AFFAIRE PRUD'HOMALE
DOUBLE RAPPORTEUR
N° RG 20/01225 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M3WC
[U]
C/
Société CIB - INGENIERIE
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON
du 30 Janvier 2020
RG : F19/00068
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRET DU 05 Juillet 2023
APPELANT :
[K] [U]
né le 06 Octobre 1967 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON
et ayant pour avocat plaidant Me Raphaël DE PRAT de la SELARL INCEPTO AVOCATS CONTENTIEUX, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
Société CIB - INGENIERIE
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Sylvie RUCHON, avocat au barreau de LYON
DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 02 Mai 2023
Présidée par Nathalie ROCCI, conseiller et Anne BRUNNER, conseiller, magistrats rapporteurs (sans opposition des parties dûment avisées) qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistées pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
- Joëlle DOAT, présidente
- Nathalie ROCCI, conseiller
- Anne BRUNNER, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
rendu publiquement le 05 Juillet 2023 par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Joëlle DOAT, présidente, et par Morgane GARCES, greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [K] [U] a été embauché par la société Cib Ingenierie le 7 septembre 2012 sans contrat de travail écrit.
Le 18 janvier 2017, la société Cib Ingenierie a notifié à M. [U] un avertissement.
Le 29 janvier 2018, elle a convoqué le salarié à un entretien préalable à une sanction disciplinaire, fixé au 9 février 2018, puis lui a notifié un avertissement, le 15 février 2018.
Par requête du 23 février 2018, M. [U] a saisi le conseil de prud'hommes de LYON en lui demandant de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et de condamner la société à lui verser diverses sommes à titre d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts, outre une indemnité de congés payés.
M. [U] a été placé en arrêt-maladie le 26 février 2018.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 6 avril 2018, la société a convoqué M. [U] à un entretien préalable en vue d'une sanction pouvant aller jusqu'au licenciement pour faute grave, fixé au 18 avril 2018, et lui a notifié une mise à pied à titre conservatoire.
Le 17 mai 2018, M. [U] a été licencié pour faute grave.
Au dernier état de la procédure devant le conseil de prud'hommes, M. [U] a demandé en outre que la société soit condamnée à lui verser des rappels de salaire en raison du non-respect de la rémunération minimale conventionnelle, compte tenu de sa classification et de son forfait annuel en jours, et, à titre subsidiaire, que son licenciement soit déclaré nul et à tout le moins dénué de cause réelle et sérieuse.
Par jugement du 30 janvier 2020, le conseil de prud'hommes a :
- débouté M. [U] de toutes ses demandes (tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société Cib Ingenierie, déclarer nul, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse le licenciement, condamner la société à lui payer un rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire, une indemnité compensatrice de préavis, une indemnité de licenciement, des dommages et intérêts consécutifs au licenciement, un rappel de salaires au titre du repositionnement, un rappel de salaires majorés, une indemnité pour travail dissimulé, le remboursement de sommes indûment déduites au titre des frais professionnels)
- condamné Monsieur [K] [U] 'au versement' de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- condamné Monsieur [K] [U] aux dépens
- 'ordonné l'exécution de droit de la décision pour l'ensemble des dispositions'
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
M. [U] a interjeté appel de ce jugement, le 14 février 2020.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 13 mars 2023, il demande à la cour :
- d'infirmer le jugement
- de rejeter les demandes d'irrecevabilité en cause d'appel de la société Cib Ingenierie
- de dire que la demande reconventionnelle de la société Cib Ingenierie à hauteur de 7 795,38 euros est prescrite
jugeant à nouveau,
- d'annuler les deux avertissements,
- de prononcer la résiliation judiciaire aux torts de la société Cib Ingenierie et de la qualifier de licenciement sans cause réelle et sérieuse
- à titre subsidiaire, de dire que le licenciement est nul et, à titre infiniment subsidiaire, de dire qu'il est sans cause réelle et sérieuse,
en conséquence,
- à titre principal, de condamner la société Cib Ingenierie à lui payer les sommes suivantes sur la base du salaire correspondant à la classification 3.3, majoré de 20 % au titre du forfait jour, soit 6 619,32 euros :
* rappel de salaire au titre des fonctions : 4 448,10 euros
* rappel de salaire au titre du forfait jour : 70 788,98 euros pour les heures supplémentaires, outre 7 078,89 euros au titre des congés payés afférents
- à titre subsidiaire, 50 722,48 euros (congés payés compris) à titre de rappel de salaire :
* rappel de salaire au titre de la mise à pied : 6 277,66 euros outre 627,76 euros au titre des congés payés afférents
* indemnité de travail dissimulé : 39 715,92 euros
* dommages et intérêts pour licenciement nul (24 mois) : 158 863,68 euros
* subsidiairement, dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (6 mois) : 39 715,92 euros
* indemnité conventionnelle de licenciement : 12 973,86 euros
* indemnité de préavis de 3 mois de salaire : 19 857,96 euros, outre 1 985,79 euros au titre des congés payés afférents
* sommes dûes au titre du solde de tout compte : 20 360,89 euros
- à titre subsidiaire, de condamner la société Cib Ingenierie à lui payer les sommes suivantes sur la base du salaire correspondant à la classification 3.3 sans la majoration au titre du forfait jour, soit 5516,10 euros :
* rappel de salaire au titre des fonctions : 4 448,10 euros
* rappel de salaire au titre du forfait jour : 70 788,98 euros pour les heures supplémentaires outre 7 078,89 euros au titre des congés payés afférents
* rappel de salaire au titre de la mise à pied : 5 232,35 euros outre 523,23 euros au titre des congés payés afférents
* indemnité de travail dissimulé : 33 096,60 euros
* dommages et intérêts pour licenciement nul (24 mois) : 132 386,4 euros
* subsidiairement, dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (6 mois) : 33 096,60 euros,
* indemnité conventionnelle de licenciement : 10 811,55 euros
* indemnité de préavis de 3 mois de salaire : 16 548,3 euros outre 1 654,83 euros au titre des congés payés afférents
* sommes dues au titre du solde de tout compte : 17 108,53 euros
- à titre infiniment subsidiaire, de condamner la société Cib Ingenierie à lui payer les sommes suivantes sur la base du salaire mensuel brut moyen versé :
* rappel de salaire au titre des heures supplémentaires : 65 509,77 euros outre 6 550,97 euros au titre des congés payés afférents, compte tenu de la nullité du forfait jour
* rappel de salaire au titre de la mise à pied : 5 033,15 euros outre 503,31 euros au titre des congés payés afférents
* indemnité de travail dissimulé : 31 836,60 euros
* dommages et intérêts pour licenciement nul (24 mois) : 127 346,4 euros
* subsidiairement, dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (6 mois) : 31 836,60 euros
* indemnité conventionnelle de licenciement : 10 399,95 euros
* indemnité de préavis de 3 mois de salaire : 15 918,3 euros outre 1 591,83 euros au titre des congés payés afférents
* sommes dues au titre du solde de tout compte : 16 342,04 euros, y compris la somme de 4 793,77 euros impayée
en tous les cas,
-indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile : 6 000 euros
- 'aux entiers dépens de l'instance'
- de rejeter la demande reconventionnelle de la société Cib Ingenierie à hauteur de 7 795,38 euros
- d'ordonner que les condamnations soient assorties du paiement des intérêts de retard au taux légal à compter de l'introduction de l'instance
- d'ordonner la capitalisation des intérêts.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 20 mars 2023, la société Cib Ingenierie demande à la cour :
- de 'débouter' M. [U] de sa demande d'annulation des avertissements, nouvelle en cause d'appel, 'comme irrecevable'
- de 'débouter' M. [U] de ses demandes au titre des heures supplémentaires, nouvelles en cause d'appel 'comme irrecevables'
- pour le surplus, de confirmer le jugement qui a débouté M. [U] de l'intégralité de ses demandes
- de condamner M. [U] à lui rembourser la somme de 7 795,38 euros au titre des dépenses non justifiées engagées par le salarié avec la carte bleue de la société
- d'ordonner la compensation judiciaire entre la créance de salaire de M. [U] au titre du solde de tout compte et sa créance pour les dépenses injustifiées payées par elle pour 7 795,38 euros
y ajoutant,
- de condamner M. [U] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles devant la cour, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 mars 2023.
Le 27 mars 2023, M. [U] a fait notifier des conclusions au fond auxquelles il ajoute les demandes suivantes :
- 'rabattre l'ordonnance de clôture du 23 mars 2023"
- à titre subsidiaire, en l'absence de rabat de l'ordonnance de clôture, écarter des débats les pièces et conclusions notifiées le 20 mars 2023 compte-tenu de la violation du principe du contradictoire.
SUR CE :
Sur la recevabilité des conclusions d'intimée notifiées le 20 mars 2023 et des pièces 81 et 82 et sur la recevabilité des conclusions d'appelant notifiées le 27 mars 2023
L'article 802 du code de procédure civile énonce qu'après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, que sont cependant recevables, notamment les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture.
Sont également recevables les conclusions notifiées après l'ordonnance de clôture tendant à voir prononcer l'irrecevabilité de conclusions notifiées antérieurement à l'ordonnance de clôture.
La société Cib Ingenierie a notifié ses conclusions d'intimée (n° 4) le 20 mars 2023, en réponse aux conclusions (n°4) de M. [U] notifiées une semaine avant, le 13 mars 2023.
La date à laquelle l'ordonnance de clôture serait rendue avait été annoncée par ordonnance du 14 janvier 2021.
Aucune cause grave ne justifie que l'ordonnance de clôture rendue le 23 mars 2023 soit révoquée.
Les conclusions au fond notifiées le 27 mars 2023 par M. [U] sont irrecevables.
L'appelant qui conclut à nouveau dix jours avant la date fixée pour la clôture de l'instruction n'est pas fondé à reprocher la tardiveté de sa réponse à l'intimée n'ayant pas formé appel incident.
Il n'y a pas lieu de déclarer irrecevables les conclusions et la pièce 81 (bulletins de paie de M. [U] délivrés par la société Cib Ingenierie en juillet et août 2017 déjà produits par M. [U]) de la société Cib Ingenierie notifiées le 20 mars 2023.
Seule la pièce nouvelle 82 communiquée tardivement sera déclarée irrecevable.
Sur la recevabilité des demandes en annulation des avertissements et au titre des heures supplémentaires
La société fait valoir qu'en première instance, M. [U], d'une part a sollicité la résiliation judiciaire de son contrat de travail sans demander l'annulation des sanctions infligées en 2017 et 2018, d'autre part, a revendiqué l'application de la convention collective relative au forfait en jours et le paiement d'un rappel de salaires consécutif à un repositionnement, majoré de 20 %, sans demander le paiement d'un rappel d'heures supplémentaires, et que les demandes formées de ces chefs pour la première fois devant la cour sont nouvelles et donc irrecevables.
Le salarié fait valoir que :
- la demande d'annulation des deux avertissements est le complément nécessaire à sa demande aux fins de résiliation judiciaire du contrat, celle-ci étant fondée sur plusieurs manquements de l'employeur, dont ces deux avertissements
- la demande de rappel de salaire et des congés payés afférents au titre des heures supplémentaires est recevable en ce qu'elle est l'accessoire de la demande soumise aux premiers juges.
****
Dans ses conclusions responsives et récapitulatives, M. [U] a demandé au conseil de prud'hommes de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail, en invoquant des manquements répétés de l'employeur depuis le début de l'année 2017 et parmi ceux-ci le fait que, le 15 février 2018, il s'était vu notifier un avertissement totalement injustifié, et, le lendemain, s'était vu remettre en main propre un autre avertissement daté du 18 janvier 2017, soit un an plus tôt, se voyant ainsi reprocher des manquements imaginaires.
En cause d'appel, M. [U] demande l'annulation desdits avertissements, sans en tirer de conséquence pécuniaire, de sorte qu'il y a lieu de considérer qu'il ne s'agit pas d'une prétention nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile, la cour étant tenue d'examiner le bien-fondé des deux avertissements litigieux pour apprécier la réalité du manquement reproché à l'employeur à l'appui de la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail dont elle est saisie.
Cette demande d'annulation est en conséquence recevable.
Devant le conseil de prud'hommes, M. [U] a demandé la condamnation de l'employeur à lui payer une somme à titre de rappel de salaire, au motif qu'il n'avait pas perçu la rémunération minimale conventionnelle correspondant à la classification dont il aurait dû bénéficier et au forfait annuel en jours qui lui était appliqué.
Il reprend devant la cour cette demande et sollicite en outre la condamnation de l'employeur à lui payer diverses sommes à titre d'heures supplémentaires, soit 'au titre du forfait jours', soit 'compte tenu de la nullité du forfait jour'.
Ainsi, la demande en paiement d'heures supplémentaires ne tend pas aux mêmes fins que la demande en rappel de salaire soumise aux premiers juges et n'est ni l'accessoire, ni la conséquence, ni le complément nécessaire de cette demande.
Il convient de la déclarer irrecevable, en application de l'article 564 du code de procédure civile.
Sur la demande aux fins de reclassification conventionnelle et les demandes consécutives de rappel de salaires
En cas de contestation sur la catégorie professionnelle dont relève le salarié, le juge doit rechercher la nature de l'emploi effectivement occupé par ce dernier et la qualification qu'il requiert. La charge de la preuve pèse sur le salarié qui revendique une autre classification que celle qui lui a été attribuée.
Le salarié ne peut prétendre obtenir la classification qu'il revendique que s'il remplit les conditions prévues par la convention collective.
Les bulletins de salaire de M. [U] mentionnent qu'il est positionné au statut cadre, position 2.3, coefficient 150 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils et qu'il occupe l'emploi de directeur de centre de profit.
En application de l'article 7.2 de la convention collective, en ce qui concerne les ingénieurs et cadres, la classification est effectuée en tenant compte des responsabilités assumées et des connaissances mises en application, ces classifications s'imposent à toutes les entreprises soumises à la convention collective, la fonction remplie est seule prise en considération pour son classement dans les emplois prévus par la classification en cause et le salarié dont les fonctions relèvent de façon continue de diverses catégories est considéré comme appartenant à la catégorie la plus élevée parmi celles-ci.
Selon l'annexe II Classification des ingénieurs et cadres, relèvent de la position 2.3 coefficient 150 les ingénieurs ou cadres ayant au moins 6 ans de pratique en cette qualité et étant en pleine possession de leur métier ; partant des directives données par leur supérieur, ils doivent avoir à prendre des initiatives et assumer des responsabilités pour diriger les employés, techniciens ou ingénieurs travaillant à la même tâche.
Les positions 3.1 et 3.2 sont ainsi définies :
3.1. Ingénieurs ou cadres placés généralement sous les ordres d'un chef de service et qui exercent des fonctions dans lesquelles ils mettent en 'uvre non seulement des connaissances équivalant à celles sanctionnées par un diplôme, mais aussi des connaissances pratiques étendues sans assurer, toutefois, dans leurs fonctions, une responsabilité complète et permanente qui revient en fait à leur chef
3.2. Ingénieurs ou cadres ayant à prendre, dans l'accomplissement de leurs fonctions, les initiatives et les responsabilités qui en découlent, en suscitant, orientant et contrôlant le travail de leurs subordonnés. Cette position implique un commandement sur des collaborateurs et cadres de toute nature.
M. [U] revendique la position 3.3 coefficient 270 de la classification, selon laquelle l'occupation de ce poste, qui entraîne de très larges initiatives et responsabilités et la nécessité d'une coordination entre plusieurs services, exige une grande valeur technique ou administrative.
L'article 4.1 de l'accord du 22 juin 1999 dispose que peuvent être soumis à l'article 4 relatif au forfait annuel en jours les personnels exerçant des responsabilités de management élargi ou des missions commerciales, de consultant ou accomplissant des tâches de conception ou de création, de conduite et de supervision de travaux, disposant d'une large autonomie, de liberté et d'indépendance dans l'organisation et la gestion de leur temps de travail pour exécuter les missions qui leur sont confiées, que les salariés ainsi concernés doivent bénéficier de dispositions adaptées en matière de durée du travail ; qu'ils sont autorisés, en raison de l'autonomie dont ils disposent, à dépasser ou à réduire la durée conventionnelle de travail dans le cadre du respect de la législation en vigueur, que la rémunération mensuelle du salarié n'est pas affectée par ces variations, que, pour pouvoir relever de ces modalités, les salariés concernés doivent obligatoirement disposer de la plus large autonomie d'initiative et assumer la responsabilité pleine et entière du temps qu'ils consacrent à l'accomplissement de leur mission caractérisant la mesure réelle de leur contribution à l'entreprise, qu'ils doivent donc disposer d'une grande latitude dans leur organisation de travail et la gestion de leur temps, qu'ils relèvent au minimum de la position 3 de la grille de classification des cadres de la convention collective nationale ou bénéficient d'une rémunération annuelle supérieure à deux fois le plafond annuel de la sécurité sociale ou sont mandataires sociaux.
M. [U] soutient en premier lieu que l'employeur l'a soumis au forfait jour considérant donc que l'article 4.1 de l'accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail au sein de la convention collective devait lui être appliqué, ce qui impliquait son positionnement au niveau 3, en deuxième lieu qu'il était le salarié exerçant les plus hautes fonctions après le gérant, M. [G], qu'il était le seul à coordonner l'activité de la société, qu'il a été le directeur opérationnel, qu'il avait des fonctions globales de direction et de gestion de la société, qu'il exerçait de larges responsabilités en autonomie, en matière de gestion du personnel, d'activité commerciale, de supervision de l'équipe technique et de l'équipe développement et de gestion opérationnelle et qu'il disposait d'une voiture de fonction avec abonnement télépéage et prise en charge de ses frais professionnels avec une carte bancaire dédiée.
Il résulte des bulletins de salaire que M. [U] percevait un salaire mensuel de 5 000 euros sur la base de 218 jours de forfait annuel et un avantage en nature voiture évalué à 256,10 euros, soit un salaire mensuel brut de 5 256,10 euros.
M. [U] n'a signé ni contrat de travail ni convention de forfait en jours, mais il ressort de la grille salariale (avenant du 21 mai 2013) que son salaire était supérieur au salaire minimal conventionnel de la position 3.1 (3 422,10 euros) et à celui de la position 3.2 (4 227,30 euros).
Le salarié remplissait donc les conditions de l'article 4.1 de l'accord du 22 juin 1999, à savoir un salaire au moins équivalent à celui de la position 3.
Pour démontrer que les fonctions qu'il exerçait relevaient de la position 3.3 et non de la position 2.3 qui figure sur ses bulletins de salaire, M. [U] verse aux débats des courriels et correspondances, non classés par ordre chronologique, datés de 2012 à 2017.
Ces documents montrent que les courriels envoyés par M. [U] comportaient en fin de message, sous sa signature, la mention 'directeur', que le salarié recevait lors d'entretiens d'embauche les candidats aux postes offerts par l'entreprise, était l'interlocuteur du cabinet comptable, exerçait des fonctions commerciales, gérait les relations avec les clients et fournisseurs, était l'intermédiaire entre les clients et le service technique, conduisait des réunions et a été convié par le directeur général à une réunion de restitution d'audit en mars 2016.
Il apparaît aussi que tous les courriels envoyés ou reçus par le salarié sont en copie du dirigeant de l'entreprise.
Ces éléments ne permettent pas de déterminer que, dans une société comptant seulement six salariés, outre un gérant directeur général, qui assumait les responsabilités lui incombant dans la gestion et la direction de l'entreprise, contrôlait en tant que dirigeant l'activité de M. [U] et détenait seul le pouvoir de signature, ce dernier exerçait un commandement sur tous les collaborateurs et cadres de l'entreprise, disposait de très larges initiatives et responsabilités et coordonnait plusieurs services, de sorte qu'il aurait dû bénéficier de la position 3.3 telle que définie ci-dessus.
Le jugement qui a rejeté les demandes formées de ce chef doit être confirmé.
Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé
Le salarié soutient que l'employeur a appliqué sciemment un décompte de la durée du travail en forfait jours alors même qu'il ne pouvait subir de telles modalités de décompte de la durée du travail et que l'élément intentionnel est caractérisé, compte-tenu de la durée de cette pratique par l'employeur.
Or, le fait d'appliquer au salarié une rémunération forfaitaire, un nombre de jours de travail dans l'année au demeurant conforme à la durée maximale prévue par la convention collective (118 jours) et des jours de RTT en contrepartie, sans lui avoir fait signer une convention de forfait, ne suffit pas à caractériser l'infraction de travail dissimulé telle que définie par l'article L8221-5 du code du travail.
Il convient de confirmer le jugement qui a rejeté la demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé.
Sur la demande aux fins de résiliation judiciaire du contrat de travail
A l'appui de sa demande, le salarié reproche à l'employeur :
- l'irrégularité de la classification conventionnelle qui lui a été appliquée alors qu'il exerçait en réalité les missions d'un salarié, statut cadre, position 3.3 de la convention collective (1)
- le non-paiement de la rémunération correspondant aux fonctions exercées (2)
- l'application irrégulière d'un forfait en jours (3)
- d'avoir commis l'infraction de travail dissimulé (4)
- de ne lui avoir jamais permis de prendre ses congés payés (5)
- d'avoir supprimé son poste 'suite à la volonté du gérant des deux sociétés CIB et SYMOTRONIC de les rapprocher', d'avoir réduit ses responsabilités à compter de 2016, de l'avoir mis à l'écart physiquement et fonctionnellement, d'avoir remis en cause ses compétences et son engagement (6)
- de lui avoir notifié un avertissement injustifié le 15 février 2018 (7)
- d'avoir porté à sa connaissance le 16 février 2018 un second avertissement daté du 18 janvier 2017, dont il ignorait l'existence, sans entretien préalable (8)
- d'avoir mis en place la visite de reprise plus de 48 heures après sa reprise effective (9)
- de ne pas avoir hésité à changer sa mutuelle en 2018 pour un coût supérieur et des garanties moindres (10).
La société reconnaît avoir manqué de vigilance en ne vérifiant pas les conditions posées par la convention collective pour la mise en 'uvre d'un forfait en jours et en n'exigeant pas du salarié qu'il régularise de convention individuelle écrite de forfait en jours, mais elle estime qu'elle n'en a pas pour autant désavantagé le salarié.
Elle soutient en substance que :
- le premier avertissement du 15 février 2018 a été envoyé par lettre recommandée avec accusé de réception que le salarié a choisi de ne pas aller retirer, ce qui ne fait pas pour autant disparaître la sanction
- la véritable source de toutes les difficultés est que le salarié n'a pas accepté le rapprochement des deux entités et la réorganisation qui lui faisaient perdre son indépendance
- alors qu'en août 2017, elle a fait parvenir au salarié une demande claire et précise d'avoir à s'organiser afin de prendre ses congés acquis et non soldés, celui-ci s'est borné à fournir son propre décompte, sans présenter de calendrier prévisionnel pour ses vacances
- elle a changé de mutuelle en raison de problèmes rencontrés avec l'organisme APICIL, dans le respect de la loi et de la convention SYNTEC.
****
Il appartient au salarié qui sollicite la résiliation judiciaire de rapporter la preuve de manquements suffisamment graves de l'employeur à ses obligations contractuelles pour empêcher la poursuite du contrat de travail et ainsi justifier la rupture à ses torts.
Les manquements (1), (2) et (4) ne sont pas établis, comme il a été dit ci-dessus.
(3)Il n'est pas discuté que la société a appliqué irrégulièrement au salarié un système de forfait en jours sans convention de forfait écrite. Le salarié n'en a toutefois tiré d'autres conséquences qu'une demande de repositionnement conventionnel, une demande en paiement d'un rappel de salaire et une demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé, lesquelles ont été rejetées.
(5) Le salarié explique qu'il a cumulé des congés non pris : 45 jours en 2015, 58 jours en 2016, 65 jours en 2017 et 60 jours au 30 avril 2018, ce qui démontre son engagement au profit de l'employeur qui a choisi de lui faire accumuler 16 semaines de congés payés non pris et n'a jamais fait en sorte de lui assurer l'effectivité de son droit aux congés.
Le bulletin de salaire d'avril 2017 montre que sur la période 2015-2016, M. [U] avait acquis 58 jours de congés, en avait pris 23 et qu'il lui en restait 35, sur la période 2016-2017, il avait acquis 27,50 jours de congés et n'en avait pris aucun.
Le bulletin de salaire de juin 2017 montre que 55 jours de congés ont été acquis au titre de la période 2016-2017 et 55 non pris et que 2,08 jours de congé ont été acquis sur la période 2017-2018 et non pris, ce qui montre que les congés non pris d'avril 2016 au 31 mai 2017 ont été reportés sur l'année suivante.
En juillet 2017, M. [U] a pris 4 jours de congés, 11 au mois d'août 2017 et 1 au mois d'octobre 2017 décomptés des 55 acquis sur la période 2016-2017, soit un solde de 39 jours.
Au 30 avril 2018, le solde était toujours de 39 jours et M. [U] avait acquis 21,67 jours sur la période 2017-2018.
L'employeur a écrit à M. [U] (et à M. [L]) le 11 août 2017 'on vient de m'alerter sur l'état des compteurs de RTT et congés inscrits sur vos fiches de paie respectives. Je souhaiterais que les RTT acquis soient soldés d'un mois sur l'autre afin de ne pas se retrouver avec des RTT non pris en fin d'année. Concernant vos congés, je vous demande de vous organiser afin de solder le compteur 16-17 avant fin avril 2018; je suis à votre entière disposition pour qu'on organise ensemble vos prises de repos et congés afin de ne pas nuire à la continuité du service client.'
Aux termes de l'avertissement du 15 février 2018, l'employeur écrit au salarié que voilà plusieurs mois, il a demandé aux cadres des deux sociétés de solder les congés acquis non pris sur les périodes antérieures, que ses collègues se sont tous organisés pour poser des jours de congés, sauf lui, qu'à réception du courriel lui demandant de solder ses congés, M. [U] lui a répondu en lui demandant comment procéder mais n'a rien proposé.
Dans sa lettre de contestation de l'avertissement du 17 février 2018, M. [U] écrit que, le 11 août 2018 (ou plutôt 2017), le dirigeant a découvert l'état des compteurs RTT et congés concernant un autre salarié et lui-même, que, le 30 août 2018 (2017) après les congés d'été, il a répondu avoir plus de 16 semaines à poser, qu'à ce jour, il attend toujours une quelconque réponse sur les modalités et que, contrairement à ce que lui indique le dirigeant, il a aussi pris des congés en octobre et décembre 2017 (ce qui pourtant n'apparaît pas sur le bulletin de salaire de décembre 2017).
Au vu de ces éléments, le salarié ne démontre pas que l'employeur l'a empêché de prendre ses congés payés.
(6) Le 29 janvier 2018, M. [U] signale au dirigeant, M. [G], qu'il constate que ce dernier a organisé depuis un an une mise au placard le concernant, en lui retirant les responsabilités d'encadrement, de planification et de formation qu'il exerce depuis plus de cinq ans, alors qu'il a passé plus de trois ans à redresser son entreprise en réorganisant ses processus, son modèle et son offre au détriment de ses intérêts (salaires notamment et congés) et qu'il l'a déjà alerté à de multiples reprises sur les pertes d'efficacité et d'organisation de CIB Ingenierie liées au déménagement dans les locaux de Symotronic.
Les autres pièces apportées par M. [U] à l'appui de ce grief sont :
- un courriel rédigé par ses soins adressé à M. [G], le dirigeant, le 6 février 2017 : 'il semble qu'unilatéralement, vous ayez décidé de bloquer le développement de ce dossier directement auprès des collaborateurs'
- un courriel adressé par lui à une cliente le 22 février 2017 qui se plaignait de l'accueil qui lui avait été fait par M. [Y], directeur technique de la société Symotronic
- une demande de congés d'un salarié faite le 5 février 2018 sur un formulaire, le nom de M. [U], dactylographié, ayant été barré pour être remplacé par celui de M. [Y], écrit à la main
- son courriel non daté en réponse au courriel que lui a envoyé M. [G] le 22 février 2018 pour lui demander une explication à propos d'un dossier, dans lequel il expose une chronologie de son activité à compter du 16 février 2018.
Ces quelques documents sont insuffisants à démontrer la réalité du grief de suppression de poste, mise à l'écart et dépossession des responsabilités allégué.
(7) et (8)
M. [U] soutient qu'il n'a jamais reçu l'avertissement daté du 18 janvier 2017.
Cet avertissement porte la mention manuscrite : remis en main propre le 16 février 2018 et la signature de M. [U].
L'employeur produit le justificatif en original de l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception présentée le 19 janvier 2017 au domicile de M. [U] et retournée à l'envoyeur avec la mention 'pli avisé et non réclamé'.
Cependant, l'employeur n'ayant pas estimé nécessaire de porter à nouveau cet avertissement à la connaissance du salarié avant le 16 février 2018, il s'en déduit qu'il avait renoncé à s'en prévaloir. C'est donc à juste titre que le salarié en demande l'annulation.
Après un entretien disciplinaire tenu le 9 février 2018, au cours duquel M. [U] était assisté par un conseiller du salarié, l'employeur a délivré le 15 février 2018 un avertissement au salarié fondé sur les faits suivants :
- une nouvelle altercation survenue le 29 janvier 2018 entre M. [Y], directeur technique de la société Symotronic et lui
- la position exprimée par le salarié selon laquelle :
* il n'avait pas à remettre les devis au dirigeant au prétexte qu'ils étaient mémorisés sur le système de gestion commerciale
* il n'avait pas à rendre de comptes à sa direction
* il n'avait pas à communiquer son planning
* il ne voulait pas que le directeur général l'accompagne en clientèle
* il ne voulait pas apurer ses congés et RTT et gérer ses frais de déplacement.
L'employeur indique qu'il a constaté que les devis étaient présents sur le logiciel mais qu'il était impossible de savoir s'ils avaient été transmis aux clients ou prospects et leur devenir , qu'il avait besoin d'être informé des déplacements, rendez-vous, état du marché et éventuels blocages rencontrés, que les métiers des sociétés du groupe MP INVEST étaient complémentaires et qu'il ne voulait plus d'altercation entre M. [U] et les membres des deux équipes.
L'employeur a également demandé à M. [U] de classer ses justificatifs de frais chaque mois, lui reprochant de ne pas l'avoir fait depuis avril 2017, alors que la carte bleue de la société est à sa disposition pour régler les frais inhérents à son activité.
M. [U] a contesté le bien-fondé de l'avertissement par lettre du 17 février 2018, en faisant valoir les arguments suivants :
- en ce qui concerne l'altercation, la seule personne ayant montré de l'agressivité n'était pas lui et l'origine du problème était l'absence de planification dont M. [Y] est chargé
- en ce qui concerne les devis, l'outil de gestion de l'entreprise renseignait la date à laquelle le devis avait été rédigé, transmis et validé, si isolément, la demande du dirigeant est parfaitement légitime, les termes employés et la coïncidence de sa mise en oeuvre avec d'autres nouvelles exigences concourt à un climat qui ressemble fort à du harcèlement
- en ce qui concerne le planning et les compte-rendus 'sauf erreur de ma part, il me semble être le seul cadre de CIB Ingenierie et à fortiori le seul directeur de centre de profit, sauf erreur de ma part, CIB Ingenierie et Symotronoc sont deux sociétés distinctes avec des conventions collectives différentes , je n'ai donc pas de collègues 'ayant peu ou prou le même niveau hiérarchique' (NDR : formulation utilisée par l'employeur dans l'avertissement)
- en ce qui concerne les visites à la clientèle : 'je n'ai aucune propriété sur la clientèle et je n'en revendique aucune, votre exigence de visiter avec vous chaque client de CIB Ingenierie dans les prochains jours ne semble pas profitable à l'entreprise. Même si isolément, votre demande est parfaitement légitime, son inefficacité, les termes employés et la coïncidence de sa mise en oeuvre avec d'autres nouvelles exigences participent à vouloir créer un climat qui ressemble là encore fort à du harcèlement'
- concernant les congés payés : à ce jour, j'attends toujours une quelconque réponse sur les modalités
- notes de frais : depuis 2012, le mode de fonctionnement concernant les notes de frais n'a pas bougé et n'a jamais posé de problème; chaque fin de mois, la personne chargée de la comptabilité récupérait les notes et nous procédions à l'édition des factures manquantes; aujourd'hui, vous souhaitez modifier ce fonctionnement, j'en prends acte et le nécessaire sera fait.
M. [U] conclut en ces termes : vous avez parfaitement le droit d'organiser les deux sociétés comme bon vous semble avec ou sans l'aval de vos collaborateurs cadres, mais vous ne pouvez pas faire fi des effets collatéraux.
Il résulte des termes mêmes de cette lettre de contestation que M. [U] remet en cause le pouvoir de direction de l'employeur et refuse d'appliquer ses instructions, ce qui précisément lui est reproché dans l'avertissement.
Cette sanction apparaît dès lors justifiée et proportionnée et il n'y a pas lieu de faire droit à la demande d'annulation de l'avertissement.
(9) En application de l'article R4624-31du code du travail, le travailleur bénéficie d'un examen de reprise du travail par le médecin du travail après une absence d'au moins trente jours pour cause d'accident du travail, de maladie ou d'accident non professionnel; dès que l'employeur a connaissance de la date de la fin de l'arrêt de travail, il saisit le service de santé au travail qui organise l'examen de reprise le jour de la reprise effective du travail par le travailleur et au plus tard dans un délai de huit jours qui suivent cette reprise.
L'arrêt de travail de M. [U] a pris fin le 31 mars 2018.
Il ressort des échanges de courriels entre les parties que le salarié est revenu travailler le 3 avril 2018 et que, le 5 avril 2018, l'employeur lui a transmis une convocation à une visite de reprise fixée au 9 avril 2018, en lui demandant de quitter son poste de travail jusqu'à cette date.
Le grief n'est dès lors pas établi.
(10) Le salarié n'explique pas en quoi le changement de mutuelle décidé par l'employeur constitue une faute.
Les manquements invoqués n'étant pas démontrés à l'exception d'un avertissement tardivement remis qui ne saurait justifier à lui seul le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail, il convient de confirmer le jugement qui a rejeté ce chef de demande.
Sur la demande en nullité du licenciement
Au visa de l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et des articles L 1235-2-1 et L 1235-3-1 du code du travail, le salarié se fonde sur les termes suivants de la lettre de licenciement 'le désaccord est si patent que vous avez assigné votre employeur pardevant le conseil de prud'hommes afin de demander la résiliation judiciaire de votre contrat pour 'mise au placard' pour soutenir que son licenciement a porté atteinte à une liberté fondamentale et qu'il doit être qualifié de licenciement nul.
L'employeur fait valoir que la lettre de licenciement reprend l'historique des relations contractuelles et de leur détérioration, en précisant qu'il ne s'agit pas des faits directement à l'origine de la décision de licenciement, mais que ce rappel permet de resituer le litige dans son contexte global et il affirme que les fautes de M. [U] sont directement à l'origine de son licenciement.
****
L'article L1121-1 du code du travail énonce que nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.
Est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite par le salarié.
Le seul fait qu'une action en justice exercée par le salarié soit contemporaine d'une mesure de licenciement ne fait pas présumer que celle-ci procède d'une atteinte à la liberté fondamentale d'agir en justice.
Lorque les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à une action en justice introduite pour faire valoir ses droits.
Mais dès lors que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et que la décision de licenciement fait suite à l'action en justice, il appartient à l'employeur d'établir que sa décision est justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner l'exercice par le salarié de son droit d'agir en justice.
La lettre de licenciement est ainsi rédigée :
« (...) Historique succinct :
Vous avez été embauché le 7 septembre 2012 en qualité de Directeur de centre de profit et dans la perspective de me seconder à la suite du départ de Monsieur [W], ancien propriétaire et fondateur de la société.
La société dont le siège social était [Adresse 7] à [Localité 2], transfère son siège à [Localité 5] à compter du 23 mars 2013.
Fin 2016, je prends la décision de réunir dans un même lieu les entités SYMOTRONIC et CIB. Ceci afin de permettre, en particulier aux équipes de développement de travailler ensemble, les activités des deux sociétés étant de plus en plus imbriquées, voire interdépendantes. Ce regroupement n'a pas eu votre assentiment et à compter de début 2017, votre opposition est devenue quasi systématique.
Toutes demandes d'information restaient lettres mortes, toutes communications concernant votre activité de prospection éludées.
Ce comportement a donné lieu à divers courriers et entretiens qui n'ont absolument pas modifié votre ligne de conduite.
Vous avez été absent pour maladie du 26 février inclus au 31 mars 2018.
Pendant cette période mes collaborateurs et moi-même avons fait en sorte, avec le peu d'éléments à notre disposition de gérer les affaires courantes, de donner les informations comptables manquantes pour la clôture du bilan, de tenter de répondre à la clientèle.
Nous nous sommes retrouvés devant des dossiers client vides d'information, une gestion commerciale « Quadratus » fort peu renseignée.
Nous avons donc « pointé » les clients, les bons de livraison faute d'avoir les bons de commande signés par les clients, retracé la vie « commerciale » de CIB au cours de l'année 2017.
Lors de notre revue des éléments 2017 nous avons été alertés par divers dossiers clients dont JEFF DE BRUGES.
Entre fin 2016 et fin 2017, 79 cartes SIM ont été activées ; ces cartes sont toutes identifiées, la date d'activation de chacune est connue, le numéro de TPE associé également et nous sommes en mesure de connaître le dernier accès Radius. Vous aviez donc tout à votre disposition pour faire établir les factures.
Rien, à ma connaissance ne l'empêchait.
Or nous avons retrouvé les bons de livraison mais aucune facture sur l'exercice 2017.
Pour votre parfaite information ce simple client représente un chiffre d'affaires TTC de plus de 63.000 euros pour l'exercice 2017, soit 10 % de chiffre d'affaires constatés sur l'exercice.
En votre qualité de Directeur de centre de profit vous avez la responsabilité de la bonne marche de l'entreprise et de son développement.
Votre désinvolture a mis en péril l'équilibre financier de la société.
En votre qualité de Directeur vous disposez :
- d'un véhicule de fonction
- d'une carte bancaire,
- d'un téléphone portable,
- de deux ordinateurs portables (SAMSUNG et TOSHIBA)
- d'une adresse mail '
Depuis des mois je vous demande de classer et de remettre vos frais de déplacement à notre secrétaire comptable de telle sorte que nous puissions les comptabiliser et les affecter aux différentes affaires afin de calculer la réalité de notre marge. Cette demande a été réitérée verbalement, par écrit, par mail et même sous la forme d'un avertissement.
A ce jour, aucun justificatif de frais n'a été retrouvé dans les locaux de l'entreprise pour les mois de mai à décembre 2017.
Vous êtes réfractaire à tout travail d'équipe, incapable de vous adapter et de rendre compte de votre activité.
Vous vous comportez comme le propriétaire de la société, de la clientèle.
Vous contestez toute autorité, mais malheureusement vous n'allez pas jusqu'à proposer une vraie stratégie de développement. Vous vous contentez de vous opposer.
Pendant votre arrêt de travail vous avez continué d'intervenir auprès de la clientèle au risque d'aggraver votre état de santé.
Le désaccord est devenu si patent que vous avez assigné votre employeur par-devant le conseil prud'hommes afin de demander la résiliation judiciaire de votre contrat de travail pour « mise au placard ».
Nous vous avons signifié une mise à pied à titre conservatoire vous confirmant l'interdiction absolue de prendre contact avec la clientèle.
Nous avons été informés que vous auriez enfreint cette interdiction.
Plus rien ne vous arrête, et vous bafouez la majorité des règles et obligations inhérentes à tout contrat de travail.
Vous mettez en péril la réputation de la société CIB Ingénierie tant auprès de ses clients qu'en interne.
Vous agissez comme si vous aviez pris la décision de tout faire pour empêcher la société de se développer voire compromettre son avenir.
C'est dans ces conditions que je vous notifie votre licenciement pour faute grave. »
L'employeur reproche au salarié :
1) son opposition quasi-systématique à compter du début de l'année 2017, à la suite de sa décision de rapprocher les deux sociétés dont M. [G] était le dirigeant, et sa contestation de toute autorité
2) des faits découverts pendant l'arrêt maladie du 26 février 2018 au 31 mars 2018, à savoir l'absence d'établissement de factures pour le client JEFF DE BRUGES sur l'exercice 2017
3) l'absence de justificatif de ses frais pour les mois de mai à décembre 2017
4) ses interventions auprès de la clientèle pendant son arrêt de travail
5) l'infraction à l'interdiction de prendre contact avec la clientèle pendant sa mise à pied.
Le salarié conteste le bien-fondé des griefs et soutient que :
- aucun élément ne vient justifier le comportement contestataire qui lui est reproché
- l'absence de facturation du client Jeff de Bruges pour l'année 2017 lui est reprochée en mai 2018, de sorte que le grief est prescrit, l'employeur ne rapportant pas la preuve de la date de la découverte de ces prétendus faits
- les problèmes de facturation était connus de l'employeur, le précédent salarié ayant quitté son poste en été 2016 sans avoir été remplacé et une salariée ayant été recrutée en février 2018 avec mission de rattraper le retard de facturation
- le montant de la facturation réalisée après son départ est erroné et ne correspond pas aux prestations effectivement réalisées
- le grief relatif au suivi des frais de déplacement n'est pas justifié, en l'absence de document comptable
- il n'a pas travaillé pendant son arrêt de travail et n'a pas échangé avec la clientèle pendant la mise à pied.
premier et troisième grief
Le salarié a reçu un avertissement le 15 février 2018, d'une part au motif de son insubordination se manifestant par un refus de rendre compte au dirigeant et un comportement d'opposition et de remise en cause du pouvoir de direction de l'employeur, d'autre part au motif de son absence de justification de ses frais professionnels pour la période de mai à décembre 2017.
Il a été placé en arrêt-maladie le 26 février 2018 et a repris le travail pendant deux jours du 3 au 5 avril 2018.
La procédure de licenciement a été introduite le 6 avril 2018 et M. [U] a été mis à pied à titre conservatoire à cette même date.
L'employeur ne démontre pas que de nouveaux faits d'insubordination se sont produits entre le 15 février 2018 et le 6 avril 2018, alors que le salarié n'a effectivement travaillé que quelques jours. Par ailleurs, l'employeur avait déjà sanctionné l'absence de justification des frais professionnels sur la même période que celle visée dans la lettre de licenciement.
Dans ces conditions, les mêmes griefs ne pouvaient à nouveau être invoqués à l'appui du licenciement.
deuxième grief
Les éléments suivants sont apportés par l'employeur :
- une liste de messages de demandes de facturation du 18 janvier 2017 au 26 janvier 2018, éditée le 2 mai 2019
- une liasse récapitulant les factures, prélèvements, virements, chèques de certains clients : Clesa, Akecia, Jeff de Bruges etc... en 2016, 2017 ou 2018
- une attestation de M. [N], technicien en monétique, datée du 16 mai 2019 : 'M. [U] me demandait de lui transmettre les numéros de bons de livraison à facturer pour qu'il les facture aux clients, cependant un grand nombre de bons de livraison fournis par mes soins n'ont jamais été facturés'
- une attestation rédigée le 16 mai 2019 par Mme [R] [X], embauchée le 1er février 2018 en qualité d'assistante administrative et commerciale : 'pendant l'arrêt maladie de M. [U], j'ai pu constater que plusieurs bons de livraison n'étaient pas facturés et ce, depuis plusieurs mois ; en reprenant les messages écrits par M. [N] s'occupant des expéditions clients, j'ai pu facturer un grand nombre de bons de livraison que M. [U] n'avait pas facturés'
- des courriels de M. [N] à M. [G] datés du 22 mars 2018 : 'vous trouverez ci-joint la liste des SIMS 3G présentes chez Jeff de Bruges' et du 7 mai 2019 : 'vous trouverez ci-joint un excel regroupant les premières et dernières transactions effectuées sur le système de caisse CIB'
- une liste de bons de livraison de matériel à Jeff de Bruges datés du 14 mars 2017 et du 14 novembre novembre 2017, une liste de factures de location mensuelle de matériel, datée du 16 mai 2018, mentionnant que la période facturée est celle du 1er novembre 2016 au 31 décembre 2017, pour un total de 43 336,80 euros, une liste de factures de location mensuelle de matériel, datée du 16 mai 2018, mentionnant que la période facturée est celle de mars à décembre 2017, pour un total de 13 990,80 euros et une liste de factures de location mensuelle de matériel, datée du 16 mai 2018, pour '2016-2017"
- le relevé de compte de la société Jeff de Bruges faisant apparaître que les factures ci-dessus du 16 mai 2018 ont été réglées le 7 novembre 2018
- des relevés de comptes de plusieurs clients en 2018 et 2019
- un tableau intitulé 'récapitulatif des clients facturés à partir de l'arrêt de M. [U]' pour un total de 92 878,21 euros, contenant le nom des clients, les dates des bons de livraison (février, mars, avril, mai , août, septembre, octobre, novembre, décembre 2017, janvier, février, mars 2018, les autres dates étant postérieures à la mise à pied de M. [U] et à son licenciement : mai 2018, décembre 2018, avril 2019) et celles des facturations.
Dans la mesure où la société ne démontre pas que M. [U] était personnellement chargé d'établir la facturation des clients, que les pièces produites concernent essentiellement des prestations de location dont les conditions de facturation et de paiement sont inconnues, puisqu'on voit par exemple que les factures dressées le 16 mai 2018 par Mme [R] [X] ne sont réglées qu'en novembre 2018, que M. [N] ne semble pas avoir fait remonter au dirigeant de difficulté au sujet des bons de livraison non suivis de factures pendant l'année 2017, que les comptes de la société étaient effectués par un expert-comptable et que certains des documents produits sont largement postérieurs au licenciement de M. [U], elle ne rapporte pas la preuve de la réalité du manquement qu'elle impute au salarié.
quatrième et cinquième griefs
La société s'appuie sur deux pièces :
- le témoignage d'un client qui atteste, le 10 mai 2019, que M. [U], démarchait ses collaborateurs pour une société qu'il était en train de construire, alors qu'il n'était pas encore licencié
- un courriel reçu par M. [U] le 21 mars 2018, pendant son arrêt-maladie, sur sa boîte électronique personnelle, d'une commerciale qui lui demande 'à la suite de notre conversation téléphonique' de lui communiquer son meilleur prix.
L'attestation du client, non circonstanciée, et le simple courriel ci-dessus montrant un échange ponctuel avec un client ne permettent pas de caractériser une faute commise par M. [U] pendant son arrêt de travail et sa mise à pied.
Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les fautes reprochées à M. [U] ne sont pas établies ou qu'elles venaient d'être sanctionnées quand la procédure de licenciement a été introduite à son encontre le 6 avril 2018, soit un mois et demi après que le salarié eut saisi le conseil de prud'hommes d'une demande aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail.
L'employeur ne démontre pas que le licenciement pour faute grave qu'il a prononcé était justifié par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner l'exercice par le salarié de son droit d'agir en justice.
Dans ces conditions, il y a lieu de constater que ce licenciement est nul et de condamner la société à payer au salarié, sur la base d'un salaire mensuel de 5 306,10 euros bruts, les sommes suivantes :
- 15 918,30 euros à titre d'indemnité compensatrice du préavis de trois mois non exécuté et l'indemnité de congés payés afférente
- 10 399,95 euros à titre d'indemnité de licenciement
- 5 033,15 euros à titre de remboursement du salaire retenu pendant la mise à pied conservatoire et l'indemnité de congés payés afférente.
Ces sommes seront augmentées des intérêts au taux légal à compter du 27 février 2018, date de signature de l'accusé de réception de la convocation devant le conseil de prud'hommes par la société Cib Ingenierie.
L'article L 1235-3-1 du code du travail énonce que lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d'une des nullités prévues notamment au 1° de cet article, à savoir la violation d'une liberté fondamentale, il octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Au regard de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise (5 ans et 8 mois), de son âge à la date de la rupture du contrat (50 ans) et de ce que M. [U] a été indemnisé par Pôle emploi du 20 juin 2018 au 30 avril 2020, il convient de condamner la société Cib Ingenierie à verser à ce dernier la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par l'illicéité du licenciement.
Cette somme sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt fixant la créance indemnitaire.
Sur le solde de tout compte
M. [U] sollicite la condamnation de l'employeur à lui verser la somme de 16 342,04 euros au titre du solde de tout compte incluant une somme de 4 793,77 euros figurant sur son solde de tout compte qu'il déclare n'avoir jamais reçue.
La société admet dans ses conclusions qu'elle est redevable de cette somme dont elle demande la compensation avec la somme de 7 795,38 euros que lui doit le salarié.
Le salarié soutient que cette demande reconventionnelle formée pour la première fois en cause d'appel (par conclusions notifiées le 18 novembre 2022 alors que le contrat de travail a pris fin le 17 mai 2020) est prescrite.
Toutefois, il ressort des conclusions déposées devant le conseil de prud'hommes par la société qu'elle faisait déjà valoir la compensation entre les sommes réclamées par M. [U] au titre du solde de tout compte et une somme de 7 752,53 euros représentant les dépenses effectuées par le salarié au moyen de la carte bancaire de la société, dont il n'avait jamais fourni les justificatifs.
La demande n'est en conséquence pas prescrite.
Afin d'établir le bien-fondé de la créance qu'elle invoque, la société verse aux débats l'attestation rédigée le 9 novembre 2022 par son expert-comptable selon laquelle la comptabilité de la société fait apparaître 7 795,38 euros au solde du compte courant de M. [U] 'qui s'explique par l'absence de justification des dépenses' et l'extrait du grand livre des comptes généraux correspondant, arrêté au 31 décembre 2017.
Au vu de ces pièces, il convient de condamner la société à payer au salarié la somme de 8 546,66 euros (16 342,04 - 7 795,38) au titre de son solde de tout compte, outre les intérêts au taux légal à compter du 27 février 2018.
La société Cib Ingenierie, partie perdante, M. [U] obtenant partiellement gain de cause en son recours, doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à payer au salarié la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés par lui en première instance et en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement :
REJETTE la demande de révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 23 mars 2023
DÉCLARE irrecevables les conclusions au fond notifiées par M. [U] le 27 mars 2023
DÉCLARE recevables les conclusions et la pièce n° 81 notifiées par la société Cib Ingenierie le 20 mars 2023
DÉCLARE irrecevable la pièce n° 82 notifiée par la société Cib Ingenierie le 20 mars 2023
DÉCLARE irrecevable la demande nouvelle en paiement d'heures supplémentaires
DÉCLARE recevable la demande aux fins de nullité des deux avertissements
DÉCLARE recevable la demande aux fins de compensation entre le solde de tout compte et les frais professionnels
INFIRME le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de M. [U] tendant à voir constater la nullité du licenciement, les demandes en paiement connexes et la demande au titre du solde de tout compte, ainsi qu'en ses dispositions relatives aux dépens et à l'indemnité de procédure
STATUANT à nouveau sur les chefs infirmés,
CONDAMNE la société Cib Ingenierie à payer à M. [K] [U] les sommes suivantes :
- 15 918,30 euros à titre d'indemnité compensatrice du préavis de trois mois et 1 591,83 euros à titre d'indemnité de congés payés afférente
- 10 399,95 euros à titre d'indemnité de licenciement
- 5 033,15 euros à titre de remboursement du salaire retenu pendant la mise à pied conservatoire et 503,31 euros à titre d'indemnité de congés payés afférente
- 8 546,66 euros au titre du solde de tout compte
ces sommes étant augmentées des intérêts au taux légal à compter du 27 février 2018
- 35 000 euros à titre de dommages et intérêts à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la nullité du licenciement, cette somme étant augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt
CONFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions
STATUANT par dispositions nouvelles,
ANNULE l'avertissement du 18 janvier 2017
CONDAMNE la société Cib Ingenierie aux dépens de première instance et d'appel
CONDAMNE la société Cib Ingenierie à payer à M. [K] [U] la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE