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07/03/2024 | FRANCE | N°20/07195

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 07 mars 2024, 20/07195


N° RG 20/07195 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NJSJ









Décision du Tribunal de Commerce de BOURG-EN-BRESSE du 04 décembre 2020



RG : 2019004973







S.A.S. FRANCE TITRISATION



C/



[C]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 07 Mars 2024







APPELANTE :



S.A.S. FRANCE TITRISATION immatriculée au R.C.S de PARIS sous le

numéro 353 053 531, agissant en qualité de société de gestion et représentant le FCT IJ INVEST 1, régi par les dispositions des articles L. 214-68 à L. 214-190 et R. 214-217 à R. 214-240 du Code Monétaire et Financier, prise en la personne de son ...

N° RG 20/07195 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NJSJ

Décision du Tribunal de Commerce de BOURG-EN-BRESSE du 04 décembre 2020

RG : 2019004973

S.A.S. FRANCE TITRISATION

C/

[C]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 07 Mars 2024

APPELANTE :

S.A.S. FRANCE TITRISATION immatriculée au R.C.S de PARIS sous le numéro 353 053 531, agissant en qualité de société de gestion et représentant le FCT IJ INVEST 1, régi par les dispositions des articles L. 214-68 à L. 214-190 et R. 214-217 à R. 214-240 du Code Monétaire et Financier, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité de droit audit siège

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Marie-Josèphe LAURENT de la SAS IMPLID AVOCATS ET EXPERTS COMPTABLES, avocat au barreau de LYON, toque : 768, plaidant par Me CHAMPIGNEULLE, avocat au barreau de LYON

INTIME :

M. [W] [F] [C]

né le [Date naissance 4] 1959 à[Localité 11])

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représenté et plaidant par Me Virginie MARRO de la SELARL VM AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1439

PARTIE INTERVENANTE VOLONTAIRE :

La société INTRUM INVESTMENT NO2, anciennement dénommée FAR RED INVESTMENT NO 2, immatriculée au registre des sociétés sous le numéro 590912, Venant aux droits du fonds commun de titrisation FCT IJ INVEST 1, représenté par la Société FRANCE TITRISATION, au capital de 240.160 €, immatriculée au RCS de PARIS sous le n°353 053 531, ayant son siège social [Adresse 2] [Localité 7], agissant en qualité de société de gestion, prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, en vertu d'un contrat de cession de créances en date du 17 décembre 2021,ayant pour mandataire de gestion la société INTRUM CORPORATE, immatriculée au registre du commerce et de sociétés de NANTERRE sous le numéro B797 546 769, dont le siège social est sis [Adresse 10] [Localité 8]

[Adresse 3],

[Localité 9], IRELANDE

Représentée par Me Marie-Josèphe LAURENT de la SAS IMPLID AVOCATS ET EXPERTS COMPTABLES, avocat au barreau de LYON, toque : 768, plaidant par Me CHAMPIGNEULLE, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 13 Septembre 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 10 Janvier 2024

Date de mise à disposition : 07 Mars 2024

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Aurore JULLIEN, conseillère

- Viviane LE GALL, conseillère

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière et en présence de Maylis MENEC, greffière stagiaire,

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Altrev, créée le 9 juin 2009, était spécialisée dans le commerce de détail de quincaillerie, peinture et verres en petites surfaces. Elle était gérée par M. [W] [C].

Le 25 juillet 2011, la société Altrev a souscrit un prêt professionnel de 50.000 euros remboursable en 26 échéances trimestrielles auprès du Crédit Lyonnais. M. [C] s'est porté caution solidaire de ce prêt à concurrence de 57.500 euros.

Par jugement du 23 janvier 2015, le tribunal de commerce de Mâcon a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société Altrev. Par courrier du 12 février 2015, le Crédit Lyonnais a déclaré sa créance auprès du mandataire judiciaire.

Par acte du 14 septembre 2015, le Crédit Lyonnais a assigné M. [C] en qualité de caution devant le tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse en paiement, principal de la somme de 26.508,49 euros.

Par jugement du 11 mars 2016, le tribunal de commerce de Mâcon a adopté le plan de continuation présenté par la société Altrev.

Par jugement du 24 février 2017, le tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse a débouté le Crédit Lyonnais de sa demande en paiement en jugeant notamment que la caution de M. [C] ne pouvait pas être actionnée en l'absence de dette exigible à l'égard de la débitrice principale.

Par acte sous seing privé le 6 juillet 2017, le Crédit Lyonnais a cédé ses créances sur la société Altrev au Fonds communs de Titrisation (FCT) IJ Invest 1, représenté par la Sas France Titrisation.

Par jugement du 27 février 2018, la procédure de redressement judiciaire de la société Altrev a été convertie en liquidation judiciaire.

Par courrier du 30 novembre 2018, la cession de créances intervenue a été dénoncée à M. [C] par la société Intrum corporate.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 2 juillet 2019, la société France Titrisation a mis en demeure M. [C] d'honorer son engagement de caution.

Des échanges sont intervenus entre la société France Titrisation et M. [C] sur le paiement des sommes réclamées mais aucun accord n'a été trouvé. Par acte du 31 juillet 2019, la société France Titrisation, venant aux droits du Crédit Lyonnais et agissant pour le compte du FCT IJ Invest 1, a donc assigné M. [C] devant le tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse aux fins notamment de le voir condamner, en qualité de caution de la société Altrev, à lui payer la somme de 28.061,43 euros.

Par jugement contradictoire du 4 décembre 2020, le tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse a :

- constaté que l'acte de cession de créance le Crédit Lyonnais et le FCT IJ Invest ne respecte pas les dispositions de l'article D. 214-227 du code monétaire et financier,

- jugé que la cession de créance dont se prévaut la société France Titrisation, agissant en qualité de société de gestion et représentant le FCT IJ Invest 1 est inopposable à M. [C],

- jugé que la société France Titrisation, agissant en qualité de société de gestion et représentant le FCT IJ Invest 1 n'a pas qualité à agir à l'encontre de M. [C],

en conséquence,

- rejeté l'intégralité des demandes formulées par la société France Titrisation, agissant en qualité de société de gestion et représentant le FCT IJ Invest 1 comme étant irrecevables,

- condamné la société France Titrisation, agissant en qualité de société de gestion et représentant le FCT IJ Invest 1 à payer à M. [C] la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire,

- rejeté toutes autres demandes,

- condamné la société France Titrisation, agissant en qualité de société de gestion et représentant le FCT IJ Invest 1 en tous les dépens.

La société France Titrisation a interjeté appel par acte du 18 décembre 2020.

Par acte sous seing privé du 17 décembre 2021, le FCT IJ Invest a cédé à la société intrum investment, 2 les créances qu'elle détenait sur la société Altrev.

***

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 23 mai 2022 fondées sur l'article 1134 ancien du code civil, les articles 2288 et suivants de ce même code et les articles L. 214-169 et suivants du code monétaire et financier, la société France Titrisation, agissant en qualité de société de gestion et représentant le FCT IJ Invest, et la société Intrum Investment N°2, anciennement dénommé Far Red Investment N°2, venant aux droits du fonds commun de titrisation FCT IJ Invest 1 et représenté par la société France Titrisation, intervenante volontaire, demandent à la cour de :

- réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

statuant de nouveau,

- recevoir comme régulière et bien fondée la demande en paiement présentée par la société Intrum Investment N°2 venant aux droits du fonds commun de titrisation FCT IJ Invest représentée par la société France Titrisation,

en conséquence, et à titre principal,

- condamner M. [C], en sa qualité de caution de la société Altrev, à payer à la société Intrum Investment N°2 la somme de 27.272,46 euros (28.061,43 ' 788,97) en principal, outre intérêts au taux conventionnel de 2,657 % à compter du 28 mai 2015, et jusqu'à parfait paiement,

à titre subsidiaire, et si, par impossible, la cour venait à déchoir la société Intrum Investment N°2 de tout droit à obtenir paiement des intérêts au taux conventionnel,

- condamner M. [C], en sa qualité de caution de la société Altrev, à payer à la société Intrum Investment N°2 la somme de 22.225,23 euros en principal, outre intérêts au taux légal à compter du 17 avril 2015, et jusqu'à parfait paiement,

en tout état de cause,

- ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

- débouter M. [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner M. [C] à payer à la société la société Intrum Investment N°2 une somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de la première instance, de la présente l'instance et de toutes ses suites.

***

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 24 juin 2022 fondées sur les articles L 313-1, L 313-4, L 333-1, L 343-5 du code de la consommation, les articles L 313-22, L 214-169, D 214-227 du code monétaire et financier et les articles 1343-5 et 1353 du code civil, M. [C] demande à la cour de :

avant dire droit,

- condamner les sociétés France Titrisation et Intrum Investment N°2 à lui communiquer, sous astreinte de 500 euros chacun par jour de retard, à compter du quinzième jour suivant la signification de l'arrêt à intervenir :

tout document justifiant du prix de la cession de la créance objet du présent litige, intervenue entre les sociétés France Titrisation et Intrum Investment N°2, ou permettant de l'apprécier,

tout document justifiant du prix de cession de l'ensemble des créances cédées, visées dans la pièce adverse n°15,

tout document justifiant du classement de la créance litigieuse par rapport à ses chances de recouvrement,

les éléments de comptabilité justifiant de la créance litigieuse,

- juger que Mme ou M. le conseiller chargé d'instruire l'affaire se réservera le droit de liquider l'astreinte,

à titre liminaire,

- rejeter les conclusions n°5 déposées par la société France Titrisation le 8 mars 2022,

A titre principal,

- confirmer le jugement déféré, en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes formulées par la société France Titrisation, représentant le FCT IJ Invest 1, faites désormais siennes par la société Intrum Investment N°2,

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour d'appel de Lyon devait considérer la cession de créance valable,

- juger que :

- tant le Crédit Lyonnais que la société France Titrisation ne l'ont pas informé de la défaillance du débiteur principal, ni respecté les dispositions sur l'information annuelle des cautions,

- le taux effectif global du prêt est absent,

- la société France Titrisation ne précise pas les sommes qu'elle aurait perçues dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Altrev,

- en conséquence, juger que les quantums des créances sont incertains et que les demandes de paiement à ce titre sont, en conséquence, irrecevables,

A titre infiniment subsidiaire,

- réviser à la baisse le montant de l'indemnité forfaitaire sollicitée par la société Intrum Investment N°2 venant aux droits de la société France Titrisation,

- juger que sa situation financière ne lui permet pas actuellement de faire face au remboursement intégral de la dette, en conséquence, lui accorder des délais de paiement, qui ne sauraient être inférieurs à 24 mois,

En tout état de cause

- juger qu'il dispose d'un droit de retrait litigieux, en raison de la cession de la créance objet du litige par la société France Titrisation au profit de la société Intrum Investment N°2, anciennement dénommée Far Red Investment N°2,

- lui donner acte de l'exercice de son droit de retrait litigieux,

- fixer à la somme d'un euro symbolique le prix de cession de la créance par la société France Titrisation au profit de la société Intrum Investment N°2, anciennement dénommée Far Red Investment N°2, objet du droit de retrait litigieux qu'il exerce,

- débouter la société Intrum Investment N°2 venant aux droits de la société France Titrisation de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner la société France Titrisation à lui payer une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner en outre aux entiers dépens de l'instance, avec droit de recouvrement.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 13 septembre 2022, les débats étant fixés au 10 janvier 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il est précisé que le litige n'est pas soumis au nouveau droit des contrats issu de l'ordonnance du 10 février 2016 puisque le contrat litigieux est antérieur au 1er octobre 2016.

Il est également précisé que le litige n'est pas soumis au droit du cautionnement issu de l'ordonnance du 15 septembre 2021 puisque le contrat de cautionnement litigieux est antérieur au 1er janvier 2022.

Sur la demande de rejet des écritures n°5 de l'appelante

M. [C] fait valoir à titre liminaire qu'aux termes du calendrier de procédure, la société France Titrisation devait déposer ses conclusions avant le 8 mars 2022 ; or, elles ont été déposées le jour même, de sorte qu'elles doivent être rejetées.

La société France Titrisation et la société Intrum Investment NO2 concluent au rejet de cette demande.

Sur ce,

Les conclusions litigieuses dont le rejet est demandé ne sont pas les dernières conclusions dont il convient de tenir compte en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statuant que sur les dernières conclusions et la demande de rejet de conclusions précédentes est donc sans intérêt sur le litige ; en outre, il est en toute état de cause relevé que le calendrier de procédure ne prévoyait aucune sanction en cas de non respect du délai.

L'intimé est donc débouté de sa demande de rejet des écritures numéro 5.

Sur la demande de production de pièces

A ce stade de la procédure, alors que la cour doit statuer au fond, cette demande à laquelle il n'a pas été répondu par les appelantes n'est pas opportune étant souligné que l'intimé a toute latitude pour tirer toutes conséquences juridiques qu'il estimerait utiles de l'absence de production des pièces réclamées par lui. La demande de production de pièces sous astreinte est en conséquence rejetée.

Sur l'opposabilité de la cession de créance

La société France Titrisation et la société Intrum Investment N°2 font valoir que :

- elles justifient de la cession de créance du le 6 juillet 2017 par le bordereau daté du même jour remis le 19 juillet 2017, un extrait de fichier électronique de liste des créances cédées, dont la créance litigieuse, conformément à l'article D.214-227 du code monétaire et financier ; eu égard au secret bancaire, au droit à la vie privée des débiteurs et à la nature des créances cédées, elles ne peuvent produire le fichier électronique dans son intégralité,

- ce bordereau est régulier et n'a pas à comporter la date sur l'annexe ; il comporte les éléments d'identification et d'individualisation de la créance cédée et la cession est opposable à la société débitrice et à sa caution dès la remise du bordereau du 19 juillet 2017,

- en tout état de cause les écritures régularisées en première instance accompagnées de l'acte de cession litigieux valent notification à l'intimé de la cession de créances de sorte qu'elle lui est opposable et à titre surabondant, le défaut de signification de la cession ne prive pas le cessionnaire du droit d'agir à l'encontre du débiteur cédé en paiement de sa créance,

- aucune instance n'a porté préalablement à toute cession sur les droits de la société Crédit Lyonnais et la créance cédés lors de la première cession ; lesdits droits n'ont pas fait l'objet d'une contestation présentée par l'intimé ; ces droits ne sont donc pas qualifiés de litigieux, de sorte qu'il ne peut pas être fait application du droit de retrait issu des dispositions de l'article 1699 du code civil,

- les dispositions de l'article 1699 du code civil sont inapplicables à l'espèce car la cession porte sur un portefeuille de créance à un prix globalisé qui fait obstacle à une individualisation du prix de cession de chaque créance,

- la cession de créances opérée entre la société France Titrisation ès-qualités et la société Intrum Investment n°2 est valable et régulière ; les créances cédées sont justifiées par l'annexe ; le prix de cession ne peut pas être individualisé ; cette cession est opposable à l'intimé.

M. [C] réplique que :

- l'acte de cession de créances mentionne le montant total des créances cédées par la société Crédit Lyonnais, sans que la créance de la société Altrev ne soit identifiée ; la créance litigieuse figure seulement dans un document non daté et non signé joint à l'acte de cession ; la date de l'annexe est pourtant requise ; on ne peut pas savoir si cette créance faisait partie des créances cédées et si le document la mentionnant a été transmis le jour de la remise du bordereau,

- il n'est pas démontré que le document produit comportant la créance serait bien l'extrait du fichier électronique ; il émane de la société Crédit Lyonnais elle-même ; les montants ne correspondent pas ; les mentions et références en entête et pied de page, ainsi que les paraphes sont absents ; il ne s'agit pas d'une annexe à l'acte de cession,

- en l'absence de démonstration de l'obligation légale d'individualisation des créances cédées par un bordereau régulier, la cession de créance lui est inopposable ; la société France Titrisation n'a donc pas qualité à agir à son encontre et la notification en cours d'instance par voie de conclusion est indifférente,

- la nouvelle cession de créance entre la société France Titrisation et la société Intrum Investment N°2, lui est inopposable en raison de l'inopposabilité de la précédente cession de créance et en ce qu'elle est affectée par le même défaut de validité que la précédente cession de créance, savoir la mention de la créance dans un document non daté et non signé qui ne permet pas de savoir si elle a été transmise le jour de la remise du bordereau ; l'absence d'entête et de paraphe empêche de vérifier si le document était un fichier intégré à l'acte de cession,

- il dispose d'un droit de retrait litigieux qu'il entend exercer mais aucune information ne figure dans l'acte de cession de créance entre la société France Titrisation et la société Intrum Investment N°2 lui permettant de déterminer à quel prix sa créance a été cédée ; cette seconde cession de créance est bien intervenue en cours de litige, de sorte qu'il peut valablement exercer son droit de retrait,

- les appelantes ne peuvent se prévaloir du fait que la cession est celle d'un portefeuille de créances pour un prix globalisé, puisqu'il suffirait que le prix de la créance soit déterminable ; il est donc fait sommation aux appelantes de communiquer divers documents permettant cette détermination ; à défaut, le prix de cession de cette créance sera fixé à 1 euro symbolique.

Sur ce,

Selon l'article D214-227 (Version en vigueur du 31 juillet 2013 au 23 novembre 2018), 'le bordereau prévu au deuxième alinéa du IV de l'article L. 214-169 comporte les énonciations suivantes :

1° La dénomination " acte de cession de créances " ;

2° La mention du fait que la cession est soumise aux dispositions des articles L. 214-169 à L. 214-175 ;

3° La désignation du cessionnaire ;

4° La désignation et l'individualisation des créances cédées ou les éléments susceptibles d'y pourvoir, par exemple l'indication du débiteur ou du type de débiteurs, des actes ou des types d'actes dont les créances sont ou seront issues, du lieu de paiement, du montant des créances ou de leur évaluation et, s'il y a lieu, de leur échéance.

Lorsque la transmission des créances cédées est effectuée par un procédé informatique permettant de les identifier, le bordereau peut se borner à indiquer, outre les mentions prévues aux 1°, 2° et 3°, le moyen par lequel elles sont transmises, désignées et individualisées ainsi que l'évaluation de leur nombre et de leur montant global.

La cession emporte l'obligation pour le cédant ou toute entité chargée du recouvrement de procéder, à la demande du cessionnaire, à la conservation des créances dans les conditions définies à l'article D. 214-229, ainsi qu'à tout acte nécessaire à la conservation des sûretés, des garanties et des accessoires attachés à ces créances, à leur modification éventuelle, à leur mise en jeu, à leur mainlevée et à leur exécution forcée.

Le bordereau peut être établi, signé, conservé et transmis sous forme électronique'.

Un bordereau de créances sur lequel ne figurent pas les mentions exigées par ce texte rend la cession inopposable au tiers cédé.

Il résulte des productions que le 19 juillet 2017, la Banque Crédit Lyonnais a cédé au fonds commun de titrisation FCT IJ Invest représenté par la société France titrisation un portefeuille de 1.617 créances représentant un solde dû de 28.216,95 euros, le prix de cession n'étant pas indiqué sur ce document qui liste 7 créances portant le nom d'Altrev.

Le tribunal de commerce a relevé que la 3ème page de la pièce 7 dénommée 'acte de cession de créances' était un tableau de listant 9 créances (numéro de dossier, montant) d'Altrev, sans date et que les références des contrats qui y sont portées ne correspondent pas au numéro du prêt cautionné litigieux.

Il apparaît cependant que les références du contrat litigieux sont bien celles données par la Banque dans le cadre de la déclaration de créance dans le cadre de la procédure collective.

Par ailleurs, si l'extrait de l'annexe portant la liste des créances est incomplet en ce qu'il ne comporte pas d'éléments concrets le reliant au bordereau, s'agissant d'un extrait de l'annexe répertoriant les seules créances détenues contre Altrev, la communication par France Titrisation d'une attestation de la Banque en pièce 14, laquelle attestation reprend l'ensemble des créances altrev cédées le 6 juillet 2017 dont la créance litigieuse, lève les doutes soulevés par le document incomplet.

Il en découle que la cession par ailleurs dénoncée en application de l'article 1690 du code civil par voie de conclusions est opposable à M. [C].

La seconde cession reproduit les mêmes caractéristiques et est confirmée par le cédant. Elle a également en sus été notifiée en application de l'article 1690 du code civil. Cette seconde cession est donc également valable.

Le jugement qui avait déclaré la cession inopposable est ainsi infirmé.

Sur l'exercice du droit de retrait

Cette demande est présentée en tout état de cause de sorte qu'elle doit être examinée logiquement avant les autres moyens se rapportant spécifiquement aux dispositions applicables aux cautions.

M. [C] soutient pouvoir exercer ce droit en l'espèce puisque sa contestation est antérieure à la cession intervenue entre les deux appelantes. Il fait ensuite valoir que le droit de retrait peut être exercé même dans le cas d'une cession en bloc de créances si la détermination du prix de la créance est possible et qu'un des critères pour déterminer le prix de la créance peut être la part de la créance par rapport à celles cédées, que le prix doit être fixé à un euro symbolique si la preuve du prix de cession n'est pas rapportée.

Les sociétés appelantes concluent à l'absence de litige antérieur avec la Banque. Elles font par ailleurs valoir qu'il s'agit d'une cession globale de créances de sorte que le prix de cession de chacune des créances ne peut être individualisé et il en découle que les dispositions de l'article 1699 du code civil ne peuvent trouver application.

Sur ce

L'article 1699 du code civil dispose que 'celui contre lequel on a cédé un droit litigieux peut s'en faire tenir quitte par le cessionnaire, en lui remboursant le prix réel de la cession avec les frais et loyaux coûts, et avec les intérêts à compter du jour où le cessionnaire a payé le prix de la cession à lui faite'. L'article 1700 précise que 'la chose est censée litigieuse dès qu'il y a procès et contestation sur le fond du droit'.

En l'espèce, la demande en paiement étant désormais présentée par la société Intrum investment NO2 suite à une seconde session de créances intervenue en cours d'instance le 31 octobre 2021, c'est à juste titre que M. [C] fait valoir que son droit de retrait à l'encontre de cette seconde cession est recevable puisqu'un litige était alors en cours sur la créance Altrev objet du litige.

Par ailleurs, s'agissant d'une cession d'un portefeuille de créances avec un prix globalisé, le prix de cession de chacune des créances ne peut effectivement apparaître. Cependant, les modalités spécifiques d'une telle cession ne peuvent faire obstacle au droit de retrait litigieux reconnu aux débiteurs par l'article 1699 susvisé.

S'il n'est pas nécessaire que le prix individuel de cession attaché à la créance soit connu pour l'exercice effectif du droit de retrait, si la détermination du prix est possible, ne serait ce que par une évaluation de la part de la créance dans le prix de vente ou son classement.

Or, force est de constater en l'espèce que les appelantes ne justifient nullement du prix de cession des créances malgré les demandes adverses, l'acte de cession ne contenant que le montant total des créances cédées, ce qui est inopérant. Il apparaît donc que l'attitude des appelantes par leur refus de communication vise à faire obstacle à toute évaluation concrète.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de procéder à l'évaluation et de fixer à un euro symbolique le prix de cession de la créance litigieuse, M. [C] étant condamné au paiement de cette somme à la société Intrum Investment NO2.

Sur les autres prétentions

En conséquence de la réduction de la créance à un euro symbolique, il n'y a pas lieu d'examiner les autres moyens développés par l'intimé et visant à la réduction de la créance ou à ses modalités de paiement.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les dépens d'appel sont à la charge de la société France Titrisation.

Il est cependant équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Les condamnations aux dépens de première instance et au titre de l'article 700 du code de procédure civile sont confirmées par ailleurs.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant dans les limites de l'appel,

Déboute M. [C] de sa demande de rejet des conclusions numéro 5 des appelantes.

Déboute M. [C] de sa demande de production de pièces sous astreinte.

Infirme le jugement déféré sauf la condamnation aux dépens et au titre de l'article 700 du code de procédure civile de la société France Titrisation agissant en qualité de société de gestion et représentant le FCT IJ Invest 1.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que les cessions de créance sont opposables à M. [W] [C].

Dit que M. [C] est recevable à exercer son droit de retrait litigieux en application de l'article 1699 du code civil.

Fixe à un euro symbolique le prix de cession de la créance la société Altrev à la société Intrum Investment NO2 le 31 octobre 2021.

Condamne M. [W] [C] à payer ladite somme à la société Intrum Investment NO2.

Condamne la société France Titrisation, agissant en qualité de société de gestion représentant le FCT IJ Invest 1 aux dépens d'appel.

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 20/07195
Date de la décision : 07/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-07;20.07195 ?
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