appel, les consorts [U] ne contestent plus le prix des parts ce qui démontrent leur volonté de tromper à l'origine la société Fidev et la société AVMH quant à la valeur de l'entreprise,

les consorts [U] ont gonflé le résultat de la société en n'imputant de provisions dans des situations connues (maladie professionnelle, inaptitude de salariés), et en ne dévalorisant pas les stocks comme cela était nécessaire,

les consorts [U] ont pu, lors de l'expertise mais aussi en première instance, faire valoir leurs observations sur la question,

un préjudice moral résulte de ces agissements.

Les consorts [U] n'ont pas répondu sur ce point.

Sur ce,

L'article 1240 du Code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

La société Fidev et la société AVMH ne démontrent pas la réalité du préjudice moral allégué dans le cadre de leur demande, et ne démontrent pas non plus un abus d'ester ou une faute de la part de consorts [U].

Dès lors, il convient de rejeter la demande présentée et de confirmer la décision déférée sur ce point.

Sur les frais d'expertise

La société Fidev et la société AVMH ont fait valoir que :

la mesure d'expertise mise en 'uvre a bénéficié à l'intégralité des parties à l'instance et qu'il est nécessaire que les consorts [U] supportent, in solidum la moitié de son coût soit la somme de 8.250 euros HT.

Les consorts [U] n'ont pas répondu sur ce point.

Sur ce,

Il ressort des écritures et des débats que la mesure d'expertise s'est tenue au bénéfice des deux parties au litige et non uniquement au bénéfice de la société Fidev et la société AVMH. Il convient en conséquence de reprendre la position des premiers juges sur ce point qui ont condamné les consorts [U] à payer aux intimées la moitié des frais de la mesure d'expertise.

La décision déférée sera ainsi confirmée.

Sur les demandes accessoires

Les consorts [U] échouant en leurs prétentions, il convient de les condamner à supporter les entiers dépens de la procédure d'appel.

L'équité commande d'accorder à la société Fidev et la société AVMH une indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile qui sera fixée à la somme de 5.000 euros.

Les consorts [U] seront condamnés in solidum à leur payer cette somme.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, dans les limites de l'appel

Confirme la décision déférée sauf en ce qu'elle a condamné la SAS Fidev et la SAS AVMH à payer à M. [J] [U] la somme de 33.000 euros au titre de son compte courant,

Statuant à nouveau

Déboute M. [J] [U] de sa demande de remboursement de son compte-courant d'associé pour la somme de 33.000 euros,

Y ajoutant

Condamne in solidum M. [J] [U], M. [Y] [U] et Mme [P] [U] épouse [L] à supporter les entiers dépens de la procédure d'appel,

Condamne in solidum M. [J] [U], M. [Y] [U] et Mme [P] [U] épouse [L] à payer à la SAS Fidev et à la SAS AVMH la somme de 5.000 euros à titre d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 21/06463
Date de la décision : 07/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-07;21.06463 ?
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