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03/07/2023 | FRANCE | N°23/00092

France | France, Cour d'appel de Lyon, Jurid. premier président, 03 juillet 2023, 23/00092


N° R.G. Cour : N° RG 23/00092 - N° Portalis DBVX-V-B7H-O7WC

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT



ORDONNANCE DE REFERE

DU 03 Juillet 2023





























DEMANDERESSE :



S.A.S. SICOVAR EXERÇANT SOUS L'ENSEIGNE DEMEURES CALADOISES

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Julia LAZAR substituant Me Yves TETREAU de la SELARL VERNE BORDET ORSI TETREAU, avocat au barreau de LYON (toque 680)>






DEFENDERESSE :



Mme [R] [V]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me TAP Axel substituant Me Julie BEUGNOT de la SELARL BERGER AVOCATS ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON (toque 238)





Au...

N° R.G. Cour : N° RG 23/00092 - N° Portalis DBVX-V-B7H-O7WC

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DE REFERE

DU 03 Juillet 2023

DEMANDERESSE :

S.A.S. SICOVAR EXERÇANT SOUS L'ENSEIGNE DEMEURES CALADOISES

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Julia LAZAR substituant Me Yves TETREAU de la SELARL VERNE BORDET ORSI TETREAU, avocat au barreau de LYON (toque 680)

DEFENDERESSE :

Mme [R] [V]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me TAP Axel substituant Me Julie BEUGNOT de la SELARL BERGER AVOCATS ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON (toque 238)

Audience de plaidoiries du 26 Juin 2023

DEBATS : audience publique du 26 Juin 2023 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d'appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 janvier 2023, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée publiquement le 03 Juillet 2023 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

''''

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 20 novembre 2019, Mme [R] [V] a conclu un contrat de construction de maison individuelle avec la S.A.S. Sicovar.

Par acte du 5 juillet 2022, Mme [V] a fait assigner en référé la société Sicovar devant le président du tribunal judiciaire de Lyon, lequel par ordonnance contradictoire du 31 janvier 2023 a notamment :

- condamné la société Sicovar :

à réaliser au domicile de Mme [V] les travaux de reprise des réserves et des désordres dénoncés pendant la durée de la garantie de parfait achèvement dans un délai de deux mois à compter de la signification de la décision, sous astreinte de 100 € par jour de retard pour chacun des postes de travaux durant 6 mois,

à payer une provision d'un montant de 650 €, à valoir sur l'indemnisation du préjudice né de l'existence d'une fuite d'eau avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision en application de l'article 1231-7 du Code civil,

à la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné la consignation par Mme [V] de la somme de 8 651,33 € correspond à 5 % du montant du marché et au solde de celui-ci auprès de la Caisse des dépôts et consignations, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de la décision.

La société Sicovar a interjeté appel de la décision le 13 mars 2023 en limitant sa portée à sa condamnation à réaliser certains des travaux ayant fait l'objet des réserves et désordres dénoncés durant la garantie de parfait achèvement et aux condamnations à paiement prononcées.

Par assignation en référé délivrée le 11 mai 2023 à Mme [V], la société Sicovar a saisi le premier président afin d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire de ce jugement et la condamnation de Mme [V] à lui payer la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

A l'audience du 26 juin 2023 devant le délégué du premier président, les parties, régulièrement représentées, s'en sont remises à leurs écritures, qu'elles ont soutenues oralement.

Dans son assignation, la société Sicovar invoque les dispositions de l'article 514-3 du Code de procédure civile et soutient qu'il existe des moyens sérieux de réformation tenant au fait que Mme [V] avait accepté en cours de chantier le déplacement de la cuve modifiant ainsi les engagements contractuels originaires et qu'en tout état de cause, une proposition avait été faite et non contestée par Mme [V] afin de créer une place de stationnement au dessus de la cuve, qui met fin au défaut de conformité.

Elle fait état de conséquences manifestement excessives eu égard à la nature et au coût des travaux de terrassement que la mise en conformité entraînerait.

Dans ses conclusions déposées au greffe par RPVA le 26 juin 2023, Mme [V] demande au délégué du premier président de :

- à titre principal, débouter la société Sicovar de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire,

- subsidiairement, limiter strictement l'arrêt de l'exécution provisoire aux seuls chefs du dispositif de l'ordonnance du président du tribunal judiciaire du 31 janvier 2023 dont la réformation est sollicitée par la société Sicovar et concernant uniquement les travaux de remplacement sous astreinte de la cuve de rétention,

- en tout état de cause, condamner la société Sicovar au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de la présente instance.

Elle invoque les termes de l'alinéa 2 de l'article 514-3 du Code de procédure civile pour soutenir l'irrecevabilité de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire à raison de l'absence d'observations sur l'exécution provisoire devant le premier juge et de démonstration de conséquences manifestement excessives révélées depuis qu'il a statué.

A titre subsidiaire, elle conteste l'existence de moyens sérieux de réformation et développe ses arguments et moyens devant conduire à son sens à la confirmation par la cour de l'ordonnance de référé du 31 janvier 2023.

Elle fait valoir que les travaux assortis d'une astreinte concernant le remplacement de la cuve de rétention sont réalisables comme cela résulte d'un devis qu'elle a obtenu de l'entreprise ADM qui a indiqué que la livraison et la pose de la cuve pouvaient être effectuées conformément aux plans d'exécution.

Dans ses conclusions déposées lors de l'audience, la société Sicovar maintient les demandes contenues dans son assignation et soutient la recevabilité de celle tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire.

Elle invoque l'article 514-1 du Code de procédure civile pour relever que le juge des référés ne pouvait pas écarter l'exécution provisoire et que ses éventuelles observations auraient été vouées à l'échec.

Elle réplique aux arguments adverses concernant les moyens sérieux de réformation qu'elle articule. Elle considère que le déplacement de la cuve de rétention constitue une solution disproportionnée au regard du coût de l'intervention et du caractère inadapté de son emplacement initialement prévu sur le permis de construire et sur les plans d'exécution. Elle s'interroge sur la faisabilité du transport de la cuve de remplacement et de l'utilisation d'une grue en proximité des fils électriques aériens présents sur le site.

Lors de l'audience, Mme [V] a soulevé l'irrecevabilité de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire qui ne figurait pas au dispositif de ses conclusions. La société Sicovar a pour sa part indiqué que sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire ne visait que le chef de l'ordonnance dont appel qui l'oblige à engager des travaux de remplacement d'une cuve de rétention.

Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l'exposé des moyens à l'énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire

Attendu que Mme [V] soutient au visa des dispositions de l'article 514-3 alinéa 2 du Code de procédure civile l'irrecevabilité de la demande de la société Sicovar pour ne pas avoir fait valoir ses observations sur l'exécution provisoire en première instance  et ne pas avoir caractérisé des conséquences manifestement excessives révélées postérieurement à la décision rendue par le président du tribunal judiciaire de Lyon ;

Attendu que comme le relève la société Sicovar, en application de l'article 514-1 alinéa 3 du même code, le juge ne peut écarter l'exécution provisoire de droit lorsqu'il statue en référé et ce texte vient ainsi rappeler que, dans le cas où il est chargé de statuer sur cette exécution provisoire et où il dispose de la possibilité de l'écarter, le premier juge n'est pas limité à apprécier uniquement les risques de conséquences manifestement excessives ;

Attendu qu'il était inopérant à double titre de saisir le juge des référés d'observations sur le risque de conséquences manifestement excessif susceptible d'être encouru par la société Sicovar d'abord, à raison des termes de l'alinéa 3 de l'article 514-1 qui interdisent au juge des référés d'écarter l'exécution provisoire et ensuite en ce que ces éventuelles observations n'auraient pas nécessairement répondu au critère du premier alinéa du même texte ;

Qu'en effet, aucun des textes nouveaux régissant l'exécution provisoire de droit et les conditions de son arrêt ne vient préciser que la partie concernée doive nécessairement faire état d'un risque de conséquences manifestement excessives pour demander à ce que l'exécution provisoire soit écartée, lorsque cet écart est possible ;

Attendu que l'objectif poursuivi par les auteurs de la réforme du décret du 11 décembre 2019 n'a pas été de prévoir une fin de non-recevoir fermant à une partie la possibilité d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire de droit dès lors qu'elle n'a pas fait d'observations devant le premier juge, mais d'interdire à cette partie de faire état d'éléments alors connus d'elle qui devaient la pousser à demander et potentiellement à obtenir l'écart de cette exécution immédiate, ce qui n'était pas possible en l'espèce ;

Attendu que la demande d'arrêt de l'exécution provisoire de la société Sicovar est déclarée recevable ;

Sur le bien fondé de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire

Attendu que l'exécution provisoire de droit dont est assortie l'ordonnance rendue le 31 janvier 2023 par le président du tribunal judiciaire de Lyon ne peut être arrêtée, que conformément aux dispositions de l'article 514-3 du Code de procédure civile, et lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; que ces deux conditions sont cumulatives ;

Attendu que s'agissant de l'existence de conséquences manifestement excessives, il y a lieu de rappeler qu'il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques générés par la mise à exécution de la décision rendue et le caractère manifestement excessif de ces conséquences ne saurait exclusivement résulter de celles inhérentes à la mise à exécution d'une condamnation à exécuter une obligation de faire ou de ne pas faire, mais ces conséquences doivent concrètement présenter un caractère disproportionné ou irréversible ;

Attendu qu'il appartient à la société Sicovar de rapporter la preuve de ces risques occasionnés par l'exécution provisoire ;

Attendu que la demanderesse a limité lors de l'audience sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire aux travaux de remplacement d'une cuve de rétention, ses observations et arguments concernant les conséquences manifestement excessives étant d'ailleurs réservés à ces derniers ; que l'arrêt de l'exécution provisoire ne peut en tout en état pas porter sur des chefs de la décision de première instance qui n'a pas été déférée en appel ;

Qu'en effet, la limitation de l'appel contenue dans la déclaration d'appel à certains des travaux ordonnés par le juge des référés conduit, en l'absence d'indication d'un appel incident à conférer un caractère définitif aux condamnations non visées comme dévolues à la cour ;

Attendu que cette société demanderesse invoque d'une part une impossibilité technique de réaliser les travaux en raison de difficultés d'accès des engins de chantier sur la propriété de Mme [V] et de livraison de la nouvelle cuve de rétention du fait de la conformation des bâtiments et de l'existence de fils électriques passant en voie aérienne ;

Qu'elle se prévaut d'autre part et à tort du caractère disproportionné de la solution retenue par le juge des référés, car cet argument concerne d'abord l'examen du caractère sérieux de ses moyens de réformation et ensuite n'est en rien un critère d'arrêt de l'exécution provisoire en ce que la disproportion susceptible d'être invoquée concerne les conséquences de l'exécution et non son principe même ;

Attendu qu'il convient de relever au surplus que la société Sicovar souligne elle-même dans ses écritures que cette cuve était prévue à l'endroit qu'elle critique sur les plans d'exécution et qu'elle ne fait pas état des conséquences financières de l'exécution des travaux litigieux ;

Attendu que Mme [V] produit pour sa part un devis et un courrier émanant de la société ADM des 3 et 14 juin 2023 qui objectivent la faisabilité des travaux ordonnés par le premier juge ;

Attendu que la société Sicovar ne peut procéder par pure allégation concernant une impossibilité de réaliser ces travaux sans tenter de fournir un quelconque élément ou avis technique de nature à étayer cette opinion ;

Que ses seules pièces produites à l'appui de cette allégation sont constituées de photographies impropres à contredire l'avis technique émis par la société ADM ;

Attendu que la société Sicovar est carente à prouver l'impossibilité de réalisation des travaux qui lui sont impartis ;

Que sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire doit dès lors être rejetée sans qu'il soit besoin d'apprécier le sérieux des moyens de réformation qu'elle articule ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Attendu que la société Sicovar succombe et doit supporter les dépens de ce référé comme indemniser son adversaire des frais irrépétibles engagées pour assurer sa défense ;

PAR CES MOTIFS

Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,

Vu la déclaration d'appel du 13 mars 2023,

Déclarons recevable mais rejetons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire présentée par la S.A.S. Sicovar,

Condamnons la S.A.S. Sicovar aux dépens de ce référé et à verser à Mme [R] [V] une indemnité de 1 200 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Jurid. premier président
Numéro d'arrêt : 23/00092
Date de la décision : 03/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-03;23.00092 ?
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